Jurisprudence : CE 6/2 SSR, 23-05-1980, n° 10896

CE 6/2 SSR, 23-05-1980, n° 10896

A7971AI3

Référence

CE 6/2 SSR, 23-05-1980, n° 10896. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/902449-ce-62-ssr-23051980-n-10896
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CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 10896

Société Civile Immobilière du Berry

Lecture du 23 Mai 1980

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 6ème Sous-Section

Vu la requête sommaire, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 janvier 1978, et le mémoire complémentaire, enregistré le 24 mars 1978, présentés pour la Société Civile immobilière du Berry, dont le siège est à La Roche, commune de Manzat (Puy de Dôme), représentée par ses représentants légaux et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1° réforme le jugement du 8 novembre 1977 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a condamné Electricité de France et l'Entreprise Normande de Désherbage à une indemnité de 627 882 F avec intérêts de droit à compter du 23 mars 1974, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'incendie provoqué dans ses plantations forestières situées dans la commune d'Allouis (Cher); 2° condamne conjointement et solidairement Electricité de France et l'Etreprise Normande de Désherbage à lui verser la somme de 3 019 092 F ainsi que les intérêts et les intérêts des intérêts;

Vu la loi du 15 juin 1906 et les décrets du 6 octobre 1967;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII;

Vu le code des Tribunaux administratifs;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu la loi du 30 décembre 1977.
En ce qui concerne la compétence de la juridiction administrative:
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 que la juridiction judiciaire est compétente pour connaître des dommages qui sont les conséquences certaines, directes et immédiates des charges imposées par la loi aux propriétés privées à raison de l'installation des servitudes d'appui, de passage et d'ébranchage au profit des concessionnaires de distribution d'énergie; que toutefois, les litiges nés des dommages purement accidentels causés par les travaux de construction ou de réparation des lignes de distribution électrique, qui ont le caractère de dommages de travaux publics, ressortissent à la compétence de la juridiction administrative; que les dommages dont la Société civile immobilière du Berry demande réparation ont pour origine un incendie accidentel provoqué par l'Entreprise Normande de désherbage xxxxx, lors de l'exécution de travaux de débroussaillage effectués pour le compte d'Electricité de France en vue du passage d'une ligne électrique, et ont ainsi le caractère de dommages de travaux publics; que, dès lors, Electricité de France n'est pas fondée à soutenir, par la voie du recours incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans s'est déclaré compétent pour connaître du litige;
Au fond:

Sur la responsabilité:
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que la destruction des plantations forestières appartenant à la Société civile immobilière du Berry dans la commune d'Allouis a pour seule cause l'incendie provoqué le 21 mars 1973 par l'Entreprise Normande de désherbage, lors de l'exécution des travaux publics que lui avait confiés Electricité de France; que c'est à bon droit que le Tribunal administratif d'Orléans a déclaré l'Entreprise Normande de désherbage et Electricité de France solidairement responsables envers la société requérante des dommages subis par celle-ci;

Sur le préjudice:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la cause des dommages et leur étendue étaient connus dés l'issue du sinistre le 21 mars 1973; que les travaux destinés à réparer les dommages causés aux plantations pouvaient être immédiatement entrepris; que la société requérante n'établit pas s'être trouvée dans l'impossibilité matérielle ou financière de les exécuter; que, par suite, il y a lieu, ainsi que l'a fait le jugement attaqué, de rejeter ses conclusions tendant à ce que l'évaluation du préjudice qu'elle a subi, qui a été calculé par l'expert désigné par le tribunal au jour du sinistre, soit effectué à la date du 1er octobre 1974;
Considérant qu'en premier lieu, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'expert a pris en compte, dans les frais de remise en état des terrains après incendie, les frais de recépage et de reconstitution de l'humus; que la requérante n'est pas fondée à demander que figurent dans ces frais de remise en état les dépenses de préparation du sol figurant déjà dans les charges de constitution des plantations retenues pour déterminer la valeur d'avenir de celles-ci; qu'elle n'établit pas que l'évaluation de ces deux catégories de frais, telle qu'elle a été arrêtée par le jugement attaqué, conformément à l'avis de l'expert qui s'est rendu sur les lieux et s'est trouvé à même d'apprécier l'état des terrains et la consistance des plantations, soit insuffisante; qu'en second lieu, la seule circonstance que la valeur forestière du sol retenue par l'expert serait inférieure à celle qui résulterait des prix des terrains constatés lors d'une vente aux enchères d'une propriété voisine réalisée quatorze mois après le sinistre et de ceux indiqués en 1978 par la chambre d'agriculture du Cher ne suffit pas à démontrer son inexactitude; qu'en troisième lieu la société requérante n'apporte aucun élément susceptible d'établir que ses plantations auraient eu un pourcentage de réussite supérieur à celui qui a été retenu; qu'enfin, elle ne produit aucune justification du montant des dépenses diverses de démarche et d'expertise qu'elle soutient avoir exposées;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'évaluation des dommages causés par l'incendie du 21 mars 1973 faite par le tribunal en se fondant sur le rapport de l'expertise qu'il a ordonnée, qui est d'ailleurs proche des évaluations du Fonds, forestier national et de l'assureur de l'Entreprise normande de désherbage, répare de manière insuffisante le préjudice subi par la société civile immobilière du Berry; que celle-ci n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif d'Orléans a limité à 627 882F le montant de l'indemnité qui lui a été accordée;

Sur les intérêts des intérêts:
Considérant que la Société civile immobilière du Berry a demandé le 26 janvier 1978 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité que le Tribunal administratif d'Orléans lui a accordée; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérëts; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil il y a lieu de faire droit à cette demande.
DECIDE
Article 1er - Les intérêts afférents à l'indemnité de 627 882 F que l'Entreprise Normande de désherbage et Electricité de France ont été condamnés à verser à la Société civile immobilière du Berry par jugement du Tribunal administratif d'Orléans en date du 8 novembre 1977 et échus le 26 janvier 1978 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 - Le surplus des conclusions de la requête de la Société civile immobilière du Berry est rejeté.
Article 3 - Le recours incident d'Electricité de France est rejeté.

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