LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 23 novembre 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 803 FS-D
Pourvoi n° A 22-13.773
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022
La société Réside études apparthôtels, société par actions simplifiée
unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 32], a formé le pourvoi n° A
22-13.773 contre l'arrêt rendu le 4 mars 2022 par la cour d'appel de Paris
(pôle 1, chambre 8), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [A] [H],
2°/ à Mme [B] [H],
tous deux domiciliés [Adresse 26],
3°/ à Mme [C] [C], … [… …],
4°/ à M. [X] [A],
5°/ à Mme [Y] [A],
tous deux domiciliés [Adresse 29],
6°/ à M. [Z] [R], domicilié [… …],
7°/ à Mme [F] [Aa], épouse [AG], … [… …],
8°/ à M. [RU] [L],
9Ab/ à MAce [I] [L],
tous deux domiciliés [Adresse 7],
10°/ à M. [LS] [Z],
11°/ à MAde [M] [Z],
tous deux domiciliés [Adresse 21],
12°/ à Mme [AH] [Ae], domiciliée [Adresse 9],
13°/ à M. [ER] [X],
14°/ à Mme [AI] [X],
tous deux domiciliés [Adresse 22],
15°/ à Mme [AJ] [Af], … [… …],
16°/ à M. [AK] [Ag], domicilié [… …] (…),
17°/ à M. [AL] [Ah], domicilié [… …],
18°/ à M. [AM] [O],
19°/ à Mme [AS] [TG], épouse [O],
tous deux domiciliés [Adresse 23],
20°/ à Mme [AN] [RP], … [… …],
21°/ à M. [AO] [WN],
22°/ à Mme [V] [IG], épouse [AP],
tous deux domiciliés [Adresse 25],
23°/ à M. [Ai] [ZZ],
24°/ à Mme [AQ] [ZZ],
tous deux domiciliés [Adresse 5],
25°/ à M. [AR] [GP],
26°/ à Mme [AS] [B] [GP],
tous deux domiciliés [Adresse 27],
27°/ à Mme [AS] [AT], domiciliée [Adresse 34],
28°/ à Mme [D] [ZR], épouse [AU], … [… …],
29°/ à M. [AV] [OV],
30°/ à Mme [DO] [OV],
tous deux domiciliés [Adresse 10],
31°/ à M. [AW] [YI],
32°/ à Mme [AX] [AY],
tous deux domiciliés [Adresse 17],
33°/ à M. [AZ] [BA], domicilié [… …],
34°/ à M. [Aj] [BB], domicilié [… …],
35°/ à M. [BC] [DE],
36°/ à M. [BD] [DE],
tous deux domiciliés [Adresse 24],
37°/ à M. [Ak] [BE], domicilié [… …],
38°/ à M. [T] [YM],
39°/ à Mme [W] [YM],
tous deux domiciliés [Adresse 3],
40°/ à Mme [BF] [BG], domiciliée [Adresse 20],
41°/ à M. [DR] [AU], domicilié [… …],
42°/ à Mme [DM] [BH], … [… …],
43°/ à M. [AF] [NM],
44°/ à Mme [B] [NM],
tous deux domiciliés [Adresse 35],
45°/ à Mme [S] [BI], domiciliée [Adresse 16],
46°/ à M. [E] [IC],
47°/ à Mme [Al] [IC],
tous deux domiciliés [Adresse 11],
48°/ à M. [BJ] [BK], domicilié [… …],
49°/ à M. [BL] [KF],
50°/ à Mme [BM] [KF],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
51°/ à M. [Am] [BN], domicilié [… …],
52°/ à M. [BL] [FH],
53°/ à Mme [YE] [FH],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
54°/ à M. [Aj] [AG], domicilié [… …],
55°/ à la société [Adresse 36], société à responsabilité limitée, dont le
siège est [Adresse 37],
56°/ à la société Vivanim, société à responsabilité limitée, dont le siège est
[Adresse 6],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de
cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. David, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé
et Trichet, avocat de la société Réside études apparthôtels, de la SCP
Marlange et de La Burgade, avocat de M. [A] [H], de Mme [B] [H], de Mme [C],
de M. [X] [A], de Mme [Y] [A], de M. [R], de Mme [Aa] épouse [AG], de M. [RU]
[L], de Mme [Ab] [Ac], de M. [LS] [Z], de Mme [M] [Ad], de Mme [Ae], de M. [ER]
[X], de Mme [GL] [X], de Mme [Af], de M. [Ag], de M. [Ah], de M. [AM] [O], de Mme
[AS] [O], de Mme [RP], de M. [AO] [WN], de Mme [V] [WN], de M. [U] [ZZ], de
Mme [AQ] [ZZ], de M. [AR] […] […], de Mme [AS] [B] [GP], de Mme [AT], de Mme
[AU], de M. [AV] [OV], de Mme [DO] [OV], de M. [AW] [YI], de Mme [AX] [AY], de
M. [BA], de M. [BB], de M. [BC] [VB] [DE], de M. [BD] [DE], de M. [BE], de M.
[T] [YM], de Mme [W] [YM], de Mme [BG], de M. [AU], de Mme [BH], de M. [AF]
[NM], de Mme [B] [NM], de Mme [BI], de M. [E] [IC], de Mme [Al] [IC], de M.
[BK], de M. [BL] [KF], de Mme [BM] [KF], de M. [BN], de M. [BL] [FH], de Mme
[YE] [FH], de M. [AG], de la société [Adresse 36] et de la société Vivanim, et
l'avis de Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, après débats en l'audience
publique du 11 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M.
David, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, MM. An,
Jobert, Mmes Grandjean, Grall, conseillers, M. Jariel, Mmes Schmitt, Aldigé,
M. Baraké, Mmes Gallet, Davoine, conseillers référendaires, Mme Guilguet-
Pauthe, avocat général, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application
de l'
article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire🏛, des président et
conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu
le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mars 2022), rendu en référé, et les
productions, M. [A] [H], Mme [B] [H], Mme [C], M. [X] [A], Mme [Y] [A], M.
[R], Mme [Aa] épouse [AG], M. [RU] [L], Mme [Ab] [Ac], M. [LS] [Z], Mme [Ad] [Z],
Mme [Ae], M. [ER] [X], Mme [GL] [X], Mme [Af], M. [Ag], M. [Ah], M. [AM] [O], Mme
[AS] [O], Mme [RP], M. [AO] [WN], Mme [V] [WN], M. [U] [ZZ], Mme [AQ] [ZZ], M.
[AR] […] […], Mme [AS] [B] [GP], Mme [AT], Mme [AU], M. [AV] [OV], Mme [DO]
[OV], M. [AW] [YI], Mme [AX] [AY], M. [BA], M. [BB], M. [BC] [VB] [DE], M.
[BD] [DE], M. [BE], M. [T] [YM], Mme [W] [YM], Mme [BG], M. [AU], Mme [BH], M.
[AF] [NM], Mme [B] [NM], Mme [BI], M. [E] [IC], Mme [Al] [IC], M. [BK], M.
[BL] [KF], Mme [BM] [KF], M. [BN], M. [BL] [FH], Mme [YE] [FH], M. [AG], la
société [Adresse 36] et la société Vivanim (les bailleurs) ont consenti à la
société Réside études apparthôtels (la locataire) des baux commerciaux portant
sur des locaux situés dans une résidence de tourisme.
2. En raison des mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus
covid-19, la locataire a, du 17 mars au 2 juin 2020, cessé son activité dans
la résidence concernée puis a enregistré un taux d'occupation en forte
diminution avant une nouvelle fermeture décidée par le décret n° 2020-1310 du
29 octobre 2020.
3. Les 9 et 21 juillet 2020, la locataire a informé les bailleurs de sa
décision de suspendre le paiement des loyers des deuxième et troisième
trimestres 2020.
4. Les bailleurs ont assigné la locataire en paiement de provisions
correspondant à l'arriéré locatif.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. La locataire fait grief à l'arrêt de la condamner à verser des provisions
d'un certain montant au titre des échéances de loyers impayées du deuxième
trimestre 2020 au quatrième trimestre 2021 inclus, alors « que saisi d'une
demande de condamnation à provision, le juge des référés ne dispose pas du
pouvoir d'interpréter les termes d'un contrat ou d'une de ses clauses ; qu'en
l'espèce les baux commerciaux conclus entre la société Réside études
apparthôtels et chacun des propriétaires bailleurs contenait une clause de
suspension du versement des loyers qui stipulait à l'article « dispositions
diverses » que « Dans le cas où la non sous-location du bien résulterait (?)
soit de la survenance de circonstances exceptionnelles et graves (telles
qu'incendie de l'immeuble, etc?) affectant le bien et ne permettant pas une
occupation effective et normale, après la date de livraison, le loyer, défini
ci-avant, ne sera pas payé jusqu'au mois suivant la fin du trouble de
jouissance » ; qu'en application de ces stipulations, les circonstances
exceptionnelles liées à la pandémie de Covid-19 et les mesures
gouvernementales prises pour en juguler son expansion, qui avaient imposé
l'état d'urgence sanitaire, entraient dans les prévisions contractuelles ainsi
stipulées en tant qu'elles interdisaient la sous-location des appartements,
devenue impossible ou entravée avec une telle ampleur et de telle manière que
de telles sous-locations ne permettaient pas une occupation effective et
normale du bien ; que, pour refuser cependant de faire application de ces
stipulations contractuelles, la cour d'appel a retenu que les circonstances
exceptionnelles ainsi visées devaient affecter « le bien lui-même », c'est-à-
dire l'immeuble ou bâtiment, entendu stricto sensu ; qu'en statuant ainsi, la
cour d'appel, qui a interprété la notion contractuelle de circonstances
exceptionnelles affectant le bien en excluant que ces circonstances pussent
affecter la sous-location du bien, objet du contrat, pour la rendre
impossible, la cour d'appel a tranché une contestation sérieuse relative à la
portée de la clause de suspension du versement du loyer et violé l'
article 835
alinéa 2 du code de procédure civile🏛. »
Réponse de la Cour
6. Ayant relevé, d'une part, que la clause de suspension du loyer prévue au
bail impliquait, à l'évidence, que le bien lui-même soit affecté, d'autre
part, que les mesures prises pour lutter contre la crise sanitaire avaient
affecté, non les biens loués eux-mêmes, mais leurs seules conditions
d'exploitation, la cour d'appel, qui n'a pas interprété le contrat, n'a pu
qu'en déduire que l'obligation de payer le loyer n'était pas sérieusement
contestable.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Réside études apparthôtels aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la
demande formée par la société Réside études apparthôtels et la condamne à
payer à M. [A] [H], à Mme [B] [H], à Mme [C], à M. [X] [A], à Mme [Y] [A],
à M. [R], à Mme [Aa] épouse [AG], à M. [RU] [L], à Mme [Ab] [Ac], à M. [LS] [Z],
à Mme [M] [Ad], à Mme [Ae], à M. [ER] [X], à Mme [AI] [X], à Mme [Af], à Ag. [N],
à M. [Ah], à M. [AM] [O], à Mme [AS] [O], à Mme [RP], à M. [AO] [WN], à Mme [V]
[WN], à M. [Ai] [ZZ], à Mme [AQ] [ZZ], à M. [AR] […] […], à Mme [AS] [B]
[GP], à Mme [AT], à Mme [AU], à M. [AV] [OV], à Mme [DO] [OV], à M. [AW] [YI],
à Mme [AX] [AY], à M. [BA], à M. [BB], à M. [BC] [VB] [DE], à M. [BD] [DE], à
M. [BE], à M. [T] [YM], à Mme [W] [YM], à Mme [BG], à M. [AU], à Mme [BH], à
M. [AF] [NM], à Mme [B] [NM], à Mme [BI], à M. [E] [IC], à Mme [Al] [IC], à
M. [BK], à M. [BL] [KF], à Mme [BM] [KF], à M. [BN], à M. [BL] [FH], à Mme
[BO] [FH], à M. [AG], à la société [Adresse 36] et à la société Vivanim la
somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et
prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre
deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SARL Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la
société Réside études apparthôtels
La société Réside Etudes Apparthôtels fait grief à l'arrêt de l'avoir
condamnée à verser une provision d'un certain montant à chacun des
propriétaires bailleurs recevables de la résidence Residhome Paris Gare de
Lyon au titre des échéances de loyers impayées du deuxième trimestre 2020 au
quatrième trimestre 2021 inclus,
Alors que, saisi d'une demande de condamnation à provision, le juge des
référés ne dispose pas du pouvoir d'interpréter les termes d'un contrat ou
d'une de ses clauses ; qu'en l'espèce les baux commerciaux conclus entre la
société Réside Etudes Apparthotels et chacun des propriétaires bailleurs
contenait une clause de suspension du versement des loyers qui stipulait à
l'article « dispositions diverses » que « Dans le cas où la non sous-location
du bien résulterait (?) soit de la survenance de circonstances exceptionnelles
et graves (telles qu'incendie de l'immeuble, etc?) affectant le bien et ne
permettant pas une occupation effective et normale, après la date de
livraison, le loyer, défini ci-avant, ne sera pas payé jusqu'au mois suivant
la fin du trouble de jouissance » ; qu'en application de ces stipulations, les
circonstances exceptionnelles liées à la pandémie de Covid-19 et les mesures
gouvernementales prises pour en juguler son expansion, qui avaient imposé
l'état d'urgence sanitaire, entraient dans les prévisions contractuelles ainsi
stipulées en tant qu'elles interdisaient la sous-location des appartements,
devenue impossible ou entravée avec une telle ampleur et de telle manière que
de telles sous-locations ne permettaient pas une occupation effective et
normale du bien ; que, pour refuser cependant de faire application de ces
stipulations contractuelles, la cour d'appel a retenu que les circonstances
exceptionnelles ainsi visées devaient affecter « le bien lui-même », c'est-à-
dire l'immeuble ou bâtiment, entendu stricto sensu ; qu'en statuant ainsi, la
cour d'appel, qui a interprété la notion contractuelle de circonstances
exceptionnelles affectant le bien en excluant que ces circonstances pussent
affecter la sous-location du bien, objet du contrat, pour la rendre
impossible, la cour d'appel a tranché une contestation sérieuse relative à la
portée de la clause de suspension du versement du loyer et violé l'
article 835
alinéa 2 du code de procédure civile🏛.