FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [Z] [X] a été embauchée en qualité d'agent des services logistiques par contrat à durée indéterminée du 16 octobre 2006 par l'Association les amis de la médecine sociale suivant contrat de travail à durée indéterminée assurant la gestion de l'hôpital Aa Ab.
Le 18 septembre 2014, Mme [Ac] a été victime d'une électrisation en ayant un contact avec un boitier de climatisation endommagé et a été placée en arrêt de travail jusqu'au 31 mars 2015.
Mme [X] a repris ses fonctions, en mi-temps thérapeutique jusqu'au 30 avril 2015, puis à temps complet à compter du 1er juillet 2015.
Mme [X] a été placée en arrêt maladie à plusieurs reprises jusqu'à la fin
de l'année 2017.
Le 17 novembre 2017, Mme [X] a été reçue par le médecin du travail qui a émis un avis d'inaptitude définitive à son poste de travail d'agent de service hospitalier.
Après avoir été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé
au 14 février 2018, Mme [X] a été licenciée par courrier du 19 février 2018 pour inaptitude définitive avec impossibilité de reclassement.
Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse le 5 avril 2018 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.
Le conseil de prud'hommes de Toulouse, section Activités Diverses, par jugement du 7 octobre 2020, a :
-dit et jugé que le licenciement de Madame [Z] [X] repose sur une cause réelle et sérieuse,
-débouté Madame [Z] [X] de l'ensemble de ses demandes,
-débouté l'association Les amis de la médecine sociale de sa demande reconventionnelle au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛,
-condamné Madame [Z] [X] aux entiers dépens de l'instance.
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Par déclaration du 28 octobre 2020, Mme [X] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 22 octobre 2020 dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.
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Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique
le 3 décembre 2020, Mme [Z] [X] demande à la cour de :
-réformer en toutes ses dispositions le jugement,
-juger que le licenciement de Mme [X] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,
-en conséquence, condamner l'association à lui verser les sommes de :
*23 018,85 euros au titre de dommages et intérêts,
*2 708,10 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
-condamner l'association au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'
article 700 du code de procédure civile🏛 ainsi qu'aux entiers dépens,
-ordonner l'exécution provisoire du jugement.
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Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique
le 12 février 2021, l'Association les amis de la médecine sociale demande à la cour de :
-confirmer le jugement dont appel,
-juger que le licenciement de Mme [X] repose sur une cause réelle et sérieuse,
-en conséquence, la débouter de l'ensemble de ses demandes,
-la condamner aux dépens ainsi qu'à la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'
article 700 du code de procédure civile🏛.
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La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance en date du 1er avril 2022.
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Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'
article 455 du code de procédure civile🏛.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le licenciement
La salariée soutient que l'inaptitude qui motive son licenciement est consécutive à un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.
Elle fait valoir que l'électrisation dont elle a été victime le 18 septembre 2014 sur le lieu de travail, en raison d'un boitier de climatiseur endommagé, a été qualifié d'accident du travail par la CPAM et que ses arrêts maladie successifs jusqu'à la déclaration de son inaptitude par le médecin du travail le 17 novembre 2017 sont en lien avec cet accident et le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Elle considère dans ces conditions que son licenciement pour inaptitude est dénué de cause réelle et sérieuse en ce qu'il résulte de la violation par l'employeur de son obligation de sécurité.
L'association des amis de la médecine sociale objecte que par
jugement du TASS du 17 juillet 2019 la salariée a été déboutée de sa demande tendant à voir retenir l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur et des demandes financières afférentes. Elle conteste tout manquement à son obligation de sécurité et soutient que l'inaptitude de la salariée n'est pas en lien avec une faute de l'employeur.
Sur ce
Aux termes de l'
article L. 4121-1 du code du travail🏛, 'l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d'information et de formation ;
3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes'.
L'employeur doit démontrer qu'il a pris toutes les mesures de prévention nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des salariés et respecter son obligation de sécurité. Si un salarié, victime d'un accident du travail, invoque une inobservation des règles de prévention et de sécurité, il appartient à l'employeur de démontrer que la survenance de cet accident est étrangère à tout manquement à son obligation de sécurité.
Sur ce
Il ressort du 'signalement d'évènement indésirable' effectué par le service d'hygiène et de gestion des risques le lendemain de l'accident du travail survenu le 17 septembre 2014, que Mme [X] a été électrisée après un contact avec un 'boitier de régulation de climatisation défectueux, arraché, fils électriques dénudés depuis manifestement un certain temps'.
Deux salariés de l'hôpital Aa Ab, Mesdames [P] [I] et [D] [O], affirment que le boitier de climatisation de la réserve de la maternité 2 était défectueux, et que, selon Mme [O], cette défectuosité avait été signalée depuis un an et demi .
Si ces deux témoignages sont établis dans des formes qui ne répondent pas totalement aux prescriptions légales de l'
article 202 du code de procédure civile🏛 - en ce qu'ils ne comportent pas la mention selon laquelle leur auteur est informé qu'il est établi en vue de sa production en justice et qu'une fausse attestation ferait encourir des sanctions pénales- leur auteur est clairement identifiable et aucun élément ne permet de mettre en doute leur authenticité. Ils s'apprécient donc comme simple élément de preuve.
La cour relève qu'il ne ressort pas de façon claire de ces témoignages que l'employeur ait été averti de la défectuosité du boitier avant l'accident, à défaut de toute précision sur le service ou les personnes auprès desquels cette information aurait été portée.
Il incombe à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de façon effective de son obligation de sécurité envers les salariés en prenant les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger leur santé. Sur ce point il produit aux débats un courriel adressé au service des ressources humaines le 1er juillet 2016 dont il ressort qu'après vérification de l'historique des demandes de travaux, il n'a pas été signalé de demande d'intervention sur la réserve du service maternité 2ème étage où a eu lieu l'accident. Il se déduit de cet élément que l'employeur n'a pas eu connaissance d'un dysfonctionnement de l'installation électrique.
Il produit également, d'une part, une attestation de la société DALKIA aux termes de laquelle cette société indique avoir effectué la maintenance annuelle des appareils de ventilation de l'hôpital avec une fin le 29 août 2014, d'autre part, un rapport de vérification annuelle des installations électriques émanant de la société APAVE sur la période d'intervention du 17 mars 2014 au 21 mai 2014.
La cour relève que la liste précise des bureaux contrôlés mentionne bien en page 66 une vérification du local situé dans le bâtiment H2 du service maternité au 2ème étage, au sein duquel s'est produit l'accident.
L'employeur justifie par ailleurs d'actions de formation menées en lien avec le CHSCT sur les risques professionnels auprès des salariés en 2012, 2013 et 2014, et de moyens financiers affectés aux actions de sécurité et maintenance des bâtiments et installations. Il verse par ailleurs aux débats le document unique d'évaluation des risques professionnels.
L'employeur démontre par ces divers éléments avoir pris les dispositions nécessaires de nature à prévenir le risque d'accident et s'être acquitté de son obligation de sécurité.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a écarté un manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité privant le licenciement de cause réelle et sérieuse.
Sur le reclassement
La fiche médicale établie par le médecin du travail lors de la visite de reprise après maladie du 17 novembre 2017 conclut à l'inaptitude de la salariée à 'reprendre son poste de travail comme à tout poste nécessitant le port de charges de plus de 5kg et tractions et poussées de toutes charges. Le poste de surveillance de bassin est aussi contre indiqué. Un poste répondant aux contre indications sus citées peut lui être proposé avec une formation si cela est nécessaire.'
Aucun certificat médical ou avis d'arrêt de travail n'est produit par la salariée postérieurement Suivant notification du 20 juillet 2015, l'état de santé de la salariée a été déclaré consolidé par le médecin conseil de la CPAM. Le 6 octobre 2015 Mme [X] a été informée de la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale lui allouant l'indemnité forfaitaire de 947,50 euros au titre de l'incapacité permanente partielle fixée à 3%.
Aucun élément médical n'est produit par la salariée depuis octobre 2015 , qu'il s'agisse d'avis d'arrêt de travail ou de certificats médicaux.
Dès lors, en l'état d'une fiche médicale ne mentionnant pas une origine professionnelle de l'inaptitude, et à défaut de toute information de nature à établir, d'une part,
un lien même partiel entre l'accident du travail et l'inaptitude prononcée par le
médecin du travail deux ans plus tard le 17 novembre 2017, d'autre part, la connaissance qu'avait l'employeur d'une origine professionnelle de l'inaptitude au moment du licenciement, la cour retient l'origine non professionnelle de l'inaptitude
En vertu de l'
article L.1226-2 du code du travail🏛, en sa version applicable au litige telle qu'elle résulte de l'ordonnance du 22 septembre 2017, 'lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnels, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Pour l'application du présent article, le groupe est défini conformément au I de l'article L2331-1.Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.'
La méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte
consécutivement à un accident ou une maladie d'origine professionnelle ou non professionnelle, dont celle imposant à l'employeur de consulter les représentants du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.
S'agissant de la demande de dommages et intérêts formée par la salariée, il convient de faire application du barème d'indemnisation fixé par l'
article L 1235-3 du code du travail🏛 dans sa rédaction applicable au litige, la chambre sociale de la cour de cassation ayant par deux
arrêts du 11 mai 2022🏛 , jugé le barème conforme à l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT, qui prévoit, en cas de licenciement injustifié, que le juge peut ordonner le versement d'une indemnité adéquate pour le salarié. Ces décisions précisent l'impossibilité pour les juges français de déroger, même au cas par cas, à l'application du barème au regard de cette convention internationale.
Mme [X], âgée de 42 ans lors de son licenciement, bénéficiait d'une ancienneté de 11 ans dans une entreprise employant plus de 10 salariés et percevait un salaire mensuel brut de 1354,05 euros. En application de l'article L1235-3 dans sa version application au litige, la salarié licenciée sans cause réelle et sérieuse bénéficiant d'une ancienneté de 11 ans peut prétendre à une indemnité dont le montant est compris entre un minimum correspondant à 3 mois de salaire et un maximum correspondant
à 10,5 mois de salaire.
Du fait de son inaptitude, la salariée voit ses possibilités de retrouver un travail stable rapidement, réduites .
Il est justifié de lui allouer en réparation de son préjudice la somme de 10 832,40 euros correspondant à 8 mois de salaire, outre une indemnité compensatrice de préavis de 2 708,10 euros et l'indemnité de congés payés correspondante de 270,80 euros.
Sur les demandes annexes
L'association les amis de la médecine sociale , partie perdante, supportera les entiers dépens de première instance et d'appel.
Mme [X] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens qu'elle a dû exposer à l'occasion de cette procédure. L'association les amis de la médecine sera donc tenue de lui payer la somme de 1500 euros en application de l'
article 700 alinéa 1 du code de procédure civile🏛.
Le jugement déféré est infirmé en ses dispositions concernant les frais et dépens de première instance.
L'association les amis de la médecine est déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.