TRIBUNAL ADMINISTRATIF
CERGY-PONTOISE
N°1202504 - 1202507
SOCIETE SCHUEPBACH ENERGY SOCIETE SCHUEPBACH ENERGY LLC
Ordonnance du 19 mars 2013
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LLC.
ère
Le président de la 1 chambre,
Vu les mémoires, enregistrés le 8 janvier 2013, présentés pour la Société Schuepbach Energy LLC dont le siège social est situé 2651 North Harwood, Suite 570, Dallas, TX 75201 (Etats-Unis), par Me Fornacciari ; la Société Schuepbach demande au Tribunal, à l’appui de ses requêtes tendant à l’annulation, d’une part, de l’arrêté du 12 octobre 2011 par lequel le ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement et le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ont abrogé les permis exclusifs de recherches de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux dits « Permis de Villeneuve de Berg » et Permis de Nant » dont la société Schuepbach était titulaire et, d’autre part, de la décision du même jour par laquelle le directeur de l’énergie a prononcé l’abrogation de ces permis, de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution et plus précisément par la Charte de l’environnement et aux droits garantis par les articles 16 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, des
articles 1 et 3 de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011🏛🏛 visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique ;
La société Schuepbach soutient que le principe de précaution est méconnu en ce que la loi excède ce qu’il permet de faire ; que la loi ne comporte pas de véritable évaluation des risques ; que les mesures adoptées ne sont pas provisoires ; qu’elles ne sont pas proportionnées ; que la loi méconnait le principe d’égalité dès lors que cette technique est admise en géothermie et qu’en conséquence elle doit être admise en la matière ; qu’elle méconnaît l’article 6 de la charte de l’environnement dès lors que la protection de l’environnement est excessivement privilégiée par rapport au développement économique et au progrès social ; qu’elle est contraire à l’article 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors qu’elle ne poursuit pas un but d’intérêt général suffisant et qu’elle porte atteinte à la liberté d’entreprendre ; qu’elle est contraire à l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors qu’elle porte atteinte au droit de propriété sans nécessité publique et sans juste et préalable indemnité ;
Vu le mémoire, enregistré le 12 février 2013, présenté pour le département de l’ Ardèche, par Me Soleihac, pour la requête n° 1202507 ; le département de l’Ardèche conclut au rejet de la demande de transmission et soutient que la demande est irrecevable dès lors qu’il s’agit d’une abrogation par voie législative et que, la loi étant l’expression de la volonté générale à laquelle concourent tous les citoyens, un étranger ne peut la contester, sauf à remettre en cause la souveraineté nationale ; que la demande est infondée ; que la loi est principalement fondée sur le principe de prévention s’agissant d’un risque avéré ; que le principe de précaution est en tout état de cause respecté ; que la loi ne porte pas atteinte au principe d’égalité car la géothermie n’utilise
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pas la même technique de fracturation hydraulique ; que le conseil constitutionnel a jugé que la méconnaissance de l’article 6 de la charte de l’environnement ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité ; que la loi respecte l’article 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors qu’elle poursuit l’objectif d’intérêt général de la protection de l’environnement ; que la loi respecte l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors que la société ne peut se prévaloir d’un droit de propriété et qu’en tout état de cause, l’atteinte qui y serait portée est limitée ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 février 2013, présenté par la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie qui demande au Tribunal de ne pas transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité dont la société Schuepbach l’a saisie ; elle soutient que la loi est principalement fondée sur le principe de prévention s’agissant d’un risque avéré ; que le principe de précaution est en tout état de cause respecté ; que la loi ne porte pas atteinte au principe d’égalité car la géothermie n’utilise pas la même technique de fracturation hydraulique ; que le conseil constitutionnel a jugé que la méconnaissance de l’article 6 de la charte de l’environnement ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité ; que la loi respecte l’article 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors qu’elle poursuit l’objectif d’intérêt général de la protection de l’environnement et que l’abrogation est strictement proportionnée à cet objectif ; que la loi respecte l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dès lors que les permis d’exploration ne peuvent être assimilés à des biens objets, pour leurs titulaires, d’un droit de propriété protégé ;
Vu, enregistré le 8 mars 2013, le mémoire présenté pour la Société Schuepbach Energy LLC ; il conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; il soutient en outre que la fracturation hydraulique utilisée pour la géothermie et celle utilisée pour l’exploration du gaz de schiste sont de même nature ; que l’abrogation des permis prive leur titulaire des droits sur les biens en cause, ce qui implique qu’il aurait dû être indemnisé ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution ;
Vu la Charte de l’environnement ;
Vu le code minier et le nouveau code minier ;
Vu le code de l’environnement ;
Vu la
loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011🏛 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique ;
Vu le code de justice administrative ;
1. Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le tribunal administratif saisi d’un moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question
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prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux ; que le second alinéa de l’article 23-2 de la même ordonnance précise que : « En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu’elle est saisie de moyens contestant la conformité d’une disposition législative, d’une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d’autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d’Etat
2. Considérant que la loi du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique est applicable aux présents litiges ; que ces dispositions n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce que les articles 1 et 3 de cette loi portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment à la Charte de l’environnement et aux droits garantis par les articles 16 et 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, pose des questions qui ne sont pas toutes dépourvues de caractère sérieux ; qu’ainsi, il y a lieu de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;