Jurisprudence : Cass. civ. 2, 22-09-2022, n° 21-10.760, F-D, Cassation

Cass. civ. 2, 22-09-2022, n° 21-10.760, F-D, Cassation

A87388KT

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2022:C200928

Identifiant Legifrance : JURITEXT000046357015

Référence

Cass. civ. 2, 22-09-2022, n° 21-10.760, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/88411451-cass-civ-2-22092022-n-2110760-fd-cassation
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CIV. 2

CM


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 septembre 2022


Cassation


M. PIREYRE, président


Arrêt n° 928 F-D

Pourvoi n° E 21-10.760


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 SEPTEMBRE 2022


La société [4], société à responsabilité limitée, dont le siège est chez [Adresse 2], venant aux droits de la société [3], a formé le pourvoi n° E 21-10.760 contre l'arrêt n° RG 19/0098 rendu le 19 novembre 2020 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) d'[Localité 1], dont le siège est [Adresse 6], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société [4], de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'[Localité 1], et l'avis de M. Halem, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 juin 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 19 novembre 2020), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2012 à 2014, suivi d'une lettre d'observations du 9 novembre 2015, l'URSSAF de [Localité 5], devenue l'URSSAF d'[Localité 1] (l'URSSAF), a notifié deux mises en demeure du 29 décembre 2015 à la société [3], aux droits de laquelle vient la société [4] (la société), laquelle a saisi de recours une juridiction chargé du contentieux de la sécurité sociale.


Examen des moyens

Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « qu'il résulte de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa rédaction applicable au litige et de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002🏛 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations sociales que revêtent le caractère d'avantages en nature, les avantages constitués par l'économie de frais de transport réalisée par les salariés bénéficiaires de la mise à disposition permanente d'un véhicule dont l'entreprise assume entièrement la charge ; que, pour juger que les salariés de la société exposante bénéficiaient d'un avantage en nature résultant de la mise à leur disposition, à des fins professionnelles et personnelles sans limitation, d'un véhicule par une association des utilisateurs de véhicules, la cour d'appel a relevé que les salariés, adhérents de cette association, lui versaient une cotisation annuelle dont le montant était fonction de la puissance fiscale du véhicule, que la société exposante versait des indemnités kilométriques à l'association pour les kilomètres parcourus à titre professionnel, que la société produisait l'ensemble des factures mensuelles qui lui avaient été adressées par l'association comportant l'identité de l'adhérent et son numéro d'adhésion, la marque et l'immatriculation du véhicule, le nombre de kilomètres professionnels retenus, la valeur unitaire de l'indemnité kilométrique, le décompte TTC 2013 le reporting et la note de frais, mais que ces documents comportant les mêmes indications et correspondant aux seules déclarations par le salarié du nombre de kilomètres parcourus, n'étaient pas, sans autre élément justificatif, de nature à démontrer que les montants versés à l'association couvraient exclusivement des kilomètres réalisés par le salarié au titre de déplacements professionnels dont la réalité n'était vérifiée ni par l'association ni par la société, les salariés bénéficiant ainsi d'un avantage en nature dans la mesure où il n'était pas démontré que les redevances qu'ils versaient à l'association couvraient intégralement les déplacements personnels, les salariés n'ayant aucune autre charge que les redevances ; que la cour d'appel a ainsi statué par des motifs ne caractérisant ni en son principe ni en son montant l'existence d'un avantage en nature au regard de la règle d'assiette sus-visée et a violé les articles L. 136-1, L. 136-2 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale🏛 dans leur rédaction applicable au litige et 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996🏛 et les articles 3 et 10 de l'arrêté du 10 décembre 2002🏛 relatif à l'évaluation des avantages en nature pour le calcul des cotisations. »


Réponse de la Cour

Vu les articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale🏛, alinéa 1er, et 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 modifié, relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations sociales :

4. Revêtent le caractère d'avantages en nature, au sens du premier de ces textes, devant être réintégrés dans l'assiette des cotisations sociales, les avantages constitués par l'économie de frais de transport réalisée par les salariés bénéficiaires de la mise à disposition d'un véhicule dont l'entreprise assume entièrement la charge.

5. En application du second de ces textes, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

6. Pour dire que les salariés bénéficiaient de l'avantage en nature résultant de la mise à disposition à titre permanent d'un véhicule, l'arrêt retient que les documents remis par la société comportent les mêmes indications et correspondent aux seules déclarations par le salarié du nombre de kilomètres professionnels parcourus, et qu'il ne ressort pas de ces éléments des précisions suffisantes, la seule déclaration par les salariés du nombre de kilomètres sans autre élément justificatif n'étant pas de nature à démontrer que les montants versés à l'association couvrent exclusivement des kilomètres réalisés par les salariés au titre de leurs déplacements professionnels, d'autant que ni l'association, ni l'employeur ne vérifient la réalité des trajets et leur caractère professionnel.

7. Il ajoute que la société, sur laquelle pèse la charge de la preuve du bien-fondé de l'exonération, ne démontre pas avec précision, salarié par salarié, le détail des trajets professionnels réalisés par ceux-ci et ne démontre donc pas que les montants versés à l'association couvrent exclusivement des kilomètres professionnels, puisqu'elle ne vérifie pas la réalité de ceux-ci et leur caractère strictement professionnel et que les salariés bénéficient ainsi d'un avantage en nature dans la mesure où il n'est pas démontré que les redevances qu'ils versent à l'association couvrent intégralement les déplacements personnels, les salariés n'ayant aucune charge autre que cette redevance.

8. En statuant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser, dans son principe et dans son montant, l'avantage en nature litigieux, la cour d'appel a violé les textes susvisés.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;

Condamne l'URSSAF d'[Localité 1] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par l'URSSAF d'[Localité 1] et la condamne à payer à la société [4] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille vingt-deux.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Le Prado-Gilbert, avocat aux Conseils, pour la société [4]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société [4] reproche à l'arrêt attaqué

D'AVOIR déclaré l'appel de l'URSSAF [Localité 1] recevable et régulier, d'AVOIR, en conséquence, infirmant le jugement entrepris, validé les deux mises en demeure du 29 décembre 2015 et de l'AVOIR condamnée au paiement, à l'URSSAF [Localité 1], des sommes de 16 063 euros et de 2 167 euros de cotisations et de majorations de retard

1°) ALORS QU'aux termes de l'article 32 du code de procédure civile🏛, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir ; qu'en déclarant recevable et régulier l'appel formé, le 4 janvier 2019, par l'URSSAF à l'encontre de la société [3] dissoute à la suite de sa fusion-absorption, le 28 septembre 2018, par la société [4], et radiée du registre du commerce et des sociétés le 1er octobre 2018, la cour d'appel a violé l'article 32 du code de procédure civile🏛 ;

2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE le défaut d'existence légale de la partie intimée est une irrégularité de fond qui doit être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief ; qu'en énonçant, pour déclarer recevable et régulier l'appel formé le 4 janvier 2019 par l'URSSAF [Localité 1] à l'encontre de la société [3], dissoute le 28 septembre 2018 et radiée du registre du commerce et des sociétés le 1er octobre 2018, à la suite de sa fusion-absorption par la société [4], que la mention de la société [3] comme intimée dans la déclaration d'appel constituait une irrégularité de forme ne pouvant entraîner la nullité de l'acte que sur justification d'un grief dont la société [4], mise en mesure de présenter sa défense, ne faisait pas état, et que le moyen tendant à faire déclarer l'appel nul pour nullité de fond était inopérant, la cour d'appel a violé les articles, 114, 117 et 119 du code de procédure civile🏛.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

La société [4] reproche à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR validé les deux mises en demeure du 29 décembre 2015 et de l'AVOIR condamnée au paiement, à l'URSSAF [Localité 1], des sommes de 16 063 euros et de 2 167 euros de cotisations et de majorations de retard

1°) ALORS QU'il résulte de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa rédaction applicable au litige et de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002🏛 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations sociales que revêtent le caractère d'avantages en nature, les avantages constitués par l'économie de frais de transport réalisée par les salariés bénéficiaires de la mise à disposition permanente d'un véhicule dont l'entreprise assume entièrement la charge ; que, pour juger que les salariés de la société exposante bénéficiaient d'un avantage en nature résultant de la mise à leur disposition, à des fins professionnelles et personnelles sans limitation, d'un véhicule par une association des utilisateurs de véhicules, la cour d'appel a relevé que les salariés, adhérents de cette association, lui versaient une cotisation annuelle dont le montant était fonction de la puissance fiscale du véhicule, que la société exposante versait des indemnités kilométriques à l'association pour les kilomètres parcourus à titre professionnel, que la société produisait l'ensemble des factures mensuelles qui lui avaient été adressées par l'association comportant l'identité de l'adhérent et son numéro d'adhésion, la marque et l'immatriculation du véhicule, le nombre de kilomètres professionnels retenus, la valeur unitaire de l'indemnité kilométrique, le décompte TTC 2013 le reporting et la note de frais, mais que ces documents comportant les mêmes indications et correspondant aux seules déclarations par le salarié du nombre de kilomètres parcourus, n'étaient pas, sans autre élément justificatif, de nature à démontrer que les montants versés à l'association couvraient exclusivement des kilomètres réalisés par le salarié au titre de déplacements professionnels dont la réalité n'était vérifiée ni par l'association ni par la société, les salariés bénéficiant ainsi d'un avantage en nature dans la mesure où il n'était pas démontré que les redevances qu'ils versaient à l'association couvraient intégralement les déplacements personnels, les salariés n'ayant aucune autre charge que les redevances ; que la cour d'appel a ainsi statué par des motifs ne caractérisant ni en son principe ni en son montant l'existence d'un avantage en nature au regard de la règle d'assiette sus-visée et a violé les articles L. 136-1, L. 136-2 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale🏛 dans leur rédaction applicable au litige et 14 de l'ordonnance n°96-50 du 24 janvier 1996🏛 et les articles 3 et 10 de l'arrêté du 10 décembre 2002🏛 relatif à l'évaluation des avantages en nature pour le calcul des cotisations ;

2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'il résulte de l'article R. 242-5 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa rédaction applicable au litige que le montant des cotisations ne peut être fixé de manière forfaitaire que si la comptabilité de l'employeur ne permet pas d'établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations ou si l'employeur ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires au contrôle ou lorsque leur présentation n'en permet pas l'exploitation ; qu'en retenant, pour valider le chef de redressement litigieux, que l'URSSAF n'avait pas procédé à une taxation forfaitaire mais à une évaluation forfaitaire et que n'ayant aucun élément permettant de déterminer la réalité des trajets professionnels et la part des déplacements personnels, l'URSSAF ne pouvait que recourir aux dispositions de l'article R. 242-5 du code de la sécurité sociale🏛, la cour d'appel a violé l'article R. 242-5 du code de la sécurité sociale🏛 dans sa rédaction antérieure au décret n°2016-941 du 8 juillet 2016, applicable au litige.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

La société [4] reproche à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR validé les deux mises en demeure du 29 décembre 2015 et de l'AVOIR condamnée au paiement, à l'URSSAF [Localité 1], des sommes de 16 063 euros et de 2 167 euros de cotisations et de majorations de retard

1°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que les transactions en cause stipulent, l'une, que la société [3] « sans modifier son appréciation sur les faits reprochés à Monsieur [M], mais afin de mettre un terme au litige, accepte de régler (…) à titre d'indemnité transactionnelle, globale, forfaitaire et définitive à nature de dommages intérêts une somme nette de 18.000 € », l'autre, que « la société, sans modifier son appréciation sur la réalité du licenciement pour faute grave, en réparation des préjudices moral et professionnel subis par Monsieur [Ab] [U] du fait de la perte de son emploi, entend lui verser, à titre de dommages et intérêts, une indemnité transactionnelle, forfaitaire et définitive à nature de dommages et intérêts s'élevant à 75 000 bruts, soit 69 000 euros nets » ; que la cour d'appel qui a énoncé que ces transactions avaient eu lieu pour éviter un recours prud'homal, l'employeur désirant réparer le préjudice moral, professionnel et financier subi par le salarié du fait de la rupture et qu'il ne pouvait en être déduit que l'employeur voulait, au-delà de la qualification juridique donnée à ce licenciement, maintenir la notion de faute grave privative de tout droit à indemnité, que les protocoles étaient ambigus et que l'indemnité transactionnelle comportait l'indemnité de préavis, a dénaturé les transactions en cause, méconnaissant le principe sus-visé ;

2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en énonçant que les protocoles transactionnels étaient ambigus et que l'indemnité transactionnelle comportait l'indemnité de préavis sans préciser en quoi les protocoles étaient ambigus ni sur quels éléments elle se fondait pour affirmer que l'indemnité transactionnelle comportait l'indemnité de préavis, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile🏛.

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