République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 29/09/2011
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N° MINUTE
N° RG 10/05709
Jugement (N° 1108001119)
rendu le 01 Juin 2010
par le Tribunal d'Instance de ROUBAIX
REF SB/FB
APPELANTS
Monsieur Abdelouhab Z
né le ..... à OUM TOUB (ALGÉRIE)
demeurant
WATTRELOS
représenté par Me Philippe ..., avoué à la Cour
assisté de Me Odile DESMAZIERES, avocat au barreau de LILLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178002/10/09106 du 28/09/2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
Madame Nora YZ épouse YZ
née le ..... à ROUBAIX (59100)
269 rue des Patriotes
Appartement 1
59150 WATTRELOS
représentée par Me Philippe ..., avoué à la Cour
assistée de Me Odile DESMAZIERES, avocat au barreau de LILLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178002/10/09106 du 28/09/2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
INTIMÉE
SA HLM VILOGIA,
venant aux droits de la SA LOGICIL,
agissant par son représentant légal domicilié ès-qualité audit siège
VILLENEUVE D'ASCQ
représentée par la SELARL LAFORCE Eric, avoués à la Cour
assistée de Me Delphine GRAS-VERMESSE, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS à l'audience publique du 23 Juin 2011
tenue par Stéphanie BARBOT magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS Karine CAJETAN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Martine DAGNEAUX, Président de chambre
Laurence BERTHIER, Conseiller
Stéphanie BARBOT, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Martine DAGNEAUX, Président et
Karine CAJETAN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 13 Avril 2011
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Par acte sous seing privé du 1er décembre 1995, la société LOGICIL, aux droits de laquelle vient désormais la S.A. VILOGIA, a consenti aux époux Z un bail portant sur un immeuble 269/1, rue des Patriotes à WATTRELOS.
Invoquant des problèmes d'humidité dans les lieux, les époux Z ont saisi le tribunal d'instance de ROUBAIX qui, par jugement avant dire droit du 30 avril 2009, a ordonné une mesure d'expertise.
L'expert a déposé son rapport le 5 janvier 2010.
Aux termes d'un jugement prononcé le 1er juin 2010, le tribunal d'instance de ROUBAIX a
· débouté les époux Z de leur demande d'expertise médicale,
· condamné la S.A. VILOGIA à payer à Abdelouhab Z la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice corporel lié à l'état du logement,
· condamné la S.A. VILOGIA à exécuter les travaux préconisés par l'expert judiciaire en page 12 de son rapport, dans le mois de la signification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai,
· condamné la S.A. VILOGIA à fournir aux époux Z un logement provisoire avec un loyer équivalent à celui payé à ce jour, dans le mois de la signification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai,
· condamné la S.A. VILOGIA à prendre en charge les frais de déménagement des époux Z dans le logement provisoire et ceux de déménagement pour le retour dans le logement loué,
· condamné S.A. VILOGIA à payer aux époux Z
* la somme de 12 503,46 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice de jouissance, * celle de 1 000 euros en réparation de leur préjudice moral,
· ordonné l'exécution provisoire,
· débouté les époux Z du surplus de leurs demandes,
· condamné la S.A. VILOGIA aux dépens, y compris le coût d'un procès-verbal de constat du 11 août 2008,
· dit que le jugement serait notifié au Préfet du Nord.
Les époux Z ont interjeté appel de ce jugement suivant déclaration reçue au greffe le 3 août 2010.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon leurs écritures récapitulatives signifiées le 4 mars 2011, les époux Z demandent à voir
· dire bien appelé, mal jugé en partie,
· confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la S.A. VILOGIA à exécuter les travaux sous astreinte, à fournir un logement provisoire sous astreinte, et à prendre en charge les frais de déménagement correspondants,
· condamner la S.A. VILOGIA à leur payer la somme de 26 582,01 euros au titre de leur préjudice de jouissance constaté quelques mois après la prise de possession des lieux et jusqu'au mois de mars 2011,
· condamner la S.A. VILOGIA à leur payer la somme de 157,29 euros par mois écoulé à compter d'avril 2011 jusqu'au jour du déménagement effectif d'Abdelouhab
Z avant son relogement dans des conditions décentes,
· condamner la S.A. VILOGIA à leur payer 15 000 euros au titre du préjudice moral subi du fait des nombreuses démarches réalisées précédemment auprès de leur bailleur resté sans réaction durant 15 ans,
· ordonner une expertise médicale sur Abdelouhab Z, afin de donner un avis sur son état de santé et ses troubles, d'en rechercher la cause, de fournir un avis sur l'aggravation de son état de santé du fait des carences du bailleur dans la réalisation des travaux et de l'humidité du logement, et d'évaluer les préjudices,
· condamner la S.A. VILOGIA à payer à Abdelouhab Z, à titre provisionnel,
10 000 euros à valoir sur l'ensemble de ses préjudices physiques et corporels, dans l'attente d'une expertise,
· débouter S.A. VILOGIA de l'ensemble de ses demandes,
· condamner S.A. VILOGIA au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile " sous réserve de l'application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle ",
· la condamner aux entiers dépens, en ce compris le coût du procès-verbal de constat du
11 août 2008,
· la condamner à prendre en charge l'ensemble des frais d'expertise.
Les époux Z indiquent que leur appel se fondent sur les motifs suivants
· leur trouble de jouissance a été apprécié sans tenir compte de la période courue jusqu'à ce jour ;
· l'expertise médicale a été rejetée alors que l'état de santé d'Abdelouhab Z est en lien direct avec l'état du logement loué, en sorte qu'il est nécessaire d'apprécier son préjudice suivant la nomenclature Dhintillac ;
· Abdelouhab Z a été victime d'une véritable discrimination de la part de S.A. VILOGIA qui a effectué des travaux dans l'immeuble voisin mais pas dans les lieux loués dont s'agit ;
· le montant alloué au titre du préjudice moral est insuffisant au vu des carences de S.A. VILOGIA et de la durée pendant laquelle ce préjudice a été enduré.
Ils soutiennent avoir, à maintes reprises, attiré l'attention de leur bailleur sur les désordres constatés dans le logement, notamment en raison de l'humidité ; que ces désordres ont été objectivés par un constat d'huissier réalisés le 11 août 2008, puis par l'expert judiciaire qui a conclu que le logement n'était pas décent ; que selon l'expertise, le bailleur ne pouvait ignorer les désordres dus à un défaut d'isolation, à une ventilation insuffisante et au non-entretien du logement ; que la responsabilité du bailleur est pleinement établie ; que le problème d'humidité est si grave qu'il rend le logement totalement inhabitable, et ce problème ne peut être attribué à l'usage d'un chauffage à pétrole par les locataires ; qu'eu égard à l'état du logement, l'expert a estimé qu'un loyer n'était pas justifié.
Ils contestent s'être maintenus dans les lieux volontairement et avoir refusé de déménager pour permettre le commencement des travaux et prétendent que la S.A. VILOGIA ne leur a fait une proposition officielle de logement qu'en octobre 2008 ; que les locataires ont accepté, le 21 novembre 2010, le principe d'un déménagement le temps des travaux, mais n'ont reçu aucune précision quant aux dates de déménagement et à la durée du changement de lieux.
Concernant leur préjudice de jouissance, les époux Z reprochent au tribunal de ne pas avoir tenu compte de la période postérieure au mois de décembre 2006 et établissent donc un décompte de leur préjudice entre le mois de mars 1996 et le mois de mars 2011, sur la base d'une indemnisation à hauteur de 157,29 euros par mois. Ils demandent que pour la période postérieure, soit ajoutée une somme mensuelle de 157,29 euros jusqu'au jour du déménagement effectif.
Quant à leur préjudice moral, les époux Z font valoir qu'ils ont effectué de nombreuses démarches auprès du bailleur qui est resté sans réaction ; que le bailleur a adopté à leur endroit une " attitude négative, irrespectueuse et discriminatoire " ; qu'en effet, outre leurs démarches, la souffrance psychologique d'Abdelouhab Z s'est accrue lorsqu'il a constaté que des travaux avaient été faits dans le logement voisin, tandis que rien n'était fait pour lui ; que le bailleur n'a réagi qu'après délivrance de l'assignation ; que la sommation produite par le bailleur quant à l'usage d'un feu à pétrole dans les lieux est sans intérêt et ne prouve rien ; que les rares et anciennes factures communiquées par le bailleur ne concernent pas le logement loué ' l'immeuble comprenant 6 logements ; qu'après le jugement entrepris, a été proposé un logement dans un quartier dangereux et sans garantie quant à la durée d'occupation prévisible de ce logement.
Au soutien de sa demande d'expertise médicale, Abdelouhab Z expose que cette mesure est nécessaire afin d'évaluer ses préjudices résultant de l'occupation des lieux humides ; qu'il convient donc de lui allouer une indemnité provisionnelle, non définitive, dans cette attente, en raison de l'aggravation de ses problèmes respiratoires et du fait qu'un remède ne peut être garanti en raison du nombre d'années passées dans le logement ; que son problème d'asthme apparu en 2004, s'est aggravé et sa situation médicale n'est pas stabilisée. Abdelouhab Z ajoute vouloir se garantir contre une aggravation de ses problèmes de santé.
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Aux termes de ses dernières conclusions signifiées 5 janvier 2011, la S.A. VILOGIA demande à la cour de
Vu les articles 1719 et suivants du Code civil,
Vu la loi du 6 juillet 1989,
Vu le contrat de bail conclu entre les parties,
· confirmer le jugement entrepris du chef des sommes allouées au titre des préjudices de jouissance et moral, ainsi que du chef de l'indemnisation du préjudice corporel d'Abdelouhab Z,
· dire qu'elle a satisfait à son obligation de relogement provisoire des époux Z et qu'elle n'est pas responsable du retard apporté à entreprendre les travaux
préconisées par l'expert judiciaire, de sorte qu'il n'y a plus lieu à condamnation sous astreinte sur ces deux points,
· débouter les époux Z du surplus de leurs demandes,
· dire qu'elle prendra en charge les frais de l'expertise judiciaire,
· condamner les époux Z aux dépens, en accordant à l'avoué le bénéfice du recouvrement direct.
La S.A. VILOGIA soutient qu'aucune pièce ne démontre que le préjudice de jouissance remonte à l'origine de la location ; qu'il convient de confirmer le jugement quant à l'indemnité allouée de ce chef, ainsi qu'au titre du préjudice moral ; que les époux Z ne peuvent solliciter une indemnisation du préjudice de jouissance jusqu'à la fin du mois de décembre 2010, compte tenu de leur résistance à intégrer le logement provisoire qu'ils ont pourtant accepté ; que de plus, ils se sont vu proposer à moult reprises depuis 2007-2008 un relogement et des interventions d'entreprises ont toujours été refusés ; qu'en tout état de cause, les locataires ne démontrent pas avoir mis le bailleur en demeure de faire les travaux lui incombant avant 2008, contrairement aux termes de l'article 1146 du Code civil ; que le fait pour les époux Z d'avoir formé des demandes de mutation dès janvier 1997 ne prouve pas que le bailleur a été mis en demeure ; que la même observation peut être faite s'agissant du préjudice moral, les époux Z s'étant opposés à des travaux qui auraient pu commencer il y a près de trois années ; qu'enfin, des interventions tendant à traiter les dysfonctionnements de la plomberie et à améliorer la ventilation du logement ont été effectués avant délivrance de l'assignation ; qu'il est établi que l'utilisation d'un feu à pétrole par les locataires est la cause principale de l'humidité des lieux, de sorte que l'on ne peut considérer que les désordres et préjudices subis par eux ne résultent que de l'inertie du bailleur.
La S.A. VILOGIA s'oppose également à la demande d'expertise, tel que retenu par le premier juge, d'autant que l'utilisation d'un feu à pétrole a contribué aux problèmes d'humidité et de santé d'Abdelouhab Z, alors qu'elle a rappelé l'interdiction d'une telle utilisation à plusieurs reprises ; que la demande indemnitaire présentée à ce titre est d'autant plus disproportionnée qu'Abdelouhab Z est responsable en se maintenant dans les lieux en dépit du relogement proposé.
SUR CE,
Attendu qu'aucune des parties ne critique les dispositions du jugement entrepris ayant condamné la S.A. VILOGIA, d'une part, à exécuter les travaux préconisés par l'expert, et, d'autre part, à reloger provisoirement les époux Z, et enfin à prendre en charge les frais de déménagement ; que des dispositions seront dès lors confirmées, sauf à devoir statuer de nouveau sur l'astreinte assortissant les condamnations sus visées compte tenu de la critique de la S.A. VILOGIA sur ce point ;
Sur le préjudice de jouissance
Attendu qu'en l'espèce, les époux Z justifient s'être plaints à leur bailleur de l'humidité régnant dans le logement à compter du 28 février 2008, problèmes " réapparus " en dépit de la réalisation de quelques travaux par la S.A. VILOGIA, tel qu'ils le précisent et qu'il est confirmé par la S.A. VILOGIA ; que suivant courrier du 21 mars 2008, la S.A. VILOGIA a expressément reconnu la présence d'humidité dans les lieux et indiqué qu'elle ferait passer une entreprise pour réaliser des travaux ; que le constat d'huissier établi en août 2008 à la requête des époux Z, démontre, tant par ses constatations que ses photos accablantes, que les murs de l'appartement étaient imprégnés d'humidité dans toutes les pièces, à telle enseigne que l'huissier a senti l'humidité au toucher, a relevé de multiples traces noirâtres de moisissures sur les murs dont le papier peint se décollait, et a noté l'odeur désagréable présente dans les lieux ; qu'à l'évidence, de tels désordres mettent plusieurs mois à se révéler avec une telle ampleur ;
Qu'en effet, selon le rapport d'expertise judiciaire dressé par Monsieur ... le 5 janvier 2010, le logement dont s'agit est dépourvu de tout moyen de chauffage, de VMC et d'isolation au niveau des murs extérieurs ; que l'expert relève que tous les désordres notés par l'huissier en août 2008 persistent à la date de la réunion d'expertise, soit en juin 2009 ; qu'il a ainsi observé que
· dans le séjour les papiers peints se décollent, les murs sont maculés de traces
sombres d'humidité, de nombreuses prises électriques sortent du mur consécutivement à l'humidité,
· dans la cuisine il n'existe pas de ventilation, le salpêtre s'est développé sur les murs,
le mur extérieur n'est pas isolé ;
· dans le couloir les murs sont porteurs de traces sombres et il existe une forte odeur d'humidité ;
· dans la chambre le mur du pignon est fortement humide ;
· dans la salle de douche les travaux de dallage réalisés par le bailleur sont qualifiés de " rafistolage ", l'eau s'écoule sur des cloisons non hydrofugées ;
· dans la cave est relevée la présence de champignons et d'humidité sur le mur en parpaings, ainsi qu'au sol, au point que les matériaux qui y sont posés pourrissent ;
Que l'expert en conclut que ces désordres ont pour origine la conception initiale de l'immeuble, les murs de parpaings n'étant pas isolés, une importante humidité et une condensation dans le logement, une ventilation insuffisante, un manque d'isolation, une humidité stagnant dans la cave, le non-entretien du logement et des parties communes ; qu'il ajoute que le logement est " insalubre et inhabitable ", et " indécent " en raison de l'humidité, des traces et de l'odeur de moisi y régnant, sans que cela soit contesté par la S.A. VILOGIA ; que si l'expert précise que cette situation peut être " modérément " attribuée aux locataires du fait de l'utilisation d'un poêle à pétrole, il achève cependant son rapport en spécifiant que " les désordres constatés sont essentiellement de la responsabilité du bailleur qui ne pouvait ignorer les désordres affectant le bien loué " ;
Attendu qu'en considération de l'ensemble de ces éléments, la cour estime que le trouble de jouissance subi par les époux Z est indéniable et imputable à un manquement du bailleur à son obligation de délivrer un logement décent ;
Que la S.A. VILOGIA est mal fondée à venir se retrancher derrière les quelques travaux qu'elle a pu réaliser dans les lieux en 2001 et 2005, dès lors que ces travaux n'ont pas apporté de solution au problème d'humidité généralisée existant dans le logement par elle offert en location ;
Que par ailleurs, la S.A. VILOGIA ne pouvait ignorer les vices affectant le logement puisqu'ils existaient dès l'origine ; que c'est dès lors à mauvais escient qu'elle se prévaut de l'absence de mise en demeure de ses locataires avant l'année 2008 ; qu'en tout état de cause, dès lors qu'elle demande confirmation du jugement entrepris sur ce point, en faisant valoir que le premier juge a exactement apprécié la durée du préjudice, il s'en déduit que la bailleresse reconnaît que le préjudice de jouissance a commencé en mars 1996 ' point de départ admis par le premier juge ;
Qu'en outre, en cas de manquement du bailleur à son obligation de logement décent, le locataire n'est pas tenu d'accepter un relogement, mais se trouve au contraire en droit d'exiger la réalisation des travaux de mise en conformité nécessaires, en vertu de l'article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu'ainsi, c'est vainement que la S.A. VILOGIA fait grief aux époux Z de n'avoir pas accepté ses propositions de relogement présentées " depuis 2007-2008 " ;
Que le préjudice de jouissance mérite par conséquent réparation à compter du mois de mars 1996, tel que retenu par le premier juge conformément à la demande des locataires ;
Attendu que s'agissant de la fin de l'indemnisation, la S.A. VILOGIA ne démontre pas avoir réagi avant la délivrance de l'assignation par ses locataires en octobre 2008 ; que certes, par la suite, en cours d'instance, les époux Z ont refusé de laisser entrer un représentant de la bailleresse, décliné une offre de relogement et refusé la réalisation d'un devis visant uniquement la salle-de-bains ; que toutefois, la cour estime qu'il ne saurait leur en être fait grief compte tenu du litige alors en cours, puis de l'organisation d'une expertise destinée à apprécier l'étendue des désordres et les conséquences en résultant ;
Mais attendu que postérieurement au jugement entrepris, le 8 octobre 2010, les époux Z ont, par l'intermédiaire de leur avocat, explicitement refusé une proposition de relogement, aux motifs que cela ne correspondaient pas " à leurs souhaits " et que le logement en cause était situé " dans un quartier dangereux " ; qu'ils ne fournissent aucun justificatif à l'appui de telles assertions, ni, dès lors, de raison valable à leur refus ; qu'en se maintenant dans les lieux en dépit d'une offre de relogement dont il n'est pas démontrée qu'elle fût inadaptée et ne correspondît pas à leurs besoins, la cour estime que les époux Z ont contribué à la persistance de leur préjudice, en sorte qu'ils ne peuvent obtenir d'indemnisation sur la période postérieure à l'offre de relogement ; que leur demande tendant à la condamnation de la bailleresse jusqu'en mars 2011, puis au paiement d'une indemnité mensuelle pour la période postérieure sera donc rejetée ;
Attendu qu'en définitive, les époux Z sont fondés à réclamer une indemnisation de leur préjudice de jouissance entre le mois de mars 1996 et le 8 octobre 2010 ; qu'au vu des éléments dont elle dispose, la cour estime que la somme de 12 503,46 euros, allouée par le premier juge, répare dans son intégralité le préjudice ainsi subi ;
Sur le préjudice moral
Attendu que, tel qu'évoqué précédemment, les désordres existent depuis l'origine, soit fin 1995 ; qu'en outre, les époux Z démontrent avoir requis leur mutation dans un autre logement H.L.M. en mai 2003, et il se déduit des éléments de fait ci-dessus évoqués que cette demande se fondait sur l'état du logement ; qu'en tout état de cause, les époux Z justifient avoir dénoncé clairement les désordres affectant le logement à la S.A. VILOGIA dès le début de l'année 2008, et alors que cette dernière avait admis l'existence de ces désordres aux termes d'un courrier du 21 mars 2008, les locataires ont été contraints, devant son inertie, de la faire assigner devant le tribunal d'instance de ROUBAIX en octobre 2008 ; que tel que souligné ci-dessus, c'est en vain que la S.A. VILOGIA oppose les travaux par elle réalisés dans les lieux en 2001 et 2005, dès lors que, d'une part, ceux-ci n'ont nullement remédié au grave problème d'humidité existant et que, d'autre part et surtout, elle avait reconnu l'existence de ce problème en mars 2008 ;
Qu'en revanche, il n'est pas démontré que les époux Z auraient été victimes d'une discrimination de la part de leur bailleresse ; qu'en effet, ne sont pas établies leurs affirmations suivant lesquelles un logement voisin aurait fait l'objet des travaux de remise en état ; qu'au surplus, à la supposer démontrée, cette circonstance eût été insuffisante à caractériser un quelconque comportement discriminatoire de la part de la S.A. VILOGIA, dès lors que l'immeuble comporte six logements et qu'il n'est ni établi, ni soutenu que tous ces logements à l'exception de celui des époux Z, auraient été rénovés ;
Attendu qu'au regard de ces éléments, la cour estime que le premier juge a exactement évalué le préjudice moral souffert par les époux Z en leur accordant une indemnisation à hauteur de 1 000 euros ; que le jugement déféré mérite donc également confirmation à ce titre ;
Sur la demande d'expertise médicale et de provision
Attendu que si le médecin traitant d'Abdelouhad Z a, à deux reprises, attesté de ce que l'état de santé de l'intéressé justifiait un changement de logement, il n'est en revanche aucunement démontré que l'humidité régnant dans les lieux aurait contribué, fût-ce pour partie, à ces problèmes ; qu'en effet, le seul compte-rendu médical produit, établi le 29 novembre 2010 par un médecin du service des maladies respiratoires du C.H.R.U. de Lille, ne dit pas que le logement humide serait à l'origine de la dyspnée d'effort dont se plaint Abdelouhad Z, alors que cette possibilité a été clairement évoquée auprès du médecin par l'intéressé ; qu'après réalisation de divers tests respiratoires, ce médecin ne pose aucun diagnostic précis, et se limite à suggérer l'hypothèse d'un asthme, sans l'affirmer, et à préconiser par conséquent la réalisation de divers examens médicaux dont on ignore les résultats;
Qu'au vu des éléments dont la Cour dispose le préjudice allégué par Abdelouhad Z sera suffisamment réparé par la somme de 2000 euros accordée par le premier juge et pour laquelle la S.A. VIGOGIA demande confirmation ;
Que dans ces conditions, la cour estime que c'est à raison que le premier juge a rejeté la demande d'expertise médicale présentée par Abdelouhad Z ;
Que le jugement sera donc confirmé à ces deux titres ;
Sur la demande de suppression de l'astreinte présentée par la S.A. VILOGIA
Attendu que le prononcé d'une astreinte pour l'exécution des travaux et le relogement des époux Z étaient à l'évidence nécessaire compte tenu de l'attitude de la S.A. VILOGIA et l'ancienneté du désordre ; que le jugement entrepris mérite donc confirmation en ce qu'il a assorti d'une astreinte ses condamnations à exécuter des travaux et à délivrer un logement provisoire ;
Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile
Attendu que le litige de première instance ayant pour origine un manquement grave du bailleur à ses obligations, c'est à bon droit que le premier juge a mis les dépens à sa charge ; qu'il conviendra seulement de préciser qu'y seront inclus les honoraires de l'expert judiciaire ;
Qu'en revanche, les époux Z succombant pour l'essentiel devant la cour, les dépens exposés en appel demeureront à leur charge, et les appelants seront déboutés de leur demande d'indemnité formée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridictionnelle ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf à préciser que le préjudice de jouissance est indemnisé sur la période comprise entre le mois de mars 1996 et le 8 octobre 2010 et que les dépens de première instance incluront les frais d'expertise judiciaire (1 669,62 euros selon taxe du 11 janvier 2010) ;
Y ajoutant,
- DÉBOUTE les époux Z de leur demande tendant à voir condamner la S.A. VILOGIA au paiement d'une somme mensuelle à compter du mois d'avril 2011, au titre de leur préjudice de jouissance ;
- DÉBOUTE les époux Z de leur demande d'indemnité formée en application de l'article 700 du Code de procédure civile et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridictionnelle ;
- CONDAMNE les époux Z aux entiers dépens d'appel et AUTORISE la S.E.L.A.R.L. LAFORCE à recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
K. CAJETAN M. ...
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