FA/AM
Numéro 13/ 3114
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 25/07/2013
Dossier 12/03007
Nature affaire
Demande en paiement ou en indemnisation formée par un intermédiaire
Affaire
SAS ESPACE LANDES IMMOBILIER
C/
Patrice Y
Jacques X
Marie Claire WX épouse WX
Grosse délivrée le
à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 juillet 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRÈS DÉBATS
à l'audience publique tenue le 15 avril 2013, devant
Monsieur AUGEY, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur ..., en application des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Madame ..., et en a rendu compte à la Cour composée de
Madame PONS, Président
Monsieur AUGEY, Conseiller
Madame BENEIX, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant
APPELANTE
SAS ESPACE LANDES IMMOBILIER
MONT DE MARSAN
représentée par Maître Thomas GACHIE, avocat au barreau de MONT DE MARSAN
assistée de Maître Sonia TRIGANO-LAFOUGERE, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS
Monsieur Patrice Y
né le ..... à MONT DE MARSAN
BORDEAUX
représenté et assisté de Maître Corinne CAPDEVILLE, avocat au barreau de MONT DE MARSAN
Monsieur Jacques X
né le ..... à SAINT ETIENNE
de nationalité française
MONT DE MARSAN
Madame Marie Claire WX épouse WX
née le ..... à LABASTIDE D'ARMAGNAC (40)
de nationalité française
109 rue René Cassin
40000 MONT DE MARSAN
représentés et assistés de la SCP PENEAU - DESCOUBES PENEAU, avocats au barreau de MONT DE MARSAN
sur appel de la décision
en date du 20 JUIN 2012
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONT DE MARSAN
Suivant un mandat exclusif de vente du 6 avril 2007, M. Y a confié à la société Espace Landes Immobilier un mandat de vente de sa maison située à Mont de Marsan pour un prix net vendeur de 310 000 euros, moyennant une rémunération du mandataire de 20 000 euros.
Cette agence a trouvé des acquéreurs en la personne de M. et Mme X qui avaient signé de leur côté un mandat de recherche le 5 juillet 2007.
Une promesse de vente a été conclue le même jour pour un prix de 270 000 euros, assortie d'une rémunération du mandataire de 20 000 euros à la charge de l'acquéreur, avec possibilité pour le vendeur de renoncer à la vente dans l'hypothèse où sa mutation définitive pour Anglet ne se réaliserait pas.
Dans un courrier du 28 aout 2007, M. Y a indiqué que cette condition n'a pas été réalisée et qu'il entendait retirer son bien de la vente, mais cependant, un nouveau compromis de vente a été signé entre M. Y et les époux X le 8 août 2008 pour un montant de 280 000 euros, et ce bien a été définitivement acquis par ces derniers.
Par acte d'huissier du 22 octobre 2010, la SAS Espace Landes Immobilier a fait assigner M. Y et les époux X afin de condamnation in solidum au paiement de la somme principale de 20 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 1134 du code civil, au motif que les défendeurs n'ont pas respecté les obligations mises à leur charge par le mandat, puisque la vente a été conclue sans l'intervention de l'agence immobilière qui n'en a pas été informée.
Par jugement du 20 juin 2012, le tribunal de grande instance de Mont de Marsan a débouté la société Espace Landes Immobilier de ses demandes, et l'a condamnée à verser à chacun des défendeurs une indemnité de 1 000 euros pour frais irrépétibles.
Par déclaration au greffe du 30 août 2012, la SAS Espace Landes Immobilier a relevé appel de ce jugement.
Dans ses dernières écritures déposées le 29 novembre 2012, elle a conclu à la réformation de cette décision, ainsi qu'à la condamnation des époux X et de M. Y au paiement des sommes respectives de 20 000 euros et de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, et sollicité le paiement d'une indemnité de 4 000 euros pour frais irrépétibles.
Elle fait valoir d'une part
- qu'elle n'a jamais sollicité le paiement par chacune des parties du montant de sa commission ;
- que sa rémunération était exclusivement à la charge de l'acquéreur ;
- que les dispositions de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 n'interdisent pas à l'agent immobilier de se prévaloir de deux mandats conclus pour la même opération.
Elle ajoute que l'obligation du mandataire n'expirait que le 5 octobre 2008 et non le 5 juillet 2008 ainsi qu'il résulte des termes du mandat, alors que la vente litigieuse a été régularisée le 8 août 2008.
Dans ses dernières écritures du 24 janvier 2013, M. Y a conclu à la confirmation du jugement ainsi qu'à la condamnation de l'appelante au paiement d'une indemnité de 1 000 euros pour frais irrépétibles.
Il soutient que la détention de deux mandats de vente et de recherche contrevient aux dispositions de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 qui prohibe la double rémunération pour une même opération.
Il ajoute que le mandat lui laissait la possibilité de vendre le bien par ses propres moyens, et que le compromis de vente signé le 8 août 2008 ne contrevient donc pas aux stipulations du contrat.
Il fait valoir par ailleurs que la durée totale du mandat, soit 19 mois, lui interdisant pendant toute cette période de traiter avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire, doit être considérée comme excessive au regard de la recommandation numéro 03-02 de la commission des clauses abusives, puisque cette clause est de nature à déséquilibrer significativement les relations entre les professionnels et les consommateurs au détriment de ces derniers, alors qu'au surplus le mandat de vente lui laissait la possibilité de procéder à la vente par ses propres moyens.
Dans leurs dernières conclusions du 28 janvier 2013, les époux X ont également conclu à la confirmation du jugement ainsi qu'à la condamnation de l'appelante au paiement d'une indemnité de 3 000 euros pour frais irrépétibles.
Ils font valoir que le mandat de recherche du 5 juillet 2007 était totalement fictif car il permettait au mandataire de contourner l'interdiction visée au dernier alinéa de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972, et d'obtenir ainsi une double rémunération.
Ils font valoir d'autre part que ce mandat signé le 5 juillet 2007 consistait dans la recherche d'une maison individuelle située à Mont de Marsan, 109 rue René ..., et qu'ainsi le mandat de rechercher a pris fin par le fait que l'acte sous seing privé d'acquisition de ce bien a été signé le même jour.
En conséquence la période de 12 mois stipulée au mandat de recherche, leur faisant défense de contracter avec toutes personnes présentées par l'agence prenait fin le 5 juillet 2008, c'est-à-dire un an plus tard, alors que le compromis de vente finalement conclu avec M. Y n'a été régularisé que le 8 août 2008, c'est-à-dire après l'expiration de cette période.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mars 2013.
Motifs de l'arrêt
Dans leurs conclusions respectives, les époux X et M. Y soutiennent que le mandat de recherche et le mandat de vente qu'ils ont respectivement confié à la SAS Espace Landes Immobilier contrevient aux dispositions de l'article 73 du décret numéro 72- 678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d'application de la loi numéro 70-9 du 2 janvier 1970, et qu'en conséquence cet agent immobilier ne peut solliciter le paiement d'aucune rémunération au titre de chacun de ces deux mandats.
Il résulte des pièces versées aux débats que le 6 avril 2007, M. Y a confié à la SAS Espace Landes Immobilier un mandat de vente portant sur un immeuble situé à Mont de Marsan, 109 rue René ..., stipulant une rémunération du mandataire d'un montant de 20 000 euros à la charge du mandant.
Cette agence immobilière a trouvé un acquéreur en la personne des époux X et leur a fait signer le 5 juillet 2007 un mandat de recherche portant précisément sur ce bien, et elle a établi un compromis de vente signé le même jour.
Le mandat de recherche stipulait une rémunération du mandataire d'un montant de 20 000 euros à la charge du mandant, c'est-à-dire les époux X.
Il résulte de l'article 73 du décret numéro 72-678 du 20 juillet 1972 que l'agent immobilier qui reçoit le mandat prévu à l'article 72 ne peut demander ni recevoir directement ou indirectement d'autre rémunération ou commission à l'occasion d'une opération spécifiée à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970.
Or en l'espèce, le mandat de vente et le mandat de recherche portent sur la même opération, c'est-à-dire le même immeuble, et prévoient chacun une rémunération à la charge respective du vendeur et des acquéreurs de l'immeuble faisant l'objet de ces mandats.
Or, il résulte de l'article précité que l'agent immobilier ne peut percevoir à la fois une rémunération du vendeur et de l'acquéreur.
Contrairement à ce que soutient la société Espace Landes Immobilier, elle a bien sollicité en première instance le paiement d'une rémunération en exécution de chacun de ces deux mandats par les époux X et par M. Y, puisqu'elle concluait à leur condamnation in solidum au paiement de la somme de 20 000 euros, et qu'en cause d'appel, elle n'a plus sollicité leur condamnation solidaire mais la condamnation de chacun d'eux au paiement de la somme de 20 000 euros par les époux X, et de 10 000 euros par M. Y.
Ces demandes sont bien fondées sur l'exécution des mandats de vente et de recherche qui lui avaient été confiés par ceux-ci, et elles consistent bien à solliciter une double rémunération pour une même opération,
Il ne peut donc y être fait droit, et il convient dès lors de confirmer le jugement qui a débouté la SAS Espace Landes Immobilier de ses demandes et l'a condamnée à payer à M. Y d'une part et aux époux X d'autre part une indemnité de 1 000 euros pour frais irrépétibles.
Il serait inéquitable de laisser à la charge des époux X d'une part et de M. Y d'autre part les frais irrépétibles qu'ils ont dû exposer en cause d'appel ; la société Espace Landes Immobilier sera donc condamnée à payer à chacune de ces parties une nouvelle indemnité de 1 000 euros à ce titre.
Par ces motifs
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Mont de Marsan du 20 juin 2012, et y ajoutant
Condamne la SAS Espace Landes Immobilier à payer à M. Patrice Y d'une part et aux époux X d'autre part, une indemnité de 1 000 euros (mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties de leurs autres demandes.
Condamne la SAS Espace Landes Immobilier aux dépens de première instance et d'appel.
Autorise les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.
Le présent arrêt a été signé par Mme ..., Président, et par Melle ..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sabrina ... Françoise PONS