SOC. ELECTIONS FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 26 juin 2013
Rejet
M. LACABARATS, président
Arrêt no 1246 FS-P+B
Pourvoi no T 12-27.480
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ la société Ipsen Pharma, société par actions simplifiée, dont le siège est Boulogne-Billancourt,
2o/ la société Ipsen innovation, société par actions simplifiée, dont le siège est Les Ulis cedex,
contre le jugement rendu le 31 octobre 2012 par le tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant
1o/ au syndicat SECIF CFDT, dont le siège est Paris,
2o/ au syndicat national CFTC des salariés des industries pharmaceutiques - CM SN 85, dont le siège est Pantin,
3o/ au syndicat national des cadres des industries chimiques et parties similaires, dont le siège est Paris,
4o/ à la Fédération nationale UNSA chimie pharmacie pétrole, dont le siège est Bagnolet cedex,
5o/ à la Fédération nationale des industries chimiques CGT, dont le siège est Paris Montreuil cedex,
6o/ à la Fédération nationale de la pharmacie Force ouvrière, dont le siège est Paris,
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 mai 2013, où étaient présents M. Lacabarats, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire rapporteur, M. Bailly, M. Béraud, Mme Lambremon, M. Huglo, M. Struillou, conseillers, Mme Salomon, conseiller référendaire, M. Lalande, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat des sociétés Ipsen Pharma et Ipsen innovation, l'avis de M. Lalande, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt, 31 octobre 2012), que les sociétés constituant l'union économique et sociale (UES) Ipsen France ont signé un protocole préélectoral pour le déroulement des élections professionnelles au sein de leurs divers établissements avec cinq organisations syndicales représentatives sur six ; qu'elles ont saisi le juge d'instance pour qu'il décide que les élections professionnelles au sein de trois des établissements de l'UES se dérouleraient au sein de deux collèges au lieu de trois en raison du très faible nombre, dans ces établissements, de salariés appartenant au 1er collège ;
Attendu que les sociétés font grief au jugement de les débouter de leur demande, alors, selon le moyen, que le tribunal d'instance, juge de l'élection, a le pouvoir de prendre toutes les mesures nécessaires au bon déroulement des opérations électorales ; que si les articles L. 2314-10 et L. 2324-12 du code du travail imposent l'unanimité comme condition de validité d'un accord modifiant le nombre et la composition des collèges électoraux, ils n'interdisent pas au juge d'instance saisi d'un litige sur ce point d'autoriser une dérogation aux règles légales ; qu'en particulier une telle dérogation doit être autorisée par le tribunal d'instance lorsque l'application des règles légales concernant le nombre et la composition des collèges électoraux aboutirait à la surreprésentation manifeste des salariés de l'un desdits collèges, altérant ainsi la fidélité du critère de l'audience et donc de la représentativité ; qu'en jugeant qu'il n'avait pas ce pouvoir, sans rechercher ainsi qu'il y était invité, si le maintien de trois collèges dans les établissements concernés n'aboutissait pas à altérer la réalité du critère de l'audience au sein de ces établissements, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2314-8, L. 2314-25, R. 2314-5, R. 2314-27, L. 2324-11, L. 2324-23, R. 2324-2 et R. 2324-23 du code du travail ;
Mais attendu qu'en vertu des articles L. 2314-10 et L. 2324-12 du code du travail, seul un accord signé entre l'employeur et l'ensemble des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise peut déroger au nombre légal de collèges ; que le tribunal d'instance en a, à bon droit, déduit qu'en l'absence d'un tel accord, il ne lui appartenait pas d'autoriser une dérogation au nombre de collèges ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour les sociétés Ipsen Pharma et Ipsen innovation.
IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR débouté les sociétés IPSEN PHARMA et IPSEN INNOVATION de leur demande tendant à voir autoriser la dérogation au nombre de collèges prévue par les articles L. 21314-8 et L. 2324-11 du Code du travail pour l'organisation des élections professionnelles des établissements IPSEN PHARMA BOULOGNE (CE et DP), IPSEN INNOVATION (CE et DP) et IPSEN PHARMA DREUX (DP), et en conséquence, à voir regrouper, au sein d'IPSEN PHARMA BOULOGNE et d'IPSEN INNOVATION, les 1er et 2ème collèges, et au sein d'IPSEN PHARMA DREUX, les 2ème et 3ème collèges, et d'AVOIR dit qu'en conséquence les élections devraient être organisées conformément aux dispositions des articles L. 21314-8 et L. 2324-11 du Code du travail,
AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions des articles L. 2314-10 et L. 2324-12 du Code du travail que le nombre et la composition des collèges électoraux ne peuvent être modifiés par une convention ou un accord collectif de travail, ou un accord préélectoral, que lorsque la convention ou l'accord est signé par toutes les organisations syndicales représentatives existant dans l'entreprise ; qu'à défaut d'un tel accord il n'appartient pas au juge d'instance d'imposer de déroger aux dispositions fixant le nombre et la répartition des collèges électoraux ; que son intervention en cas de désaccord se limite à vérifier que les conditions de la dérogation sont respectées ; que dans ces conditions il convient de rejeter la demande des sociétés IPSEN PHARMA et IPSEN INNOVATION ;
ALORS QUE le tribunal d'instance, juge de l'élection, a le pouvoir de prendre toutes les mesures nécessaires au bon déroulement des opérations électorales ; que si les articles L. 2314-10 et L. 2324-12 du Code du travail imposent l'unanimité comme condition de validité d'un accord modifiant le nombre et la composition des collèges électoraux, ils n'interdisent pas au juge d'instance saisi d'un litige sur ce point d'autoriser une dérogation aux règles légales ; qu'en particulier une telle dérogation doit être autorisée par le tribunal d'instance lorsque l'application des règles légales concernant le nombre et la composition des collèges électoraux aboutirait à la surreprésentation manifeste des salariés de l'un desdits collèges, altérant ainsi la fidélité du critère de l'audience et donc de la représentativité ; qu'en jugeant qu'il n'avait pas ce pouvoir, sans rechercher ainsi qu'il y était invité, si le maintien de trois collèges dans les établissements concernés n'aboutissait pas à altérer la réalité du critère de l'audience au sein de ces établissements, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2314-8, L. 2314-25, R. 2314-5, R. 2314-27, L. 2324-11, L. 2324-23, R. 2324-2 et R. 2324-23 du Code du travail.