Jurisprudence : CA Saint-Denis de la Réunion, 30-11-2012, n° 10/00279, Confirmation partielle

CA Saint-Denis de la Réunion, 30-11-2012, n° 10/00279, Confirmation partielle

A9316I3G

Référence

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AFFAIRE N° RG 11/01575 Code Aff.
ARRÊT N ° 12/471
ORIGINE
JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-DENIS en date du 20 Juin 2011, rg n° 10/00279
COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS
DE LA RÉUNION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2012

APPELANTE
CAISSE GÉNÉRALE DE SÉCURITÉ SOCIALE DE LA RÉUNION

SAINT DENIS MESSAG CEDEX 09
Représentant - SCP BELOT CREGUT HAMEROUX, avocats postulants au barreau de Saint denis de la Réunion
- CHASSANY WATRELOT & ASSOCIÉS (avocats Plaidants au barreau de LYON)
INTIMÉ
Monsieur Laurent Fabrice Y
Résidence Eva apt 15

LA POSSESSION
Représentant M. Francis ... (Délégué syndical ouvrier)

DÉBATS En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2012, en audience publique devant Hervé PROTIN, Président de Chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de
Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 30 NOVEMBRE 2012;
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de Président Hervé PROTIN
Conseiller Christian FABRE
Conseiller Catherine PAROLA
ARRÊT mis à disposition des parties le 30 NOVEMBRE 2012
greffier lors des débats Mme Martine LARRIEU, Greffière
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LA COUR

Suivant déclaration du 12/08/2011, la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la RÉUNION (CGSSR) a régulièrement interjeté appel d'un jugement rendu le 20/06/2011 par le conseil des prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion dans un litige l'opposant à M. Y Laurent Fabrice, et notifié par voie postale le 03/08/2011.
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M. Y a été engagé par la CGSSR en qualité de technicien d'installation-maintenance par contrat à durée déterminée en date du 22/06/2009 prenant fin le 21/09/2009.
Ce contrat a fait l'objet d'un avenant de prolongation jusqu'au 06/12/2009.
Un nouveau contrat était signé le 01/03/2006 pour les mêmes fonctions à exercer et la même durée.
Par courrier du 24/11/2009 la CGSSR rappelait à M. Y le terme de son contrat, lui indiquant que son certificat de travail et son attestation assedic étaient à sa disposition à compter du 07/12/2009.
Par courrier du 30/11/2007 M. Y sollicitait le bénéfice de l'application de l'article 17 de la Convention Collective Nationale de Travail du Personnel des Organismes de Sécurité Sociale du 08/02/57 (CCNTPOSS), faisant valoir qu'il avait travaillé au sein de la CAF de la RÉUNION du 21/12/2001 au 04/02/2002 comme agent administratif polyvalent.
Par acte introductif d'instance du 14/01/2010 M. Y saisissait le conseil de prud'hommes de Saint-Denis des demandes suivantes
- condamner la CGSSR à procéder à sa titularisation en application de la CCNTPOSS, et ce sous astreinte de 200 euros pare jour de retard à compter du 15° jour de notification du jugement.
- condamner la CGSSR au paiement
-des salaires dus depuis le 06/12/2009 jusqu'à la date du jugement,
- de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.
En réplique, la CGSSR sollicitait que M. Y soit débouté de toutes ses demandes.
Le jugement déféré a ordonné à la CGSSR la titularisation de M. Y à compter du 06/12/2009, et ce sous astreinte de 30 euros (par jour) à compter de la notification du jugement, mentionnant se garder la possibilité de liquider cette astreinte, avec régularisation des salaires dus jusqu'à son prononcé, déboutant M. Y du surplus de ses demandes et condamnant la CGSSR aux entiers dépens.
Devant la Cour
La CGSSR sollicite l'infirmation du jugement et
- qu'il soit dit et jugé que le temps de présence visé à l'article 17 de la convention précitée, doit s'apprécier au sein de chaque organisme employeur entrant dans son champ d'application,
- qu'il soit constaté que M. Y ayant été employé durant moins de six mois au sein de la CGSSR, ne remplissait pas la condition requise pour être titularisé,
- que M. Y soit débouté de toutes ses demandes et condamné à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux dépens.
- subsidiairement qu'en tout état de cause M. Y n'est pas fondé à solliciter sa réintégration au sein de la CGSSR.
Vu les conclusions déposées au greffe
- les 14/02/12, 06/06/2012 et 28/09/2012 (conclusions récapitulatives) par la CGSSR,
- le 28/09/2012 (conclusions récapitulatives) par M. Y.
Les parties ayant développé oralement leurs écritures auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits et des moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 17 de la CCNTPOSS dispose que
"Tout nouvel agent sera titularisé, au plus tard après six mois de présence effective dans les services en une ou plusieurs fois ".
S'appuyant sur le principe de l'effet relatif des contrats et de ce que la reprise d'ancienneté, pour être exorbitante du droit commun, doit être prévue de manière claire et non équivoque par un texte d'interprétation stricte, la CGSSR considère d'une part que la CCNTPOSS s'applique distinctement aux deux organismes employeurs juridiquement signataires (la Fédération Nationale des Organismes de Sécurité Sociale et L'Union Nationale des Caisses d'Allocations Familiales), et d'autre part que l'appréciation " globale " de l'ancienneté au sein de chacun de ces organismes employeurs, ne peut être mise en oeuvre qu'en application d'une disposition expresse et précise.
A l'appui de la thèse de la distinction juridique des organismes employeurs l'appelante se réfère aux dispositions de la CCNTPOPSS dont
- son article 1 distinguant littéralement les organismes de sécurité sociale " et " d'allocations familiales,
- son article 16 disposant du " changement volontaire d'employeur " au cas d'acceptation par un agent d'une offre d'emploi, et imputant respectivement la dispense de l'action de formation et sa prise en charge, à l'organisme d'accueil et à l'organisme preneur,
- son article 16 bis précisant que "les demandes de changement d'organisme employeur... sont intégrés dans la bourse des emplois par l'intermédiaire de l'organisme employeur auquel il (l'agent) appartient "
Par ailleurs, la CGSSR observe que la convention applicable ne contient aucune disposition expresse se rapportant à l'appréciation globale de l'ancienneté acquise au sein de différents organismes employeurs et ne prévoit pas de reprise automatique de l'ancienneté acquise par un salarié au titre d'un précédent contrat de travail auprès d'un autre organisme relevant de la même convention, au surplus en cas de contrats ne se succédant pas sans interruption, et qu'à la lecture de l'article 17 disposant des conditions de la titularisation, les termes "les services" doivent s'entendre comme ceux se rapportant à chaque organisme employeur pris séparément, conformément à l'esprit de la titularisation prévue par cette convention et d'autres dites " classiques", supposant l'occupation d'un poste nécessaire de façon pérenne au fonctionnement de l'organisme employeur, mais aussi, de la part du requérant, une certaine identité ou complémentarité d'activité, d'occupation de poste pendant une période ininterrompue ou quasi ininterrompue, au sein de l'organisme employeur.
Subsidiairement, l'appelante soutient que la réintégration du salarié qui s'infère de l'obligation décidée par le conseil des prud'hommes de poursuite du contrat, avec la requalification du contrat, ne fait pas partie des cas limitativement prévus par le code du travail, alors que la situation de M. Y ne relève pas d'un cas de licenciement nul.
En réplique, le salarié considère que l'article 17 lui est applicable pour avoir travaillé globalement plus de six mois à la CAF et à la CGSSR, branches d'une même organisation de droit privé ayant une délégation de service public, et auxquelles s'applique "conjointement" la convention ainsi qu'en dispose notamment les articles 16 bis (susvisé) et 18 selon lequel " les emplois vacants seront sollicités par priorité parmi le personnel en fonction dans la caisse, ou, s'il y a lieu parmi le personnel en fonction dans d'autres organismes de sécurité sociale ou d'allocation familiale ".
Par ailleurs, l'intimé fait notamment état de la circulaire de la Direction du Développement et de l'Accompagnement des Ressources Humaines de la Sécurité Sociale en date du 16/02/2011 modifiant les règles relatives à la titularisation en introduisant en dérogation à l'article 17 de la convention la possibilité de conclure des CDD d'une durée supérieure à 6 mois... et en déduit (à contrario) qu'avant son application la titularisation "devait se faire" pour tout salarié recruté dans le cadre d'un ou de plusieurs contrats à durée déterminée pour une ou plusieurs branches de la sécurité sociale, au bout de six mois, ininterrompu ou non.
SUR CE
Il convient de relever que le salarié considère que les dispositions de l'article 17 sont suffisamment claires pour ne souffrir aucune interprétation mais ajoute paradoxalement qu'il convient de se référer à la circulaire du 12/11/2010 comme élément de preuve qu'au moment de la survenance du litige sa titularisation était de droit alors qu'il avait été recruté dans le cadre d'un ou de plusieurs contrats à durée déterminée, pour une ou successivement plusieurs branches de la Sécurité Sociale, au bout de six mois d'emploi, ininterrompu ou non.
Or, l'article 17 dispose littéralement de l'hypothèse d'un recrutement "dans les services" et non de celle d'un recrutement successif dans plusieurs branches.
Mais la notion de "service" doit être entendue comme intentionnellement large, à savoir dans les services d'un organisme employeur.
En l'espèce, il n'est pas contesté que M. Y a été successivement recruté par deux organismes employeurs.
De même, il convient d'observer que les rédacteurs de l'article 17 n'ont pas entendu préciser que l'emploi se rapportait aux services du même organisme employeur, ce dont il s'infère que les dits services se rapportent à tout organisme employeur signataire de la convention.
De même, la circulaire susvisée ayant pour objet " les possibilités et limites au recours aux contrats à durée déterminée " ne précise pas davantage si la succession des CDD intéresse un ou plusieurs organismes employeurs alors qu'elle a manifestement pour objet de restreindre le champ d'application de l'article 17 et qu'elle explique avoir pour objet de palier les "éventuelles fragilités de l'évolution conventionnelle". La directive ayant pour finalité d'infléchir et préciser les dispositions de l'article 17, il appartenait à son rédacteur de préciser, le cas échéant, que la dérogation nouvelle aux dispositions de l'article 17 concernait le même organisme employeur. Ce qu'ils n'ont pas fait, n'entendant donc pas restreindre dans ce sens son champ d'application.
Par ailleurs, il convient de retenir l'existence et la remise au salarié au moment de l'embauche d'un document valant attestation sur l'honneur de n'avoir jamais travaillé dans un organisme de sécurité sociale tel que la CPAM, la CRAM, la CAF, l'URSSAF, la CNAMTS, la CNATAVS et la CNAF.
De par sa formulation négative cette attestation ne peut s'analyser de la part de l'organisme employeur qui la sollicite que comme une mesure de précaution ayant nécessairement pour fin de s'assurer de l'existence ou non d'embauches, quelle que soit leur antériorité, auprès des différentes branches de la sécurité sociale, et de pouvoir ainsi être en mesure, pour le moins de moduler, l'application des dispositions de l'article 17 de la convention.
Il convient de retenir que le libellé de ce document se rapporte à toutes les branches de la sécurité sociale et non au seul organisme sollicitant l'attestation.
Il résulte de ces considérations que la titularisation de droit doit être constatée, dès lors que la durée globale des deux contrats à durée déterminée successifs conclus avec deux organismes employeurs signataires de la convention, est, en l'espèce, supérieure à six mois.
Le jugement est confirmé sur ce point.
La titularisation du salarié, par l'effet de l'application de la convention collective, entraîne ipso facto la requalification du contrat qui devient à durée indéterminée.
La rupture de la relation de travail du fait de l'employeur doit s'analyser comme un licenciement.
Pour autant, la violation de la convention collective ne saurait valoir nullité du licenciement, aucun texte légal n'en disposant dans ce sens.
Le licenciement ne saurait davantage être déclaré illicite, aucune atteinte à un principe d'ordre public ou à une liberté fondamentale du salarié n'est à relever.
Le licenciement doit donc être déclaré sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement est infirmé sur ce point. Sur l'indemnisation
La réintégration de M. Y n'est pas ordonnée et il est débouté de sa demande de régularisation de salaires postérieure au 06/12/2009, date de l'expiration du contrat à durée déterminée.
Le jugement est infirmé sur ce point.
Il est toutefois constaté que M. Y n'a nullement fait valoir de demande d'indemnisation conforme à la qualification du licenciement retenue.
Il est sursis à statuer pour inviter les parties à faire toutes observations utiles dans ce sens.
Il est aussi sursis à statuer sur les autres demandes.

PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en matière sociale et en dernier ressort,
Confirme le jugement quant au constat de la titularisation de M. Y Laurent Fabrice ;
Déclare le licenciement de M. Y Laurent Fabrice sans cause réelle et sérieuse et dit n'y avoir lieu d'ordonner sa réintégration au sein de la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la RÉUNION ;
Infirme le jugement quant à la régularisation de salaires dus à M. Y Laurent Fabrice jusqu'à son prononcé, et déboute celui-ci de cette demande ;
Dit qu'il est sursis à statuer sur l'ensemble des autres demandes jusqu'à ce que les parties aient fait valoir leurs observations sur le point exposé ci-après ;
Avant dire droit
Invite les parties à faire valoir leurs observations éventuelles quant à l'indemnisation de M. Y Laurent Fabrice comme suit
- M. Y Laurent Fabrice avant le 1er février 2013, - la CGSSR avant le 1er avril 2013 ;
Ordonne le retrait du rôle de la présente affaire qui sera inscrite à nouveau à la requête de la partie la plus diligente après le 1er février au plus tôt ;
Réserve les dépens.
Le présent arrêt a été signé par Hervé ..., Président, et par Mme Martine ..., greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

SIGNE

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