Jurisprudence : CE Contentieux, 09-01-1981, n° 10145

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 10145

Société Timex Corporation

Lecture du 09 Janvier 1981

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)



Sur le rapport de la 8ème Sous-Section

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 25 novembre 1977, et le mémoire complémentaire enregistré le 28 avril 1978, présentés pour la société "Timex Corporation", société de droit américain de l'Etat dy Delaware, dont l'établissement en France est 141 avenue Charles de Gaulle à Meuilly-sur-Seine (Hauts de Seine), représentée par son trésorier régulièrement mandaté, et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1° annule le jugement du 28 septembre 1977 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande en réduction de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971, par avis de mise en recouvrement du 28 mai 1973; 2° lui accorde la réduction de l'imposition contestée à concurrence de 3 111 266 F de droits simples et des pénalités correspondantes;

Vu le Code général des impôts;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;

Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que la société "Timex Corporation", dont le siège est aux Etats Unis et qui exploite directement, sans avoir créé une filiale, un établissement industriel en France, demande la réduction de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie dans la mesure où celle-ci est assise sur les sommes qui, au cours de la période comprise entre le 1er janvier 1968 et le 31 décembre 1971, ont été versées par le siège à l'établissement français; que l'imposition est fondée sur la constatation que l'établissement français, qui était en période de démarrage et ne parvenait pas à équilibrer son exploitation, n'a été en mesure de poursuivre celle-ci que moyennant les concours financiers dont il s'agit, lesquels ont été portés dans ses écritures, notamment dans les bilans qu'il était tenu d'établir pour exprimer les résultats d'ensemble de l'activité exercée en France par la société, à un poste "subventions d'exploitation";
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts dans sa rédaction applicable pendant les années d'imposition: "1-Les affaires faites en France au sens des articles 258 et 259 sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité de nature industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats. - 2. Cette taxe s'applique, quels que soient le statut juridique des personnes qui interviennent dans la réalisation des opérations imposables ou leur situation au regard de tous autres impôts..."; qu'aux termes de l'article 269: "le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée est constitué: ... g) pour toutes les autres opérations, par l'encaissement du prix ou de la rémunération";
Considérant que, si les subventions d'exploitation reçues par une entreprise sont en règle générale, par application des textes ci-dessus rappelés, passibles de la taxe sur la valeur ajoutés, en ce qu'elles constituent un complément de recettes s'ajoutant à celles qui proviennent de l'exploitation industrielle ou commerciale proprement dite et en ce que la personne qui les verse ne le fait que parce qu'elle souhaite, de son propre point de vue, voir se poursuivre l'exploitation de l'entreprise qu'elle subventionne à cet effet, cette règle ne peut pas être étendue au cas où il s'agit, comme dans la présente espèce, de mouvements de fonds en provenance du siège et à destination d'un établissement d'une même personne morale; qu'en pareil cas, le fait générateur de l'impôt fait défaut dès lors qu'il ne s'agit pas de sommes versées par un tiers en contrepartie de services qui lui seraient rendus, que le siège n'a pas un intérêt qui lui soit propre à voir se poursuivre l'exploitation de l'établissement, dont il est en toute hypothèse responsable à l'égard des tiers, et qu'enfin, si la loi prévoit l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, sous certaines conditions, des livraisons à soi-même de certains biens ou marchandises, aucun texte ne soumet à la taxe les services que se rendent les entités économiques, non dotées de la personnalité morale, exploitées directement par la même société; que si, pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés, les prescriptions de l'article 209.I, des articles 28 et suivants ainsi que de l'article 57 du code général des impôts obligent une société étrangère exerçant une activité en France à tenir une comptabilité et établir des bilans retraçant toutes les opérations faites en France et elles seules et à prendre en compte pour leur valeur réelle les éléments d'actif qui, sans ce ser d'appartenir à la société, sont transférés de l'étranger en France ou inversement, il ne s'ensuit pas que ces transferts puissent être regardés comme correspondant à la réalisation d'affaires au sens de l'article 256 précité, alors que, sous réserve du régime des importations ou des exportations, ils ne peuvent constituer que des apports ou des prélèvements;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, malgré la dénomination de "subventions d'exploitation" que la société requérante a cru devoir leur donner, les mouvements de fonds dont il s'agit n'étaient pas passibles de la taxe sur la valeur ajoutée; que la société "Timex Corporation" est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce fussent réduits de 3 111 266 F les droits et pénalités mis à sa charge.
DECIDE
Article 1er - Le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 28 septembre 1977 est annulé.

Article 2 - Les droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la Société "Timex Corporation" a été assujettie pour la période du 1er janvier 1968 au 31 décembre 1971 sont réduits de 3.111.266 F. La réduction correspondante est accordée en ce qui concerne les pénalités dont ces droits ont été assortis.

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