CIV. 2 SÉCURITÉ SOCIALE LG
COUR DE CASSATION
Audience publique du 14 mars 2013
Cassation partielle sans renvoi
Mme FLISE, président
Arrêt no 393 F-P+B
Pourvoi no J 12-17.421
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs, dont le siège est Besançon cedex, anciennement caisse primaire d'assurance maladie du Doubs site de Montbéliard, dont le siège est Montbéliard,
contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2012 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), dans le litige l'opposant
1o/ à la société ISS Propreté, dont le siège est Nommay,
2o/ à M. Ali W, domicilié Montbéliard,
3o/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié Paris 07 SP,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 février 2013, où étaient présents Mme Flise, président, Mme Palle, conseiller référendaire rapporteur, M. Héderer, conseiller, Mme Gazel, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Palle, conseiller référendaire, les observations de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs, l'avis de Mme de Beaupuis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable ;
Attendu qu'il résulte de ce texte qu'un employeur n'est pas recevable à invoquer l'irrégularité de la procédure administrative d'instruction d'une demande de prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle menée par une caisse, lorsque la décision de prise en charge résulte d'une décision juridictionnelle rendue dans une procédure intentée par l'assuré qui conteste la décision de refus opposée par la caisse, procédure dans laquelle l'employeur, qui y a été appelé, a pu faire valoir ses moyens de défense ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie de Montbéliard, aux droits de laquelle se trouve la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs (la caisse), a refusé de prendre en charge au titre du tableau no 42 des maladies professionnelles, l'affection déclarée, le 23 avril 2008, par M. W, salarié de la société ISS Abilis France, devenue ISS Propreté (l'employeur) ; que l'intéressé a saisi une juridiction de sécurité sociale qui a accueilli son recours ;
Attendu que pour déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie de M. W au titre de la législation professionnelle, l'arrêt énonce que préalablement à la décision de refus de prise en charge notifiée par courrier du 20 octobre 2008, la caisse, qui avait ouvert une procédure d'instruction et avait eu recours à un délai complémentaire, n'a pas informé l'employeur de la clôture de l'instruction, de son droit à venir consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoyait de prendre sa décision ; que cette obligation d'information s'impose à la caisse et doit être respectée par elle quelle que soit la décision envisagée ; que l'obligation d'information et le respect du contradictoire étant d'ordre public,
il s'ensuit que l'employeur est fondé à se prévaloir de l'inopposabilité à son égard de toute décision postérieure de prise en charge de la maladie de son salarié au titre de la législation professionnelle ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur, mis en cause dans l'instance née du recours exercé par M. W contre la décision de la caisse de refus de prise en charge de la maladie litigieuse, avait pu faire valoir ses moyens de défense devant les juges du fond, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré inopposable à la société ISS Propreté la décision de prise en charge de la maladie de M. W au titre de la législation professionnelle, l'arrêt rendu le 31 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare opposable à la société ISS Propreté la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée le 23 avril 2008 par M. W ;
Condamne la société ISS Propreté aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société ISS Propreté à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie du Doubs
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point D'AVOIR déclaré inopposable à la société ISS la décision de prise en charge de la maladie de Monsieur W au titre de la législation professionnelle
AUX MOTIFS QU'il résultait des dispositions de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale que la Caisse était tenue, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'une maladie, d'informer l'employeur de la fin de l'instruction, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoyait de prendre sa décision ; que cette obligation d'information s'imposait à la Caisse, quelle que soit la décision envisagée ; qu'en l'espèce, il était constant que la Caisse avait ouvert une procédure d'instruction à la suite de la déclaration de maladie litigieuse ; qu'elle avait informé l'employeur du refus de prise en charge ; qu'il était constant que, préalablement à cette décision de rejet, la Caisse n'avait pas informé la société ISS de la clôture de l'instruction, de son droit à venir consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoyait de prendre sa décision ; que la considération de l'absence de grief consécutif à cette décision était inopérante, l'obligation d'information et de respect du contradictoire étant d'ordre public ; que l'employeur était fondé à se prévaloir de l'inopposabilité à son égard de toute décision ultérieure de prise en charge de la maladie de son salarié au titre de la législation professionnelle ;
ALORS QUE l'employeur n'est pas recevable à invoquer l'irrégularité de la procédure administrative d'instruction d'une demande de prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle, dans le cas où la décision de prise en charge résulte d'une décision juridictionnelle rendue dans une procédure intentée par le salarié contestant la décision de refus opposée par la Caisse, procédure dans laquelle l'employeur a été appelé et a pu faire valoir ses moyens de défense ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale.