Jurisprudence : Cass. com., 22-05-2013, n° 12-15.305, F-P+B, Cassation partielle sans renvoi

Cass. com., 22-05-2013, n° 12-15.305, F-P+B, Cassation partielle sans renvoi

A9153KDD

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:CO00515

Identifiant Legifrance : JURITEXT000027451845

Référence

Cass. com., 22-05-2013, n° 12-15.305, F-P+B, Cassation partielle sans renvoi. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8217975-cass-com-22052013-n-1215305-fp-b-cassation-partielle-sans-renvoi
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Abstract

Selon l'article L. 631-19-1 du Code de commerce, lorsque le redressement de l'entreprise le requiert, le tribunal, sur la demande du ministère public, peut subordonner l'adoption du plan de redressement au remplacement d'un ou plusieurs dirigeants ou ordonner à cette fin et dans les mêmes conditions, la cession des parts sociales détenues par un ou plusieurs dirigeants de droit ou de fait.



COMM. CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 22 mai 2013
Cassation partielle sans
renvoi
M. ESPEL, président
Arrêt no 515 F-P+B
Pourvoi no J 12-15.305
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par M. Gil Le Z, domicilié Paris,
contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2012 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant
1o/ à M. Fabrice Y, domicilié Le Bignicourt-sur-Saulx,
2o/ à la société Le Château, société civile immobilière, dont le siège est Bignicourt-sur-Saulx,
3o/ à la société Philippe Contant Cardon, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est Troyes, prise en la personne de M. V, en qualité de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la SCI Le Château,
4o/ à la société Dargent-Tirmant-Raulet, société civile professionnelle, dont le siège est Reims, prise en la personne de M. T, mandataire judiciaire de la SCI Le Château,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 9 avril 2013, où étaient présents M. Espel, président, Mme Schmidt, conseiller référendaire rapporteur, M. Gérard, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Schmidt, conseiller référendaire, les observations de Me Spinosi, avocat de M. Le Z, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. Y et des sociétés Le Château et Dargent-Tirmant-Raulet et Contant Cardon, l'avis de Mme ..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Vu les articles L. 631-19-1 et R. 631-34-1 du code de commerce ;
Attendu que selon le premier de ces textes, lorsque le redressement de l'entreprise le requiert, le tribunal, sur la demande du ministère public, peut subordonner l'adoption du plan de redressement au remplacement d'un ou plusieurs dirigeants ou ordonner à cette fin et dans les mêmes conditions, la cession des parts sociales détenues par un ou plusieurs dirigeants de droit ou de fait ; qu'il s'ensuit que la demande du ministère public tendant à la cession forcée des parts sociales du dirigeant doit être faite dans les formes et délais prescrits par le second de ces textes ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Le Chateau, ayant deux associés et co-gérants M. Y et M. Le Z, a été mise en redressement judiciaire le 16 mars 2010 ; que chaque associé a proposé un plan de continuation prévoyant la cession des parts de l'autre ; qu'un jugement du 18 janvier 2011 a arrêté un plan de continuation et ordonné la cession à M. Y des parts détenues par M. Le Z ;

Attendu que pour ordonner cette cession, l'arrêt retient que le premier alinéa de l'article L. 631-19-1 du code de commerce prévoit seulement que la cession forcée des parts sociales d'un dirigeant peut être décidée par le tribunal sur la demande du ministère public sans qu'aucun texte réglementaire d'application de cette disposition législative n'exige que cette demande soit écrite, l'article R. 631-34-1 du même code ne réglementant que la procédure d'éviction d'un ou plusieurs dirigeants puis constaté que le ministère public a, à l'audience, demandé au tribunal de faire droit à la demande de cession forcée des parts de M. Le Z ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627, alinéa 1er du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné la cession des parts détenues par M. Le Z dans le capital de la société Le Chateau, l'arrêt rendu le 10 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable la demande tendant à la cession des parts de M. Le Z dans le capital de la société Le Chateau ;
Condamne M. Y et la SELARL Philippe Contant, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. Le Z
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Chalons en Champagne du 18 janvier 2011 en ce qu'il avait ordonné la cession des parts sociales détenues par M. Gil Le Z au profit de M. Fabrice Y pour le prix de un euro tel que fixé par l'expert Pierre ... ;
Aux motifs que, " l'article L. 631-19-1 du code de commerce édicte
"lorsque le redressement de l'entreprise le requiert, le tribunal, sur la demande du ministère public, peut subordonner l'adoption du pian au remplacement d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise.
A cette fin et dans les mêmes conditions, le tribunal peut prononcer l'incessibilité des parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital détenus par un ou plusieurs dirigeants de droit ou de fait et décider que le droit de vote y attaché sera exercé, pour une durée qu'il fixe, par un mandataire de justice désigné à cet effet De même, il peut ordonner la cession de ces parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital, détenus par ces mêmes personnes, le prix de cession étant fixé à dire d'expert.
Pour l'application du présent article, les dirigeants et les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel sont entendus ou dûment appelés" ;
que l'article R. 631-34-1 du même code dispose
"Lorsque le ministère public demande, en application de l'article L.631-19-1, que l'adoption du plan soit subordonnée au remplacement d'un ou plusieurs dirigeants, il saisit le tribunal par une requête indiquant les faits de nature à motiver cette demande.
Le président du tribunal fait convoquer, à la diligence du greffier, le ou les dirigeants de la personne morale dont le remplacement est demandé, quinze jours au moins avant l'audience, par acte d'huissier de justice. A cette convocation est jointe la requête du ministère public" ;
qu'est susceptible d'appel de la part de M. Le Z la disposition de la décision entreprise qui ordonne la cession des parts sociales détenues par ce dernier, qui avait la qualité de cogérant de la SCI Le Château lors du prononcé de ce jugement, dès lors que sa démission desdites fonctions n'était pas effective pour n'avoir pas été effectuée dans les conditions prévues aux statuts de cette société, ainsi que l'a exactement relevé le tribunal ; que c'est donc vainement que l'appelant reproche au tribunal d'avoir ordonné la cession des parts d'un ancien dirigeant, car il n'a perdu cette qualité que par décision de l'assemblée générale du 14 mars 2011, qui a décidé sa révocation de ses fonctions à compter du 18 janvier 2011 ; que l'article R. 631-34-1 du code de commerce ne réglemente que la procédure d'éviction d'un ou plusieurs dirigeants ; que le premier alinéa de l'article L. 631-19-1 dudit code prévoit seulement que la cession forcée des parts sociales d'un dirigeant d'une telle société peut être décidée par le tribunal "sur la demande du ministère public", sans qu'aucun texte réglementaire d'application de cette disposition législative n'exige que cette demande soit écrite ; qu'en l'espèce, que les jugements des 18 mai, 21 septembre et 30 novembre 2010 précités constatent respectivement que
- "le ministère public n'est pas opposé à la poursuite de la période d'observation et sollicite la désignation d'un expert comptable afin de procéder à l'évaluation des parts de la SCI" et que chacun des associés de la SCI Le Château a "la volonté de présenter seul un projet de plan d'apurement du passif qui serait assorti d'une cession forcée des parts",
- "les consultations préalables au dépôt du plan ne sont pas terminées",
- "le délai de consultation des créanciers sur les projets de plan déposés par l'administrateur n'est pas encore expiré" ;
qu'il est ainsi établi que le ministère public est bien à l'origine de la demande subordonnant l'adoption du plan de redressement de la SCI Le Château à la cession forcée des parts sociales de l'un ou de l'autre des deux associés cogérants de cette dernière ; que M. Gil Le Z a eu tout loisir d'étudier utilement le plan proposé par M. Fabrice Y, puisqu'il était présent, assisté de son avocat, aux audiences des 21 septembre et 30 novembre 2010 ; qu'il ne saurait donc sérieusement prétendre à la violation du principe de la contradiction, des droits de la défense et de l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'à l'audience du 18 janvier 2011, le ministère public a confirmé sa requête, le jugement déféré constatant que le ministère public fait valoir que "la démission de M. Le Z, n'étant pas conforme aux statuts, ne doit pas être prise en compte" et qu'il "demande au tribunal de faire droit à la cession des parts sociales de M. Le Z et d'homologuer le plan proposé par M. Y" ; qu'au vu des observations qui précédent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a ordonné la cession des parts sociales détenues par M. Gil Le Z au profit de M. Fabrice Y pour le prix de un euro tel que fixé par l'expert Pierre ... " ;
1/ Alors que, d'une part, l'article L.631-19-1 du Code de commerce prévoit que lorsque le redressement de l'entreprise le requiert, le tribunal, sur la demande du ministère public, peut subordonner l'adoption du plan au remplacement d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise ; que ce texte prévoit par ailleurs, en son deuxième alinéa, que dans les mêmes conditions, le tribunal peut (...) ordonner la cession de ces parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital détenus par un ou plusieurs dirigeants de droit ou de fait, le prix de cession étant fixé à dire d'expert ; que les conditions dans lesquelles le tribunal peut ordonner la cession forcée des parts d'un associé d'une SCI sont donc identiques à celles dans lesquelles le tribunal peut ordonner le remplacement d'un dirigeant social ; que notamment, en application de l'article R.631-34-1 du même Code, le Ministère public doit saisir le tribunal d'une requête motivée, dont copie doit être jointe à la convocation du dirigeant dont l'expropriation des parts est demandée ; qu'en jugeant néanmoins que la cession forcée des parts sociales de M. Le Z pouvait être demandée par le Ministère public par simples réquisitions à l'audience, sans que le tribunal soit saisi d'une requête ni que cette requête soit communiquée à M. Le Z, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2/ Alors que, d'autre part, il résulte de la combinaison des articles 562 du Code de procédure civile, 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme et L.631-19-1 du Code de commerce que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement pour irrégularité de la saisine de la juridiction de première instance, la cour d'appel n'a pas, lorsque cet acte est nul, le pouvoir d'ordonner la cession des droits sociaux du dirigeant ; que M. Le Z sollicitait l'annulation du jugement du 18 janvier 2011 pour irrégularité de la saisine de la juridiction, la demande de cession forcée de ses parts sociales n'ayant pas été formée par le Ministère public dans les conditions de l'article L.631-19-1 du Code de commerce ; qu'ainsi, en prononçant néanmoins la cession forcée des parts sociales de M. Le Z, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs en violation des textes susvisés.

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