CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 134580
PREFET DE POLICE DE PARIS
Lecture du 29 Decembre 1993
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, ), de la Section du Contentieux,
Vu la requête, enregistrée le 28 février 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE DE PARIS ; le PREFET DE POLICE DE PARIS demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 11 janvier 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 3 janvier 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Stefan Tanev ; 2°) de rejeter la demande présentée par M. Tanev devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989 et la loi du 10 janvier 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il est constant que M. Tanev, à qui la qualité de réfugié a été refusée par une décision en date du 30 janvier 1991 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée le 21 mai 1991 par la commission des recours des réfugiés, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la notification, le 26 septembre 1991, de la décision du même jour par laquelle le PREFET DE POLICE DE PARIS lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; que l'intéressé entrait donc dans le champ d'application de l'article 22-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée autorisant la reconduite des ressortissants étrangers à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le PREFET DE POLICE DE PARIS a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. Tanev, celui-ci n'avait pas allégué être le père d'un enfant français ; que si, par une lettre du 18 octobre 1991, M. Stefan TANEV a sollicité la délivrance d'une carte de résident en qualité de parent d'enfant français en application de l'article 15-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, il n'a indiqué à aucun moment les dispositions sur le fondement desquelles un enfant né de deux parents étrangers, eux-mêmes nés hors de France, pourrait être regardé comme possédant la nationalité française ; que dans ces conditions, le PREFET DE POLICE DE PARIS n'était pas tenu de saisir la commission du séjour des étrangers prévue à l'article 18 bis de l'ordonnance précitée avant de rejeter la nouvelle demande de M. Stefan TANEV et de prononcer à son encontre une mesure de reconduite à la frontière ; que, par suite, le PREFET DE POLICE DE PARIS est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'illégalité du refus de séjour, résultant elle-même du défaut de consultation préalable de la commission du séjour des étrangers, pour annuler son arrêté du 3 janvier 1992 ;
Considérant toutefois qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. Tanev devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que si M. Tanev a fait état de son mariage le 2 mai 1991 avec une ressortissante bulgare dont il a eu un enfant, il résulte des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. Tanev en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DE POLICE DE PARIS en date du 3 janvier 1992 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'ainsi, M. Tanev n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE DE PARIS est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 11 janvier 1992 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Tanev devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE DE PARIS, à M. Tanev et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.