Jurisprudence : CA Lyon, 06-12-2022, n° 21/01208, Confirmation

CA Lyon, 06-12-2022, n° 21/01208, Confirmation

A75018YH

Référence

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N° RG 21/01208 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NNDJ


Décision du

TJ de BOURG EN BRESSE

Au fond

du 04 févrierr 20211


RGAc: 19/2720


[V]

[E]


C/


[J]

[L]

Commune COMMUNE DE [Localité 1]


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE LYON


1ère chambre civile B


ARRET DU 06 Décembre 2022



APPELANTS :


Mme [A] [C] [Aa] [V]

née le … … … à [Localité 1]

[Adresse 9]

[Localité 1]


Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983

Assistée de Me Jean henri LAURENT, avocat au barreau D'AIN


M. [Adb] [E]

né le … … … à [Localité 1]

[Adresse 10]

[Localité 1]


Représenté par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983

Assisté de Me Jean henri LAURENT, avocat au barreau D'AIN


INTIMES :


M. [N] [R] [Ac] [J]

né le … … … à … … …

[Adresse 3]

[Localité 1]


Représenté par Me Benoit CONTENT, avocat au barreau D'AIN


Mme [W] [F] [Z] [L] épouAce [J]

née le … … … à EVREUX

[Adresse 3]

[Localité 1]


Représentée par Me Benoit CONTENT, avocat au barreau D'AIN


COMMUNE DE [Localité 1]

[Adresse 11]

[Localité 1]


Représentée par Me Philippe REFFAY de la SCP REFFAY ET ASSOCIÉS, avocat au barreau D'AIN


* * * * * *


Date de clôture de l'instruction : 02 Décembre 2021


Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Septembre 2022


Date de mise à disposition : 22 Novembre 2022 prorogée au 06 Décembre 2022, les avocats dûment avisés conformément au code de procédure civile



Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller


assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier


A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile🏛.


Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile🏛,


Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.


* * * *



EXPOSE DU LITIGE


Mme [A] [Aa] est propriétaire d'une parcelle, cadastrée section B n°[Cadastre 7], sise [Adresse 9] (Ain), et M. [Ad] [Ab] est propriétaire d'une parcelle, cadastrée section B n°[Cadastre 8], sise [Adresse 10] (Ain).


Selon acte de vente du 5 novembre 2009, établi par Me [P], notaire à [Localité 12], M. [Ae] [Ac] et Mme [W] [Ac] ont acquis de l'association sportive culturelle et d'entraide de l'équipement de l'Ain, les parcelles cadastrées, section B n°[Cadastre 4] et [Cadastre 2].


La commune de [Localité 1] est quant à elle propriétaire de la parcelle cadastrée ,section B n°[Cadastre 6].


Reprochant aux époux [Ac] d'avoir installé un portail sur un passage qu'ils estiment être indivis, Mme [Aa] et M. [Ab] les ont fait assigner, par acte d'huissier de justice du 21 juin 2019, devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, ainsi que la commune de [Localité 1].



Par jugement du 4 février 2021, le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse a :

- débouté Mme [Aa] et M. [Ab] de l'ensemble de leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à rendre commun et opposable le jugement à la commune de [Localité 1],

- condamné in solidum Mme [Aa] et M. [Ab] à payer à M. et Mme [Ac], la somme de 1 500 euros et à la commune de [Localité 1], la somme de 1 000 euros, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné in solidum Mme [Aa] et M. [Ab] aux dépens.


Par déclaration du 18 février 2021, M. [Ab] et Mme [Aa] ont interjeté appel de l'ensemble du jugement.


Au terme de conclusions notifiées le 10 mai 2021, M. [Ab] et Mme [Aa] demandent à la cour de réformer le jugement déféré


Au principal,

Prenant acte de ce que l'acte du 5 novembre 2009 leur transfère des droits différents de ceux qui sont contenus dans le titre de leur auteur du 17 juin 1980,

- ordonner que la clause figurant à l'acte du 5 novembre 2009 libellée comme suit : « toutefois, le vendeur déclare qu'il existe sur les biens vendus une servitude de passage à pied et au moyen de véhicules, qui n'a jamais (fait) l'objet d'un acte publié au bureau des hypothèques depuis 1956, partant de la route de [Localité 13], longeant la maison vendue côté nord, pour desservir les propriétés cadastrées section B, numéros [Cadastre 7] et [Cadastre 8] » sera supprimée,

- ordonner qu'à la mention « avec cour et terrain » figurant à la désignation de l'acte de 2009 sera substituée la mention « cour devant et derrière ; passage indivis ; et un petit terrain en face au nord » issue de l'acte du 17 juin 1980,

- faire droit à la demande selon laquelle l'accès allant de la voie publique dite route de [Localité 1] Devant aux parcelles B [Cadastre 7] et B [Cadastre 8] est indivis,

- juger que la commune de [Localité 1] est propriétaire indivis du passage au même titre que les autres parties à la présente affaire,

- ordonner qu'il est interdit aux propriétaires du tènement cadastré commune de [Localité 1], section B, n°[Cadastre 4] et [Cadastre 2] d'édifier quelque ouvrage que ce soit sur l'emprise du passage indivis matérialisé par la voie goudronnée comprise entre le mur Nord de l'immeuble section B, parcelle [Cadastre 2] et son prolongement vers l'Est, et Nord du caniveau d'écoulement des eaux pluviales en béton et son prolongement à l'Est, entre la [Adresse 11] et la [Adresse 15],


Subsidiairement,

Si la cour considère que le tènement [Ac] est grevé d'une servitude de passage conventionnelle du chef de l'acte du 5 novembre 2009,

- ordonner que le propriétaire des parcelles B[Cadastre 4] et B[Cadastre 2] ne pourra rien faire qui tende à diminuer ou rendre plus incommode le passage existant,

- ordonner la démolition des ouvrages construits par les consorts [Ac] et [L] sous astreinte de 200 euros par jour à compter de la date de la notification des présentes,


Plus subsidiairement,

- faire droit à la demande selon laquelle la commune sera déclarée pleine et entière propriétaire de l'emprise du passage et de la voirie que constitue l'[Adresse 14], de la [Adresse 11] à la [Adresse 15],


En tout état de cause,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques,

- condamner solidairement M. [Ac] et Mme [Af] à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner les mêmes sous la même solidarité à leur payer la somme de 4 000 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile🏛, outre entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Me JH Laurent, avocat, sur son affirmation de droit.


Au terme de conclusions notifiées le 22 juillet 2021, M. et Mme [Ac] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse le 4 février 2021 en toutes ses dispositions,

- condamner Mme [Aa] et M. [Ab] à leur verser la somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamner Mme [Aa] et M. [Ab] aux entiers dépens distraits au profit de Me Benoit Content, avocat.


Au terme de conclusions notifiées le 15 juillet 2021, la commune de [Localité 1] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse le 4 février 2021 en ce qu'il a rejeté toutes demandes formulées à son encontre et condamné les consorts [Aa]-[Ab] à lui payer la somme de 1 000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile🏛 et à supporter les entiers dépens,

Y ajoutant :

- condamner in solidum les consorts [Aa]-[Ab] à lui payer la somme de 2 500 euros au visa de l'article 700 du Code de procédure civile🏛,

- condamner in solidum les consorts [Aa]-[Ab] aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP Reffay & Associés, avocat sur son affirmation de droit.


La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 2 décembre 2021.


Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions précitées en application de l'article 455 du code de procédure civile🏛.



MOTIFS DE LA DECISION


1. Sur le caractère indivis du passage


Mme [Aa] et M. [Ab] font valoir qu'ils sont respectivement propriétaires des parcelles cadastrées section B, n° [Cadastre 7] et n°[Cadastre 8], [Adresse 9] et que l'accès à leurs tènements se fait depuis tout temps par une voie ouverte au public, dénommée [Adresse 14], qui rejoint leurs propriétés depuis les voies publiques.


Ils expliquent que l'acte d'acquisition du 5 novembre 2009, par lequel M et Mme [Ac] ont acquis les parcelles cadastrées section B, n°[Cadastre 4] et [Cadastre 2], mentionne qu'il existe sur les biens une servitude de passage à pied et au moyen de véhicules, n'ayant jamais fait l'objet d'une publication depuis 1956, partant de la route de [Localité 13], longeant la maison côté Nord, pour desservir les propriétés cadastrées section B, numéros [Cadastre 7] et [Cadastre 8]. Or, cet acte, ne reprendrait pas, selon eux, la désignation figurant dans l'acte antérieur du 17 juin 1980, faisant état d'un passage indivis. Ils ajoutent que le plan contenu dans un acte de 1893 confirme la présence d'un chemin indivis.


Ils indiquent par ailleurs, que la commune est propriétaire de la parcelle B [Cadastre 6] qui jouxte la parcelle de M et Mme [Ac] et qu'elle se comporte depuis plusieurs années comme un propriétaire, en utilisant ce passage indivis pour installer des réseaux publics.


M et Mme [Ac] font valoir que l'existence d'un passage indivis n'est mentionné que dans un acte de partage établi le 29 juin 1893, qui mentionne qu'il fait partie du lot n°1 du partage, lequel ne se situe pas sur leur propriété. Aucun autre acte ne fait mention d'un passage indivis.


La commune de [Localité 1] soutient qu'il n'existe aucun élément accréditant le fait qu'elle serait propriétaire indivise du passage litigieux. Elle ajoute qu'elle ne revendique pas cette propriété et que les appelants ne peuvent soutenir en ses lieu et place l'existence d'un domaine privé.


Réponse de la cour


Selon l'acte de vente du 17 juin 1980, par lequel M et Mme [Ag] ont vendu les parcelles cadastrées [Cadastre 4] et [Cadastre 5] à l'association sportive et culturelle et d'entraide de l'équipement de l'Ain, il existe un 'passage indivis', qui n'apparaît plus dans l'acte de vente des mêmes parcelles, devenues n°[Cadastre 4] et [Cadastre 2], qui fait état d'une servitude de passage.


Cependant, il y a lieu de relever que dans l'acte de vente du 17 juin 1980, il n'est donné aucune précision sur la situation de ce passage indivis et, notamment, les parcelles concernées, de sorte qu'il n'est pas suffisant pour établir qu'il concernerait la parcelle permettant de desservir les propriétés de Mme [Aa] et M. [Ab]. Par ailleurs, ainsi que le relèvent justement les premiers juges, ces derniers ne produisent pas leurs actes de propriétés, qui devraient également en faire mention si une partie de leurs parcelles étaient indivises, ainsi qu'ils le revendiquent. Enfin, le chemin indivis mentionné sur l'acte de partage du 29 juin 1893 concerne un lot qui ne se situe ni sur les propriétés de Mme [Aa] et M. [Ab], ni sur la propriété de M et Mme [Ac].


En conséquence de l'ensemble de ces éléments, par confirmation du jugement, il convient de débouter Mme [Aa] et M. [Ab] de leurs demandes, tendant à voir reconnaître un passage indivis, allant de la voie publique, dite route de [Localité 1] Devant aux parcelles cadastrées B, n° [Cadastre 7] et [Cadastre 8].


Dès lors, les appelants sont également déboutés des demandes subséquentes, tendant, d'une part, à voir ordonner la modification de la clause figurant à l'acte de vente du 5 novembre 2009, qui mentionne l'existence d'une servitude de passage et, d'autre part, à constater que la commune de [Localité 1] est propriétaire indivise du passage, alors qu'aucun titre n'est produit pour le confirmer.


Enfin, Mme [Aa] et M. [Ab] ne sont pas plus fondés à soutenir que la commune, qui le dénie, aurait acquis la propriété du passage par usucapion, sans démontrer qu'elle avait l'intention de se comporter en véritable propriétaire de ce bien, dont elle aurait eu la possession de façon continue, paisible, publique et non équivoque depuis au moins trente ans.


2. Sur la servitude de passage


Mme [Aa] et M. [Ab] font notamment valoir que même si la parcelle de ces derniers est grevée d'une servitude conventionnelle de passage, ainsi qu'ils le soutiennent, ils ne sont pas autorisés à le clôturer, de sorte qu'il convient d'ordonner la démolition du portail qu'ils ont fait édifier.


M et Mme [Ac] font notamment valoir qu'il ne s'agit pas d'une servitude conventionnelle de passage, mais d'une servitude légale, en raison de la situation d'enclave. Ils ajoutent que l'existence d'une telle servitude n'exclut pas le droit de se clore, à partir du moment où la clôture ne rend pas le passage plus incommode.


Réponse de la cour


Il est constant entre les parties, d'une part, que M et Mme [Ac] ont fait édifier un portail à l'entrée du passage goudronné longeant leur maison et sur lequel est implanté la servitude, afin de se clore, et d'autre part, que ces derniers ont proposé à Mme [Aa] et M. [Ab], une clé du portail afin qu'ils puissent continuer à profiter de la servitude.


Ainsi que l'ont très justement retenu les premiers juges, il résulte de la combinaison des articles 701 et 647 du code civil🏛🏛, que M et Mme [Ac] sont fondés à s'opposer à la demande de démolition du portail, en application de leur droit de se clore, celui-ci ne rendant pas plus incommode l'usage de la servitude à laquelle il leur est laissé la possibilité d'avoir accès.


En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de débouter Mme [Aa] et M. [Ab] de leur demande de démolition des ouvrages, sous astreinte.


3. Sur les autres demandes


Aucune faute ne pouvant être reprochée à M et Mme [Ac], il convient, par confirmation du jugement, de débouter Mme [Aa] et M. [Ab] de leur demande de dommages-intérêts.


Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.


L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile🏛 au profit de M et Mme [Ac], d'une part, et de la commune de [Localité 1], d'autre part, en appel. Mme [Aa] et M. [Ab] sont condamnés in solidum à leur payer respectivement à ce titre, les sommes de 3.000 et de 2.000 euros.


Les dépens d'appel sont à la charge de Mme [Aa] et M. [Ab] qui succombent en leur tentative de remise en cause du jugement.



PAR CES MOTIFS:


LA COUR,


Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,


y ajoutant,


Condamne in solidum Mme [Aa] et M. [Ab] à payer à M et Mme [Ac] la somme globale de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, en cause d'appel


Condamne in solidum Mme [Aa] et M. [Ab] à payer à la commune de [Localité 1], la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, en cause d'appel,


Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.


Condamne Mme [Aa] et M. [Ab] aux dépens de la procédure d'appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile🏛.


La greffière, Le Président,

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