Jurisprudence : Cass. soc., 17-04-2013, n° 12-13.847, F-D, Rejet

Cass. soc., 17-04-2013, n° 12-13.847, F-D, Rejet

A4125KCR

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:SO00749

Identifiant Legifrance : JURITEXT000027338498

Référence

Cass. soc., 17-04-2013, n° 12-13.847, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8194656-cass-soc-17042013-n-1213847-fd-rejet
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SOC. PRUD'HOMMES LM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 17 avril 2013
Rejet
M. FROUIN, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt no 749 F-D
Pourvoi no Z 12-13.847
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la société Rexel France, dont
le siège est Paris,
contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2011 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme Eva Y, domiciliée Grainville-sur-Ry,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 19 mars 2013, où étaient présents M. Frouin, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Huglo, conseiller rapporteur, M. Chauvet, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller, les observations de la SCP Blanc et Rousseau, avocat de la société Rexel France, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 13 décembre 2011), que Mme Y a été engagée le 1er mars 1981 en qualité d'employée administrative par la société Normande de transformateurs, aux droits de laquelle se trouve la société Rexel France ; qu'en dernier lieu, la salariée exerçait les fonctions d'assistante commerciale dans l'établissement du Grand-Quevilly ; que l'employeur lui a notifié son licenciement pour motif économique par lettre du 2 novembre 2009 ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale en invoquant notamment le principe d'égalité de traitement, des salariés de l'établissement de Nîmes, également licenciés pour motif économique, ayant perçu une prime exceptionnelle de 10 000 euros ;

Attendu que la société Rexel France fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de la salariée et de la condamner à lui verser la prime exceptionnelle prévue par la commission de suivi du plan de sauvegarde de l'emploi, alors, selon le moyen
1o/ que le salarié qui se prétend victime d'une discrimination doit présenter des éléments faisant supposer son existence ; que les salariés travaillant dans des établissements différents ne sont pas présumés se trouver dans une situation identique et qu'il incombe au salarié, qui prétend que l'attribution d'une prime aux salariés d'un autre établissement est discriminatoire, d'établir qu'il est placé dans une situation identique ; qu'en l'espèce, en retenant que la société Rexel France, qui affirmait que la prime exceptionnelle accordée à des salariés de Nîmes correspondait " à une contrainte supplémentaire ", soit l'affectation à l'activité comptabilité clients, consistant dans la relance téléphonique en cas de retard de paiement, le recouvrement, la saisie des règlements clients, le suivi des précontentieux et contentieux et le suivi des caisses en agences, ne prouvait pas ses allégations, cependant qu'il incombait à Mme Y, qui revendiquait la prime accordée à ces salariés, d'établir qu'elle réalisait le même travail et se trouvait placée dans une situation identique à ces salariés de cet autre établissement, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1132-1 du code du travail ;
2o/ que le juge ne peut réparer le préjudice résultant d'une discrimination que par l'octroi de dommages-intérêts ; qu'en condamnant la société Rexel France à payer à la salariée la somme de 10 000 euros au titre de la prime exceptionnelle prévue au plan de suivi du plan de sauvegarde de l'emploi du 7 octobre 2009, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
3o/ qu'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en l'espèce, en retenant l'existence d'une discrimination au préjudice de Mme Y, sans avoir indiqué quel élément aurait été illicitement pris en considération par l'employeur pour la discriminer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
4o/ qu'en retenant que Mme Y était dans la même situation que les salariés de Nîmes, la cour d'appel a statué par voie d'affirmation, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu d'abord qu'il ne peut y avoir de différences de traitement entre salariés d'établissements différents d'une même entreprise exerçant un travail égal ou de valeur égale que si elles reposent sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'ayant relevé que le site du Grand-Quevilly où travaillait la salariée ne fermait pas et que l'entreprise avait décidé "d'avoir une approche particulière" à l'égard des collaborateurs du site de Nîmes concernés par un licenciement pour motif économique en les faisant bénéficier d'une prime exceptionnelle de 10 000 euros au motif qu'ils ne bénéficiaient pas de l'indemnité pour fermeture de site dès lors que celui-ci ne fermait pas, la cour d'appel, qui a constaté que, si l'employeur affirmait que cette prime exceptionnelle correspondait à "une contrainte supplémentaire", il ne produisait aucun élément de preuve à l'appui de ces allégations, a ainsi fait ressortir qu'au regard de la prime exceptionnelle attribuée aux salariés licenciés pour motif économique, les salariés de l'établissement du Grand-Quevilly se trouvaient dans une situation identique à ceux de l'établissement de Nîmes ;
Attendu, ensuite, qu'ayant constaté une différence de traitement, la cour d'appel a, à bon droit, accueilli la demande de versement de la prime exceptionnelle ;
Attendu, enfin, que, la société n'ayant pas fait valoir devant la cour d'appel que l'article L. 1132-1 du code du travail n'était pas applicable en l'absence de motif de discrimination, le moyen, en sa troisième branche, est contraire à la position prise devant les juges du fond ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Rexel France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept avril deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Blanc et Rousseau, avocat aux Conseils, pour la société Rexel France.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Rexel France à payer à Mme Y 10.000 euros au titre de la prime exceptionnelle prévue au plan de suivi du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) du 7 octobre 2009 ;
Aux motifs propres que Mme Y ne demande plus en appel le paiement de l'indemnité spécifique de 10.000 euros prévue à la section E2 du PSE pour les salariés concernés par la fermeture d'une site qui a été rejetée par le conseil de prud'hommes au motif que le site sur lequel elle travaillait n'était pas fermé, mais la confirmation du jugement lui ayant attribué la somme de 10.000 euros au titre de la prime exceptionnelle prévue au plan de suivi du PSE du 7 octobre 2009 ; que selon les termes du compte rendu de la commission de suivi du PSE, les collaborateurs du site de Nîmes concernés par un licenciement économique ne bénéficiant pas de l'indemnité pour fermeture de site car celui-ci ne fermait pas, l'entreprise a décidé " une approche particulière " les concernant en les faisant bénéficier d'une prime exceptionnelle de 10.000 euros ; que la société Rexel France, qui affirme que cette prime correspondait " à une contrainte supplémentaire " et que les salariés du site de Nîmes étaient affectés à l'activité comptabilité clients, qui consiste dans le relance téléphonique en cas de retard de paiement, le recouvrement, la saisie des règlements clients le suivi des précontentieux et contentieux et le suivi des caisses en agences, n'a produit aucun élément de preuve de ses allégations ; qu'elle n'est pas fondée à prétendre utilement qu'Eva Bape, assistante commerciale à l'agence de Grand-Quevilly, n'effectuait pas le même travail que les salariés du site de Nîmes et ne se trouvait pas placée dans une situation identique ; que la société n'établissant pas autrement que les règles déterminant l'octroi de cet avantage aux salariés du site de Nîmes aient été préalablement définies et soient contrôlables, et que la différence de traitement dont ils ont bénéficié soit justifiée par des raisons objectives et étrangères à toute discrimination prohibée, Eva Bape est en droit de revendiquer et obtenir le paiement de la prime exceptionnelle ainsi accordée à ces salariés ; Aux motifs éventuellement adoptés que selon l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en l'espèce, lors de la réunion de suivi du PSE du 7 octobre 2009, la société Rexel a décidé de verser une prime exceptionnelle de 10.000 euros à des salariés de Nîmes licenciés économiquement alors que leur site n'était pas encore fermé ; que Mme Y a été licenciée pour raison économique suite au même PSE ; qu'il serait discriminatoire qu'elle ne perçoive pas la même prime exceptionnelle de 10.000 euros que les salariés de Nîmes ; que la prime n'est pas le fruit d'un accord mais une application unilatérale de la société, le compte rendu ne prévoit pas d'exclusion particulière ; que Mme Y était dans la même situation que les salariés de Nîmes ; que le lieu d'exécution du contrat n'est pas un élément objectif d'exclusion suite un PSE national ;
Alors que 1o) le salarié qui se prétend victime d'une discrimination doit présenter des éléments faisant supposer son existence ; que les salariés travaillant dans des établissements différents ne sont pas présumés se trouver dans une situation identique et qu'il incombe au salarié qui prétend que l'attribution d'une prime aux salariés d'un autre établissement est discriminatoire, d'établir qu'il est placé dans une situation identique ; qu'en l'espèce, en retenant que la société Rexel France, qui affirmait que la prime exceptionnelle accordée à des salariés de Nîmes correspondait " à une contrainte supplémentaire ", soit l'affectation à l'activité comptabilité clients, consistant dans la relance téléphonique en cas de retard de paiement, le recouvrement, la saisie des règlements clients le suivi des précontentieux et contentieux et le suivi des caisses en agences, ne prouvait pas ses allégations, cependant qu'il incombait à Mme Y, qui revendiquait la prime accordée à ces salariés, d'établir qu'elle réalisait le même travail et se trouvait placée dans une situation identique à ces salariés de cet autre établissement, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 2o) le juge ne peut réparer le préjudice résultant d'une discrimination que par l'octroi de dommages-intérêts ; qu'en condamnant la société Rexel France à payer à la salariée la somme de 10.000 euros au titre de la prime exceptionnelle prévue au plan de suivi du PSE du 7 octobre 2009, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 3o) aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en l'espèce, en retenant l'existence d'une discrimination au préjudice de Mme Y, sans avoir indiqué quel élément aurait été illicitement pris en considération par l'employeur pour la discriminer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
Alors que 4o) en retenant que Mme Y était dans la même situation que les salariés de Nîmes, la cour d'appel a statué par voie d'affirmation, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.

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