CIV. 1
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 mars 2022
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 243 F-D
Pourvoi n° X 20-22.341
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2022
La société Horizon, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° X 20-22.341 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2020 par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société [X] [G], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Socobois, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de la société Horizon, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de la société [X] [G], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société civile immobilière Horizon du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Socobois.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 29 septembre 2020), par acte authentique du 31 mars 2014, la société civile immobilière Horizon (l'acquéreur) a acquis une propriété immobilière par l'intermédiaire de la société [X] [G], agent immobilier (l'agent immobilier). Cet acte comportait une clause figurant également dans la promesse de vente du 30 janvier 2014 et stipulant que les parties avaient été informées des dégâts pouvant être occasionnés par la présence de mérule dans un bâtiment, que l'acquéreur n'avait pas constaté lors de la visite du bien la présence de certains éléments énumérés parmi les plus révélateurs de la potentialité de la présence de ce champignon, que le vendeur déclarait ne pas avoir constaté jusqu'à ce jour l'existence de tels indices et que l'acquéreur avait dispensé le vendeur et le notaire de faire effectuer la recherche de la présence éventuelle de mérule par un diagnostiqueur spécialisé.
3. Ayant constaté la présence d'un champignon lignivore de type mérule, la société Horizon a obtenu la désignation d'un expert judiciaire, puis a assigné en responsabilité et indemnisation l'agent immobilier, ainsi que la société Socobois, qui avait procédé à d'autres diagnostics techniques.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé
4. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
5. La société Horizon fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :
« 2°/ que l'agent immobilier qui prête son concours à la réalisation d'un acte de vente est tenu d'un devoir de conseil, même envers des acquéreurs professionnels, lui imposant, lorsque l'immeuble présente des risques de développement de champignons lignivores, de conseiller la réalisation d'un diagnostic parasitaire en permettant la détection ; qu'en statuant comme elle l'a fait motifs pris que la responsabilité de l'agent immobilier pour manquement à son obligation d'information et de conseil ne peut pas être engagée, sa mission n'étant pas d'inspecter lui-même l'immeuble et il ne lui appartenait pas de conseiller aux acquéreurs professionnels de l'immobilier de faire effectuer un diagnostic de détection des champignons lignivores auquel ils ont renoncé devant notaire", la cour d'appel a violé les dispositions de l'
article 1382, devenu 1240 du même code ;
3°/ que l'agent immobilier qui prête son concours à la réalisation d'un acte de vente est tenu d'un devoir de conseil, même envers des acquéreurs professionnels, lui imposant, lorsque l'immeuble présente des risques de développement de champignons lignivores, de conseiller la réalisation d'un diagnostic parasitaire en permettant la détection ; qu'en statuant comme elle l'a fait après avoir pourtant relevé que l'état de vétusté de l'habitation, l'absence d'occupation depuis plusieurs années, et les mentions figurant sur les états de diagnostic technique avertissaient clairement les époux [M], professionnels de l'immobilier, de l'humidité présente dans certains murs, et donc des risques potentiels de présence de mérules", ce dont il s'inférait que les conditions de développement de champignons lignivores étaient réunies, de sorte qu'il appartenait à l'agent immobilier de conseiller la réalisation d'un diagnostic de détection de ces champignons, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations a violé les dispositions de l'
article 1382 du code civil🏛, devenu 1240 du
même code🏛 civil ;
4°/ que l'agent immobilier qui prête son concours à la réalisation d'un acte de vente est tenu d'un devoir de conseil, même envers des acquéreurs professionnels, lui imposant, lorsque l'immeuble présente des risques de développement de champignons lignivores, de conseiller la réalisation d'un diagnostic parasitaire en permettant la détection ; qu'en statuant comme elle l'a fait motifs pris que la SCI Horizon a renoncé devant notaire à la réalisation d'un diagnostic de détection des champignons lignivores, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à écarter le devoir de conseil de l'agent immobilier, en violation des dispositions de l'
article 1382 du code civil🏛, devenu 1240 du
même code🏛. »
Réponse de la Cour
6. Après avoir retenu que n'était pas rapportée la preuve de la connaissance de l'agent immobilier de la présence de mérule dans l'immeuble et d'une dissimulation de cette information, la cour d'appel a relevé que l'acquéreur, professionnel de l'immobilier, avait acquis le bien en cause, à un prix peu élevé, en connaissance de son état de vétusté, de son absence d'occupation depuis des années et de la présence d'humidité dans certains murs révélée par les diagnostics techniques, qu'il était ainsi averti de risques potentiels de mérule et informé par la clause insérée dans la promesse de vente et l'acte de vente des dégâts pouvant être occasionnés par sa présence dans le bâtiment et qu'il avait renoncé devant le notaire à demander au vendeur la réalisation d'un diagnostic portant sur la recherche de ce champignon.
7. Elle a pu en déduire que l'agent immobilier n'était pas tenu de conseiller à l'acquéreur de procéder à un tel diagnostic et qu'il n'avait pas commis de faute.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Horizon aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SARL Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Horizon.
La SCI Horizon fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à voir la SARL [X] [G] condamnée à lui verser la somme de 178.854,18 euros en réparation de son préjudice résultant des travaux payés et à réaliser, à la somme de 30.000 euros pour la perte de chance de louer le bien acheté et à la somme de 13.000 euros au titre de la commission indument versée ;
1°) ALORS QUE le mandataire qui commet un dol en taisant une information dont il a connaissance commet une faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle ; qu'en jugeant que « la SCI Horizon ne peut reprocher à la SARL [G] d'avoir volontairement dissimulé la présence de mérule alors qu'ils ne démontrent aucunement que cette dernière en avait connaissance » après avoir pourtant relevé, d'une part que les époux [M] « produisent l'attestation rédigée par Monsieur [Aa] [H] qui, intéressé par la propriété, l'a fait visiter au mois d'août 2013 par un architecte Monsieur [P] [E] [J] qui l'a « alerté immédiatement sur la présence de mérule, mais également sur les faiblesses extrêmes des charpentes de l'habitation principale et de la dépendance, rongées par les capricornes et dont le traitement lui semblait non seulement insuffisant, mais aussi inefficace ». Il a ajouté avoir avisé Monsieur [G] « du fait de la présence de mérule, et des problèmes de capricornes sur la charpente, Mr [G] nous a indiqué être en mesure de négocier avec les propriétaires et d'obtenir un rabais conséquent » (arrêt attaqué p. 6) et que « Monsieur [Ab] [G] a déposé plainte auprès du commissariat de police d'Aurillac pour des faits d'usage d'attestation inexacte, contestant avoir été informé par Monsieur [Aa] [H] de la présence de mérules au cours des négociations. La procédure a été classée sans suite » (arrêt attaqué p. 7), et que « Dans son rapport d'expertise, Monsieur [Ac] [S] a indiqué que « la manifestation du champignon est parfaitement identifiable pour une personne professionnelle. Cette manifestation est caractérisée par la déformation des bois ainsi que par son aspect fissuré et craqué. Ces signes apparents sont présents sur les photographies présentées par Monsieur [M], photographies prises par lui lors de la visite des lieux, préalable à la vente ». L'expert indique également que « il convient de noter que les désordres tant de mérule que de parasites affectant les bois présentent un caractère visible » (arrêt attaqué p. 7) et, d'autre part, que « la SCI HORIZON ne peut dès lors reprocher à la SARL [G] d'avoir volontairement dissimulé la présence de mérule alors qu'ils ne démontrent aucunement que cette dernière en avait connaissance » (arrêt attaqué p.7), la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations d'où il s'évinçait que Monsieur [Ad] avait eu connaissance de la présence de mérule et de capricorne, a violé les dispositions de l'
article 1382 du code civil🏛 devenu 1240 du
même code🏛 ;
2°) ALORS QUE l'agent immobilier qui prête son concours à la réalisation d'un acte de vente est tenu d'un devoir de conseil, même envers des acquéreurs professionnels, lui imposant, lorsque l'immeuble présente des risques de développement de champignons lignivores, de conseiller la réalisation d'un diagnostic parasitaire en permettant la détection ; qu'en statuant comme elle l'a fait motifs pris que « la responsabilité de l'agent immobilier pour manquement à son obligation d'information et de conseil ne peut pas être engagée, sa mission n'étant pas d'inspecter lui-même l'immeuble et il ne lui appartenait pas de conseiller aux acquéreurs professionnels de l'immobilier de faire effectuer un diagnostic de détection des champignons lignivores auquel ils ont renoncé devant notaire », la cour d'appel a violé les dispositions de l'
article 1382, devenu 1240 du même code🏛 ;
3°) ALORS QUE l'agent immobilier qui prête son concours à la réalisation d'un acte de vente est tenu d'un devoir de conseil, même envers des acquéreurs professionnels, lui imposant, lorsque l'immeuble présente des risques de développement de champignons lignivores, de conseiller la réalisation d'un diagnostic parasitaire en permettant la détection ; qu'en statuant comme elle l'a fait après avoir pourtant relevé que « l'état de vétusté de l'habitation, l'absence d'occupation depuis plusieurs années, et les mentions figurant sur les états de diagnostic technique avertissaient clairement les époux [M], professionnels de l'immobilier, de l‘humidité présente dans certains murs, et donc des risques potentiels de présence de mérules » (arrêt attaqué p. 7) ce dont il s'inférait que les conditions de développement de champignons lignivores étaient réunies, de sorte qu'il appartenait à la SARL [X] [G] de conseiller la réalisation d'un diagnostic de détection de ces champignons, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations a violé les dispositions de l'
article 1382 du code civil🏛, devenu 1240 du
même code🏛 civil ;
4°) ALORS QUE l'agent immobilier qui prête son concours à la réalisation d'un acte de vente est tenu d'un devoir de conseil, même envers des acquéreurs professionnels, lui imposant, lorsque l'immeuble présente des risques de développement de champignons lignivores, de conseiller la réalisation d'un diagnostic parasitaire en permettant la détection ; qu'en statuant comme elle l'a fait motifs pris que la SCI Horizon a renoncé devant notaire à la réalisation d'un diagnostic de détection des champignons lignivores, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à écarter le devoir de conseil de l'agent immobilier, en violation des dispositions de l'
article 1382 du code civil🏛, devenu 1240 du
même code🏛.