Jurisprudence : CA Saint-Denis de la Réunion, 18-06-2013, n° 13/248, Confirmation partielle

CA Saint-Denis de la Réunion, 18-06-2013, n° 13/248, Confirmation partielle

A3818KIA

Référence

CA Saint-Denis de la Réunion, 18-06-2013, n° 13/248, Confirmation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8889861-ca-saintdenis-de-la-reunion-18062013-n-13248-confirmation-partielle
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AFFAIRE N° RG 11/01948 Code Aff.
ARRÊT N ° 13/248
ORIGINE
JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-DENIS en date du 30 Août 2011, rg n° F09/01040
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT DU 18 JUIN 2013

APPELANTE
ASSOCIATION DE FORMATION PROFESSIONNELLE POUR ADUL TES DE LA RÉUNION (AFPAR), prise en la personne de son représentant légal

SAINT-DENIS
Représentant Me Agnès GAILLARD (avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION)
INTIMÉ
Monsieur Jean Claude Y

LE TAMPON
Représentant Me Arielle MOREAU (avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION)

DÉBATS En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Avril 2013 en audience publique, devant Christian FABRE, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, assisté de Martine LARRIEU, greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 28 MAI 2013, mise à disposition prorogée au 18 JUIN 2013.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Président Hervé PROTIN
Conseiller Christian FABRE
Conseiller Catherine PAROLA
Qui en ont délibéré
ARRÊT mis à disposition des parties le 18 JUIN 2013
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LA COUR

L'AFPAR (Association de Formation Professionnelle pour Adultes de la Réunion) a interjeté appel d'un jugement rendu le 30 août 2011 par le conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion dans une affaire l'opposant à Monsieur Jean Claude Y Y.
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L'AFPAR a embauché Monsieur ... ... en qualité de formateur en menuiserie pour une durée indéterminée à compter du 22 octobre 1982. Il a travaillé sur le site de Saint-Paul à compter d'août 1984. Dès avril 2003, il a sollicité sa mutation sur le site de Saint-Pierre. En mai 2006, l'AFPAR a lancé un recrutement pour un poste de formateur en menuiserie d'agencement et/ou poseur de menuiserie et aménagement intérieur localisé à Saint-Pierre. Monsieur ... ... a postulé sur ce poste comme Monsieur ..., prestataire de service en matière de formation jusqu'en novembre 2006 puis salarié sous contrat à durée déterminée sur le site de Saint-Pierre (CDD du 1er décembre 2006 au 30 juin 2007). Les deux candidatures ont été retenues et les salariés ont subi en métropole des évaluations techniques à l'issue desquelles ils ont reçu un avis favorable. Par un courrier du 11 octobre 2006, Monsieur ... ... s'est vu notifier un avis favorable à sa mutation sur Saint-Pierre avec la réserve qu'elle ne sera effective 'qu'au moment où le pôle bois de Saint-Pierre sera totalement opérationnel, après donc la fin des travaux dus à la réhabilitation'. Monsieur ... a été recruté en contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2007 comme formateur du Pôle bois de Saint-Pierre.
Invoquant un recrutement de Monsieur ... en violation des dispositions conventionnelles, Monsieur ... ... a saisi la juridiction prud'homale en indemnisation par une requête déposée le 15 décembre 2009. Le jugement déféré a retenu une violation de l'article 44 de l'accord d'entreprise et a condamné l'AFPAR au paiement de la somme de 15.000 euros en réparation du préjudice moral et celle de 1.000 euros pour les frais irrépétibles.
Monsieur ... ... a été licencié pour inaptitude par un courrier recommandé du 24 mars 2011 faisant suite aux avis du médecin du travail des 07 et 24 janvier 2011. La décision des premiers juges était alors en délibéré.
Les parties ont déposé leurs conclusions
· les 20 mars 2012 et 16 avril 2013 par l'AFPAR,
· le 24 avril 2013 par Monsieur ... ...,
auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits et des moyens. Elles ont été entendues en leurs observations orales.
Monsieur ... ... a été autorisé à déposer une note en délibéré en réponse aux dernières conclusions de l'appelante déposées à l'audience des plaidoiries du 16 avril 2013. Il a déposé cette note le 27 mai suivant. Celle-ci est acquise aux débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l'article 44 de l'accord d'entreprise du 1er février 2000, 'la promotion interne est favorisée pour l'ensemble des catégories de personnel...à compétence égale requise pour tenir l'emploi, la
promotion interne est prioritaire par rapport au recrutement externe'.
Monsieur ... ... considère que le recrutement de Monsieur ... a été réalisé en violation de ces dispositions. Mais Monsieur ... était salarié sous contrat à durée déterminée du 1er décembre 2006 au 30 juin 2007. Son recrutement par un contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2007, doit alors être considéré comme un recrutement interne. La violation de l'article 44 précité n'est donc pas avérée. Le jugement est infirmé de ce chef.
L'AFPAR explique que le recrutement de Monsieur ... ne s'inscrit pas dans celui initié en 2006 et qui portait sur des emplois de formateur de poseur de menuiserie et aménagement intérieur et en menuiserie d'agencement. Elle précise que celui-ci a été recruté sur un poste de formateur en matière de meubles créoles d'escaliéteur, formations qu'il assurait dans le cadre de son contrat à durée déterminée.
L'évaluation des compétences de Messieurs ... ... et ... réalisée en métropole dans le cadre du recrutement lancée en 2006 ne peut alors être invoquée pour justifier l'embauche de 2007.
Il est acquis qu'aucune procédure de recrutement, interne ou externe, n'a été diligentée par l'AFPAR quant au poste attribué à Monsieur .... Or en application des dispositions conventionnelles, la procédure de recrutement était nécessaire, ce que ne conteste pas l'AFPAR qui invoque avoir fait un choix 'légitime' entre les deux candidats issus de la sélection faite en 2006 sur d'autres postes.
Monsieur ... ... invoque encore les dispositions de l'article L. 4624-1 du Code du travail dès lors que le 06 juin 2006 le médecin du travail avait suggéré un rapprochement du lieu de travail-domicile bénéfique pour son état de santé (pièce 10). Si cette suggestion n'a pas la valeur d'un avis d'inaptitude ou d'une prescription impérative, l'employeur tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de santé des travailleurs devait à tout le moins rechercher les moyens de la mettre en oeuvre pour y parvenir. Elle n'invoque nullement l'avoir fait alors qu'elle a recruté Monsieur ... sur le poste de Saint-Pierre en juillet 2007. Par ailleurs, l'inaptitude définitive prescrite en janvier 2011 par le médecin du travail confirme sa nécessité. D'ailleurs, le second avis d'inaptitude du 24 janvier précise 'pour raison médicale une affectation sur le secteur sud est nécessaire'.
Ainsi, l'AFPAR n'a pas respecté ses obligations résultant de l'accord d'entreprise en éludant toute procédure de recrutement quant au poste attribué à Monsieur .... Sur ce premier point, le salarié est fondé à invoquer un favoritisme en faveur de son collègue. A son endroit, il s'agit d'une discrimination illicite. Pareillement, l'employeur n'a pas été diligent au regard de son obligation de sécurité quant à la préservation de l'état de santé de Monsieur ... ....
Le préjudice subi tient à la perte d'une chance d'obtenir le poste attribué. Il tient aussi à la perte d'une chance de ne pas avoir pu éviter l'inaptitude médicale. Il convient de préciser que Monsieur ... ... est né en 1953, son ancienneté était de 28 années. Son salaire brut était de 4.072,01 euros en mars 2010 (pièce 24 communiquée en première instance). En considération de ces éléments, le préjudice subi est fixé à la somme de 70.000 euros.
Le jugement est alors confirmé sur les frais et dépens et infirmé pour le reste.
Monsieur ... ... doit être indemnisé de ses frais irrépétibles à concurrence de la somme de 2.000 euros. Les dépens d'appel sont à la charge de l'AFPAR qui succombe.

PAR CES MOTIFS
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La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en matière sociale et en dernier ressort,
Confirme le jugement sur les frais et dépens, l'infirme pour le reste,
Dit que l'Association de Formation Professionnelle pour Adultes de la Réunion s'est rendue coupable de discrimination à l'encontre de Monsieur Jean Claude Y Y en l'absence de procédure de recrutement interne mise en place préalablement à l'embauche d'un formateur sur le site de Saint-Pierre,
Dit que l'Association de Formation Professionnelle pour Adultes de la Réunion n'a pas respecté son obligation de sécurité de résultat en matière de santé des travailleurs en ne tenant pas compte du fait que la préservation de l'état de santé de Monsieur Jean Claude Y Y induisait sa mutation sur le site de Saint-Pierre,
Condamne l'Association de Formation Professionnelle pour Adultes de la Réunion à payer à Monsieur Jean Claude Y Y la somme de 70.000 euros en réparation des préjudice subi et celle de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne l'Association de Formation Professionnelle pour Adultes de la Réunion aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Hervé ..., Président d, et par Mme Martine ..., greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT, signé

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