Jurisprudence : CA Grenoble, 29-11-2022, n° 20/03463, Infirmation

CA Grenoble, 29-11-2022, n° 20/03463, Infirmation

A58488XU

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N° RG 20/03463 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KTLG

C3

N° Minute :


Copie exécutoire

délivrée le :


Me Elsa VIARD GAUDIN


la SCP MONTOYA PASCAL-MONTOYA DORNE GOARANT

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


COUR D'APPEL DE GRENOBLE


PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU MARDI 29 NOVEMBRE 2022


Appel d'une décision (N° RG 10/05363)

rendue par le Tribunal judiciairede GRENOBLE

en date du 24 septembre 2020

suivant déclaration d'appel du 05 novembre 2020



APPELANTE :


Mme [A] [V] [K] épouAae [P]

née le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 5]


représentée par Me Elsa VIARD GAUDIN, avocat au barreau de GRENOBLE postulant et plaidant par Me Marie-Christine PINEL de la SELARL LINK ASSOCIES, avocat au barreau de LYON


INTIMEE :


LA SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD ASSURANCES MUTUELLES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]


représentée par Me Catherine GOARANT de la SCP MONTOYA PASCAL-MONTOYA DORNE GOARANT, avocat au barreau de GRENOBLE et plaidant par Me DORNE avocat au même cabinet



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :


Mme Catherine Clerc, président de chambre,

Mme Joëlle Blatry, conseiller,

M. Laurent Desgouis, vice-président placé,


DÉBATS :


A l'audience publique du 10 octobre 2022 Mme Clerc président de chambre chargé du rapport en présence de Mme Blatry, conseiller assistées de Mme Anne Burel, greffier, ont entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile🏛🏛.


Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.



FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES


M. [Ab] [K] et de son épouse Mme [F] [B] [G] , mariés sous le régime de la communauté universelle par l'effet d'un acte de changement de régime matrimonial du 16 mai 1995, homologué par jugement du tribunal de grande instance de Grenoble du 12 février 2016, ont sollicité Me [O], notaire à [Localité 10] (38) pour recevoir l'acte de donation-partage par lequel ils ont fait donation entre vifs à titre de partage anticipé, conformément aux dispositions des articles 1075 et suivants du code civil🏛, à leurs trois enfant, [A], [E] et [X], donataires par égales parts entre eux , à concurrence de un tiers chacun, des biens mobiliers et immobiliers dépendant de leur communauté universelle.


Cet acte de donation-partage, qui a été signé par toutes les parties concernées le 20 décembre 2000, comportait en outre une clause selon laquelle':


les parties concernées par les donations antérieures (donations consenties en avancement d'hoirie à Mme [E] [K] le 25 avril 1985 et à M. [Ac] [K] les 8 septembre et 30 décembre 1987) «'déclarent vouloir que cette donation en avancement d'hoirie soit transformée en une libéralité consentie par préciput et hors part et par conséquent avec dispense de rapport'»,

les donateurs, M. et Mme [K], ont fait «'donation par préciput et hors part, en application de l'article 913 du code civil🏛 d'une somme de 30.000 francs à Mme [E] [K], étant précisé que la valeur des biens donnés par préciput n'excède pas la quotité disponible dont peuvent disposer les donateurs'».


ll résulte ainsi de cet acte de donation-partage que les droits de M. [X] [K] et de Mme [K] se sont élevés respectivement à 4.569.300 francs ( 696.585,29€) , ceux de Mme [E] [K] s'élevant à cette même somme majorée de la donation préciputaire de 30.000 francs, soit 4.599.300 francs au total.


Selon acte extrajudiciaire du 9 novembre 2010, Mme [K] a assigné devant le tribunal de grande instance de Grenoble Me [O] et son successeur, Me [H], en responsabilité et indemnisation de son préjudice sur le fondement d'un manquement à l' obligation de conseil, d'investigation, d'impartialité et de loyauté, au motif que':


Me [O] n'a pas réintégré à l'actif à partager les donations précédemment reçues par ses frère et s'ur, [X] et [E] [K], mais les a transformées en donations à titre d'avancement d'hoirie en préciput ce qui ne s'imposait pas et contrevient à un partage égalitaire,

Me [O] n'a pas recherché la valeur vénale des biens figurant à la donation-partage alors qu'il était, de par sa qualité de notaire, garant de l'équilibre des partages, cette valeur des biens étant indissociable de l'exigence d'un partage égalitaire.


Par ordonnance juridictionnelle du 20 juin 2012, le juge de la mise en état a débouté Mme [K] de sa demande d'expertise aux fins de déterminer notamment la consistance des biens dépendant de l'acte de donation-partage du 20 décembre 2020 et de déterminer la valeur de la totalité des biens composant la masse des biens à partager, procéder à l'évaluation des donations faites antérieurement à M. [X] [K] et à Mme [E] [K] afin d'en fixer la valeur à la date de la donation-partage.



Par nouvelle ordonnance juridictionnelle du 30 juin 2015, le juge de la mise en état a débouté Mme [K] de sa demande de communication de pièces.


Me [O] étant décédé en cours de procédure, sa compagnie d'assurance, la société MMA Iard, est intervenue volontairement à l'instance.


Par jugement du 24 septembre 2020, le tribunal précité' a':


déclaré recevable l'intervention volontaire à l'instance de la société MMA IARD,

donné acte à Mme [K] de son désistement d'instance à l'encontre de He [H],

dit que Me [O] n'a commis aucun manquement fautif dans l'élaboration de la donation-partage du 20 décembre 2000, tant en qualité de rédacteur de l'acte solennel qu'au titre de son devoir de conseil,

débouté Mme [K] de ses demandes indemnitaires et de sa demande d'expertise,

condamné Mme [K] aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Montoya-Pascal-Dorne,


condamné Mme [K] à payer au profit de MMA Iard une somme de 1.500€ et celle de 1.500€ au profit de Me [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire.


Pour débouter Mme [A] [K] (ci-après toujours dénommée': Mme [K]) de ses demandes indemnitaires et d'expertise, le tribunal a retenu en substance que':


le notaire ayant élaboré l'acte de donation n'a pas manqué à son obligation de conseil en intégrant au chapitre «'exposé'» les donations antérieures ayant profité aux frère et s'ur de Mme [K] et en actant la volonté de leurs parents, acceptée expressément à l'acte, y compris par elle, de qualifier ces donations de donations hors part successorale, au bénéfice des donataires concernés'; il a considéré que cette imputation ne rompait pas les droits successoraux potentiels des co-donataires car ces donations qualifiées à l'origine de préciputaires, s'imputent sur la quotité disponible'; dès lors, en cas de dépassement de cette quotité disponible, l'action en réduction prévue à l'article 922 du code civil🏛 peut être initiée au décès des donateurs'; le tribunal a conclu que les allotissements, même s'ils étaient inégalitaires, ont été acceptés par tous les intervenants à l'acte, y compris par Mme [K] qui a signé en toute connaissance de cause, ayant pu consulter un autre notaire avant le rendez-vous de signature, de sorte que la donation a été établie conformément aux techniques du droit des libéralités et que le déséquilibre pouvant porter atteinte à la réserve héréditaire n'est apprécié qu'au moment du décès des donateurs';

le notaire n'avait pas à vérifier personnellement la valeur réelle des biens faisant l'objet de la donation-partage, n'intervenant qu'en tant qu'officier public recueillant les évaluations indiquées par les parties, selon celles figurant dans les déclarations d'ISF des donateurs établies l'année précédant la donation-partage,

le préjudice de Mme [K] n'est pas actuel ni certain, l'éventuelle atteinte à ses droits réservataires ne pouvant être déterminée qu'à l'occasion des opérations successorales des donateurs et celle-ci disposant alors en tout état de cause de l'action prévue à l'article 922 précité.



Par déclaration du 5 novembre 2020, Mme [K] a relevé appel en intimant la société MMA.


Aux termes de ses conclusions déposées le 8 septembre 2022 sur le fondement du Règlement Nation du Conseil supérieur du Notariat, des articles 1382 devenu 1240 par l'effet de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, 948, 1076 et suivants du code civil, L.111-6 et suivants du code de l'organisation judiciaire🏛', 339 et 430 et suivants du code de procédure civile, Mme [K] demande à la cour de':


prononcer la nullité du jugement rendu le 24 septembre 2020,

réformer le jugement et déclarer recevables ses demandes,


statuant à nouveau,


juger que la preuve n'est pas rapportée que Me [O] a fourni aux parties une information complète et circonstanciée sur les engagements pris par les parties et sur les incidences patrimoniales des libéralités consenties dans la donation-partage,

juger que Me [O] a manqué aux devoirs de conseil et d'information lui incombant,

juger que Me [O] a omis d'incorporer les donations antérieures dans la masse à partager violant ainsi les articles 1078 et suivants du code civil🏛,

juger que Me [O] a commis des erreurs dans l'évaluation des biens et objets de la donation-partage,


en conséquence,


la déclarer bien fondée en ses demandes,

donner acte à la société MMA de son intervention volontaire,

condamner la société MMA à lui verser':

la somme de 324.323€, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique subi du fait des erreurs dans l'élaboration de l'acte de donation-partage,

la somme de 150.802€ à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance subi du fait de la dévalorisation des biens grevés d'usufruit,


la somme de 100.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

dire que les condamnations porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'assignation introductive d'instance,

dire que les intérêts seront capitalisés pour chaque période de douze mois écoulés,


à titre subsidiaire,


désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de :

se faire communiquer tout acte et document utile,

convoquer les parties en vue d'une réunion d'expertise,

déterminer la valeur, au jour de la donation initiale et au jour de la donation-partage, des biens ayant fait l'objet d'une donation antérieure à M. [X] [K] les 8 septembre et 30 décembre 1987 et Mme [E] [K] le 25 avril 1985,

établir la consistance des biens dépendant de l'acte de donation-partage en date du 20 décembre 2000,

déterminer la valeur des biens composant la masse à partager, à savoir :

nue-propriété des parts de la SCI Veronel,

nue-propriété des locaux commerciaux sis [Adresse 2],

nue-propriété des locaux commerciaux sis [Adresse 4],

nue-propriété d'un bien immobilier sis à [Localité 12],

pleine propriété d'un bien sis à [Localité 13],

déterminer la perte de valeur des immeubles de la SCI Veronel et de ceux situé [Adresse 8] grevés d'un usufruit au profit des donateurs,

dire que l'évaluation de la valeur des biens devra se faire sur pièces,

dire que l'expert pourra s'adjoindre de sa propre initiative un sapiteur dans une spécialité différente de la sienne,

dire que l'expert devra établir un pré-rapport dans un délai de trois mois et un rapport définitif dans un délai de six mois à compter de sa désignation,

condamner la société MMA à lui verser la somme de 5.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

condamner la même aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Me Elsa Viard Gaudin, avocat, sur son affirmation de droit.


Par conclusions déposées le 19 septembre 2022 sur le fondement des articles 122, 339 et suivant du code de procédure civile🏛🏛, 948, 1076 et suivants, 1382 du code civil , la société MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, intervenante volontaire, assureurs de responsabilité professionnelle de Me [O], demandent à la cour de':


constater que le jugement déféré ne saurait être annulé au seul prétexte qu'il a été rédigé par M. [U], ancien notaire,

constater que Mme [K] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une cause de récusation à l'encontre des magistrats composant le tribunal ayant rendu le jugement critiqué,

constater que Mme [Ad] est défaillante dans l'administration de la preuve d'une quelconque partialité des magistrats ayant rendu le jugement critiqué,

débouter Mme [K] de sa prétention au titre de la nullité du jugement.


sur le fond du litige,


constater que les griefs formés à l'encontre de Me [O] ont vocation à contester et remettre en cause le contenu de l'acte de donation-partage notamment s'agissant de l'évaluation des biens sans que Mme [K] ait jugé utile d'assigner l'ensemble des parties à l'acte,

constater qu'en procédant de la sorte, elle ne peut sérieusement venir reprocher au notaire d'avoir manqué à son obligation de conseil et d'information à l'égard des parties en alléguant ne pas avoir respecté leur volonté dès lors que celles-ci ne sont pas dans la cause,


en conséquence,


juger Mme [K] irrecevable en ses prétentions financières,


en tout état de cause,


constater que la donation-partage du 20 décembre 2020 est parfaitement régulière,

constater que Me [O] a strictement respecté la volonté des parties,

constater que Me [O] n'a commis aucune faute dans l'exercice de sa mission,

constater que Mme [K] s'est engagée en toute connaissance de cause,

constater que Me [O] n'a commis aucune faute en transformant les donations antérieures consenties à Mme [E] [K] et M.[X] [K] en donations préciputaires aux termes de l'acte donation-partage dès lors qu'il s'agissait de concrétiser la volonté des donateurs,

constater qu'il n'appartenait en aucun cas à Me [O] de procéder à une réévaluation de ces donations et incorporation lors de la régularisation de l'acte de donation-partage,

constater que les éléments en possession de Me [O] ne permettaient en aucun cas de déterminer que les évaluations retenues par les donateurs, s'agissant des biens objet de la donation, pouvaient se révéler erronées,

constater que les pièces versées aux débats par Mme [K] ne sont pas probantes pour remettre en cause les évaluations retenues par les parties lors de la régularisation de la donation-partage,

constater que Mme [Ad] ne justifie pas de l'existence d'un préjudice que ce soit dans son principe ou dans son quantum,

constater que Mme [K] au décès de ses parents, pourra engager toute procédure utile à l'encontre de ses frère et s'ur pour faire constater l'existence d'une éventuelle atteinte à sa réserve en exerçant une action en réduction de la donation-partage,


en conséquence,


confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que':

Me [O] n'avait commis aucun manquement à ses obligations professionnelles,

Mme [K] ne justifiait d'aucun préjudice indemnisable à l'encontre du notaire et son assureur,

il a alloué à la compagnie MMA une indemnité de 1.500€ au titre des frais de procédure,

juger que la responsabilité de Me [O] ne saurait être retenue,

débouter Mme [K] de l'intégralité de ses prétentions financières,

si par impossible, la cour pouvait entrer en voie de condamnation à leur encontre, les condamnations ne sauraient porter intérêts au taux légal qu'à compter du jugement rendu sans possibilité de pouvoir procéder à la capitalisation des intérêts, dès lors que l'action judiciaire engagée tend à faire reconnaître la responsabilité civile délictuelle du notaire,

condamner Mme [K] à leur verser une somme de 5.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

condamner la même aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP Montoya Pascal-Montoya Dorne Goarant.


L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 septembre 2022.



MOTIFS


Il est donné acte à la société MMA Iard Assurances Mutuelles de son intervention volontaire.


Sur la demande de nullité du jugement déféré


Mme [K] expose qu'en raison de la procédure sans audience instaurée par l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020🏛 durant la période de confinement liée à la crise sanitaire Covid-19, elle n'a pas été en mesure d'une part, d'identifier les magistrats composant la juridiction de jugement ayant statué sur son assignation et qu'elle a découvert à la lecture du jugement déféré que l'un des magistrats statuant en qualité de magistrat à titre temporaire et rédacteur de la décision était M. [U], ancien notaire de [Localité 9], et s'est ainsi trouvée privée d'autre part, de la faculté d'en demander la récusation avant jugement.

Elle fonde ainsi sa demande de nullité du jugement «'sur le soupçon de partialité envers la juridiction de première instance et plus spécifiquement sa composition'», soulignant que M. [Ae] , de par son ancienne profession, a été, «'en tout état de cause, nécessairement en contact professionnel avec le notaire rédacteur de l'acte'» de sorte que «'l'impartialité de ce magistrat peut être légitimement remise en question'».


Les sociétés MMA objectent à bon droit que le jugement dont appel est le fruit d'une décision prise en collégialité, quand bien même il a été rédigé par M. [U].


Ensuite, Mme [K] n'expose aucun fait précis et ne communique aucun élément de preuve de nature à établir le bien fondé de son allégation selon laquelle M. [U] a été en relation professionnelle avec Me [O], étant de plus fort relevé que ces griefs sont portés à l'encontre d'une personne non appelée dans la cause.


En outre, la circonstance que M. [U] a exercé comme notaire à Chambéry durant de nombreuses années (de 1982 à 2017 selon les sociétés MMA) n'a pas fait obstacle à sa nomination comme magistrat à titre temporaire au tribunal judiciaire de Grenoble.


En l'absence de démonstration d'une situation de conflit d'intérêt dans laquelle ce magistrat se serait trouvé pour exercer sa fonction juridictionnelle de manière indépendante, impartiale et objective, Mme [K] doit être déboutée de sa demande de nullité.


Sur la recevabilité des demandes de MAde [K]


Il est relevé que dans le paragraphe du jugement «'sur la recevabilité des actions engagées par Mme [A] [K]'» les premiers juges n'ont pas statué sur cette irrecevabilité, s'étant limités à donner acte à celle-ci de son désistement d'instance à l'égard de Me [H] et à déclarer recevable l'intervention volontaire de la société MMA Iard, tout en déclarant ex abrupto au dispositif du jugement, l'action de Mme [K] recevable.


Les sociétés MMA soutiennent que'sous couvert de son action en responsabilité à l'encontre du notaire ayant reçu la donation-partage, Mme [K] conteste en réalité le contenu de l'acte de donation-partage, ses conditions financières et juridiques sans contester in fine la validité et l'efficacité de l'acte puisqu'elle n'agit pas en nullité. Elles soutiennent ainsi l'irrecevabilité des prétentions financières de Mme [K] en l'absence d'assignation des autres parties signataires de cette donation-partage.


Mme [K] défend être recevable à agir en responsabilité contre le notaire, en sa qualité de donataire victime de ses manquements et du préjudice en résultant, préjudice qu'elle dit résulter d'une mauvaise évaluation par le notaire des biens objet de la donation-partage, de l'absence de réintégration à l'actif à partager des donations antérieurement faites au profit de ses frère et s'ur, de sorte que la part allouée à ces derniers était surévaluée, d'où un trop-perçu qu'elle calcule, disant sa part sous-évaluée'; elle soutient qu'elle n'était pas dans l'obligation de mettre en cause l'ensemble des signataires de l'acte de donation-partage dès lors qu'il ne «'s'agit pas uniquement d'analyser la volonté des donateurs mais également les manquements du notaire à l'égard des donateurs et donataires'» et plus spécifiquement à son égard.


La demande d'irrecevabilité des sociétés MMA à l'égard des «'prétentions financières'» de Mme [K] s'entend nécessairement à l'égard de l'ensemble des prétentions, les réclamations indemnitaires de l'appelante étant en relation causale avec son action en responsabilité à l'encontre du notaire.


Il résulte de ses écritures que Mme [K] fait grief au notaire de ne pas avoir respecté la volonté des parties, spécialement de ses parents, donateurs, quant au caractère égalitaire du partage, d'avoir commis des erreurs grossières dans l'estimation de la valeur des biens de sorte que la valeur de la masse à partager aurait dû être bien supérieure, se fondant en cela sur des éléments postérieurs à la donation-partage, dénonçant également le fait qu'elle est la seule des trois donataires dont la part immobilière a été grevé d'usufruit sans avoir reçu d'information à ce sujet du notaire, tout en développant, sans offre de preuve autre que ses propres courriers, qu'elle a été contrainte de signer l'acte litigieux, le notaire s'étant rendu à son domicile pour exercer «'une pression psychologique forte'», alors que celui-ci n'avait pas répondu à ses questionnements sur la teneur de cette donation-partage.

Ce faisant, elle remet en cause l'économie générale de la donation-partage dont elle impute le caractère qu'elle qualifie d'inégalitaire et qu'elle dénonce, aux manquements du notaire instrumentaire'; elle reconsidère pour les besoins de la démonstration du bien fondé de ses prétentions, le socle de la donation-partage, à savoir la volonté des donateurs dont elle soutient qu'elle n'aurait pas été respectée (quand bien même nul ne plaide par procureur) et les droits des autres donataires en critiquant la valeur de leurs lots respectifs ; l'expertise qu'elle sollicite à titre subsidiaire atteste parfaitement de la finalité de son action, à savoir remettre en cause la valeur des biens partagés et donc contester celle des lots qui lui ont été attribués'; les dommages et intérêts qu'elle réclame ne tendent en réalité qu'à la replacer dans les droits dont elle estime avoir été lésée, à partir de calculs estimatifs fondés sur la critique des valeurs retenues dans le partage, sachant qu'elle recalcule également la valeur des lots attribués à ses frère et s'ur.


Dès lors, eu égard à la portée de ses contestations et de ses demandes indemnitaires qui excédent le débat sur la seule responsabilité du notaire, il lui appartenait de mettre en cause les autres parties signataires de l'acte de donation-partage litigieux, non pas en tant que responsables du préjudice dont elle dit être victime, mais en tant qu'acteurs de la donation-partage (notamment concernant la volonté exacte des donateurs, le sort des donations antérieurement consenties), l'accueil éventuel de ses prétentions relatives à l'évaluation de l'actif partageable induisant une éventuelle remise en cause des attributions en valeur des lots entre les donataires.

Les sociétés MMA sont en conséquence accueillies dans leur demande d'irrecevabilité et le jugement déféré infirmé de ce chef.


Sur les dépens et les frais irrépétibles


Partie succombante, Mme [K] conserve les dépens d'appel à sa charge avec recouvrement conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile🏛, ainsi que ses frais irrépétibles'; elle est dispensée en équité de verser une indemnité de procédure complémentaire pour la cause d'appel aux intimés.

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont confirmées.



PAR CES MOTIFS


La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,


Donne acte à la société MMA Assurance Mutuelle de son intervention volontaire,


Déboute Mme [A] [K] épouse [P] de sa demande en nullité du jugement déféré,


Infirme le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens,


Statuant à nouveau et ajoutant,


Dit Mme [A] [K] épouse [P] irrecevable en ses prétentions,


Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile🏛 au profit de l'une ou l'autre des parties en appel,


Condamne Mme [A] [K] épouse [P] aux dépens d'appel avec recouvrement selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛.


Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛,


Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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