Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRÊT DU 04 AVRIL 2013
(n°, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 11/08362
Décision déférée à la Cour Jugement du 16 Mars 2011 -Tribunal d'Instance de PARIS 18ème - RG n° 1110001228
APPELANT
Établissement PARIS HABITAT- OPH nouvelle dénomination de l'OPAC DE PARIS agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration
21 bis, rue Claude ...
PARIS CEDEX 05
Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque J151
Assisté de Me Florence ..., de MENANT ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque L 190
INTIMÉE
Mademoiselle Léa Y
Chez Y
PARIS
Assistée de Me Sylvie ASSOUNE, avocat au barreau de PARIS, toque W04
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/26402 du 06/07/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Février 2013, en audience publique, devant la Cour composée de
Monsieur Jacques CHAUVELOT, Président de chambre
Madame Michèle TIMBERT, Conseillère
Madame Isabelle BROGLY, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats Mme Amandine CHARRIER
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jacques CHAUVELOT, président et par Mme Amandine CHARRIER, greffier présent lors du prononcé.
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* *
Par acte du 21 mai 1974, Paris Habitat-OPH a donné en location à M. Y un appartement à usage d'habitation et d'artiste peintre situé à Paris dans le 18° arrondissement.
M. Y est décédé le 19 juin 2009 et sa fille a demandé le transfert du bail à son nom, ce qui a été refusé par le bailleur.
Paris Habitat-OPH, soutenant que Mme Y était restée dans les lieux, a saisi le tribunal d'instance du 18° arrondissement de Paris qui, par jugement du 16 mars 2011, avec exécution provisoire, a
-débouté Paris Habitat-OPH de l'intégralité de la demande -condamné le bailleur à garder la charge des dépens.
Paris Habitat-OPH a formé un appel le 4 mai 2011.Dans les dernières conclusions du 7 février 2013, il demande
- l'infirmation du jugement
-que le bail soit résilié de plein droit au décès du locataire conformément au contrat, en application de l'article 5 de la loi du 1 septembre 1948, faute pour la bénéficiaire de prétendre au maintien dans les lieux
Subsidiairement
-que le bail soit résilié en application des articles 14 et 40 de la loi du 6juillet 1989,
-de ne pas écarter la pièce 8,
-de ne pas accorder des délais,
-d'ordonner l'expulsion,
- de fixer une indemnité d'occupation majorée de 30%,
-de condamner Mme Y à payer la somme de 3000euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à garder la charge des dépens.
Mme Y par conclusions du 13 et du 21 février 2013, demande
-la confirmation du jugement,
- de rejeter la demande d'expulsion,
Subsidiairement
- de lui accorder un délai d'un an renouvelable ainsi qu'un délai de deux mois en application de l'article 613-1 du code de la construction et l'habitation,
Très subsidiairement
- de lui accorder un délai de deux mois conformément à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991,
- de condamner Paris Habitat-OPH à payer à son conseil la somme de 3000euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la charge des dépens.
MOTIFS de la DÉCISION
Sur la recevabilité
Mme Y a envoyé des conclusions à Paris Habitat-OPH le 21 février 2013 qui en eu réception le même jour à 13H27, l'audience étant à 14H.
Paris Habitat-OPH verbalement s'est opposé à la prise en compte de ces conclusions dont il n'a pas eu connaissance.
En conséquence, afin d'assurer le caractère contradictoire des débats, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme Y datée du jour de l'audience et de ne prendre en compte que celles du 13 février 2013.
Loi applicable
Paris Habitat-OPH soutient que le bail n'est pas transmissible par voie de succession et que les dispositions de la loi du 1 septembre 1948, font échec à la transmission du bail à Mme Y.
Cette dernière soutient que le bailleur n'a jamais invoqué les dispositions de la loi de 1948 tant dans ses lettres, que devant le premier juge, qu'il ne prouve pas que le bail est soumis à cette loi, qu'elle n'a jamais cessé de vivre avec son père et qu'elle vient à ses droits en sa qualité d'héritière sur le fondement de l'article 1742 du code civil et qu'à ce titre, elle prend la suite de son père, en sa qualité d'artiste.
Préalablement, il y a lieu de déterminer la loi applicable afin de déterminer si la clause insérée dans le contrat selon laquelle le bail n'est pas transmissible par voie de succession, n'est pas contraire à l'ordre public.
Le bail signé le 21 mai 1974 ne fait mention d'aucun texte mais il est précisé que la location n'est pas régie par la législation sur les habitations à loyer modéré. Il s'agit d'un bail mixte principalement à usage de la profession d'artiste peintre, l'appartement étant considéré comme l'accessoire de l'atelier. Le loyer est calculé conformément au décompte de surface corrigée et déterminé suivant la législation en vigueur concernant les locaux à usage professionnel.
Il importe peu que le bailleur ne se soit pas antérieurement prévalu de la loi du 1septembre 1948, comme le souligne Mme ... à juste titre. Il ne s'agit que d'un nouveau moyen visant à la résiliation du bail et pas d'une nouvelle demande, et il doit être examiné par la cour.
La cour observe que le bail mentionne qu'il s'agit d'un quatre pièces et que les lieux se composent d'un atelier d'artiste, entrée, séjour, trois chambres, cuisine, wc et cave. La mention 'cabinet de toilette avec lavabo ' a été rayée. Les lieux ne disposaient pas lors de la signature du bail, du confort, en l'espèce, une salle d'eau.
En effet, pour sortir de cette loi, lors de la signature du bail et bénéficier de l'article 3 quater de la loi de 1948 visant les locaux utilisés en tout ou partie à usage professionnel, il aurait été nécessaire conformément au décret du 30 décembre 1964, que les locaux possèdent une salle d'eau c'est à dire soit une salle de bains, soit une salle de douches, soit un cabinet de toilette avec eau courante et en bon état d'entretien.
De plus, le montant du loyer a été fixé selon la surface corrigée.
En conséquence, le bail a bien été signé sous l'empire de la loi du 1 septembre 1948.
Il en résulte contrairement à ce que soutient Paris Habitat-OPH que la mention selon laquelle la location n'était pas transmissible par voie de cession, legs ou succession n'est pas applicable car seuls les textes régissant la transmission dans le cadre de la loi du 1 septembre 1948 le sont. Cette loi est d'ordre public et M. Y n'a pas pu y renoncer dés la signature du bail.
Cependant, Paris Habitat-OPH invoque à juste titre l'article 5 de la loi sus visée. M. Y est décédé le 19 juin 2009. Il en résulte que quelque soit l'alinéa applicable de cet article soit le 1 ou le 2, Mme Y ne peut se voir transmettre le bail. En effet, conformément à l'article 1, elle est descendante mais non mineure et conformément à l'alinéa 2, son père étant décédé en 2009, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire en titre, nonobstant l'article 1742 du code civil, ne pouvant plus à cette date être héritière du bail.
Il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail avec toutes les conséquences en résultant. Il y a lieu d'ordonner l'expulsion de la locataire comme il est indiqué dans le dispositif.
Délai
Mme Y demande subsidiairement qu'un délai d'un an renouvelable lui soit octroyé ainsi que le bénéfice de l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991.
Paris Habitat-OPH s'oppose à la demande de délai d'un an invoquant le manque de diligences de la locataire dans la recherche d'un logement.
S'agissant du délai des deux mois, Paris Habitat-OPH ne demande pas à ce que l'intimée n'en bénéficie pas. La demande est sans objet, ce délai étant légal.
Les lieux loués sont à usage mixte professionnel et d'habitation. Cependant, les revenus de Mme Y sont constitués pour l'essentiel du revenu de solidarité et de l'allocation logement et avec son ami, ils ont eu à leur disposition un logement de trois pièces de plus de soixante m2, appartenant à sa grand mère qu'ils ont délaissé. Toutefois, il y a lieu de lui octroyer un délai de quatre mois à compter de la date de l'arrêt incluant celui des deux mois visé dans le commandement de quitter les lieux.
Indemnité d'occupation
Paris Habitat-OPH demande que l'indemnité d'occupation soit égale au montant du loyer, charges et taxes en sus, majoré de 30% .
L'intimée s'oppose à cette demande non justifiée selon elle et fait état de ses ressources ne lui permettant pas un tel paiement alors qu'elle paie son loyer régulièrement.
Il y a lieu de fixer l'indemnité d'occupation au montant du loyer outre les charges et taxes et de dire qu'à compter de septembre 2013, l'indemnité sera égale au loyer majoré de 30%, outre les charges et taxes.
Article 700 du code de procédure civile
L'équité ne commande pas d'allouer une somme aux parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les demandes doivent être rejetées.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement,
Rejette comme étant tardives les conclusions de Mme Y du 21 février 2013, date de l'audience,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que le bail a été résilié au décès de M. Y le 19 juin 2009,
Condamne Mme Y à payer à Paris Habitat-OPH une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer, outre les charges et taxes et dit que dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt, soit en septembre 2013,cette indemnité sera égale au montant du loyer majoré de 30%, outre les charges et taxes,
A défaut de libération volontaire des lieux par Mme Y dans un délai de quatre mois à compter du présent arrêt, incluant les deux mois du commandement de quitter les lieux, autorise Paris Habitat-OPH à faire procéder, dans les formes légales, à l'expulsion de Mme Y, ainsi qu'à celle de tous occupants de son fait, du logement situé 189, rue Ordenner dans le 18° arrondissement de Paris et avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, si besoin,
Dit que conformément aux dispositions des articles 65 et 66 de la loi du 9 juillet 1991 et 200 et suivants du décret du 31 juillet 1992, les meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux seront remis, aux frais de la locataire expulsée, en un lieu que cette dernière aura choisi et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la locataire expulsée d'avoir à les retirer à leurs frais dans le délai d'un mois,
Rejette les autres demandes,
Condamne Mme Y à garder la charge des dépens,
Dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile .
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT -