Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 11
ARRÊT DU 07 OCTOBRE 2022
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02983 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBOXZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Novembre 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2013052622
APPELANTE
SA FACTOFRANCE - anciennement dénommée GE FACTOFRANCE
[Adresse 1]
[Localité 9]
Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELEURL TBA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241
Ayant pour avocat plaidant Me Olivier DROUOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0535
INTIMEES
S.A.S. TECH DATA FRANCE exerçant sous l'enseigne MAGIRUS, venant aux droits de la Société BEST'WARE FRANCE, représentée par son Président en exercice et tous représentants légaux,
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Serge BOUGANIM, avocat au barreau de PARIS, toque : C0106
SAS EVOLIUM RCS Evry sous le n° 732 941 144, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 10]
[Localité 7]
Représentée par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153
Ayant pour avocat plaidant Me Jean DAMERVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0116
S.E.L.A.R.L. BCM, prise en la personne de Maître [G] [S],agit ès qualités d'Administrateur judiciaire de la SAS OVERLAP.
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Olivier PECHENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : B0899
S.E.L.A.R.L. [C][X], prise en la personne de Maître [C] [X], agit ès qualités de Liquidateur judiciaire de la société OVERLAP
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentée par Me Olivier PECHENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : B0899
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des
articles 805 et 907 du code de procédure civile🏛🏛, l'affaire a été débattue le 30 juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marion PRIMEVERT,Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marion PRIMEVERT, magistrate faisant fonction de présidente
Emmanuelle DEMAZIERE,Conseillère désignée
Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Damien GOVINDARETTY
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'
article 450 du code de procédure civile🏛.
- signé par Mme Marion PRIMEVERT, magistrate faisant fonction de présidente, et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties, en application de l'
article 455 du code de procédure civile🏛.
Il sera succinctement rapporté que la société Best'Ware, aux droits de laquelle vient la société Tech Data, a vendu le 26 avril 2013, à la société Overlap, pour un montant de 450.169,41€ TTC, des logiciels que cette dernière avait commandés pour son client Evolium, auquel elle les a ensuite revendus.
La société Overlap a été mise en redressement judiciaire le 11 juin 2013 puis en liquidation judiciaire le 11 juin 2014, la société [S] étant désignée comme administrateur judiciaire et la société [C] [X] comme liquidateur.
Le 6 juin 2013, Best'Ware (devenue Aa Ab) mettait en demeure le sous-acquéreur Evolium de régler les factures impayées des logiciels à hauteur de 427.254,84€.
Aa Ab se prévalant d'une clause de réserve de propriété sur les logiciels, adressait à l'administrateur judiciaire d'Overlap une demande de revendication, qui a été irrévocablement admise par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 19 mai 2016.
Aa Ab a alors assigné le sous-acquéreur Evolium en paiement de la somme de 427.254,84€ TTC en principal.
La société GE Capital Factofrance devenue Factofrance, qui avait conclu le 9 avril 2008 avec Overlap un contrat d'affacturage portant sur les créances que celle-ci détenait sur ses clients, est intervenue volontairement à l'instance pour réclamer le paiement de la somme de 478.862,89€ au titre des factures dues par le sous-acquéreur à Overlap, à laquelle elle soutenait être conventionnement subrogée.
***
Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 15 novembre 2019, qui a :
- Confirmé la recevabilité de l'intervention volontaire de la société Factofrance,
- Condamné la société Evolium à payer à la société Tech Data France la somme de 276.571,85€ à majorer des intérêts correspondant à 1,5 fois l'intérêt légal à compter du 1er juillet 2013 au titre de sa réserve de propriété,
- Condamné la société Evolium à payer la somme de 202.291,04 € à Factofrance outre les intérêts au taux légal à compter du 14 novembre 2013 date de l'intervention volontaire de Factofrance au titre du contrat d'affacturage,
- Condamné la société Evolium à payer 5.000€ à la société Tech Data France et 5.000€ à la société Factofrance au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛,
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- Condamné la société Evolium aux dépens de l'instance,
- Ordonné l'exécution provisoire.
Vu l'appel interjeté par la sa Factofrance, le 7 février 2020,
* * *
Vu l'
article 455 du code de procédure civile🏛,
Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 13 décembre 2021 pour la sa Factofrance par lesquelles elle demande à la cour de :
Vu la qualité de créancier subrogé de la société Factofrance,
Vu le jugement prononcé par le Tribunal de Commerce de Paris le 14 avril 2015 déclarant recevable l'intervention volontaire de la société Factofrance,
Vu l'arrêt prononcé par la Cour d'Appel de Versailles le 19 mai 2016,
Vu l'arrêt prononcé par la chambre commerciale de la Cour de Cassation le 24 Janvier 2018,
Vu le jugement déféré du 15 Novembre 2019,
Vu les pièces et observations présentées par la société Factofrance,
Recevant la société Factofrance anciennement dénommée GE Factofrance en son appel, l'y déclarer bien fondée.
- Confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société Factofrance anciennement dénommée GE Factofrance recevable en son intervention volontaire.
- Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Evolium à payer à la société Tech Data France la somme de 276.571,85 € majorée des intérêts correspondant à 1,5 fois l'intérêt légal à compter du 1 er JUILLET 2013 au titre de sa réserve de propriété.
Débouter la société Tech Data France de son appel incident et de ses demandes formulées tant à l'encontre de la société Evolium que de la société Factofrance, anciennement dénommée GE Factofrance.
En conséquence, statuant à nouveau,
- Débouter toutes parties de toutes prétentions contraires ou plus amples, notamment la société Tech Data France de ses demandes formulées tant à l'encontre de la société Evolium que de la société Factofrance, anciennement dénommée GE Factofrance.
- Débouter la société Evolium de son appel incident portant sur l'indemnité de procédure mise à sa charge par les premiers Juges et celle demandée en cause d'appel à l'encontre de la société Factofrance, anciennement dénommée GE Factofrance.
- Condamner la société Evolium à payer à la société Factofrance, anciennement dénommée GE Factofrance, la somme de 478.862,89 €, outre intérêts au taux légal à compter de la date d'échéance de chaque facture et ce, jusqu'à parfait paiement.
- Vu l'
article 700 du code de procédure civile🏛, dire qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Factofrance, anciennement dénommée GE Factofrance, les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager afin de faire valoir ses droits en Justice. en conséquence, condamner toute partie succombante à payer à la société Factofrance, anciennement dénommée GE Factofrance, la somme de 10.000,00 €,
- outre tous dépens de première instance et d'appel, dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Eric Allerit, membre de la Selarl Taze-Bernard Allerit, Avocat au barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'
article 699 du code de procédure civile🏛.
Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats pour la sas Tech Data France le 17 novembre 2021, accompagnées de son dernier bordereau de communication de pièces en date du 16 juin 2022, par lesquelles elle demande à la cour de :
Vu les
articles 1139, 1146, 1153, 1166, 1382, 2367 à 2372 du Code civil🏛🏛🏛🏛🏛🏛🏛 (anciens),
Vu l'
article L441-6 du Code de commerce🏛,
Vu les conditions générales de vente de Aa Ab France (Best'Ware),
Vu la jurisprudence constante,
Vu les pièces produites au débat.
Dire la société Tech Data France recevable et fondée en ses demandes, fins et prétentions ;
En conséquence,
- Débouter Factofrance de son appel,
- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il reconnaît le principe de la créance recouvrable par Tech Data France, bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété et
- l'infirmer pour le surplus en ce compris sur le quantum ;
- Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
* Confirmé la recevabilité de l'intervention volontaire de la société Factofrance ;
* Condamné la société Evolium à payer à la société Tech Data France la somme de 276 571,85 euros à majorer des intérêts correspondant à 1,5 fois l'intérêt légal à compter du 1 er juillet 2013 au titre de sa réserve de propriété mais seulement en ce qu'il a limité ce montant à la somme de 276 571,85 euros ;
* Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires mais seulement en ce qu'il a débouté la société Tech Data France de sa demande tendant à voir la société Evolium condamnée à lui verser la somme de 35 723,65 euros correspondant à la clause pénale consacrée par l'
article 441-6 du code de commerce🏛.
Et statuant à nouveau,
- Déclarer irrecevable l'intervention volontaire de Factofrance pour défaut de qualité et d'intérêt à agir ;
- Condamner la société Evolium à payer à la société Tech Data France la somme de 427.254,84 Euros TTC, à majorer des intérêts correspondant à 1,5 fois l'intérêt légal à compter du 1er juillet 2013 ;
- Condamner la société Evolium à payer à la société Tech Data France la somme de 35.723,65 euros correspondant à la clause pénale contractuelle consacrée par l'
article L 441-6 du Code de commerce🏛 ;
- Condamner la société Evolium à payer à la société Tech Data France la somme de 10.000 euros au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛,
- Condamner la société Factofrance à payer à la société Tech Data France la somme de 10.000 euros au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 ;
- Condamner solidairement les sociétés Evolium, Factofrance et la Selarl [C] [X] à payer à la société Tech Data France à payer les entiers dépens.
Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 18 septembre 2020 pour la sas Evolium par lesquelles elle demande à la cour de :
sur l'appel principal de factofrance sur l'appel principal de factofrance :
- donner acte à la société evolium qu'elle ne conteste pas le principe de sa dette qu'elle n'a pu régler du fait du litige existant entre les sociétés tech data et factofrance ;
- si la cour estime que factofrance est seul créancier, fixer le montant dû par evolium 478.862,89 €, débouter factofrance de ses autres demandes,
- si la cour estime que tech data est seul créancier, fixer le montant dû par evolium 427.254,84 €ttc, débouter tech data de ses autres demandes. evolium 427.254,84 €ttc, débouter tech data de ses autres demandes.
- si, comme le tribunal, la cour juge que chacune des deux sociétés est créancière pour partie, fixer le montant dû à chacune par evolium en excluant toute pénalité à la charge d'evolium.
sur l'appel incident d'evolium sur l'appel incident d'evolium :
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné evolium à payer à factofrance et tech data une somme de 5.000 € au titre de l'article 700, et, statuant à nouveau condamner, selon la solution retenue dans le litige opposant factofrance et tech data, la société succombante, ou les deux sociétés in solidum à payer à evolium une somme de 10.000 € au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 24 juillet 2020 pour la selarl [C] [X] prise en la personne de Maitre [C] [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Overlap, et pour la selarl Bauland [S] Martinez prise en la personne de Maître [G] [S], ès qualités d'administrateur de la SAS OVERLAP par lesquelles elles demandent à la cour de :
vu l'arrêt rendu par la cour d'appel de versailles le 19 mai 2016 ;
vu l'absence de demandes formulées à l'encontre de la selarl [C] [X] prise en la personne de Maître [C] [X] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société overlap ;
vu l'absence de demandes formulées à l'encontre de la Selarl Bauland [S] Martinez prise en la personne de Maître [G] [S], ès qualité d'administrateur de la Sas Overlap et le fait qu'elle n'est désormais plus administrateur judiciaire de la société Overlap ;
- mettre hors de cause la Selarl Bauland [S] Martinez prise en la personne de Maître [G] [S], ès qualité d'administrateur de la sas overlap ;
- donner acte à la s.e.l.a.r.l. [C] [X], prise en la personne de Maître [C] [X], ès qualité de liquidateur de la société Overlap, de ce qu'il entend s'en rapporter à justi ce sur les mérites des demandes soutenues dans le cadre de la présente instance ;
- réserver les dépens.
Vu l'ordonnance de clôture du 16 décembre 2021 fixant l'audience de plaidoirie au 20 janvier 2022,
Vu l'arrêt du 11 mars 2022 de la présente chambre ordonnant la révocation de l'ordonnance de clôture du 16 décembre 2021 et la réouverture des débats et renvoyant l'affaire à l'audience de plaidoiries du 30 juin 2022, le magistrat chargé du rapport à l'audience du 20 janvier 2022 ayant relevé qu'il entrait dans la composition de la formation de la cour d'appel de Versailles qui avait rendu un arrêt le 26 février 2019, cette décision ayant fait l'objet d'une cassation le 9 décembre 2020,
Vu l'ordonnance de clôture du 30 juin 2022,
SUR CE, LA COUR,
1. Sur la demande de mise hors de cause la selarl Bauland [S] Martinez prise en la personne de Maître [G] [S], en qualité d'administrateur de la sas Overlap
Aux termes de l'
article 5 du code de procédure civile🏛, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.
En l'espèce, la procédure de redressement judiciaire ayant été convertie en liquidation judiciaire, l'administrateur de la sas Overlap n'est plus désigné. Par ailleurs, la cour relève qu'aucune demande n'est formée à son encontre.
En conséquence, il y a lieu de mettre hors de cause la selarl Bauland [S] Martinez prise en la personne de Maître [G] [S], en qualité d'administrateur de la sas Overlap.
2. Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de Factofrance
Aux termes de l'
article 31 du code de procédure civile🏛, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
L'irrecevabilité de l'intervention volontaire de Factofrance dans le cadre de la procédure d'acquiescement devant le juge commissaire, invoquée par les intimées, relève d'une procédure distincte, par laquelle la Cour de cassation a jugé par arrêt du 24 janvier 2018 que, dans le cadre d'une procédure collective strictement réglementée par l'
article L624-17 du code de commerce🏛, le juge commissaire ne pouvait être saisi que par le revendiquant, le débiteur ou le mandataire en justice, à l'exclusion de toute autre personne, que ce soit par la voie d'une intervention volontaire à l'instance ainsi ouverte ou d'une réclamation contre l'acte d'acquiescement.
L'action formée devant le tribunal de commerce de Paris dont jugement du 15 novembre 2019 ici déféré, consiste en une action distincte, en revendication du créancier, Aa Ab, bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété à l'égard du sous-acquéreur Evolium, Factofrance ayant intérêt à intervenir pour faire valoir ses droits de créancier subrogé dans les droits de la société Overlap à l'égard du même sous-acquéreur.
En effet, en application des dispositions de l'
article 2372 du code civil🏛, le droit de propriété du bien retenu à titre de garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur ; par ailleurs, aux termes de l'
article L624-18 du code de commerce🏛, la revendication qu'il permet du prix ou de la partie du prix des biens vendus avec réserve de propriété, qui n'a été ni payé ni réglé en valeur ni compensé entre le sous-acquéreur et le débiteur à la date du jugement ouvrant la procédure collective de ce dernier, ce qui est le cas en l'espèce, tend seulement à rendre opposable à cette procédure le report du droit de propriété du vendeur initial sur la créance du prix de revente.
Il s'ensuit que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision qui a statué sur la revendication du droit de propriété du bien retenu à titre de garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété ne prive pas l'affactureur, se disant subrogé dans les droits du débiteur au titre de la créance du prix de revente, de la possibilité de faire trancher le conflit qui l'oppose au vendeur bénéficiaire de la clause de réserve de propriété en vue d'obtenir le paiement de sa créance, la décision s'étant prononcée sur la revendication de celui-ci n'ayant pas eu pour objet de résoudre un tel conflit.
Partant, le jugement sera confirmé de ce chef.
3. Sur les demandes des parties
En vertu de l'
article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016🏛 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne. En l'espèce, la vente litigieuse a été conclue en avri
l 2013, de sorte qu'il est ainsi soumis au code civil🏛 tel qu'antérieur à cette réforme.
Aux termes de l'
article 1166 du code civil🏛 les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne.
En l'espèce il n'est pas contesté que Best'Ware devenue Aa Ab a vendu à Overlap des licences de logiciels pour un montant TTC de 450.169,41€ selon facture du 30 avril 2013, qu'Overlap a ensuite revendues à Evolium.
Il n'est pas contesté non plus qu'Overlap restait redevable de la somme de 427.254,84€ TTC pour une facture exigible au 30 juin 2013.
Best'Ware devenue Aa Ab a, dès le 6 juin 2013 soit avant l'ouverture de la procédure collective à l'endroit d'Overlap, mis en demeure Evolium de payer cette facture en visant la clause de réserve de propriété et en précisant qu'Overlap n'avait pas réglé les marchandises livrées.
Par courrier du 13 juin 2013 Factofrance a notifié à Evolium qu'Overlap lui avait cédé des factures pour un montant de 478.862,89 euros en adressant les trois quittances subrogatives concernées.
Evolium reconnaît dans ses conclusions qu'à la suite de ces courriers, elle n'a pas déféré à la mise en demeure de Best Ware, afin de ne pas avoir à payer deux fois les mêmes factures.
En application de l'
article 1250, 1° du code civil🏛🏛, la subrogation est conventionnelle lorsque le créancier recevant son paiement d'une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur dès lors que cette subrogation est expresse et faite en même temps que le paiement.
Factofrance produit en pièce n°1 trois quittances subrogatives par lesquelles Overlap a reçu de Factofrance paiement de l'intégralité de ses créances, le jour même de la quittance subrogative, comme il résulte d'ailleurs des relevés de compte de Factofrance (pièce 3 Factofrance) dont :
- une facture de 22.420,22 euros du 11 mars 2013,
- une facture de 9.621,62 euros du même jour,
- une facture de 985,90 euros du même jour,
- une facture de 3.645,61 euros du même jour,
- une facture de 464,851,95 euros du 29 juin 2013 à échéance du même jour,
- une facture de 4.389,32 euros du 29 mai 2013 à échéance au 28 juillet 2013.
Si Aa Ab se prévalant d'une clause de réserve de propriété sur les logiciels, a adressé à l'administrateur judiciaire d'Overlap une demande de revendication de logiciels, qui a été irrévocablement admise par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 19 mai 2016 dans le cadre de la procédure collective à l'endroit d'Overlap, cette admission ne prive pas Factofrance, affactureur subrogé dans les droits d'Overlap à l'égard du sous-acquéreur, de contester les droits invoqués par Aa Ab qui lui sont opposés.
Aux termes de l'
article L624-18 du code de commerce🏛, peut être revendiqué le prix ou la partie du prix des biens visés à l'article L. 624-16 qui n'a été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé entre le débiteur et l'acheteur à la date du jugement ouvrant la procédure. L'
article 2372 du code civil🏛 prescrit que le droit de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur.
Ainsi, en assignant Evolium en paiement des factures, Aa Ab a engagé une action personnelle des biens vendus avec clause de réserve de propriété à l'encontre du sous-acquéreur.
La demande de Factofrance fondée sur sa subrogation dans les créances d'Overlap à l'endroit du sous-acquéreur Evolium consiste également en une action personnelle. Cependant, l'affactureur, qui agit aux lieu et place du revendeur subrogeant, n'a pu recevoir la créance qu'avec ses précarités. La revendication de la clause de propriété prime donc pour la créance sur laquelle elle porte.
Or l'article 11 des conditions générales de vente de Best'Ware (CGV in extenso en pièce 3 Tech Data) stipule que « dans tous les cas, Best'Ware conserve la propriété des matériels et des supports de logiciels jusqu'au paiement complet du prix, des frais accessoires et des taxes. A défaut de paiement total d'une facture à la date échue par le client, Best-Ware est en droit, sans formalités préalables et indépendamment de toute action judiciaire, d'exiger du client, aux frais et de celui-ci et sans qu'il puisse s'y opposer, la restitution des produits dans les meilleurs délais. Le client est autorisé, sauf convention particulière, à revendre les produits avant d'en avoir réglé intégralement le prix à condition qu'il informe tout acquéreur de l'existence de la présente clause de réserve de Propriété grevant les produits concernés et du droit de Best Ware de revendiquer entre les mains de l'acquéreur soit les produits concernés, soit le prix de ceux-ci - à hauteur du prix dû à Best'Ware par le client - et ce quel que soit le détenteur des produits ».
La vente du droit d'utilisation des logiciels sous la forme d'une licence constituée d'un numéro unique appelé clé d'activation, constitue une vente dont l'objet entre dans les biens tels que visés à l'
article L624-16 du code de commerce🏛 ; dès lors, Tech Data est fondée à solliciter l'application de la clause de réserve de propriété pour cette cession de droit d'utilisation de ses logiciels, droit dont Evolium est sous-acquéreur.
Le transfert de la créance dans le patrimoine du vendeur initial bénéficiaire de la clause de réserve de propriété s'opère au moment de la revente et non au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective. De son côté, l'affactureur est titulaire de la créance au jour où son client lui remet, avec ses factures, une quittance subrogative, et où l'affactureur inscrit le montant des créances transmises au crédit du compte de ce client. Dès lors, le conflit entre le fournisseur et l'affactureur, le premier étant de fait le premier acquéreur de la créance du prix de revente, se résout au profit du fournisseur.
Il n'est pas contesté que le prix des licences s'établit à 276.571,85€.
S'agissant de la somme réclamée au-delà de ce montant définitivement admis dans le cadre de la liquidation comme correspondant à des biens figurant dans les stocks de la société Overlap au jour de l'ouverture de la procédure (pièce 8 Tech Data), il y a lieu de rappeler :
- que la réserve de propriété, qui porte sur un bien, ne peut porter sur des prestations de services comme des prestations de maintenance de sorte que le prix de ces prestations, intégré dans le montant total de la facture émise par Aa Ab pour un total de 107.136,96€, ne peut être revendiqué au titre de la réserve de propriété,
- que le vendeur bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété, lorsque les marchandises cédées ont été vendues à un sous-acquéreur, ne peut exercer sa revendication que sur le prix tel qu'il a été fixé lors de la convention avec l'acquéreur, de sorte que le prix revenant à Aa Ab ne peut inclure la marge bénéficiaire qu'Overlap avait fait supporter à Evolium à hauteur de 51.608,05€,
- il en est de même pour les 4 avoirs émis pour un montant de 75.831,02€,
de sorte que la somme qui doit être versée par Evolium à Aa Ab ne peut dépasser 276.571,85€ tel que l'a jugé le tribunal de commerce qui sera confirmé sur ce point.
S'agissant des intérêts correspondant à 1,5 fois l'intérêt au taux légal, il y a lieu de débouter Aa Ab de ce chef, l'effet relatif des contrats ne permettant pas d'opposer cette clause à Evolium. Le jugement sera donc infirmé sur ce point, les intérêts étant dus au seul taux légal à compter de la mise en demeure du 6 juin 2013.
Evolium reconnaissant devoir 478.862,89€ à Factofrance si cette dernière est son unique créancier s'agissant de ces ventes, la somme revenant à Factofrance après paiement de Aa Ab au titre de sa priorité relative à la clause de réserve de propriété s'élève à :
478.862,89 - 276.571,85 = 202.291,04€, aucun aveu judiciaire de Factofrance sur une créance réduite ne pouvant être constaté dans ses conclusions. Le jugement du tribunal sera ainsi confirmé de ce chef également.
S'agissant enfin de la demande de Tech Data au titre de la clause pénale contractuelle, il y a lieu de relever que l'effet relatif des contrats ne permet pas plus d'opposer cette clause à Evolium. Cette demande sera donc rejetée et le jugement confirmé de ce chef.
4.Sur les dépens et les frais irrépétibles
Si le jugement est confirmé en toutes ses dispositions, il y a lieu de relever qu'au regard du conflit entre les créanciers, c'est à bon droit qu'Evolium a attendu que le litige soit tranché pour désintéresser ceux-ci. Partant, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné Evolium à payer à Aa Ab et Factofrance la somme de 5.000€ chacune et l'a condamnée aux dépens.
Statuant de ces chefs en première instance et en cause d'appel, il y a lieu, eu égard à ce qui précède, de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens, et de les débouter de leurs demandes au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛.
PAR CES MOTIFS
Met hors de cause la selarl Bauland [S] Martinez prise en la personne de Maître [G] [S], en qualité d'administrateur de la sas Overlap,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :
- condamné Evolium à payer à Aa Ab sur la somme due les intérêts correspondant à 1,5 fois le taux légal à compter du 1er juillet 2013,
- condamné Evolium à payer à Aa Ab et Factofrance la somme de 5.000€ chacune et l'a condamnée aux dépens,
Statuant à nouveau de ce chef :
- condamne Evolium aux intérêts au seul taux légal à compter de la mise en demeure du 6 juin 2013 sur la somme due à Tech Data,
- laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens en première instance,
- déboute les parties de leurs demandes au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 en première instance,
Y ajoutant,
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens en appel,
Déboute les parties de leurs demandes en appel au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛,
LE GREFFIER LA MAGISTRATE FAISANT FONCTION DE PRESIDENTE