CIV. 2 CB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 11 avril 2013
Cassation
Mme FLISE, président
Arrêt no 578 F-P+B
Pourvoi no R 12-18.255
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Daniel Z, domicilié
Le Prieuré des Basses Loges, Avon,
contre l'ordonnance rendue le 12 avril 2012 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société HSBC France, société anonyme, dont le siège est Paris,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mars 2013, où étaient présents Mme Flise, président, M. André, conseiller rapporteur, Mme Bardy, conseiller, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. André, conseiller, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de M. Z, de la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat de la société HSBC France, l'avis de M. Mucchielli, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Vu l'article R. 121-22 du code de procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 496 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'un juge de l'exécution, saisi sur requête, ayant autorisé la société HSBC France (la société HSBC) à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur des biens immobiliers appartenant à M. Z, a rétracté sa décision et ordonné la mainlevée de l'inscription provisoire ; que la société HSBC, ayant interjeté appel de cette décision, a saisi le premier président d'une demande de sursis à l'exécution ;
Attendu que, pour accueillir la demande, l'ordonnance retient qu'il existe des moyens sérieux de réformation de la décision déférée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la sûreté judiciaire avait été autorisée sur requête, puis rétractée par décision du juge de l'exécution, ce dont il résultait que les dispositions de l'article R. 121-22 du code de procédures civiles d'exécution n'étaient pas applicables, le premier président a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 12 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société HSBC France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Z la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. Z
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir déclaré recevable la demande de la banque HSBC France et ordonné le sursis à l'exécution des mesures ordonnées par le juge de l'exécution, par le jugement du 23 février 2012 ;
AUX MOTIFS QUE le 3 mai 2007, la SA HSBC France a consenti à la SARL Angelis Multiservices un prêt de 400 000 euros, pour une durée de 48 mois, en vue de financer l'acquisition de deux fonds de commerce ; que M. Daniel Z, gérant de la SARL, s'est porté caution personnelle et solidaire de du prêt à hauteur de 480 000 euros ; que, le 30 octobre 2009, a été signé entre la SARL Angelis Multiservices et la société UESP un traité d'apport de fonds de commerce emportant cession des deux fonds de commerce à cette dernière et prévoyant que la société UESP se substituait totalement à la première dans ses relations avec la banque HSBC France et deviendrait l'unique débiteur de celleci, la société Angelis Multiservices n'étant plus tenue de la dette ni à titre principal, ni à titre de garantie ; que M. Z a souscrit un nouvel engagement de caution solidaire au profit de la société UESP le 12 novembre 2009 a hauteur de 200 000 euros ; que, par jugements des 26 novembre 2009 et 10 juin 2010, le tribunal de commerce de Paris a prononcé successivement le placement en redressement judiciaire de la société Angelis Multiservices, puis la liquidation judiciaire de celle-ci ; que, par lettre recommandée avec avis de réception du 18 mai 2011, la banque HSBC France a mis en demeure M. Z de lui payer la somme de 173 963,94 euros, outre les intérêts courus et à courir ; qu'à la requête de la banque HSBC France, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Sens, par ordonnance du 19 juillet 2011, a autorisé l'inscription d'une hypothèque judiciaire sur des biens immobiliers appartenant à M. Z ; que, sur assignation de M. Z, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Sens a prononcé le jugement susvisé du 23 février 2012 ; que le juge de l'exécution a retenu que la banque HSBC avait expressément declaré accepter la substitution des deux debiteurs et avait manifesté sa volonté de décharger la société Angelis Multiservices de sa dette à son égard, que la novation du contrat de prêt s'était opérée, que la banque HSBC France n'était plus créancière de la société Angelis Multiservices et que l'acte de caution de M. Z du 9 mars 2007 était devenu sans objet ; que la demande de la banque HSBC France est recevable dés lors qu'elle invoque des moyens qu'elle estime sérieux de réformation du jugement ; qu'aux termes de l'article 1275 du code civil, la délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier, n'opère point de novation, si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation ; que, comme le fait valoir la banque HSBC France, l'accord qu'elle a donné suivant attestation du 18 novembre 2009 pour procéder au transfert de prêt de la société . Angelis ... vers la société UESP dans les mêmes conditions et garanties n'implique pas de façon évidente, en l'absence de déclaration expresse faite en ce sens, qu'elle ait entendue décharger la société Angelis Multiservices de son engagement envers elle et n'emporte pas, dés lors, novation au profit de la société UESP et donc décharge de sa caution, sans interprétation, nécessaire pour en apprécier la portée, des termes et du contexte de cet accord ; qu'il s'ensuit qu'il existe des moyens sérieux d'infirmation justifiant, en application de l'article 31 du décret du 31 juillet 1992, de surseoir à I'exécution des mesures ordonnées par le juge de l'exécution ;
1o) ALORS QU' il n'entre pas dans les pouvoirs du premier président de la cour d'appel de suspendre l'exécution des mesures judiciaires de sûretés autorisées sur requête et rétractées par ordonnance du juge de l'exécution ; qu'en ordonnant le sursis à l'exécution des mesures ordonnées par le juge de l'exécution par jugement du 23 février 2012, qui avait rétracté l'ordonnance sur requête du 19 juillet 2011 et ordonné la mainlevée de l'hypothèque judiciaire conservatoire, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 31 du décret du 31 juillet 1992 l'article susvisé, par fausse application ;
2o) ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QU' en retenant qu'il existait des moyens sérieux d'infirmation du jugement, motifs pris que la banque HSBC n'avait pas expressément déclaré qu'elle entendait décharger la société Angelis Multiservices au titre du prêt cautionné par Monsieur Z, sans prendre en compte les échanges de mails du 19 novembre 2009 entre la banque HSBC France et Monsieur Z, ni l'attestation de la banque du 18 novembre 2009 aux termes de laquelle elle donnait son accord pour le " transfert " de prêt " dans les mêmes conditions et avec les mêmes garanties ", ce dont il s'inférait qu'il s'agissait d'un même acte de cautionnement transféré et que l'acte du 12 novembre 2009 s'était substitué à celui du 9 mai 2007, le premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du décret du 31 juillet 1992.