SOC. PRUD'HOMMES FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 26 septembre 2012
Cassation totale
partiellement sans renvoi
M. LINDEN, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président
Arrêt no 1906 F-D
Pourvoi no E 10-24.286
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme Martine Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 juin 2010.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Martine Z, domiciliée Toulouse,
contre l'arrêt rendu le 30 octobre 2009 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2 - chambre sociale), dans le litige l'opposant
1o/ à M. Patrick Y, domicilié Nanterre, pris en qualité de mandataire liquidateur de la société Saint-Simon,
2o/ au CGEA Ile-de-France Ouest, dont le siège est Levallois-Perret cedex,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 juin 2012, où étaient présents M. Linden, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Wurtz, conseiller référendaire rapporteur, M. Ballouhey, conseiller, M. Cavarroc, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Wurtz, conseiller référendaire, les observations de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de Mme Z, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu l'article 1184 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagée par la société Saint-Simon à compter du 15 novembre 2001 en qualité de directrice de la communication, Mme Z a saisi la juridiction prud'homale en référé pour obtenir le paiement de salaires au titre de l'année 2004 et au fond pour voir prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de son employeur ; que la société Saint-Simon a été mise en liquidation judiciaire le 20 mars 2007, M. Y étant nommé en qualité de liquidateur judiciaire;
Attendu que pour fixer la date de rupture du contrat de travail au 17 février 2005, l'arrêt retient que la salariée ne produit aucun justificatif de la poursuite de son activité au cours de l'année 2005, ni de son maintien à la disposition de son employeur ; que ni le courrier que l'intéressée a adressé le 1er février 2005 à M. ... pour l'alerter sur sa situation financière difficile, ni la reconnaissance de dettes établie le 11 février 2005 par ce dernier ne font état de la poursuite des relations contractuelles au-delà de cette date ;
Attendu cependant qu'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat de travail entre la salariée et la société Saint-Simon n'avait pas été rompu au jour du jugement prononçant sa résiliation judiciaire, soit le 26 juin 2008, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la résiliation judiciaire ; Dit que le contrat de travail a été résilié le 26 juin 2008 ;
Renvoie la cause et les parties pour qu'il soit statué sur les points restés en litige devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne M. Y, ès qualités, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour Mme Z.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la date de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame Martine Z au 17 février 2005 et de lui avoir alloué les seules sommes de 12.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 759,20 euros à titre d'indemnité de licenciement, 3.659,73 euros à titre de rappel de salaire et 365,97 euros au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE la cour constate que le jugement n'est pas critiqué en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant Martine Z et l'EURL SAINT-SIMON aux torts de l'employeur, décision motivée à bon droit par la violation de l'obligation de payer les salaires. S'il est exact que la prise d'effet de la résiliation judiciaire d'un contrat de travail est en principe celle de la décision judiciaire la prononçant, c'est à la condition qu'à cette date le salarié soit toujours au service de son employeur. Or, en l'espèce, Martine Z, dont la fonction consistait à développer la clientèle et à promouvoir l'image de la société et qui exerçait son activité en totale autonomie, ne produit aucun justificatif de la poursuite de son activité au cours de l'année 2005 (ni rapport d'activité, ni la preuve de débours de frais...), ni de son maintien à la disposition de son employeur, en particulier elle n'a adressé aucun courrier à celui-ci pour le lui indiquer. L'attestation de Monsieur ..., ex employé de " Mascottes Traiteur " qu'elle produit énonce qu'elle " a été employée par l'EURL SAINT-SIMON en tant que relations publiques pour le groupe " la Ferme d'Isatis " la " Olé Bodega " et en même temps pour la " Mascotte Traiteur " confirmation par le gérant Monsieur Jean-Paul ... ; la dernière manifestation pour le group UMP s'est déroulé à la " Ol " Bodega " Sesquières au mois de novembre 2004 ". Enfin, ni le courrier que Martine Z a adressé le 1er février 2005 à Monsieur ... pour l'alerter sur sa situation financière difficile, ni la reconnaissance de dettes établie le 11 février 2005 par ce dernier ne font état de la poursuite des relations contractuelles au-delà de cette date. Par ailleurs, dans son arrêt du 11 mai 2006, rendu contradictoirement à l'égard de l'EURL SAINT-SIMON, notre cour a constaté, au vu des pièces produites, que Martine Z avait effectivement été employée par l'EURL SAINT-SIMON de novembre 2001 à janvier 2005. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a fixé la date de la rupture au jour de sa saisine. Le jugement sera donc également confirmé sur le montant des sommes allouées au titre du préavis, de l'indemnité de licenciement et des rappels de salaires et de congés payés ;
1) ALORS QU'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date ; qu'en l'espèce, il est constant que le contrat de travail de Madame Martine Z n'avait pas été rompu avant le 26 juin 2008, date de la décision de première instance prononçant la résiliation judiciaire de son contrat de travail, le mandataire liquidateur de la Société SAINT-SIMON n'ayant pas procédé à son licenciement et la salariée n'ayant pas, en cours de procédure, pris acte de la rupture ou démissionné ; qu'en considérant pourtant que c'était à bon droit que le Conseil de prud'hommes avait fixé la date de la rupture au jour de sa saisine, le 17 février 2005, la Cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil ;
2) ALORS, ET EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QU'en considérant, pour retenir que c'était à bon droit que le Conseil du prud'hommes avait fixé la date de la rupture au jour de sa saisine le 17 février 2005, que Madame Martine Z ne produisait aucune justificatif de la poursuite de son activité au cours de l'année 2005, ni de son maintien à la disposition de son employeur, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, dès lors qu'il ne résulte nullement de ses constatations que le contrat de travail avait été rompu le 17 février 2005, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du Code civil ;
3) ALORS QUE la décision rendue en référé n'a pas autorité de chose jugé au principal ; qu'en se fondant pourtant sur son arrêt du 11 mai 2006, statuant en référé, ayant constaté que Madame Martine Z avait été effectivement employée par la Société SAINT SIMON de novembre 2001 à janvier 2005, pour considérer que c'était à bon droit que le Conseil de prud'hommes avait fixé la date de la rupture au jour de sa saisine, la Cour d'appel a violé les article 488 du Code de procédure civile et 1351 du Code civil.