SOC. ELECTIONS FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 17 avril 2013
Rejet
M. LACABARATS, président
Arrêt no 790 F-P+B
Pourvoi no X 12-19.825
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ M. Jesus Z, domicilié Montbrun-Lauragais,
2o/ Mme Sylvie Y, domiciliée Toulouse,
3o/ M. Marc X, domicilié Saint-Genies-Bellevue,
4o/ M. David W, domicilié rue Monein,
5o/ M. Patrick U, domicilié rue Quincy-Voisins,
6o/ M. Philippe T, domicilié Daux,
7o/ Mme Stéphanie S, domiciliée Toulouse,
8o/ M. Yannick R, domicilié rue Vernon,
9o/ M. Hassen Ben Q, domicilié Grenoble,
10o/ M. Michaël P, domicilié rue Frédéric Noyal-sur-Vilaine,
11o/ M. Jean-François N, domicilié Antibes,
12o/ M. Yann M, domicilié Grenoble,
13o/ M. Adrian L, domicilié rue Villeurbanne,
14o/ M. Denis K, domicilié rue Saint-Savin,
15o/ M. Thierry J, domicilié rue Vernon,
16o/ M. Davy I, domicilié Nicolas Blagnac,
17o/ M. Henri V, domicilié rue Fonsorbes,
18o/ M. Didier Ben Q, domicilié rue Toulouse,
19o/ M. Robert G, domicilié Toulouse,
20o/ M. Ian F, domicilié Colomiers,
21o/ M. Rémi E, domicilié rue Toulouse,
22o/ M. Philippe T, domicilié Mondonville,
23o/ M. Laurent D, domicilié Noé,
24o/ M. Arnaud C, domicilié Grasse,
contre le jugement rendu le 9 mai 2012 par le tribunal d'instance de Vanves (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant
1o/ à la société Sogeti High Tech, société par actions simplifiée, dont le siège est rue Issy-les-Moulineaux,
2o/ à M. Jean-Luc AA, domicilié Vinon-sur-Verdon,
3o/ à M. Michel ZZ, domicilié rue Fontenay-aux-Roses,
4o/ à M. Bertrand YY, domicilié rue David Paris,
5o/ à M. Jean-Pierre XX, domicilié rue Denonville,
6o/ à M. Jean-Michel WW, domicilié Vacquiers,
7o/ à M. Franz VV, domicilié rue Issy-les-Moulineaux,
8o/ à M. Jean-Pierre XX, domicilié rue Ury,
9o/ à M. Jean-Luc AA, domicilié rue Savigny-le-Temple,
10o/ à M. Fabrice UU, domicilié rue Buc,
11o/ à M. Stéphan TT, domicilié rue Gaillon,
12o/ à M. Hervé SS, domicilié Mont-Saint-Aignan,
13o/ à M. Erwan RR, domicilié Rennes,
14o/ à M. Hervé SS, domicilié Rouen,
15o/ à M. Gérard QQ, domicilié rue Vernon,
16o/ à Mme Catherine Arbonville PP, domiciliée Saint-Marcel,
17o/ à M. Philippe T, domicilié Amanlis,
18o/ à Mme Céline OO, domiciliée rue La Salvetat-St-Gilles,
19o/ à M. Tony W, domicilié Grosville,
20o/ à M. René NN, domicilié rue Marseille,
21o/ à M. Frédéric O, domicilié Paris,
22o/ à M. Laurent D, domicilié La Roque-d'Antheron,
23o/ à M. Patrice MM, domicilié Marseille,
24o/ à M. Franck LL, domicilié Trets,
25o/ à Mme Aurélie KK, domiciliée Plan-de-Cuques,
26o/ à M. Olivier JJ, domicilié rue Éguilles,
27o/ à Mme Sandrine II, domiciliée La Trinité,
28o/ à Mme Marie-Claude HH, domiciliée rue Châteauneuf-les-Martigues,
29o/ à Mme Danièle GG, domiciliée rue Verneuil-sur-Seine,
30o/ à M. Frédéric O, domicilié René La Fare-Les-Oliviers,
31o/ au syndicat F3C CFDT, dont le siège est rue Paris,
32o/ à M. François EE, domicilié Toulouse,
33o/ à Mme Jeanine DD, domiciliée rue Toulouse,
34o/ à M. Vincent CC, domicilié Balma,
35o/ à Mme Estelle BB, domiciliée Toulouse,
36o/ à M. Christophe AAA, domicilié rue Toulouse,
37o/ à M. Nicolas H, domicilié Blagnac,
38o/ à Mme Frédérique ZZZ, domiciliée Colomiers,
39o/ à M. François EE, domicilié rue Beaupuy,
40o/ à M. Arnaud C, domicilié rue François Toulouse,
41o/ à M. Olivier JJ, domicilié rue Livry-sur-Seine,
42o/ à M. Christian ZZ, domicilié rue Epernon,
défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 mars 2013, où étaient présents M. Lacabarats, président, M. Huglo, conseiller rapporteur, M. Béraud, conseiller, M. Finielz, premier avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de M. Z et des vingt-trois autres demandeurs, de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Sogeti High Tech, l'avis de M. Finielz, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Vanves, 9 mai 2012), que, par requête du 4 mars 2012, la société Sogeti High Tech a demandé l'annulation du vote du collège désignatif des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 24 février 2012 et a sollicité du tribunal de dire que le collège désignatif sera composé des membres du comité d'établissement de la société et de tous les délégués du personnel relevant de ce comité ;
Sur le premier moyen
Attendu que M. Z et les autres salariés font grief au jugement de rejeter leur exception d'incompétence, alors, selon le moyen, que le tribunal d'instance ayant une compétence d'attribution, celle-ci doit être expressément prévue par un texte ; qu'en l'absence de disposition textuelle expresse donnant compétence au tribunal d'instance pour statuer dans un domaine, la compétence revient à la juridiction de droit commun, à savoir le tribunal de grande instance ; qu'aux termes des articles R. 4613-11 du code du travail et R. 221-28 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal d'instance est compétent pour connaître des contestations relatives à la désignation de la délégation des représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ; qu'aucun texte ne prévoit la compétence du tribunal d'instance pour connaître des contestations relatives à la seule composition du collège devant désigner la délégation des représentants du personnel au CHSCT sans qu'aucun membre de cette délégation n'ait été désigné ; que le tribunal d'instance qui a relevé que le litige portait sur la composition du collège désignatif en vue des élections des différents CHSCT au sein de la société, sans qu'aucune désignation des membres des CHSCT n'ait été faite, aurait dû déduire de ses propres énonciations qu'il n'était pas compétent pour connaître du litige ; que le tribunal d'instance qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles R. 4613-11 du code du travail, L. 221-1, R. 211-3 et R. 221-28 du code de l'organisation judiciaire ;
Mais attendu que le tribunal d'instance, compétent en application de l'article R. 4613-11 du code du travail pour statuer sur les contestations relatives à la désignation des membres des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, est compétent pour statuer sur un litige relatif à la composition du collège désignatif des membres du personnel de ces comités ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen
Attendu que M. Z et les autres salariés font grief au jugement d'annuler la délibération du 24 février 2012 et de dire que le collège désignatif doit être composé de l'ensemble des membres du comité d'établissement de la société et de l'ensemble des délégués du personnel de cet établissement, alors, selon le moyen, qu'un CHSCT est constitué dans tout établissement de cinquante salariés et plus ; qu'il est admis qu'au sein d'un même établissement plusieurs CHSCT puissent être constitués sur la base d'un secteur géographique ou d'un secteur d'activité spécifique afin de tenir compte de la particularité des attributions du CHSCT ; qu'aux termes de l'article L. 4613-1 du code du travail, le CHSCT comprend l'employeur et une délégation des représentants du personnel dont les membres sont désignés par un collège constitué par les membres élus du comité d'entreprise et les délégués du personnel ; qu'il résulte nécessairement de ces principes combinés que lorsqu'il existe plusieurs CHSCT au sein d'un même établissement, le collège désignatif comprend chacun des membres du comité d'établissement unique et les délégués du personnel correspondant à chaque CHSCT ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu de s'attacher au périmètre spécifique des quatre CHSCT de la société Sogeti High Tech, le tribunal d'instance a violé les articles L. 4611-1 et L. 4613-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'en l'absence d'accord collectif en disposant autrement, le collège désignatif des CHSCT est constitué de tous les membres élus du comité d'établissement et de tous les délégués du personnel élus dans le périmètre de ce comité ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal a ainsi statué ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept avril deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. Z et vingt-trois autres demandeurs.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR écarté l'exception d'incompétence du Tribunal d'instance ;
AUX MOTIFS QUE " l'article L. 4613-3 du Code du travail dispose que les contestations relatives à la délégation des représentants du personnel au comité (CHSCT) sont de la compétence du juge judiciaire. L'article R.4613-11 du même Code prévoit que le Tribunal d'instance statue en dernier ressort sur les contestations relatives à la délégation des représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail prévues à l'article L. 4613-3. Le tribunal est saisi des contestations par voie de déclaration au greffe. Cette déclaration n'est recevable que si elle est faite dans les 15 jours suivant la désignation. L'article R.221-28 du Code de l'organisation judiciaire rappelle que le Tribunal d'instance connaît des contestations relatives à la désignation 1o des délégués syndicaux et des représentants syndicaux aux comités d'entreprise, aux comités d'établissement, aux comités centraux d'entreprise et aux comités de groupe, 2o de la délégation des représentants du personnel aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. En l'espèce, le litige porte sur une délibération du collège désignatif ayant statué le 24 février 2012 sur la composition de ce collège en vue des élections des différents CHSCT au sein de la société. S'il est vrai que la séance du 24 février 2012 du collège désignatif des nouveaux CHSCT a été levée sans qu'aucune désignation des membres des CHSCT n'ait été faite, il ne peut être contesté qu'au cours de cette séance, il a été procédé au vote des membres du collège afin de statuer sur le périmètre de la désignation de chaque CHSCT. Or, cette question de la composition de cette délégation relève du contentieux des contestations relatives à la délégation des représentants du personnel au CHSCT. Par conséquent, l'exception d'incompétence au profit du Tribunal de grande instance doit être écartée, et le Tribunal d'instance doit être déclaré compétent pour trancher la question au fond " ;
ALORS QUE le Tribunal d'instance ayant une compétence d'attribution, celle-ci doit être expressément prévue par un texte ; qu'en l'absence de disposition textuelle expresse donnant compétence au Tribunal d'instance pour statuer dans un domaine, la compétence revient à la juridiction de droit commun, à savoir le Tribunal de grande instance ; qu'aux termes des articles R.4613-11 du Code du travail et R.221-28 du Code de l'organisation judiciaire, le Tribunal d'instance est compétent pour connaître des contestations relatives à la désignation de la délégation des représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ; qu'aucun texte ne prévoit la compétence du Tribunal d'instance pour connaître des contestations relatives à la seule composition du collège devant désigner la délégation des représentants du personnel au CHSCT sans qu'aucun membre de cette délégation n'ait été désigné; que le Tribunal d'instance qui a relevé que le litige portait sur la composition du collège désignatif en vue des élections des différents CHSCT au sein de la société, sans qu'aucune désignation des membres des CHSCT n'ait été faite, aurait du déduire de ses propres énonciations qu'il n'était pas compétent pour connaître du litige; que le Tribunal d'instance qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles R.4613-11 du Code du travail, L.221-1, R.211-3 et R.221-28 du Code de l'organisation judiciaire.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué
D'AVOIR annulé la délibération du 24 février 2012 et dit que le collège désignatif procédant à l'élection des 4 comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail Grand Ouest, Est, Ile de France, et Midi-Pyrénées doit être composé de l'ensemble des membres du comité d'établissement Sogeti High Tech et de l'ensemble des délégués du personnel de Sogeti High Tech ;
AUX MOTIFS QUE " les pièces du dossier font apparaître que l'employeur a, par convocation du 7 février 2012, convoqué les membres du comité d'établissement et les délégués du personnel, pour une réunion du collège désignatif le 24 février 2012 en vue de la désignation des membres des CHSCT de SOGETI HIGH TECH. L'analyse de la décision litigieuse du 24 février 2012, intitulée "désignation des CHSCT de SOGETI HIGH TECH" mettent clairement en évidence qu'un vote a été organisé sur la question de la composition de ce collège désignatif " selon l'usage ou selon la jurisprudence de la Cour de cassation" (page 2), Ce procès-verbal signe de Monsieur Jésus Z secrétaire de séance relate ainsi les faits de manière suivante "l'assemblée passe au vote. Pour une désignation par un collège désignatif national selon l'orientation de la chambre sociale de la Cour de cassation 20 voix. Pour une désignation par des collèges désignatifs correspondant aux périmètres respectifs des CHSCT, selon l'usage 21 voix. La désignation se déroulera selon l'usage" (Page 4). Aussi, cette délibération par vote ne peut être remise en question quant à son existence. La SAS SOGETI HIGH TECH ainsi que les organisations syndicales sont fondées à en contester en justice le contenu, ce d'autant que l'élection des 4 CHSCT est actuellement envisagée pour se dérouler selon les préconisations retenues par ce vote du 24 février 2012, de sorte qu'il existe un risque certain d'annulation du scrutin. II résulte de l'article L.4613-1 du Code du travail que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail comprend l'employeur et une délégation du personnel dont les membres sont désignés par un collège constitué par les membres élus du comité d'entreprise et les délégués du personnel. D'une part, la loi ne distingue pas entre les différentes instances de délégués du personnel. D'autre part, si le périmètre d'action du CHSCT ne coïncident pas nécessairement avec le périmètre du comité d'établissement, ni avec celui des délégués du personnel, il doit en être autrement de la question de la composition du collège désignatif, laquelle n'est pas liée à l'activité du CHSCT et aux spécificités de ses attributions. A cet égard, il importe de rappeler que doit être distinguée la question de la composition du collège désignatif procédant à l'élection du CHSCT de celle tenant à la composition du CHSCT lui-même, lequel ne pourra être composé en tout état de cause que de salariés appartenant à l'établissement correspondant au périmètre du CHSCT concerne. En outre, il est désormais de jurisprudence acquise qu'en l'absence d'accord collectif, le collège désignatif est constitué de tous les membres titulaires du comité d'établissement et tous les délégués du personnel élus dans le périmètre de ce comité. Cette solution doit trouver à s'appliquer quel que soit le périmètre du CHSCT, sans qu'il y ait lieu de s'attacher au périmètre spécifique du CHSCT pour déterminer la composition du collège désignatif de ce comité. Par ailleurs, si lors des élections antérieures des CHSCT, la composition du collège désignatif pouvait avoir été différente, il n'y a pas lieu d'y voir là un usage qui pourrait supplanter les dispositions légales et jurisprudentielles, cet usage étant contraire à ces dispositions rappelées précédemment. Par conséquent, doit être annulée la délibération du 24 février 2012 du collège désignatif en ce qu'elle a prévu que celui-ci serait composé des membres élus du comité d'établissement et des seuls délégués du personnel élus dans le périmètre du CHSCT dont l'élection est prévue. La SAS SOGETI HIGH TECH sera autorisée à convoquer une nouvelle réunion du collège désignatif afin de procéder à l'élection des 4 CHSC, ce collège désignant devant être le même pour l'ensemble des CHSCT " ;
ALORS QU'un CHSCT est constitué dans tout établissement de 50 salariés et plus ; qu'il est admis qu'au sein d'un même établissement plusieurs CHSCT puissent être constitués sur la base d'un secteur géographique ou d'un secteur d'activité spécifique afin de tenir compte de la particularité des attributions du CHSCT ; qu'aux termes de l'article L. 4613-1 du Code du travail, le CHSCT comprend l'employeur et une délégation des représentants du personnel dont les membres sont désignés par un collège constitué par les membres élus du comité d'entreprise et les délégués du personnel ; qu'il résulte nécessairement de ces principes combinés que lorsqu'il existe plusieurs CHSCT au sein d'un même établissement, le collège désignatif comprend chacun des membres du comité d'établissement unique et les délégués du personnel correspondant à chaque CHSCT ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu de s'attacher au périmètre spécifique des quatre CHSCT
de la société Sogeti High Tech, le Tribunal d'instance a violé les articles L.4611-1 et L.4613-1 du Code du travail.