CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 19 mai 2022
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 511 F-B
Pourvoi n° Y 21-10.685
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 MAI 2022
1°/ Mme [S] [A], veuve [W], domiciliée [Adresse 7],
2°/ M. [T] [W], domicilié [Adresse 2],
tous deux agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit de [U] [W], décédé,
ont formé le pourvoi n° Y 21-10.685 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme [Z] [X], domiciliée [Adresse 6],
2°/ à Mme [N] [X], domiciliée [Adresse 4],
3°/ à Mme [D] [X], domiciliée [Adresse 5],
tous trois venant aux droits de [Y] [X], décédé,
4°/ à la société [Y] [X], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 6], représentée par son liquidateur, Mme [Z] [X],
5°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
6°/ à la société Atelier l'Echelle, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8], venant aux droits de la société Cabinet d'architecture [V] [R] et [C] [H],
7°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF), société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [A], veuve [W], et M. [T] [W], de la SARL Boré, Aa de Bruneton et Mégret, avocat de Mmes [Ab], [N] et [D] [X] venant aux droits de [Y] [X], la société [Y] [X] représentée par son liquidateur, Mme [Z] [X], et la société MMA IARD, de Me Balat, avocat de la société Atelier l'Echelle, venant aux droits de la société Cabinet d'architecture [V] [R] et [C] [H], et la société Mutuelle des architectes français, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 mars 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 novembre 2020), Mme [W] et son fils, M. [T] [W], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit de [U] [W], ont, par déclaration du 23 novembre 2017, relevé appel du jugement d'un tribunal de grande instance ayant déclaré irrecevable comme prescrite leur action en responsabilité engagée contre M. [X], en son nom personnel et en qualité de liquidateur de la société [X], aux droits desquels viennent la société [Y] [X] représentée par son liquidateur Mme [Z] [X], Mmes [N], [Z] et [D] [X] venant aux droits de [Y] [X], et contre la société MMA IARD.
2. La société Cabinet d'architecture [V] [R] et [C] [H], aux droits de laquelle se trouve la société Atelier l'Echelle, et la société Mutuelle des architectes français ont été appelées en garantie.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Mme [W] et M. [T] [W] font grief à l'arrêt de constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel, alors :
« 1°/ que, lorsqu'une demande en annulation de la déclaration d'appel, fondée sur l'absence de mention, dans cette déclaration, des chefs du jugement critiqués, est rejetée par le conseiller de la mise en état au motif que, le chef de dispositif que l'appelant a entendu remettre en cause étant aisément identifiable, ce vice de forme ne cause aucun grief à l'intimé, la cour d'appel doit être regardée comme saisie de l'effet dévolutif de l'appel ; que, dans son ordonnance du 3 juillet 2018, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande des intimés tendant à l'annulation de la déclaration d'appel formée par les époux [W], au motif que, le dispositif du jugement attaqué ne comportant, outre les condamnations aux dépens et aux indemnités de procédure, qu'une seule disposition, par laquelle le jugement a déclaré l'action prescrite, l'appel portait nécessairement sur cette disposition, de sorte que les intimés ne justifiaient d'aucun grief résultant de la mention, dans cette déclaration, selon laquelle l'appel était « total » ; qu'en considérant, pour constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel, que la déclaration d'appel ne visait aucun chef de jugement critiqué, la cour d'appel a violé les
articles 562 et 901 du code de procédure civile🏛 ;
2°/ que le constat de l'absence d'effet dévolutif de l'appel ne bénéficie qu'à l'intimé qui s'en est prévalu devant la cour d'appel ; que seule la société MAF avait demandé à la cour d'appel de juger que l'acte d'appel des consorts [W] était dépourvu de tout effet dévolutif ; qu'en considérant qu'elle n'était saisie d'aucune demande, la cour d'appel a violé l'
article 562 du code de procédure civile🏛. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'
article 562 du code de procédure civile🏛, dans sa rédaction issue du
décret n° 2017-891 du 6 mai 2017🏛, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
5. En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.
6. Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d'appel fondée sur ce même grief aurait été rejetée.
7. En application des
articles L. 311-1 du code de l'organisation judiciaire🏛 et 542 du
code de procédure civile, seule la cour d'appel, dans sa formation collégiale, a le pouvoir de statuer sur l'absence d'effet dévolutif, à l'exclusion du conseiller de la mise en état dont les pouvoirs sont strictement définis à l'
article 914 du code de procédure civile🏛.
8. Ayant relevé que la déclaration d'appel mentionnait au titre de l'objet/portée de l'appel un « appel total » et ne visait aucun chef de jugement critiqué et qu'aucune régularisation de la déclaration d'appel n'était intervenue dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, la cour d‘appel, qui ne pouvait que constater que cette déclaration d'appel était dépourvue d'effet dévolutif, quand bien même le conseiller de la mise en état avait rejeté la demande d'annulation de cette déclaration d'appel fondée sur l'absence de mention des chefs de jugement critiqués faute de grief causé aux intimés, en a exactement déduit qu'elle n'était saisie d'aucune demande, l'absence d'effet dévolutif opérant pour l'ensemble des intimés.
9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [W] et M. [T] [W] aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par Mme [W] et M. [T] [W] et les condamne à payer à la société [Y] [X] représentée par son liquidateur, Mme [Z] [X], Mmes [N], [Z] et [D] [X] venant aux droits de [Y] [X], et la société MMA IARD, la somme globale de 3 000 euros et à la société Mutuelle des architectes français la somme globale de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour Mme [A], veuve [W], et M. [T] [W]
IL EST REPROCHE à l'arrêt attaqué d'avoir constaté l'absence d'effet dévolutif de l'appel ;
1°) ALORS QUE, lorsqu'une demande en annulation de la déclaration d'appel, fondée sur l'absence de mention, dans cette déclaration, des chefs du jugement critiqués, est rejetée par le conseiller de la mise en état au motif que, le chef de dispositif que l'appelant a entendu remettre en cause étant aisément identifiable, ce vice de forme ne cause aucun grief à l'intimé, la cour d'appel doit être regardée comme saisie de l'effet dévolutif de l'appel ; que, dans son ordonnance du 3 juillet 2018, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande des intimés tendant à l'annulation de la déclaration d'appel formée par les époux [W], au motif que, le dispositif du jugement attaqué ne comportant, outre les condamnations aux dépens et aux indemnités de procédure, qu'une seule disposition, par laquelle le jugement a déclaré l'action prescrite, l'appel portait nécessairement sur cette disposition, de sorte que les intimés ne justifiaient d'aucun grief résultant de la mention, dans cette déclaration, selon laquelle l'appel était « total » ; qu'en considérant, pour constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel, que la déclaration d'appel ne visait aucun chef de jugement critiqué, la cour d'appel a violé les
articles 562 et 901 du code de procédure civile🏛 ;
2°) ALORS QU'en tout état de cause, le constat de l'absence d'effet dévolutif de l'appel ne bénéficie qu'à l'intimé qui s'en est prévalu devant la cour d'appel ; que seule la société MAF avait demandé à la cour d'appel de juger que l'acte d'appel des consorts [W] était dépourvu de tout effet dévolutif ; qu'en considérant qu'elle n'était saisie d'aucune demande, la cour d'appel a violé l'
article 562 du code de procédure civile🏛.