Jurisprudence : CA Paris, 5, 6, 20-10-2011, n° 10/06409, Infirmation

CA Paris, 5, 6, 20-10-2011, n° 10/06409, Infirmation

A9472H7X

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CA Paris, 5, 6, 20-10-2011, n° 10/06409, Infirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5672731-ca-paris-5-6-20102011-n-1006409-infirmation
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Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2011 (n°, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 10/06409
Décision déférée à la Cour Jugement du 15 Février 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/09533

APPELANTE
Madame Christiane Z Z Z Z veuve Z

PARIS
représentée par la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY, avoués à la Cour
assistée de Me Martine BLANCK DAP de la SCP LEFEVRE PELLETIER ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque P0238
INTIMÉE
Société Civile DU 6 RUE DE L'ABREUVOIR

PARIS
représentée par Me Rémi ..., avoué à la Cour
assistée de Me Jean-pierre CAHEN de l' ASSOCIATION CAHEN RUIMY-CAHEN, avocat au barreau de PARIS, toque R217

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 06 Septembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente
Madame Marie-Josèphe JACOMET, Conseillère
Madame Caroline FEVRE, Conseillère
qui en ont délibéré Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.
Greffier, lors des débats M. Sébastien PARESY
ARRÊT
- contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente et par M. Sébastien PARESY, greffier présent lors du prononcé.

***********
Suivant acte authentique du 21 décembre 1972, Monsieur Guillaume Daviel Z Z Z et son épouse née Yolande ..., ont constitué avec leur fils, Bernard Z de la Nézière, la société civile du 6 rue de l'Abreuvoir, ayant pour objet la propriété, l'administration, l'exploitation par bail, location ou autrement de l'immeuble situé à Paris 18ème arrondissement 6 rue de l'Abreuvoir, sur la butte Montmartre.
Monsieur et Madame Z Z Z Z Z sont décédés respectivement les 30 décembre 1975 et 24 janvier 1979, laissant pour leur succéder leurs trois enfants Simone Z Z Z Z, Christiane Daviel de la Nézière épouse Fort et Bernard Z de la Nézière.
A la suite des opérations de partage des deux successions, la société civile est constituée des porteurs de parts suivants Bernard Z de la Nézière, notaire, gérant titulaire de 609 parts dont 606 en usufruit, Michèle Z de la Nézière son épouse, titulaire de 5 parts, Isabelle Z de la Nézière leur fille, titulaire de 5 parts en toute propriété et 303 parts en nue propriété, Alexandre Z de la Nézière, leur fils, titulaire de 5 parts en pleine propriété et 303 parts en nue propriété, et Christiane Fort titulaire de 116 parts.
Par jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 7 septembre 2000, Madame ... a été déboutée de sa demande tendant à la dissolution anticipée pour juste motif de la société civile sur le fondement de l'article 1844-7.5 du Code civil.
Par arrêt de la Cour d'appel du 4 octobre 2002, infirmant le jugement, le retrait de Madame ... a été autorisé dans les conditions de l'article 1869 du Code civil, avec précision qu'à défaut d'accord amiable sur la valeur de ses droits sociaux, Madame ... devait solliciter l'application de l'article 1843-4 du Code civil.
Le pourvoi en cassation a été déclaré non admis le 30 mars 2004.
Par acte extra judiciaire du 3 mars 2003, Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve Z, a notifié à la société civile une demande de remboursement de ses parts sociales qu'elle a évalué à 431.081 euros.
Par ordonnance de référé du 14 octobre 2003, Madame ... a été déboutée de sa demande de nomination d'expert, faute de justifier des recherches accomplies en vue d'un accord amiable tel que visé à l'article 1843-3 du Code civil.
La société civile familiale a versé la somme de 19.584,29 euros, le 19 juin 2004, représentant la valeur nominale des 116 parts de Madame ... (17.684,20 euros augmentée de la somme de 1.900 euros allouée par la Cour de cassation en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Sur la même demande que précédemment, par ordonnance du 18 janvier 2005, un expert a été désigné pour déterminer la valeur des parts de la société en vue du remboursement des droits sociaux. Il a déposé son rapport le 25 octobre 2007 en concluant à une valeur de la société civile familiale (SCF) de 1.540.877 euros soit 2.082,26 euros la part, avant application d'une décote minoritaire de -15% ramenant la valeur unitaire à 1.769,93 euros. Les parts de Madame ... sont donc chiffrées à 205.311 euros, valeur au 31octobre 2002 date la plus proche de l'arrêt autorisant le retrait, ou à 329.227,37 euros, valeur juin 2007 date la plus proche du dépôt du rapport par l'expert.
Le 15 novembre 2007, la SCF a versé spontanément la somme de 187.626,80 euros.
Par acte d'huissier du 19 juin 2008, Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve Z, a fait assigner la société civile du 6 rue de l'Abreuvoir, en évaluation des parts qu'elle détient dans la société civile 6 rue de l'Abreuvoir à la date la plus proche de leur remboursement effectif, en paiement de la somme de 329.227,37 euros, correspondant à la valeur à la date de l'assignation, augmentée des intérêts au taux légal outre capitalisation, subsidiairement en condamnation de la société civile au paiement des intérêts au taux légal sur la somme de

205.311 euros à compter du 4 octobre 2002 outre capitalisation, devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 15 février 2010 a
-débouté Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve Z, de toutes ses demandes,
-condamné Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve Z, à payer à la société civile du 6 rue de l'Abreuvoir la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts,
-rejeté toutes autres demandes, -ordonné l'exécution provisoire,
-condamné Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve Z, à payer à la société civile du 6 rue de l'Abreuvoir la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance comprenant le coût de l'expertise.

Suivant déclaration du 22 mars 2010, Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve Z, a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions du 10 mai 2011, la SCI du 6 rue de l'Abreuvoir a sollicité la confirmation du jugement, le débouté des demandes de Madame ..., la réformation du jugement en ce qu'il a alloué à la SCF la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et statuant à nouveau la condamnation de Madame Christiane Z à lui verser la somme de 20.000 euros de ce chef, la condamnation de Madame ... à lui payer une somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, très subsidiairement la fixation au 19 juin 2004 de la date d'évaluation du montant des droits sociaux de Madame ..., le renvoi devant l'expert des parties avec mission d'établir la valeur des parts de Madame ... au 19 juin 2004, qu'il soit dit que les intérêts ne porteront que sur le solde résiduel, déduction faite des paiements effectués les 19 juin 2004 et 15 novembre 2007, restant dû à Madame ... après fixation par expert de la valeur de ses parts au 19 juin 2004 et courront à compter de la signification de l'arrêt, le rejet de la demande de capitalisation des intérêts et à défaut, qu'il soit dit qu'ils ne pourront produire d'effet que sur le solde résiduel de la valeur fixée par l'expert.
Dans ses dernières écritures du 7 juin 2011, Madame ... a conclu à la réformation du jugement en l'ensemble de ses dispositions, qu'il soit dit que l'évaluation des parts qu'elle détient dans la SCF doit être réalisée à la date la plus proche de leur remboursement effectif, constaté que le rapport d'expertise est entaché d'une erreur grossière, au renvoi des parties devant l'expert afin qu'il soit procédé à l'évaluation des parts qu'elle détient dans la SCF à la date la plus proche de leur remboursement effectif, en toute hypothèse à la condamnation de la société SCF à lui verser une somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 30 août 2011.
****

Considérant que Madame Christiane Daviel Z Z Z, veuve de monsieur ..., fait grief au jugement d'avoir retenu, de manière erronée, que l'évaluation des parts sociales n'a pas lieu d'être effectuée à la date de leur remboursement effectif alors qu'il y aurait lieu d'ordonner la reprise des opérations d'expertise portant sur les parts de la société civile du 6 rue de l'Abreuvoir pour estimer leur valeur à la date la plus proche de leur remboursement effectif;
Considérant que, par arrêt définitif du 4 octobre 2002, le retrait de Madame ... de la société civile a été autorisé dans les conditions de l'article 1869 du Code civil qui stipule que l'associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux fixée, à défaut d'accord amiable, conformément à l'article 1843-4 du Code civil, d'ordre public; que ce même arrêt a précisé qu'à défaut d'accord amiable, Madame Christiane Z devait solliciter l'application des dispositions de ce dernier article aux termes duquel, dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d'un associé ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible;
Considérant que l'expert désigné par ordonnance de référé du 18 janvier 2005 pour déterminer la valeur des parts de la société en vue du remboursement des droits sociaux, a déposé son rapport le 25 octobre 2007;
Considérant qu'il conclut en ces termes la valeur des parts de Madame Christiane Z peut être estimée à 205.311 euros au 31 octobre 2002, soit un montant de 233.456 euros si l'on tient compte de la capitalisation d'intérêts au taux légal sur une période allant du 31 octobre 2002 au 30 septembre 2007; que pour parvenir à cette évaluation, il a considéré que la date de l'arrêt de la Cour d'appel ayant autorisé le retrait de Madame ..., en octobre 2002, est plus pertinente, mais, à la demande du conseil de Madame ..., a réalisé, aussi, l'évaluation des parts à la date la plus proche du dépôt du rapport, ce conseil estimant que l'expert doit procéder aux deux évaluations et que le tribunal a seul vocation à trancher entre ces deux évaluations; qu'il mentionne clairement dans son rapport qu'il a retenu la seule date de retrait, et a appliqué une décote, dont il dit qu'elle est d'usage, de 15% pour participation minoritaire, puis un intérêt au taux légal pour tenir compte du temps écoulé entre la date retenue pour l'évaluation et le jour du rapport;
Considérant que l'associé qui est autorisé à se retirer d'une société civile pour justes motifs par une décision de justice ne perd sa qualité d'associé qu'après remboursement de la valeur de ses droits sociaux;
Considérant que la valeur des droits sociaux de l'associé qui se retire doit être déterminée à la date la plus proche de celle du remboursement de la valeur de ces droits;
Considérant qu'il ressort de ces énonciations et des articles susvisés qu'une expertise est nécessaire pour l'évaluation des droits sociaux de l'associé;
Considérant que l'expert ne peut être désigné que selon les modalités prévues à l'article 1843-4 du Code civil; qu'en l'espèce, eu égard à la contestation entre les parties, l'expert judiciaire qui a déposé son rapport a été désigné par ordonnance de référé;
Considérant que l'expert ainsi désigné est seul compétent pour procéder à l'évaluation des droits sociaux, la juridiction ne pouvant y procéder elle-même;
Considérant que, toutefois, ainsi que l'a révélé la lecture du rapport d'expertise, l'expert judiciaire a évalué les parts sociales, de manière erronée, à la date de l'arrêt qui a autorisé le retrait alors que cette évaluation doit être effectuée à la date la plus proche de celle du remboursement effectif de ces parts sociales; que, ce faisant, il a commis une erreur grossière que la juridiction saisie de l'affaire ne peut réparer, pas plus qu'elle ne peut désigner un expert judiciaire aux fins d'évaluation des parts sociales, étant seulement compétente pour désigner le même expert aux fins de l'actualisation du rapport, ce qui n'est pas possible en l'espèce, les bases d'évaluation de l'expertise ne pouvant être retenues;
Considérant que le paiement, par la société civile familiale, du montant représentant l'évaluation erronée, par l'expert, des parts sociales de Madame ..., outre le fait qu'il est formellement contesté par l'appelante, ne représente pas le paiement de la valeur imposée, telle que rappelée précédemment, de ses droits sociaux et n'est donc pas de nature à faire perdre la qualité d'associée de Madame ...;
Considérant qu'il s'ensuit que le rapport de Monsieur ... ne peut être pris en considération par la Cour pour l'évaluation des droits sociaux de Madame ...; qu'il convient de renvoyer les parties devant la juridiction compétente pour désigner l'expert chargé d'évaluer les droits sociaux de Madame ...;
Considérant qu'en cet état, il n'est pas démontré que le comportement allégué de Madame ... est fautif;
Considérant que le jugement est donc infirmé;
Considérant que l'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, tant en première instance qu'en appel;
Considérant que chaque partie supportera ses dépens de première instance et d'appel;

PAR CES MOTIFS
La Cour
Infirme le jugement.
Statuant à nouveau
Dit que le rapport d'expertise de Monsieur Thierry ... est entaché d'une erreur grossière.
Renvoie les parties à saisir la juridiction compétente, au visa de l'article 1843-4 du Code Civil pour désigner l'expert chargé d'évaluer les droits sociaux de Madame ....
Dit n'y avoir lieu à application, en première instance comme en appel, des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Rejette toutes autres demandes.
Dit que chaque partie supportera ses propres dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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