Jurisprudence : CA Montpellier, 10-07-2013, n° 12/01499, Infirmation

CA Montpellier, 10-07-2013, n° 12/01499, Infirmation

A8198KIH

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CA Montpellier, 10-07-2013, n° 12/01499, Infirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8897509-ca-montpellier-10072013-n-1201499-infirmation
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Abstract

Ne peuvent être opposés à un salarié pour justifier son insuffisance professionnelle les chiffres réalisés par son successeur comme étant meilleurs que les siens en quelques mois seulement, dans la mesure où ils contiennent des clients où le salarié était initialement intervenu.



SD/GB
4° chambre sociale
ARRÊT DU 10 JUILLET 2013 Numéro d'inscription au répertoire général 12/01499 ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour Jugement du 20 FÉVRIER 2012 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER
N° RG11/00159

APPELANTE
SAS LAQUET TENNIS
représentée par son dirigeant légal

LAPEYROUSE MORNAY
Représentant Me AULIARD de la SELARL VANDEVELDE (avocats au barreau de LYON)
INTIMÉ
Monsieur Stéphane Y

SAINT GELY DU FESC
Représentant Me Frédéric RICHERT (avocat au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 AVRIL 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Gisèle BRESDIN, Conseillère, chargé(e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre
Madame Gisèle BRESDIN, Conseillère
Mme Françoise CARRACHA, Conseillère
Greffier, lors des débats Mademoiselle Sylvie DAHURON
ARRÊT
- Contradictoire.
- prononcé publiquement initialement prévu le 19 juin 2013 et prorogé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure civile ;
- signé par Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre, et par Madame Dominique VALLIER FF. greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Stéphane Y a été engagé par la société Laquet à compter du 3 janvier 2006 en qualité de technico commercial pour le secteur du tennis pour les régions PACA et Méditerranée.
Son contrat a été transféré le 1er avril 2010 à la société Laquet Tennis créée le 13 janvier 2010 et soumise à la convention collective des entreprises du paysage. M. ... a exercé son activité dans le sud de la France sous l'autorité de M. Vieux .... L'avenant a intégré un objectif de chiffre d'affaires fixé à 1 million d'euros ainsi qu'un objectif de marge de 250.000 euros.
M. Y a perçu des primes exceptionnelles tous les ans de 2006 à 2009 d'un montant variant d'une année sur l'autre.
Après une première réunion du 15 décembre 2009, M. Y a été convoqué par M. Vieux ... dirigeant l'entreprise le 10 janvier 2011 pour convenir d'une rupture conventionnelle. Au terme du délai imparti, M. Y a refusé de signer la rupture conventionnelle qu'il estime contraire à ses intérêts.
Par courrier recommandé avec avis de réception du 21 janvier 2011, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 3 février 2011.
Le 28 janvier 2011, il a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, et en paiement de dommages-intérêts et des indemnités de licenciement et de préavis.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 8 février 2011, il a été licencié pour insuffisance professionnelle en ces termes
" Nous faisons suite à notre entretien du 3 février 2011, au cours duquel nous vous avons exposé les motifs du licenciement envisagé, et recueilli vos explications.
Devant les résultats catastrophiques générés par votre activité, nous nous sommes entretenus le 15/12/2010 pour tenter de trouver une solution préservant les intérêts de chacun.
De fait, cela fait désormais deux ans que nous nous entretenons régulièrement sur le manque de chiffre d'affaires que vous générez.
Vous avez reconnu la faiblesse de vos résultats et sollicité un licenciement pour motif économique.
Votre épouse travaillant à Pôle Emploi, vous souhaitiez, sur ses conseils, bénéficier de la CAP avec maintien de votre salaire net pendant un an.
Nous n'avons pas accédé à votre demande dans la mesure où nous ne nous trouvons pas dans une situation économique justifiant un tel licenciement.
Nous avons alors abordé le sujet de la rupture conventionnelle et nous avons rédigé les documents adéquats que nous vous avons laissés en toute confiance.
Vous avez alors tenté de négocier le montant de l'indemnité de rupture mais devant vos demandes outrancières, nous n'avons pas opté pour cette solution.
nous trouvons ainsi contraints de poursuivre la rupture de nos relations contractuelles envisagée pour motif d'insuffisance de résultats qui procède d'une insuffisance professionnelle, et c'est la raison pour laquelle nous vous avons adressé une convocation le 21 janvier 2011.
Nous sommes donc au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse, motivé par les faits ci-après.
Début 2010, une réunion avait été organisée en présence de Denis ... afin de vous sensibiliser à l'insuffisance de vos résultats et rechercher les moyens d'améliorer votre productivité.
Nous avons mis à votre disposition un bureau dans les locaux de Sport Environnement, notre agence de Montpellier, mais vous ne l'avez jamais occupé.
De la même manière, vous n'avez pas sollicité le représentant de notre fournisseur Monde, qui aurait pourtant pu vous apporter de nombreux contacts commerciaux.
Toujours début 2010, nous vous avons conseillé de bénéficier de la prospection téléphonique réalisée sur les autres secteurs, et vous l'avez refusée en prétextant que vous aviez déjà une activité suffisante.
Cette situation prolongée est d'autant moins excusable que chaque mois, vous êtes informé, par mail, de votre chiffre d'affaires et de l'écart par rapport à l'objectif fixé en début d'année. Régulièrement, nous vous avons rappelé que l'objectif annuel pour ce secteur était d'un million d'suros, ce que vous aviez alors expressément accepté en signant l'avenant à votre contrat de travail le 1er avril 2010.
Vous n'avez jamais prétendu ni objecté que cet objectif serait excessivement élevé. Or, il se trouve que vos performances sont les plus faibles de l'entreprise.
Sur un objectif contractuel de 1.000.000 euros de chiffre d'affaires HT pour 2010, vous n'avez atteint au 31 décembre 2010 qu'une somme de 599.864 euros HT ;
Sur un objectif contractuel de marge brute de 250.000 euros pour 2010, vous n'avez atteint que 118.411 euros .
Nous avons été stupéfaits de constater que, lors de mois de mai, juin, juillet, et août 2010, votre activité a été pratiquement nulle, alors qu'il s'agit justement de mois où l'activité est habituellement élevée.
Ce très faible niveau d'activité a même entraîné le départ de votre sous-traitant béton, qui, faute de commandes, a rejoint la concurrence.
Divers dossiers illustrent votre déficit chronique d'activité et votre manque de professionnalisme.
Ainsi, sur l'affaire Montagnac, Monsieur Jean Vieux ... a dû se déplacer un samedi afin de voir le site, et de répondre sur ce dossier à la dernière minute.
Quant au dossier Vic La ..., vous aviez demandé à celui-ci de vous aider à réaliser un relevé topographique et à chiffrer des travaux d'assainissement.
Monsieur Jean Vieux ... a dû réaliser lui-même la totalité de l'implantation et le chiffrage.
Par ailleurs, lors de notre entrevue du1 5 décembre 2010, vous avez demandé à Monsieur Jean Vieux ... de faire les bons de commande pour l'équipe Dogan pour le chantier Coudoux, alors que le chantier était terminé. Ceci aurait dû être fait en début de chantier.
Vous avez prétendu que, depuis le 15 décembre 2010, le contact aurait été rompu avec le siège.
Or, ceci est faux, à telle enseigne que vous recevez les mails des clients, que vous transmettez systématiquement.
Vous ne traitez plus ces demandes depuis cette date.
Par ailleurs, depuis début 2011, vous n'avez assisté à aucune réunion commerciale hebdomadaire, qui ont pourtant toujours lieu au siège le mardi matin, ce que vous ne sauriez prétendre ignorer.
Par courrier du 21 janvier 2011, vous prétendiez que l'entreprise ne vous laissait plus effectuer votre travail normalement, mais le fait est que cela fait de trop longs mois déjà que vous n'exécutez pas normalement votre travail.
L'ensemble de ces motifs constitue la cause réelle et sérieuse de votre licenciement.
Votre préavis d'une durée de trois mois commencera à courir à compter de la première présentation du présent courrier' ".
Par courrier du 17 février 2011, M. Y a contesté les griefs formulés à son encontre en ces termes
" J'accuse réception, non sans surprise, de la lettre de licenciement du 8 février 2011, qui est un tissu de contre-vérités que je ne peux laisser sans réponse.
En premier lieu, vous évoquez pour la toute première fois des résultats prétendument catastrophiques générés par mon activité.
C'est faux et d'ailleurs vous ne m'auriez pas accordé de primes depuis mon arrivée dans l'entreprise si cela avait été le cas.
En second lieu je n'ai pas reconnu la faiblesse de mes résultats ni sollicité un licenciement pour motif économique, et je ne vois pas pourquoi vous parlez de ma femme qui travaille à POLE EMPLOI, sauf à ce que vous tentiez de justifier votre version fictive des faits.
C'est vous qui m'avez annoncé le 15/12/10 que vous vouliez mettre un terme à notre collaboration. J'ai été totalement surpris et bouleversé par une décision que rien ne laissait présager, aucune remarque concernant mes résultats ne m'avait été faite. A l'évocation des chiffres lors de cette réunion vous m'avez demandé d'en faire abstraction et de reconnaître que " je n'avais plus de niaque, je n'avais plus envie, qu'aujourd'hui pour faire ce métier il fallait être un chien " et que vous sentiez que je ne possédais plus ces soient-disantes qualités.
C'est dans ce cadre que vous avez tenté de m'imposer une rupture conventionnelle de mon contrat de travail.
En troisième lieu, je réfute catégoriquement toute insuffisance professionnelle
Mise à disposition d'un bureau dans les locaux de Sport Environnement Jamais personne ne m'a proposé de façon formelle de m'installer dans ce bureau. J'ai donc priorisé l'action sur le terrain plutôt que perdre du temps et de l'énergie à un déménagement.
Sollicitation du représentant de notre fournisseur Monde Je l'ai très souvent sollicité mais il ne s'est jamais rendu disponible ce représentant n'est pas intéressé par le secteur tennis, pour deux raisons d'une par la gamme spécifique tennis de chez Monde est inexistante (seul un ou deux produis peuvent s'adapter) et d'autre part, il ne s'investit pas dans cette activité tennis beaucoup moins rémunératrice pour lui que ses activités habituelles bâtiments, pistes, gymnases et terrains de grand jeu.
Par ailleurs, le changement de fournisseur (passage de Tarkett à Monde) que vous avez décidé en 2008 a bouleversé nos actions commerciales. Alors que les secteurs " gazon synthétique " et " terre battue synthétique " explosaient sur le marché, nous ne disposions plus de produits appropriés. En effet, Tarkett disposait d'une gamme tennis complète et reconnue au niveau national (gamme homologuée et certifiée). Et Tarkett s'investissait dans le secteur tennis au travers de ses représentants et de ses entreprises partenaires.
Prospection téléphonique J'ai toujours utilisé la prospection téléphonique, début 2010 également, je tiens d'ailleurs à votre disposition la liste des contacts, devis et affaires traitées. Pour rappel je suis à l'origine de cette action commerciale dans l'entreprise, comme je suis à l'origine également et concepteur de l'ensemble des documents de communication (plaquette, site internet, publicité dans magazines spécialisés..) éléments inexistants à mon entrée dans l'entreprise.
Signature du contrat, avenant et objectif Début 2010, vous avez créé une entité indépendante. Laquet tennis, avec refonte des statuts et modification de mon contrat de travail. D'ailleurs, les coûts de constitution de cette entreprise ont été imputés en partie sur les résultats de mon secteur ce qui les pénalise d'autant. J'ai donc du signer en avril 2010, ce nouveau contrat, ses avenants et également une délégation de pouvoir total. Déléguer la totalité des pouvoirs à un salarié à qui soi disant on ne fait plus confiance ou qui n'exécute pas son travail normalement depuis longtemps, me semble incohérent et insensé.
A cette date, je vous ai alerté de la difficulté à atteindre l'objectif compte tenu de différents facteurs crise économique, produits Monde non concurrentiels techniquement et économiquement, équipes de poseurs non formées donc incompétentes. Aucune initiative de votre part n'a été engagée pour trouver des solutions.
Performances les plus faibles de l'entreprise Concernant les objectifs (CA et/ou marge), depuis 2006, ils ne sont atteints sur aucun des secteurs géographiques de l'entreprise. Mes résultats ne sont pas, comme vous l'écrivez, les plus faibles d'après les tableaux de résultats que vous m'avez transmis. En ce qui me concerne j'ai, chaque année, reçu des primes liées à mon activité et à mes résultats, ce qui n'est pas le cas de tous les responsables de secteur.
Faible activité en mai, juin, juillet et août 2010 En ce qui concerne cette période, vous n'avez rien formalisé sur cette situation que vous jugez aujourd'hui stupéfiante, par contre de mon côté je vous ai alerté et vous vous étiez engagé à vous rendre disponible pour étudier la situation et envisager avec moi des solutions. J'attends encore' En l'absence de réaction de votre part, j'ai pris la décision d'orienter mon action commerciale de façon à l'optimiser. N'ayant pas de produits performants économiquement et techniquement (Monde) à proposer à nos principaux clients, les collectivités territoriales, et de plus celles-ci ayant du faire face à des restrictions budgétaires, à partir du mois d'août j'ai ciblé une clientèle de privés. Cette prospection très importante s'est étalée sur plusieurs mois, je n'ai posé d'ailleurs qu'une seule semaine de congés pour l'été 2010. Mon investissement sans relâche m'a permis d'atteindre l'équilibre de mes résultats en 2010.
Affaires Vic La ... et Montagnac Comme habituellement dans notre entreprise, il est d'usage de travailler ensemble sur quelques affaires afin de se concerter pour imaginer les meilleurs solutions. Il est de coutume aussi de remplacer certains collègues dans leurs tâches s'ils sont empêchés ou en congés. C'est le cas pour l'affaire de Montagnac, traitée effectivement par vous pendant mes congés. Si vous vous êtes déplacé un samedi et que vous avez répond à la dernière minute, c'est un problème lié à votre organisation personnel car le dossier était au siège de Laquet et mes dates de congés connues.
Pour ma part, j'ai remplacé des collègues sur des affaires comme Auzat, Meyreuil, Le Val, Le Tignet et bien d'autres encore.
Bon de commandes affaires Coudoux Avant l'entretien du 15/12/2010, j'ai traité normalement cette affaire, j'ai réalisé l'ensemble des bons de commandes. Par contre le 15/12/2010, vous m'avez signalé que vous feriez vous-même le bon de commande pour l'équipe Dogan.
Réception de mails des clients Après que vous m'ayez indiqué vouloir mettre un terme à notre collaboration le 15/12/2010 et après m'avoir précisé que je serai pointé en congés jusqu'au 04/01/11 (sans que d'ailleurs j'en ai formulé la demande ou signé quoi que ce soit), je n'ai reçu de la part du siège, ni appel d'offre, ni fax, ni mail, ni contacts clients, ni de proposition de mise en place de téléprospection comme chaque année. J'ai pensé pertinent par contre, de vous envoyer les sollicitations des clients à partir du 04/01/11 afin que vous puissiez les exploiter vous-mêmes, puisque vous ne souhaitiez pas que je poursuivre mes activités. De fait je ne me suis pas rendu aux réunions commerciales du mardi, nÿ étant d'ailleurs plus convoqué.
Le contact était rompu puisque la communication ne se faisait plus qu'à mon initiative.
Préavis Compte tenu des éléments ci-dessus, il me sera difficile de travailler normalement, mais je continuerai à le faire avec les seuls moyens dont je dispose à ce jour. En effet, je ne reçois plus de votre part les appels d'offres, les contacts clients, je n'ai pas non plus la liste des salariés ou sous- traitants mis à ma disposition pour réaliser les chantiers. Par conséquent je ne pourrais que répondre aux clients qui me contacteront directement, je me déplacerai et je leur ferai des propositions (devis) que je vous transmettrai immédiatement. Compte tenu de cette situation qui vous est imputable, je serai évidemment favorable à un terme plus rapide du préavis, lequel devra être rémunéré comme le prévoit la loi.
Pour conclure je déplore qu'après avoir constaté l'échec de la rupture conventionnelle que vous souhaitiez mettre en oeuvre en l'absence de toute faute de ma part, vous ayez finalement décidé de vous séparer de moi de façon brutale en inventant soudainement des griefs aussi mensongers qu'inconsistants.
Ceci d'autant plus que mon travail a donné toute satisfaction pendant près de 4 années' "

Par le jugement du 20 février 2012, la section encadrement du conseil de prud'hommes de Montpellier a
Prononcé la résiliation du contrat de travail et dit que la rupture emporte les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Dit que le salaire moyen annuel est de 3.801,58 euros ;
Condamné la SAS Laquet Tennis à payer à M. Stéphane Y les sommes suivantes
· 234,18 euros bruts au titre de l'indemnité de licenciement,
· 2.875 euros bruts au titre de la prime sur objectifs
· 34.000 euros à titre de dommages-intérêts
· 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Condamné la société Laquet Tennis aux dépens.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 février 2012, la SAS Laquet Tennis a régulièrement interjeté appel à l'encontre de cette décision.
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que
· Les soit-disants manquements graves de l'employeur retenus pour accueillir la demande de résiliation judiciaire ne sont pas établis les congés n'ont pas été imposés, traditionnellement tout le personnel de chantier à l'exception des dirigeants est en congés payés entre Noël et le jour de l'an ; il n'y a pas eu de harcèlement téléphonique de la part de M. ..., ainsi que cela ressort des relevés versés aux débats où il n'y a aucun appel en décembre et 6 pour tout le mois de janvier 2011 ; il n'y a pas eu de mise à l'écart du salarié qui en réalité ne voulait plus travailler à compter du 15 décembre 2010 puisqu'il transmettait les dossiers au siège ; enfin la prime de fin d'année n'est pas une gratification, elle ne réunit pas les critères de l'usage constant, fixe et général, il s'agit d'une libéralité qui n'était prévue ni par son contrat de travail ni par la convention collective, que l'employeur n'était pas tenu de lui verser au 31 décembre 2010.
· le licenciement est fondé sur l'insuffisance de résultat due à une insuffisance professionnelle du salarié M. Y a enregistré de très mauvais résultats, les plus mauvais de l'entreprise au 31 décembre 2010, par comparaison à ses objectifs contractuels et à ceux réalisés par l'équipe, ainsi qu'à ceux de son successeur.
· Les éléments dont il fait état pour tenter de les justifier sont inopérants (changement de fournisseur, défaut d'information sur le fait que ses résultats étaient mauvais, objectifs inatteignables) car cette situation est due à son manque de professionnalisme malgré les moyens humains et matériels mis à sa disposition (non utilisation du réseau professionnel, déficit chronique d'activité et manque de professionnalisme).
Elle conclut en demandant à la cour de juger infondée la demande de résiliation judiciaire de M. Y, de juger que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence de débouter le salarié de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Stéphane Y conclut en demandant à la cour de confirmer sur le principe les condamnations prononcées à l'encontre de la société Laquet Tennis, d'infirmer sur le montant de certaines sommes le jugement déféré,
1. Sur l'exécution du contrat de travail,
Confirmer sur le salaire moyen de M. Y de 3.801,96 euros,
Confirmer sur la condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 2.975 euros au titre de la prime pour l'année 2010,
II. Sur la rupture du contrat de travail,
A titre principal, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, et à titre subsidiaire, dire que le licenciement pour insuffisance professionnelle notifié le 8 février 2011 est sans cause réelle et sérieuse,
En toutes hypothèses, condamner la société Laquet Tennis à lui payer
· 45.623,52 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif;
· 234,18 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;
· 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Il soutient pour l'essentiel que
· les griefs qui lui sont reprochés pour la toute première fois dans la lettre de licenciement sont mensongers ou inconsistants,
· il a subi un préjudice important du fait qu'il n'a pas retrouvé du travail, en raison de son âge de 44 ans en 2011, de son ancienneté de 5 ans et 4 mois et de sa situation de famille avec deux enfants à charge, l'un mineur et l'autre majeur et étudiant.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives, la cour se réfère au jugement du conseil des prud'hommes et aux conclusions auxquelles les parties se sont rapportées lors des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de résiliation judiciaire
Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, il appartient au juge de vérifier si les faits invoqués par le salarié à l'appui de sa demande sont établis et, dans l'affirmative, si ces manquements présentent une gravité suffisante pour en justifier la résiliation aux torts de l'employeur.
La résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée à l'initiative du salarié et aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En l'espèce, le salarié invoque plusieurs manquements de l'employeur au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail une mise en congés d'office du 20 au 31 décembre 2010, des pressions exercées sur lui par téléphone pour le faire signer une rupture conventionnelle qui était à son désavantage, une privation de la possibilité d'exécuter son travail et le non paiement de la prime de la fin d'année 2010.
Cependant compte tenu des usages dans l'entreprise, faisant apparaître que le personnel de chantier prenait habituellement des congés entre Noêl et le jour de l'an, les congés que M. Y ne conteste pas avoir pris pendant cette période ne peuvent pas être retenus comme étant constitutifs d'un manquement de l'employeur.
De même, si des appels téléphoniques ont bien été adressés à M. Y par M. ..., six sur une période de quinze jours en janvier 2011, cela n'apparaît pas excessif au regard de l'activité accomplie à son domicile par ce salarié, pas plus que cela n'établit qu'ils avaient pour objet de faire pression sur lui pour le contraindre à signer la rupture conventionnelle qui avait été envisagée entre les parties.
Quant à l'absence de fourniture de travail, là encore les éléments au dossier ne permettent pas d'établir un manquement de l'employeur à cet égard, compte tenu de ce que le salarié a renvoyé à compter de janvier 2011 plusieurs messages de clients au siège de l'entreprise pour suite à donner.
Enfin en ce qui concerne la prime qui n'a pas été versée à la fin de l'année 2010, il y a lieu de constater qu'elle ne présentait pas les caractères de constance, de fixité et de généralité nécessaire pour qu'elle constitue un élément normal et permanent de salaire, étant observé qu'elle n'était pas prévue dans le contrat de travail ou par la convention collective applicable dans l'entreprise pour M. Y, comme pour les autres membres de l'équipe commerciale, elle a varié d'une année sur l'autre, certaines personnes ne l'ayant d'ailleurs perçue certaines années entre 2006 et 2009 à la différence de M. Y qui en a reçu une mais d'un montant toujours différent chaque année.
Ainsi, cette prime qualifiée de 'prime de fin d'année'sur les bulletins de paie, constitue une libéralité que l'employeur n'était pas contraint de verser, d'autant que les résultats de l'entreprise avaient baissé en 2010 par comparaison à ceux de l'année 2009, et qu'elle n'a d'ailleurs pas été versée à tous cette année-là.
En conséquence, M. Y n'est pas fondé à réclamer le paiement de cette prime.
L'ensemble des manquements invoqués par le salarié à l'encontre de l'employeur n'étant pas matériellement établis, ou en tout cas pas suffisamment graves pour prononcer la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, le jugement est infirmé et M. Y est débouté de sa demande de résiliation judiciaire.
Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de résiliation judiciaire de M. Y.
Sur le licenciement pour insuffisance professionnelle
L'insuffisance de résultats ne constitue pas en elle-même une cause réelle et sérieuse de licenciement et il incombe à celui qui s'en prévaut d'établir qu'elle a pour origine soit une faute disciplinaire, soit une insuffisance professionnelle.
L'insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments concrets et non sur une appréciation purement subjective de l'employeur.
En l'espèce, dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, l'employeur reproche au salarié son insuffisance de résultats consécutive à son insuffisance professionnelle.
Cependant, il résulte de l'ensemble des éléments d'appréciation qui sont au dossier que les résultats de Mathieu en chiffre d'affaires et en marge n'étaient pas les plus faibles en 2010, comme pour les années précédentes ; qu'une baisse générale de résultat a été enregistrée par l'entreprise cette année-là; qu'en outre, depuis son arrivée dans l'entreprise en 2006, le secteur de ce salarié, comme celui des autres salariés, ne parvenait pas à atteindre les objectifs annoncés, sans pour autant que les salariés responsables des dits secteurs ne soient pénalisés, puisque M. Y a perçu chaque année de 2006 à 2009 une prime de fin d'année d'un montant respectivement de 1.000 euros, 3.000 euros, 5.000euros et 2.500 euros, d'autres commerciaux ne l'ayant quant à eux pas touchée certaines années.
Il convient d'ajouter que les chiffres réalisés par le successeur de M. Y ne peuvent pas lui être opposés, comme étant meilleurs que les siens en quelques mois seulement, dans la mesure où ils contiennent des clients où soit M. Y soit M. ... sont initialement intervenus.
Ensuite et surtout, l'employeur n'établit pas que le salarié aurait fait preuve d'insuffisance professionnelle les reproches évoqués pour établir celle-ci ne sont pas étayés par les pièces versées au débat qu'il s'agisse des moyens mis à sa disposition qu'il n'aurait pas utilisés comme le bureau qui ne lui a pas été formellement proposé et sans lequel le salarié a pu travailler, à son domicile avec l'accord de l'employeur et la plus grande satisfaction de ce dernier puisque pendant plusieurs années en parvenant à atteindre de bons résultats récompensés plusieurs années, il a perçu des primes de fin d'année ; qu'il s'agisse encore de la prospection téléphonique dont il n'est pas démontré que le salarié ne l'aurait pas utilisée, alors même qu'il indique, sans être démenti sur ce point par l'employeur, que c'est lui qui l'a mise en place à son arrivée dans l'entreprise en 2006.
S'agissant de l'utilisation du réseau Mondo, les objections du salarié sur l'absence de spécialisation pour les tennis de ce fournisseur, sont confirmées par le document de présentation de cette entreprise produit par l'employeur, où il apparaît que sa réputation s'est faite pour ses performances en matière de terrains d'athlétisme ou de grandes surfaces de sports, mais pas pour des courts de tennis .
Quant aux reproches sur des affaires ponctuelles, M. Y s'en est expliqué dans sa lettre de protestation du 17 février 2011, il n'y a pas là matière suffisante pour retenir une insuffisance professionnelle.
L'ensemble des éléments au dossier met en évidence que M. Y n'a jamais reçu de remarques ou rappels à ses obligations professionnelles pendant les quatre années d'exécution de son contrat de travail et qu'au contraire, son activité a été récompensé par l'octroi de primes en fin d'année.
En conséquence, il y a lieu de dire que le licenciement de M. Y est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Compte tenu de son âge, de son ancienneté et de sa rémunération, ainsi que des circonstances de la rupture, il convient de réformer le jugement déféré pour porter à la somme nette de 40.000 euros les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnité de licenciement
Comme conséquence de l'infirmation du jugement déféré ayant fait droit à la demande de rappel sur la prime de fin d'année 2010, il n'y a pas lieu de rectifier le calcul et le montant de l'indemnité de licenciement versée par l'employeur, laquelle a rempli M. Y de l'intégralité de ses droits.
Le jugement est en conséquence infirmé en ce qu'il a alloué à M. Y une somme complémentaire de 234,18 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement rendu entre les parties le 20 février 2012 par la section encadrement du conseil de prud'hommes de Montpellier ;
Et statuant à nouveau
Déboute M . Stéphane Y de sa demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur ;
Dit le licenciement de M. Stéphane Y dénué de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la SAS Laquet Tennis à payer à M. Stéphane Y la somme nette de 40.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Déboute les parties de tout autre demande ;
Condamne la SAS Laquet Tennis à payer à M. Stéphane Y la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et l'appel ;
Condamne la SAS Laquet Tennis aux entiers dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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