ARRET N°
du 11 octobre 2022
R.G : N° RG 22/01186 - N° Portalis DBVQ-V-B7G-FGAV
S.A. BANQUE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS 'BTP BAN QUE'
c/
S.E.L.A.R.L. SELARL [S] [B]
S.A.S. SCHANUS
Formule exécutoire le :
à :
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1° SECTION
ARRET DU 11 OCTOBRE 2022
APPELANTE :
d'une ordonnance rendue le 18 mai 2022 par le juge commissaire du tribunal de commerce de REIMS,
S.A. BANQUE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS 'BTP BANQUE'
[Adresse 3]
[Localité 4]
COMPARANT, concluant par Maître Arnaud GERVAIS, avocat au barreau de REIMS
INTIMEES :
S.E.L.A.R.L. SELARL [S] [B] La SELARL [S] [B], [Adresse 1], représentée par Maître [S] [B], domicilié de droit audit siège, pris en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de la SAS SCHANUS 'SCHANUS SAE', société immatriculée au RCS de REIMS sous le n°403 250 715, dont le siège social est à [Adresse 2], fonctions auxquelles il a été désigné selon jugement prononcé par le Tribunal de Commerce de REIMS en date du 13 juillet 2021
[Adresse 1]
[Localité 5]
COMPARANT, concluant par la SELARL FOSSIER NOURDIN, avocats au barreau de REIMS,
S.A.S. SCHANUS Société en liquidation judiciaire représentée par son mandataire judiciaire, la SELARL [S] [B] prise en la personne de Maître [S] [B] es qualité.
[Adresse 2]
[Localité 5]
COMPARANT, concluant par la SELARL FOSSIER NOURDIN, avocats au barreau de REIMS,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre
Madame MAUSSIRE, conseiller
Madame MATHIEU, conseiller
GREFFIER :
Madame MOHAMED-DALLAS, greffier lors des débats et Monsieur MUFFAT-GENDET greffier lors du délibéré
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
DEBATS :
A l'audience publique du 12 septembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 11 octobre 2022,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022 et signé par Madame MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre, et Monsieur MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par jugement rendu le 1er décembre 2015, le tribunal de commerce de Reims a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la Sas Schanus et désigné la Selarl [S] [B] en qualité de mandataire judiciaire. Un plan de continuation lui a été accordé par jugement en date du 6 juin 2017.
Puis suivant une décision rendue le 13 juillet 2021, le tribunal de commerce de Reims a prononcé la liquidation judiciaire de la Sas Schanus et a désigné la Selarl [S] [B], prise en la personne de Me [S] [B], en qualité de liquidateur.
Par lettre recommandée du 3 août 2021 avec accusé de réception, la Sa BTP Banque a déclaré une créance à titre privilégié au sens de l'
article L 622-17 du code de commerce🏛 pour un montant de 94.015,47 euros.
Était jointe à sa déclaration de créance, une autre déclaration de créance portant sur un montant de 62.061,06 euros.
Me [B], ès-qualités, par courrier du 15 février 2022 a informé la Sa BTP Banque que la créance déclarée à titre privilégié au passif pour un montant de 94.015,17 euros était contestée au motif que "suite à la résolution du plan et la liquidation judiciaire de la société Schanus, la créance produite ne relève pas de l'
article L 622-17 du code de commerce🏛 mais de l'article L 622-24. Le caractère privilégié de votre créance n'est pas justifié".
Faute d'avoir reçu une réponse de la Sa BTP Banque dans un délai d'un mois, Me [B], ès-qualités, a saisi le juge-commissaire du tribunal de commerce de Reims, qui par une ordonnance contradictoire rendue le 18 mai 2022 a rejeté la créance de la Sa BTP Banque.
Par acte en date du 3 juin 2022, la Sa BTP Banque a interjeté appel de cette ordonnance.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 19 juin 2022, la Sa BTP Banque conclut à l'infirmation de l'ordonnance déférée et demande à la cour de voir :
-admettre au passif de la liquidation judiciaire de la Sas Schanus la somme de 62.061,06 euros à titre privilégié se décomposant en cessions de créances impayées pour 30.811,06 euros et en encours de cautions pour 31.256,78 euros,
-condamner les intimés à lui payer la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Elle expose que son recours est recevable dans la mesure où la contestation a été adressée à une mauvaise entité (crédit coopératif) et portait sur un montant global étranger à celui qu'elle revendiquait par suite d'une confusion manifeste des dossiers par le mandataire.
Elle explique que le dispositif institué par les
articles L 622-24 et suivants du code de commerce🏛 a pour objet, d'une part, d'obliger le créancier à faire valoir ses créances, y compris une non échues, et d'autre part, de lui permettre de faire reconnaître la nature et l'étendue des droits constitués à son profit au jour de l'ouverture de la procédure collective pour prévenir toute difficulté relative à leur mise en œuvre.
Elle précise qu'il est distingué entre le titre exécutoire que constitue l'ordonnance d'admission venant consacrer l'encours existant au jour de l'ouverture de la procédure collective et l'effet exécutoire de ce titre contre le débiteur sous procédure collective, dont l'étendue est naturellement limitée aux seuls encours restés non apurés ensuite de l'ouverture de la procédure collective, après réception de règlements de tiers et/ou après justification de la libération des engagements par signature existant au jour de l'ouverture de la procédure collective.
Elle soutient qu'en application de l'
article L 622-17 du code de commerce🏛, les concours ayant donné lieu à la déclaration de créance ont été délivrés postérieurement à l'ouverture de la procédure, pour les besoins de la poursuite d'activité.
Elle fait valoir que l'admission des créances doit être faite à titre privilégié, sauf à préciser que l'admission devra l'être au titre du passif à échoir pour ce qui concerne les caution déclarées en vertu de l'action préventive éditée à l'
article 2309 du code civil🏛.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 14 juillet 2022, Maître [B], ès-qualités et la Sas Schanus concluent à l'infirmation de l'ordonnance entreprise et demandent à la cour d'admettre au passif de la procédure collective de la société Schanus la créance de la Sa BTP Banque pour un montant de 62.061,06 euros à titre chirographaire.
Ils exposent que le délai de forclusion n'a pas couru car Me [B], ès-qualités, a adressé sa lettre de contestation au Crédit Coopératif, de sorte que même s'il s'agit du même groupe que la Sa BTP Banque, le délai d'un mois n'a pas couru.
Ils font valoir que si le montant de la créance de 62.061,06 euros au jour de l'ouverture de la procédure collective n'est pas remise en cause, il appartient à la Sas BTP Banque de préciser quelles sont les cessions de créances qui sont restées impayées alors qu'elle a déclaré pour 30.811,06 euros et quelles sommes celle-ci a dû verser ensuite des encours de caution qui s'élevaient à un montant de 31.256,78 euros.
Ils soutiennent que':
-les contrats fondant la déclaration sont tous, selon les propres écritures de l'appelante, antérieurs au jugement de redressement judiciaire du 1er décembre 2015,
-la période d'observation s'est achevée en juin 2017, avec l'arrêté du plan de redressement,
-l'ensemble des pièces contractuelles relatives aux créances produites sont postérieures à cette date,
-la liquidation a été prononcée sans poursuite d'activité,
de sorte que les créances déclarées ne peuvent être reconnues comme privilégiées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
À titre liminaire, il convient de relever qu'à hauteur de cour le débat ne porte plus que sur le caractère chirographaire ou privilégié de la créance à admettre au passif de la procédure collective de la Sas Schanus, le montant n'étant plus discuté.
L'
article L 622-24 alinéa 1 du code de commerce🏛 énonce qu'à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leur créance au mandataire judiciaire dans les délais fixés par décret en conseil d'État.
Aux termes de l'article L 622-17- I du même code, la créance née régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, est payés à son échéance.
Lorsqu'elle n'est pas payée à l'échéance, cette créances est payées par privilège, avant toutes les autres créances, assorties ou non d'un privilège.
Le caractère privilégié de la créance se fonde sur la notion de créance postérieure utile et il résulte de l'article L 622-17-I que l'appréciation du caractère utile d'une créance doit se faire en considération de l'utilité potentielle de l'opération et non de son utilité réelle appréciée a posteriori.
En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que la Sa BTP Banque établit que la Sas Schanus lui a cédé des créances correspondant à l'exécution de travaux d'un marché de construction réalisé pour le compte de l'organisme Foyer Rémois à [Localité 5], suivant un acte daté du 7 juillet 2021 (pour des factures émises en juin 2021) et qu'elle s'est portée caution suivant acte daté du 18 juin 2021. Aussi, force est de constater que les créances sont postérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective et que, par leur nature, elles ont eu une utilité potentielle à la poursuite de l'activité de la Sas Schanus.
Dès lors, il convient de fixer au passif de la procédure collective de la Sas Schanus les créances suivantes de la Sa Banque du BTP à hauteur de 62.061,06 euros à titre privilégié et par conséquent, d'infirmer l'ordonnance entreprise, en ce qu'elle a rejeté les créances de la Sa Banque du BTP.
Eu égard à la nature de l'affaire, il convient d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective et de débouter la Sa Banque du BTP de sa demande en paiement à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Infirme l'ordonnance rendue le 18 mai 20221 par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Reims en ce qu'elle a rejeté les créances de la Sa Banque du BTP au passif de la procédure collective de la Sas Schanus.
Et statuant à nouveau,
Admet au passif de la procédure collective de la Sas Schanus les créances de la Sa Banque du BTP pour un montant total de 62.061,06 euros à titre privilégié se décomposant comme suit':
-30.811,06 euros au titre de cessions de créances impayées,
-31.256,78 euros au titre d'encours de caution.
Y ajoutant,
Déboute la Sa Banque du BTP de sa demande en paiement à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
Le greffier La présidente