Jurisprudence : CA Aix-en-Provence, 04-06-2013, n° 12/21809

CA Aix-en-Provence, 04-06-2013, n° 12/21809

A0692KGQ

Référence

CA Aix-en-Provence, 04-06-2013, n° 12/21809. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8392266-ca-aixenprovence-04062013-n-1221809
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Abstract

Aux termes d'un arrêt rendu le 4 juin 2013, la cour d'appel d'Aix-en-Provence rappelle que la subdélégation non expressément autorisée par le client, d'un avocat à un autre avocat n'exerçant pas au sein d'un même cabinet, ne crée pas de rapport direct d'avocat à client entre l'avocat subdélégué et le client de l'avocat déléguant (CA Aix-en-Provence, 4 juin 2013, n° 12/21809 ; cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat").



COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE Opp. Taxes
ORDONNANCE SUR CONTESTATION
D'HONORAIRES D'AVOCATS
DU 04 JUIN 2013
N°2013/ 487
Rôle N° 12/21809

Olivier Z
C/
Ludovic Y
Grosse délivrée
le
à
Monsieur Olivier Z
Me Odile X
Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel
Décision fixant les honoraires de M. Ludovic Y rendue le
12 Octobre 2012 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de NICE.
DEMANDEUR
Monsieur Olivier Z,
demeurant HYERES
comparant en personne
DÉFENDEUR
Monsieur Ludovic Y, avocat
demeurant NICE
représenté par Me Odile MONACO, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ
L'affaire a été débattue le 03 Avril 2013 en audience publique devant
Monsieur Jean Yves MARTORANO, Conseiller,
délégué par Ordonnance du Premier Président.
Greffier lors des débats Madame Jessica FREITAS.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juin 2013
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juin 2013
Signée par Monsieur Jean Yves MARTORANO, Conseiller et Madame Jessica FREITAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***

EXPOSÉ

Vu le recours formé par Monsieur Olivier Z par lettre recommandée expédiée le 13 novembre 2012 et enregistré au greffe le 15 novembre 2012, contre la décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice, en date du 12 octobre 2012, notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue le 16 octobre 2012, qui a fixé à la somme de 1.000,00 euros HT soit 1.196,00 euros TTC les honoraires dus à Maître Ludovic Y;
Vu ladite décision de taxe n°110647, rendue sur demande de Maître Ludovic Y formée par lettre reçue au secrétariat de l'Ordre le 14 juin 2012, après recueil des observations des parties, par référence d'une part, aux dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 c'est à dire en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, d'autre part par référence à l'article 11-2 du Règlement Intérieur National, c'est à dire en fonction, notamment, de chacun des éléments suivants conformément aux usages le temps consacré à l'affaire, le travail de recherche, la nature et la difficulté de l'affaire, l'importance des intérêts en cause, l'incidence des frais et charges du cabinet auquel appartient l'avocat, sa notoriété, ses titres, son ancienneté, son expérience et la spécialisation dont il est titulaire, les avantages et le résultat obtenus au profit du client par son travail, ainsi que le service rendu à ce dernier et la situation de fortune du client, dans une affaire de résiliation de contrat de mandat d'achat de véhicule automobile ;
Vu, développées oralement, les conclusions en date du 03 avril 2013 par lesquelles Monsieur Olivier Z stigmatise la violation par le bâtonnier du principe de la contradiction, soutient qu'il avait confié son affaire à Maître Eve ... qui s'était engagée à le défendre gracieusement et à n'être rémunérée que sur les sommes allouées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, affirme qu'il n'a jamais confié de mandat à Maître Ludovic Y, dont il n'a appris l'intervention que lors de la réception de la note d'honoraires, souligne que cet avocat est dans l'impossibilité, en infraction aux articles 8 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat et 11.2 du Règlement intérieur National de la profession d'avocat, de justifier d'un mandat écrit et d'avoir satisfait à son obligation d'information préalable des modalités de détermination de ses honoraires et de leur évolution prévisible, et sollicite en conséquence l'annulation de la décision entreprise, le rejet des prétentions de Maître Ludovic Y et sa condamnation au paiement d'une somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu, développées oralement, les conclusions en date du 03 avril 2013 par lesquelles Maître Ludovic Y expose que M. Z était un ami de Maître Eve ..., du barreau de Grasse, laquelle l'avait chargé de représenter les intérêts de ce client - dont elle l'avait garanti qu'elle s'occuperait de lui faire régler ses honoraires -, dans une procédure qui l'opposait au garage SARL COM 1, qu'il a donc rédigé des conclusions que son associée était allée plaider devant le Tribunal d'Instance de Colombes, affirme que Monsieur Z avait approuvé lesdites conclusions auprès de Me ..., fait valoir qu'il a échangé des correspondances tant avec le conseil de la partie adverse qu'avec le président du Tribunal d'Instance de Colombes et que son nom figure d'ailleurs comme représentant de Monsieur Olivier Z sur le jugement rendu par ce tribunal, soutient en conséquence que ses diligences sont incontestables, souligne que M. Z ne lui a pas adressé les pièces visées au soutien de ses écritures d'appel, estime que le bâtonnier, tenu par les délais, a rendu sa décision dans le respect du principe de la contradiction, et sollicite la confirmation de sa décision qui a justement fait remarquer que " la facturation forfaitaire pour 1 196 euros T.T.C. est bien plus favorable à Mr Z que la facturation au temps passé que Maître Y aurait pu revendiquer au taux horaire de 230 eurosH. T. de l'heure ", et la condamnation de Monsieur Olivier Z au paiement d'une somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR QUOI
- sur la recevabilité
du recours
Attendu que les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité du recours formé dans les délais et selon les formes prescrites par l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 et qui sera en conséquence déclaré recevable ;
des pièces produites
Attendu 'il résulte de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 que la procédure d'appel en matière de fixation d'honoraires est orale ;
Qu'en l'espèce Monsieur Olivier Z a communiqué ses écritures avant l'audience, mais pas les pièces visées dans lesdites écritures ;
Que cependant ces pièces (au nombre de 15) sont principalement constituées des échanges épistolaires avec le bâtonnier et Me Y lui-même, de la décision du bâtonnier et de 8 échanges de courriels entre M. Z et Me ... sur lesquelles, à la barre Me Y a pu utilement présenter des observations ;
Que le principe de la contradiction a donc été respecté et qu'il n'y a donc pas lieu d'ordonner la distraction (que Me Y ne réclame d'ailleurs pas expressément) des pièces produites par l'appelant ;
- sur le fond
de la régularité de la décision du bâtonnier
Attendu que l'article 175 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 dispose notamment que ' le bâtonnier, ou le rapporteur qu'il désigne, recueille préalablement les observations de l'avocat et de la partie ; il prend sa décision dans les quatre mois [délai qui] peut être prorogé dans la limite de quatre mois par décision motivée ' ;
Qu'il résulte de ce texte que le délai dont il dispose pour statuer est un délai maximum prescrit à peine de nullité et que le bâtonnier n'est pas tenu à l'organisation d'un échange de pièces ni à un débat contradictoire, mais seulement de provoquer les observations des parties ;
Attendu en l'espèce que le bâtonnier a demandé les explications des parties ; que la page 3 de sa décision est entièrement consacrée à l'exposé de leur position respective ; que le dernier envoi de Maître Ludovic Y au bâtonnier, en date du 25 septembre 2012 et communiqué à Monsieur Olivier Z par lettre du 08 octobre 2012 et auquel ce dernier se plaint de n'avoir pas pu répondre avant la décision intervenue le 12 octobre 2012, est ainsi résumé par le bâtonnier ' Par courrier du 25 septembre 2012, Maître Y confirme sa réclamation.' ;
Qu'ainsi donc ce dernier courrier, qui n'apportait pas d'élément supplémentaire utile à la prise de décision, n'appelait pas non plus de réponse supplémentaire de Monsieur Olivier Z, et le bâtonnier a pu prendre, dans le délai de 4 mois qui s'achevait le 14 octobre 2012, la décision attendue de lui en ayant parfaitement respecté l'exigence de recueil des observations des parties ;
Attendu qu'il n'y a donc pas lieu d'annuler cette décision comme le demande Monsieur Olivier Z ;
de la recevabilité de la demande de fixation d'honoraires
Attendu que l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 énonce que les honoraires de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client. A défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci;
Attendu par ailleurs que la procédure spéciale prévue par le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ne s'applique qu'aux contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires des avocats ; qu'il en résulte que le bâtonnier et, sur recours, le premier président, n'ont pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l'avocat à l'égard de son client résultant d'un manquement à son devoir de conseil et d'information ou de toute autre éventuelle faute susceptible d'engager sa responsabilité, ni non plus celui de trancher un différend sur le débiteur des honoraires, l'existence ou la validité du mandat
1
C. ... ... 2 8 septembre 2005 N° de pourvoi 04-10553 - Bull civ II n° 214 ; C. ... civ 1 15 décembre 1999 N° de pourvoi 97-22424 publié au bulletin
ou tout autre acte mais seulement de fixer le montant des honoraires au regard des critères rappelés ci-dessus ;
Qu'ainsi si les diligences accomplies par un collaborateur ou un juriste au sein d'un cabinet d'avocat constituent des frais exposés par l'avocat dans l'exercice de son mandat de représentation et d'assistance et doivent être prises en compte dans la détermination de ses honoraires
2
C. ... civ 2 07 février 2013
, en revanche le litige opposant deux avocats, notamment quant à une rétrocession d'honoraires, ne relève pas de la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret de 1991, qui n'est applicable qu'aux différends en matière d'honoraires entre un avocat et son client
3
C. ... civ 2 17 mars 2011
;
Qu'il se déduit de ces principes, du caractère intuitu personae du mandat confié à l'avocat et de l'article 1994 du code civil, que la subdélégation non expressément autorisée par le client, d'un avocat à un autre avocat n'exerçant pas au sein d'un même cabinet, ne crée pas de rapport direct d'avocat à client entre l'avocat subdélégué et le client de l'avocat déléguant ;
Attendu en l'espèce que, dans ses écritures soutenues oralement à la barre, Maître Ludovic Y indique
'A l'origine, Mr Z était un ami de Maître Eve ..., du barreau de Grasse, laquelle avait chargé Maître Y de représenter les intérêts de celui-ci dans une procédure qui l'opposait au garage SARL COM 1.
Maître Y avait donc rédigé des conclusions (pièce n°l) et Maître ... ..., qui était à l'époque son ancien associé, était partie plaider l'affaire auprès du Tribunal d'Instance de COLOMBES.
Le client étant recommandé par Maître ..., et cette dernière ayant garanti le concluant de s'occuper de lui faire parvenir ses honoraires, ce dernier a donc accompli toutes diligences utiles.
Malheureusement, Mr Z n'a pas obtenu gain de cause, ce qui l'a profondément contrarié.
Il a donc décidé de ne pas régler Maître Y, malgré maintes relances de sa part (pièces n° 3 et 5).'
Que les relances visées dans ces écritures et produites sous les numéros 3 et 5, sont deux courriers recommandés adressés à Monsieur Olivier Z les 09 juin 2011 et 28 juin 2011 qui indiquent
- le premier ' Comme vous le savez, c'est moi qui ai été missionné par Maître Eve ... pour vous représenter dans la procédure qui vous opposait à la SARL COMM 1 (...) '
- le second ' (...) Vous ne pouvez ignorer que j'étais en charge de votre procédure par devant le Tribunal d'Instance de COLOMBES puisque mon nom est inscrit tant sur mes conclusions que sur le jugement qui a été rendu (...) ' ;
Attendu qu'il résulte expressément de ces diverses écritures qu'il n'y a pas eu de relation d'avocat à client au sens des articles 10 de la loi du 31 décembre 1971 et 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, entre Maître Ludovic Y et Monsieur Olivier Z, en sorte que la demande de fixation d'honoraires présentée par Maître Ludovic Y est irrecevable ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser chacune des parties supporter l'intégralité de ses frais non compris dans les dépens ;
Attendu que les dépens seront à la charge de la partie succombante.

PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, sur recours en matière de contestation d'honoraires,
Déclarons recevable le recours formé par Monsieur Olivier Z,
Rejetons la demande d'annulation de la décision du bâtonnier, présentée par Monsieur Olivier Z ;
Infirmant la décision n°110647 rendue le 12 octobre 2012 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice et statuant à nouveau
Déclarons irrecevable la demande de fixation d'honoraires présentée par Maître Ludovic Y ;
Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamnons Maître Ludovic Y aux dépens.
Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence à la date indiquée ci-dessus dont les parties comparantes avaient été avisées à l'issue des débats.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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