COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRÊT DU 25 JUIN 2013
(Rédacteur Jean-Claude ..., conseiller,)
N° de rôle 12/01257
SAS PRIORIS
c/
Jean-Marie Y
Annette VIVIEN divorcée Y
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/006012 du 05/04/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
Nature de la décision AU FOND
Grosse délivrée le
aux avocats
Décision déférée à la cour jugement rendu le 08 février 2012 par le Tribunal d'Instance d'ANGOULEME (RG 11-10-001639) suivant déclaration d'appel du 1er mars 2012
APPELANTE
SAS PRIORIS, inscrite au RCS de ROUBAIX TOURCOING sous le numéro 489 581 769, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés MARCQ EN BAROEUL
représentée par Maître Patricia COMBEAUD, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de la SCP CBG AVOCATS & CONSEILS, avocat au barreau de la CHARENTE
INTIMÉS
Jean-Marie Y
né le ..... à SALLES-DE-VILLEFAGNAN (16)
de nationalité Française
demeurant BRIE
non représenté, assigné à étude d'huissier
Annette VIVIEN
née le ..... à SAVIGNE (86)
de nationalité Française
Profession Sans emploi
demeurant SAVIGNE
représentée par Maître Katell LE BORGNE, avocat au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Lionel BETHUNE DE MORO, avocat au barreau de la CHARENTE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 avril 2013 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Jean-Claude SABRON, conseiller, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de
Brigitte ROUSSEL, président,
Jean-Claude SABRON, conseiller,
Thierry LIPPMANN, conseiller,
Greffier lors des débats Annick BOULVAIS
ARRÊT
- de défaut
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
LES DONNEES DU LITIGE
Selon une offre préalable acceptée le 5 mai 2009, la SAS PRIORIS a consenti à M. Jean Marie Y et Madame Annette Y épouse Y, emprunteurs solidaires, un crédit de 8 989 euros affecté au financement de l'acquisition d'un véhicule, remboursable en 60 mensualités de 222,37 euros chacune, assurance comprise.
Par lettre recommandée en date du 31 mars 2010, la société de crédit a mis les emprunteurs en demeure de lui payer, après déchéance du terme, la somme de 8 758,09 euros arrêtée au 20 mars 2010.
Par acte du 26 novembre 2010, elle a fait assigner les époux Y devant le tribunal d'instance d'ANGOULEME en paiement de la dite somme, majorée des intérêts au taux contractuel de 8,26 % à compter du 20 mars 2010.
Le tribunal a par jugement du 8 février 2012 prononcé la déchéance des intérêts à défaut de justification de ce que l'offre de crédit comportait le formulaire détachable permettant à l'emprunteur d'exercer son droit de rétractation, réduit à néant l'indemnité de résiliation de 8 % prévue par le contrat et condamné solidairement M. et Madame Y à payer à la société PRIORIS la somme de 6 832,41 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2010.
Il a par ailleurs autorisé les emprunteurs à se libérer de leur dette en s'acquittant chacun de 23 versements de 200 euros s'imputant prioritairement sur le capital.
Enfin, au vu de l'ordonnance de non conciliation prononcée entre les époux Y, en instance de divorce, le tribunal a dit que, dans les rapports entre les débiteurs solidaires, Madame Y devrait relever M. Y indemne de toute somme versée en exécution du jugement.
La société PRIORIS a relevé appel de ce jugement par déclaration déposée au greffe le 1er mars 2012.
Elle fait valoir que le formulaire détachable prévu par l'article L 311-15 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, et par le modèle type prévu à l'article R 311-7 du même code, est distinct de l'offre, que les emprunteurs ont reconnu en signant l'offre être restés en possession d'un exemplaire de cette dernière doté d'un formulaire détachable de rétractation et qu'à défaut de produire cet exemplaire, ils ne peuvent pas se prévaloir de l'absence ou de l'irrégularité de ce formulaire.
La société appelante qui reproche également au premier juge d'avoir mis à néant l'indemnité de résiliation alors que son montant n'est pas excessif demande à la cour de condamner solidairement M. et Madame Y à lui payer la somme de 8 758,09 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,26 % à compter du 20 mars 2010.
Elle sollicite en outre une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame Y qui relève que seule la production d'un offre comportant le formulaire de rétractation est de nature à justifier de la régularité de cette dernière au regard des articles L 311-15, R 311-6 et R 311-7 du code de la consommation a conclu à la confirmation de la décision entreprise.
Elle déclare s'en remettre en ce qui concerne la fixation à sa seule charge de la contribution à la dette dans les rapports entre les débiteurs solidaires, aujourd'hui divorcés.
M. Jean Marie Y qui a été assigné et à qui les conclusions des parties ont été signifiées par huissier n'a pas constitué avocat.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l'article L 311-15 du code de la consommation, en sa rédaction alors applicable, le formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice du droit de rétractation de l'emprunteur est " joint à l'offre préalable ".
Il n'y a pas de raison qu'on le retrouve dans l'exemplaire de l'offre préalable conservé par le prêteur qui ne dispose pas de la faculté de résiliation et, y figurerait-il, sa production ne démontrerait pas la remise.
La preuve exigée par le tribunal est impossible.
Le prêteur ne peut pas se réserver la preuve de la remise d'une offre à la quelle est joint un formulaire de rétractation autrement que par la déclaration, signée par l'emprunteur, de ce qu'une telle remise a eu lieu.
Or en l'espèce, les emprunteurs ont signé cette déclaration, ce qui permet au prêteur de justifier de ce qu'un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de leur droit de rétractation était joint à l'exemplaire de l'offre qui leur a été remis.
Les emprunteurs ont la possibilité de démontrer le caractère erroné de cette reconnaissance en produisant l'exemplaire de l'offre de crédit qui leur était destiné, ce qui serait de nature à faire apparaître que cette offre n'était pas munie d'un formulaire détachable ou que ce formulaire n'était pas conforme au modèle type visé à l'article R 311-7 du code de la consommation.
A défaut de produire cet exemplaire, Madame Annette Y divorcée Y ne peut pas prétendre qu'à l'inverse de ce qu'elle a expressément reconnu, l'offre de crédit n'était pas munie d'un formulaire détachable de rétractation.
Le premier juge ne pouvait pas prononcer la sanction de la déchéance des intérêts prévue à l'article L 311-33 du code de la consommation.
L'emprunteur qui a recouvré la cotisation d'assurance pour le compte de l'assureur groupe est en droit de percevoir sur les échéances impayées la part de ladite cotisation dès lors que ces échéances ont été appelées avant la résiliation du contrat, pour une période pendant laquelle les emprunteurs auraient été en droit d'invoquer la garantie si le risque assuré s'était réalisé.
C'est donc à tort que le premier juge a déduit ces cotisations des mensualités du prêt appelées avant la déchéance du terme.
Enfin, le montant de l'indemnité de résiliation qui représente 8 % du capital restant dû n'est pas manifestement excessif au regard de durée du prêt qui restait à courir à la date de la défaillance des emprunteurs.
En effet, alors que le prêt était remboursable sur cinq ans à compter du 20 juin 2009, les remboursements ont cessé dès le mois de janvier 2010, au milieu de la première année.
En revanche, cette indemnité qui s'élève à 648,01 euros, comme les frais de courrier recommandés, de 10 euros, produiront intérêts, non au taux du contrat de prêt dont ils ne sont pas des éléments constitutifs, mais au taux légal.
Madame Annette Y divorcée Y ne formule aucune proposition sérieuse lui permettant de s'acquitter d'une partie substantielle de sa dette dans le délai maximum de deux ans prévu par l'article 1244-1 du code civil.
Elle n'a procédé à aucun des versements mensuels mis à sa charge par le jugement déféré qui était assorti de l'exécution provisoire.
La demande de délais de paiement qui n'a aucune chance de prospérer doit être rejetée.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au regard de la situation économique des emprunteurs.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau.
Condamne solidairement M. Jean Marie Y et Madame Annette Y divorcée Y à payer à la SAS PRIORIS la somme de 8 758,09 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,26 % à compter du 20 mars 2010 sur la somme de 8 100, 08 euros et au taux légal à compter du 26 novembre 2010, date de l'assignation, sur le solde.
Confirme le jugement en ses autres dispositions non contraires au présent arrêt. Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Madame Annette Y aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SELARL Patricia MATET-COMBEAUD, avocat au barreau de BORDEAUX, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Brigitte ..., président, et par Madame Annick ..., greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.