SOC. ELECTIONS JL
COUR DE CASSATION
Audience publique du 20 mars 2013
Rejet
M. BÉRAUD, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président
Arrêt no 548 F-P+B
Pourvoi no X 11-26.836
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par la société GE Capital équipement finance (GECEF), société par actions simplifiée, dont le siège est Puteaux,
contre le jugement rendu le 9 novembre 2011 par le tribunal d'instance de Puteaux (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant
1o/ à M. José-Maria Y, domicilié Paris,
2o/ au syndicat parisien des banques et établissements financiers-CFTC, dont le siège est Paris,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 février 2013, où étaient présents M. Béraud, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Lambremon, conseiller, M. Finielz, premier avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société GE Capital équipement finance, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. Y et du syndicat parisien des banques et établissements financiers-CFTC, l'avis de M. Finielz, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Puteaux, 9 novembre 2011), qu'après les élections qui se sont tenues dans l'entreprise le 5 mai 2011, le syndicat parisien des banques et établissements financiers CFTC, qui n'a pas obtenu au moins 10% des suffrages lors du scrutin, a désigné M. Y, qui était jusqu'alors délégué syndical dans l'entreprise, en qualité de représentant de section syndicale au sein de la société GE Capital équipement finance ; que la société a contesté la désignation ;
Sur le premier moyen
Attendu que la société fait grief au jugement de dire la désignation de M. Y régulière, alors, selon le moyen
1o/ que si I'article L. 2142-1-1 emporte la perte du mandat de RSS en cours à titre, comme l'observe le tribunal d'instance, de "sanction de l'échec électoral", ce texte s'oppose a fortiori à la création d'un tel mandat, pour le syndicat qui vient de perdre sa représentativité, du moins jusqu'au début de la période commençant 6 mois avant les prochaines élections ; qu'en décidant cependant que la perte de représentativité du syndicat parisien des banques et établissements financiers CFTC autoriserait ce syndicat à substituer au précédent mandat de délégué syndical de M. Y un nouveau mandat de RSS, le juge d'instance a violé par fausse application le texte susvisé ;
2o/ que la disposition selon laquelle " le salarié qui perd ainsi (à la suite du scrutin) son mandat de représentant syndical ne peut pas être désigné à nouveau comme représentant syndical au titre de la section " vise de façon générique tous les mandats de représentation délivrés par le syndicat avant les élections, de sorte qu'en limitant son champ d'application exclusivement au cas où le mandat perdu aurait été celui de RSS, le juge d'instance a violé par refus d'application I'article L. 2142-1-1 du code du travail ;
Mais attendu que l'article L. 2142-1-1 du code du travail n'interdit pas au syndicat de désigner en qualité de représentant de la section syndicale un salarié qui exerçait avant les élections les fonctions de délégué syndical ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature, à lui seul, à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GE Capital équipement finance à payer à M. Y et au syndicat parisien des banques et établissements financiers-CFTC la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société GE Capital équipement finance
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le pourvoi fait reproche au jugement attaqué d'avoir constaté la régularité de la désignation, le 05 mai 201 1, de José Maria Y en qualité de Représentant de section syndicale pour le compte du SYhlDlCAT PARISIEN DES BANQUES ET ETABI-ISSEMENTS FINANCIERS CFTC ;
AUX MOTIFS QUE " le représentant de la section syndicale a été institué par la loi no 2008-789 du 20 août 2008 au profit des organisations syndicales non représentatives dans I'entreprise (( Chaque syndicat qui constitue [. . .] une section syndicale au sein de I'entreprise ou de I'établissement de cinquante salariés ou plus peut, s'il n'est pas représentatif dans I'entreprise ou I'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de I'entreprise ou de I'établissement " (C, trav., art. L. 2142-1-1) ; que pour pouvoir être désigné représentant de la section syndicale, le salarié doit remplir les mêmes conditions que le délégué syndical, sauf celle relative à l'audience électorale ; que les formalités de désignation ainsi que celles de sa contestation sont les mêmes que pour le délégué syndical; qu'il a été par ailleurs prévu que le mandat du Représentant de section syndicale prend fin automatiquement si, à l'issue des premières élections professionnelles suivant sa désignation, le syndicat qui l'a désigné n'est pas reconnu représentatif dans I'entreprise ou I'établissement; que le salarié qui perd ainsi son mandat de représentant de la section syndicale ne peut pas être désigné à nouveau comme représentant syndical au titre d'une section jusqu'aux six mois précédant la date des élections professionnelles suivantes dans I'entreprise (C. trav., art. L. 2142-1-1) ; qu'à ce titre, il a été indiqué par la Doctrine que cette disposition mettait en évidence la finalité de l'institution du Représentant de section syndicale qui est de permettre à des organisations syndicales en voie d'implantation de bénéficier transitoirement de moyens et de protection en vue d'obtenir ultérieurement les résultats électoraux qui fonderont leur légitimité ; que la perte automatique du mandat est en quelque sorte la sanction de I'échec électoral; qu'en l'espèce il ressort des documents fournis que l'existence d'une section syndicale CFTC au 05.05.11 est justifiée par la production des reçus de cotisation de deux salariés émanant du SYNDICAT PARISIEN DES BANQUES ET ÉTABLISSEMENTS FINANCIERS CFTC en date du 30.12.2010 mais aussi du 12.11.09 ; que ces documents sont complétés par les bulletins d'adhésion correspondants, les reçus de cotisation syndicale 201 1 ; que l'attestation délivrée par A. ..., Président du syndicat, du 06.08.11 attestant que la section syndicale d'entreprise compte au moins 2 salariés ; ce qui est complété à titre surabondant par une photo montrant l'utilisation du panneau syndical mis à sa disposition dans I'entreprise ; que par ailleurs il n'est pas contesté et il est justifié de ce que José Maria Y avait été désigné délégué syndical par courrier du 27.03. 2007 par le SYNDICAT PARISIEN DES BANQUES ET ÉTABLISSEMENTS FINANCIERS CFTC ; qu'il a perdu ce mandat à la suite du scrutin s'étant tenu le 22.03.11 dans I'entreprise, le syndicat n'ayant pas obtenu au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la désignation unique du personnel ou des délégués du personnel et ayant de ce fait perdu sa représentativité dans I'entreprise ; que si I'article L. 2142-1-1 prévoit que le mandat du Représentant de section syndicale prend fin à l'issue des premières élections professionnelles suivant sa désignation dès lors que le syndicat qui l'a désigné n'est pas reconnu représentatif, cet article ne trouve clairement pas application dans l'hypothèse où c'est le Délégué syndical, précédemment désigné, qui perd son mandat en raison des résultats obtenus ; que lors du scrutin professionnel, dès lors que le terme "représentant syndical" employé au 3è alinéa de cet article ne fait manifestement pas référence à un terme général mais au mandat particulier de Représentant de section syndicale visé spécifiquement dans la section 2 à laquelle appartient cet article, insérée clans le Chapitre II du Titre IV consacré à l'exercice du droit syndical ; que ce n'était pas le mandat de Représentant de section syndicale qui était en jeu dans ce scrutin mais celui de Délégué syndical ; par conséquent, le syndicat CFTC conservait toute latitude pour se prévaloir des dispositions légales en invoquant le bénéfice des dispositions de I'article L. 2 142- 1 - 1, dans l'attente du scrutin suivant, et ce, indépendamment de l'absence de représentativité résultant de ce scrutin ; que dans ce cadre, José Maria ... ... ... ne pourra plus exercer les prérogatives attachée à la fonction de Délégué syndical lorsqu'il s'agira de négocier des accords collectifs " ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si I'article L.2142-1-1 emporte la perte du mandat de R.S.S. en cours à titre, comme l'observe le Tribunal d'instance, de " sanction de l'échec électoral )), ce texte s'oppose a fortiori à la création d'un tel mandat, pour le syndicat qui vient de perdre sa représentativité, du moins jusqu'au début de la période commençant 6 mois avant les prochaines élections ; qu'en décidant cependant que la perte de représentativité du Syndicat Parisien des Banques et Établissements Financiers C.F.T.C autoriserait ce syndicat à substituer au précédent mandat de délégué syndical de M. Y un nouveau niandat de RSS, le juge d'instance a violé par fausse application le texte susvisé ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la disposition selon laquelle " le salarié qui perd ainsi (à la suite du scrutin) son mandat de représentant syndical ne peut pas être désigné à nouveau comme représentant syndical au titre de la section " vise de façon générique tous les mandats de représentation délivrés par le syndicat avant les élections, de sorte qu'en limitant son champ d'application exclusivement au cas oij le mandat perdu aurait été celui de
RSS, le juge d'instance a violé par refus d'application I'article L.2142-1-1 du Code du Travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le pourvoi fait reproche au jugement attaqué d'avoir constaté la régularité de la désignation, le 05 mai 201 1, de José Maria Y en qualité de représentant de section syndicale pour le compte du SYNDICAT PARISIEN DES BANQUES ET ETABLlSSEiVlENTS FINANCIERS CFTC
AUX MOTIFS QUE " le représentant de la section syndicale a été institué par la loi no 2008-789 du 20 août 2008 au profit des organisations syndicales non représentatives dans I'entreprise Chaque syndicat qui constitue [...] une section syndicale au sein de I'entreprise ou de I'établissement de cinquante salariés ou plus peut, s'il n'est pas représentatif dans I'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de I'établissement " (C, trav., art. L. 2142-1-1) ; (...) qu'en l'espèce il ressort des documents fournis que l'existence d'une section syndicale CFTC au 05.05.11 est justifiée par la production des reçus de cotisation de deux salariés émanant du SYNDICAT PARISIEN DES BANQUES ET ÉTABLISSEMENTS FINANCIERS CFTC en date du 30.12.20 10 mais aussi du 12.1 1.09 ; que ces documents sont complétés par les bulletins d'adhésion correspondants, les reçus de cotisation syndicale 201 1 ; que l'attestation délivrée par A. ..., Président du syndicat, du 06.08.11 attestant que la section syndicale d'entreprise compte au moins 2 salariés ; ce qui est complété à titre surabondant par une photo montrant l'utilisation du panneau syndical mis à sa disposition dans I'entreprise ; que par ailleurs il n'est pas contesté et il est justifié de ce que José Maria Y avait été désigné délégué syndical par courrier du 27.03.2007 par le SYNDICAT PARISIEN DES BANQUES ET ÉTABLISSEMENTS FINANCIERS CFTC " ;
ALORS, D'UNE PART, QUE tout syndicat qui procède à la désignation d'un RSS doit réunir à la date de la désignation la condition exigée par l'article L.2142-1-1 du Code du travail concernant la présence minimale de deux adhérents dans I'entreprise ; qu'en se contentant de reçus de cotisations en date des 3011 21201 0 et 1211 112009 qui seraient " complétés ", sans autre précision, " par les reçus de cotisation syndicale 2011 " (sic), le Tribunal d'instance qui se réfère par ailleurs à une ancienne désignation et à la photographie d'un tableau prise à une date indéterminée n'a pas établi, dans le respect du contradictoire, qu'à la date du 5 mai 201 1, jour de la désignation de M. Y, la condition susvisée était satisfaite ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE nul ne saurait se constituer un titre à lui-même et qu'en considérant cependant comme probante l'attestation contestée de M. ... président du syndicat qui est l'auteur de la désignation litigieuse, le Tribunal d'instance de PUTEAUX a violé l'article 131 5 du Code civil ;
ALORS, ENFIN ET DE TOUTES FACONS, QUE si le syndicat qui entend créer une section syndicale ne peut être contraint de produire une liste nominative de ses adhérents, il lui incombe cependant, en cas de contestation, d'apporter les éléments utiles à établir la présence d'au moins deux adhérents dans I'entreprise à l'exclusion des éléments susceptibles de permettre l'identification de ceux-ci dont seul le juge peut prendre connaissance ; que le syndicat CFTC avait fait connaître que ses adhérents s'opposaient à la révélation de leur adhésion et sollicitait l'autorisation de fournir au juge d'instance de façon non contradictoire les éléments nominatifs de preuve ; qu'en s'abstenant de mettre en oeuvre cet aménagement de la règle du contradictoire et de vérifier personnellement que les adhérents invoqués appartenaient effectivement à I'entreprise concernée à la date de la désignation, le juge d'instance a méconnu son office et violé ensemble les articles 16 et 17 du Code de procédure civile, L.2141-1 et L.2142-1 du Code du travail ainsi que l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.