Jurisprudence : Cass. soc., 23-05-2013, n° 12-13.875, F-P+B, Cassation partielle

Cass. soc., 23-05-2013, n° 12-13.875, F-P+B, Cassation partielle

A9154KDE

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:SO00950

Identifiant Legifrance : JURITEXT000027452006

Référence

Cass. soc., 23-05-2013, n° 12-13.875, F-P+B, Cassation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8217976-cass-soc-23052013-n-1213875-fp-b-cassation-partielle
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Abstract

Les dispositions relatives à la rémunération du travail effectif dans le cadre du régime d'équivalence du décret n° 2001-1384 du 31 décembre 2001, qui instituait une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, n'ont pas été affectées par la décision d'annulation partielle du Conseil d'Etat du 28 avril 2006 (CE, 28 avril 2006, 1° et 6° s-s-r., n° 242727) qui ne portent sur les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définissait pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la Directive 93/104 du 23 novembre 1993.



SOC. PRUD'HOMMES CH.B
COUR DE CASSATION
Audience publique du 23 mai 2013
Cassation partielle
M. BLATMAN, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt no 950 F-P+B
Pourvoi no E 12-13.875
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par l'association APOGEI 94 - Foyer Madeleine Y, Association parentale d'organisation et de gestion d'établissements pour personnes handicapées mentales du Val-de-Marne, dont le siège est Créteil,
contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2011 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant à Mme Odile X, domiciliée Créteil,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 10 avril 2013, où étaient présents M. Blatman, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Flores, conseiller référendaire rapporteur, M. Ballouhey, conseiller, M. Aldigé, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Flores, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de l'association APOGEI 94 - Foyer Madeleine Y, de la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat de Mme X, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X a été engagée, à compter du 30 juillet 1994, par l'Association des parents d'enfants inadaptés, aux droits de laquelle est venue l'Association parentale d'organisation et de gestion d'établissements pour personnes handicapées mentales du Val-de-Marne (APOGEI 94) ; qu'estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre des congés trimestriels et du travail en chambre de veille, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen
Vu les articles L. 3121-9 du code du travail et 2 du décret no 2001-1384 du 31 décembre 2001, devenu l'article R. 314-202 du code de l'action sociale et des familles ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une certaine somme à titre de rappel de salaire 2004-2006, l'arrêt retient que par arrêt du 28 avril 2006, le Conseil d'Etat a annulé le décret no 2001-1384 du 31 décembre 2001, qui instituait une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, en tant qu'il ne fixait pas les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définissait pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la directive du 23 novembre 1993 ; que ce n'est que par un décret du 29 janvier 2007 que ces garanties seront instituées ; que la salariée effectuait des nuits de permanence au sein de l'établissement, pendant lesquelles elle devait intervenir immédiatement chaque fois que nécessaire et rester à la disposition permanente de son employeur et des résidents, une chambre de veille étant mise à sa disposition ; qu'aucun système d'équivalence ne pouvait lui être valablement opposé pour la période 2004-2006 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le décret no 2001-1384 du 31 décembre 2001, qui instituait une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, n'avait été annulé par l'arrêt du Conseil d'Etat du 28 avril 2006 (req. no 242.727, 243.359, 243.385 et 243.703, M. ... et autres), qu' en tant qu'il ne fixait pas les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définissait pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la directive du 23 novembre 1993, de sorte que les dispositions relatives à la rémunération du travail effectif dans le cadre du régime d'équivalence n'étaient pas affectées par la décision d'annulation partielle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'APOGEI 94 - Foyer Madeleine Y à payer à Mme X la somme de 17 000,48 euros à titre de rappel de salaire 2004-2006 et 1 700,05 euros de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 1er décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme X aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour l'association APOGEI 94 - Foyer Madeleine Y.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'association Apogei 94 à payer à Mme Odile X les sommes de 4.201,84 euros au titre des congés payés trimestriels 2001 à 2003, de 3.113,88 euros au titre des congés payés trimestriels 2004 et 2005 et de 9.127,89 euros au titre des congés payés trimestriels 2006 à 2011 ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande au titre des congés payés trimestriels, Odile X se prévaut de l'article 6 de l'annexe 3 de la convention collective qui les institue ainsi que du principe " à travail égal, salaire égal ", tandis que l'Apogei 94 s'y oppose en se référant à l'annexe 10 de la convention collective ; qu'il n'est pas discuté que, pendant la période litigieuse, Odile X s'occupait de personnes adultes handicapées ; que le contrat à durée indéterminée du 15 février 1995 à effet du 6 mars suivant précisait en son article 3 que la relation contractuelle était soumise aux dispositions de la convention collective de mars 1966, annexe 4 ; que cette annexe, qui contient des dispositions spécifiques au personnel paramédical non cadre, dispose, en son article 6, que " sans que le fonctionnement des établissements et services en soit perturbé " les personnels ont droit, selon leur statut, au bénéfice, soit de six jours de congés consécutifs, non compris les jours fériés et repos hebdomadaires, au cours de chacun des trois trimestres qui ne comprennent pas le congé annuel ; qu'au regard de son statut, elle avait contractuellement droit aux trois jours ci-dessus prévus par trimestre ; que ceci étant, elle en réclame six en se prévalant de l'annexe 3 qui dispose en son article 6 qu'en " sus des congés payés annuels accordés selon les dispositions de l'article 22 de la convention collective, les personnels visés par la présente annexe ont droit au bénéfice de congés payés supplémentaires, au cours de chacun des trois trimestres qui ne comprennent pas le congé annuel, pris au mieux des intérêts de service, aux conditions suivantes, pour le personnel non cadre trois jours consécutifs, non compris les jours fériés et le repos hebdomadaire, par trimestre " ; que cette annexe 3 de la convention collective a pour titre " Dispositions particulières au personnel éducatif, pédagogique et social non cadre " et précise qu'en sont bénéficiaires les personnels chargés dans les établissements et services du champ d'application professionnel fixé à l'article 1er de ladite convention, de la mise en oeuvre des techniques éducatives, pédagogiques et sociales ; qu'en prévoyant que des congés supplémentaires ne seraient attribués au personnel relevant de l'annexe 10, que par un accord distinct et simultané, les parties à l'avenant 145 ont par là même exclu l'application à ces personnes des dispositions relatives aux congés trimestriels contenues dans d'autres annexes à la convention collective ; qu'aucun accord distinct n'étant intervenu pour le personnel travaillant au sein des établissements pour personnes adultes handicapées, la demande d'Odile X est sans fondement conventionnel ; que ceci étant, il est établi qu'alors qu'Odile X soutient que des salariés, dont elle précise l'identité, travaillant dans le même foyer et exerçant des fonctions qui, selon l'employeur, les exclurait du bénéfice de six jours de congés supplémentaires, se sont vus reconnaître le bénéfice des congés payés supplémentaires, ce qui n'est pas contesté et ce dont elle justifie, l'Apogei 94 ne justifie pas, alors que cela lui appartient, des motifs objectifs de différence de traitement, le seul fait que le contrat de travail des salariés en cause aurait, par erreur, fait référence à l'annexe 3 n'étant pas de nature à justifier cette différence de traitement entre des salariés effectuant tous un travail de même nature dans des établissements pour personnes handicapées adultes ; qu'Odile X revendique donc à bon droit une indemnité compensatrice au titre des congés qui ne lui sont pas accordés ; que le montant des demandes pour la période non prescrite n'est pas contesté ; qu'il y sera fait droit, étant observé que ce n'est que postérieurement à la décision déférée que l'Apogei 94 a fait signer à Odile X un avenant qui précise que l'annexe 10 lui est applicable, ce qui au demeurant ne modifie pas les termes du litige, la salariée ne pouvant valablement renoncer à se trouver dans une situation identique à celle de ses collègues ;
ALORS QUE l'erreur n'est pas créatrice de droit ; qu'en retenant que l'association Apogei 94 ne justifiait pas de motifs objectifs de différence de traitement entre Mme X et les autres salariés dont celle-ci prétendait qu'ils avaient bénéficié des congés payés trimestriels litigieux, et en ajoutant que le seul fait que le bénéfice de cet avantage aurait été concédé par erreur n'était pas de nature à justifier une différence de traitement entre des salariés effectuant un même travail (arrêt attaqué, p. 3 in fine), cependant qu'un salarié ne saurait, sur le fondement du principe " à travail égal, salaire égal ", prétendre bénéficier lui aussi d'un avantage consenti par erreur, insusceptible en tant que tel de constituer un droit, de sorte qu'il incombait aux juges du fond de rechercher si l'erreur invoquée par l'association Apogei 94 était avérée, la cour d'appel, qui a éludé cette question jugée par elle à tort inopérante, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1133-1 du code du travail, des articles 1109, 1110 et 1134 du code civil et du principe " à travail égal, salaire égal ".
SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'association Apogei 94 à payer à Mme Odile X la somme de 17.000,48 euros à titre de rappel de salaire 2004-2006 et celle de 1.700 euros au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande de salaire au titre du travail en chambre de veille, il résulte de l'article L. 3121-1 du code du travail que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que si, en application de la directive 93/04, tous les temps de présence au sein de l'entreprise doivent être comptabilisés pour apprécier si les temps de repos minimum et la durée maximale hebdomadaire de travail sont respectés, cette directive ne trouve pas à s'appliquer à la rémunération des travailleurs ; que sur ce point, l'article L. 3121-9 du code du travail dispose qu'une durée du travail équivalente à la durée légale peut être instituée dans les professions et pour des emplois déterminés comportant des périodes d'inaction soit par décret, pris après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche, soit par décret en Conseil d'Etat, ces périodes étant alors rémunérées conformément aux usages ou aux conventions ou accords collectifs de travail ; que par arrêt du 28 avril 2006, le Conseil d'Etat a annulé le décret no 2001-1384 du 31 décembre 2001, qui instituait une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, en tant qu'il ne fixait pas les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définissait pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la directive du 23 novembre 1993 ; que ce n'est que par un décret du 29 janvier 2007 que ces garanties seront instituées ; que la demande de rappel de salaires formée par Odile X, dont il est constant qu'elle effectuait des nuits de permanence au sein de l'établissement, pendant lesquelles elle devait intervenir immédiatement chaque fois que nécessaire et rester à la disposition permanente de son employeur et des résidents, une chambre de veille étant mise à sa disposition, demande qui porte sur la période 2004 à 2006 est donc, aucun système d'équivalence ne pouvant lui être valablement opposé, justifiée ; que l'Apogei 94 ne forme aucune critique sur le montant des sommes réclamées, lesquelles, au regard des calculs effectués par Odile X, sont pertinentes ; qu'il sera donc fait droit à cette demande ;
ALORS QU' en estimant qu'en l'état de l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 28 avril 2006 (req. no 242.727, 243.359, 243.385, et 243.703, M. ... et autres), prononçant l'annulation du décret du 31 décembre 2001 instituant un régime d'équivalence, aucun régime d'équivalence ne se trouvait en vigueur dans le courant des années 2004 à 2006 pouvant être invoqué par l'association Apogei 94, cependant que l'annulation du décret litigieux n'a été que partielle, " en tant qu'il ne fixe pas les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définit pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la directive du 23 novembre 1993 ", sans remettre en cause le régime d'équivalence proprement dit, qui se trouvait donc applicable au titre des années en cause, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article R. 314-202 du code de l'action sociale et des familles.

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