Jurisprudence : Cass. civ. 2, 13-10-2022, n° 21-13.373, F-B, Cassation

Cass. civ. 2, 13-10-2022, n° 21-13.373, F-B, Cassation

A75598NB

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:C201037

Identifiant Legifrance : JURITEXT000046437421

Référence

Cass. civ. 2, 13-10-2022, n° 21-13.373, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/88884630-cass-civ-2-13102022-n-2113373-fb-cassation
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Abstract

Il résulte des articles 2224 du code civil, R. 142-18 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le deuxième dans sa rédaction antérieure au décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 et le dernier dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicables au litige, que le délai de la prescription de l'action de l'employeur aux fins d'inopposabilité de la décision de la caisse de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute court à compter du jour où l'employeur a eu une connaissance effective de cette décision. Par suite, viole ces textes la cour d'appel qui rejette la fin de non-recevoir soulevée par la caisse et dit recevable l'action de l'employeur, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur avait eu connaissance de la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident de sa salariée, par l'information qu'il en avait reçue, plus de cinq années avant de former un recours contre cette décision, de sorte que son action était prescrite


CIV. 2

LM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 octobre 2022


Cassation sans renvoi


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 1037 F-B

Pourvoi n° V 21-13.373


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 OCTOBRE 2022


La caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 21-13.373 contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2021 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre sécurité sociale), dans le litige l'opposant à la société [3], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 janvier 2021), par lettre du 15 juillet 2008, la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône (la caisse) a informé la société [3] (l'employeur) de sa décision de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident dont l'une de ses salariées a été victime le 27 mai 2008.

2. Après avoir vainement saisi, le 11 mars 2015, la commission de recours amiable de la caisse d'une contestation de l'opposabilité de cette décision, l'employeur a porté son recours, le 28 novembre 2016, devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.


Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer recevable le recours de l'employeur et de déclarer inopposable à celui-ci la décision de prise en charge, alors « que le délai de prescription de droit commun court à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que par suite, s'agissant de l'action en inopposabilité de la prise en charge d'une maladie professionnelle formée par l'employeur, la prescription court à compter du jour où il a eu connaissance de cette prise en charge, peu important qu'aucune décision précisant les délais et voies de recours lui ait été notifiée ; qu'en jugeant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 2224 du code civil🏛, R. 142-18 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le deuxième dans sa rédaction antérieure au décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 et le dernier dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicables au litige :

4. Selon le premier de ces textes, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

5. En l'absence de texte spécifique, l'action de l'employeur aux fins d'inopposabilité de la décision de la caisse de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute est au nombre des actions qui se prescrivent par cinq ans en application de l'article 2224 du code civil🏛.

6. Il résulte de ces textes que le délai de la prescription de l'action de l'employeur aux fins d'inopposabilité de la décision de la caisse de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute court à compter du jour où il a eu une connaissance effective de cette décision.

7. Pour rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la caisse et dire recevable l'action de l'employeur, l'arrêt relève que l'employeur ne conteste pas avoir reçu le courrier du 15 juillet 2008 l'informant de la décision de prise en charge de l'accident, au titre de la législation professionnelle. Il énonce qu'aucune prescription du droit d'agir ne saurait être opposée à l'employeur au motif que les conséquences de cette prise en charge ont été imputées à son compte depuis plus de cinq ans lorsqu'il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, dès lors qu'il n'est justifié d'aucune notification de cette décision lui faisant grief et précisant les délais et voies de recours.

8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur avait eu connaissance de la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident de sa salariée, par l'information qu'il en avait reçue, plus de cinq années avant de former un recours contre cette décision, de sorte que son action était prescrite, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile🏛, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire🏛 et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. Il résulte des énonciations du point 8 qu'il y a lieu de déclarer prescrite l'action de l'employeur aux fins d'inopposabilité de la décision de la caisse de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident de sa salariée.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare irrecevable comme prescrite l'action de la société [3] aux fins d'inopposabilité de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident de Mme [Ab] du 27 mai 2008 ;

Condamne la société [3] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Rennes ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, condamne la société [3] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Rhône

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La CPAM du Rhône fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré recevable le recours exercé contre la décision de prise en charge de l'accident déclaré par Mme [Ab] et la décision de rejet explicite de la commission de recours amiable,

ALORS QUE le délai de prescription de droit commun court à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que par suite, s'agissant de l'action en inopposabilité de la prise en charge d'une maladie professionnelle formée par l'employeur, la prescription court à compter du jour où il a eu connaissance de cette prise en charge, peu important qu'aucune décision précisant les délais et voies de recours lui ait été notifiée ; qu'en jugeant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil🏛.

SECOND MOYEN DE CASSATION

La CPAM du Rhône fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré inopposable à la société [3] la décision de prise en charge de l'accident du travail du 27 mai 2008 déclaré par MmAb [J],

ALORS QUE dispose d'un délai utile suffisant l'employeur disposant de six jours ouvrés pour consulter les pièces du dossier établi par la Caisse et faire valoir ses observations avant qu'elle ne prenne sa décision sur le caractère professionnel de l'accident ; qu'en considérant en l'espèce que le délai utile de six jours dont bénéficiait l'employeur était insuffisant pour lui permettre de consulter le dossier de la Caisse et formuler des observations, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale🏛, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009.

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