CAA Marseille, 13-06-2022, n° 22MA01038
A6272798
Référence
Procédure contentieuse antérieure :
M. B A a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2110074 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 avril 2022, M. A, représenté par Me Bartolomei, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 24 février 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.
Il soutient que :
Concernant la régularité du jugement :
- le jugement est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;
Concernant le refus de titre de séjour :
- il méconnaît les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien et est entaché d'une erreur de fait ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
Concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale par voie d'exception ;
Concernant la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :
- elle est illégale par voie d'exception.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
1. M. A, de nationalité algérienne, demande l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 13 octobre 2021 lui refusant titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative🏛 : " () les présidents des formations de jugement des cours peuvent (), par ordonnance, rejeter (), après l'expiration du délai de recours () les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. () ".
Sur la régularité du jugement :
3. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. A ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit ou d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur le refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant () ".
5. Si M. A soutient résider en France depuis son entrée régulière en août 2004 sous couvert d'un visa Schengen, les pièces les plus anciennes produites à l'instance relatives à sa présence sur le territoire remontent à 2011. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que des décisions portant interdiction de retour pour deux ans ont été prises à son encontre le 29 avril 2016 et le 12 mars 2019. Ces périodes durant lesquelles l'intéressé avait interdiction de retour en France ne peuvent être prises en compte pour le calcul de la durée de résidence mentionnée au 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, alors même qu'il n'aurait pas quitté le territoire. Dès lors, il n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions fixées par ces stipulations à la date de l'arrêté attaqué. Le préfet des Bouches-du-Rhône a donc pu légalement refuser de lui délivrer un certificat de résidence sur le fondement du 1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : () 5) Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A, né en 1983, est célibataire et sans enfant. S'il fait valoir qu'il serait entré en France en 2004 et y résiderait depuis lors, ainsi qu'il a été dit, les pièces les plus anciennes relatives à sa présence en France remontent à 2011. Par ailleurs, il s'y est maintenu alors qu'il a fait l'objet de cinq obligations de quitter le territoire les 29 septembre 2009, 22 septembre 2011, 29 novembre 2013, 29 avril 2016 et 12 mars 2019, outre les interdictions de retour mentionnées au point 5. Enfin, si le requérant justifie que ses parents et une de ses surs résident régulièrement en France, il ne conteste pas les mentions de la décision attaquée indiquant des membres de sa fratrie résident en Algérie. Dans ces conditions, quand bien même il travaillerait de manière non-déclarée et justifie d'une activité d'éducateur bénévole dans un club de football, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris, au sens de l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien. Pour les mêmes motifs, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas davantage commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le refus de titre de séjour opposé à M. A n'est pas entaché des illégalités qu'il allègue. Dès lors, il n'est pas fondé à invoquer son illégalité par voie d'exception à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
9. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le refus de titre de séjour opposé à M. A n'est pas entaché des illégalités qu'il allègue. Dès lors, il n'est pas fondé à invoquer son illégalité par voie d'exception à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français. La seule durée de sa résidence en France, eu égard aux conditions de séjour de l'intéressé, ne peut être regardée comme de nature à faire obstacle au prononcé d'une interdiction de retour.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de M. A, qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B A.
Copie sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Fait à Marseille, le 13 juin 2022.
N°22MA01038
Délivrance d'un titre de séjour Éloignement Délai à compter d'une notification Délivrance d'une autorisation provisoire de séjour Erreur d'appréciation Expiration du délai Effet dévolutif de l'appel Délivrance d'un certificat de résidence Autorité publique Sûreté publiques Défense de l'ordre Infraction pénale Protection de la santé ou de la morale Liens personnels Liens familiaux Vie privée Club de football