16/09/2011
ARRÊT N°
N° RG 10/01448
CL/CS
Décision déférée du 15 Février 2010 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE 08/00308
VINCENT Bernard
Christine Z
C/
AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN
INFIRMATION
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2 - Chambre sociale
***
ARRÊT DU SEIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE ONZE
***
APPELANT(S)
Madame Christine Z
TOULOUSE
représentée par Me Jean-marc DENJEAN, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉ(S)
AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN
19 boulevard Armand Duportal
31000 TOULOUSE
représentée par Me Alfred PECYNA, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Juin 2011, en audience publique, devant, C. LATRABE, président et C. CHASSAGNE, conseiller chargés d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de
C. LATRABE, président
C. PESSO, conseiller
C. CHASSAGNE, conseiller
Greffier, lors des débats D. FOLTYN-NIDECKER
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
- signé par C. LATRABE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.
FAITS ET PROCÉDURE
Madame Christine Z, née en septembre 1957, a été embauchée le 1° septembre 1992, par l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN, suivant contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de formatrice.
Le 1° septembre 2001 puis le 1° septembre 2003, elle a été promue successivement aux fonctions de formatrice responsable puis de responsable de projet, ces dernières fonctions étant exercées moyennant une rémunération mensuelle brute de 2.002,20 euros.
En mars 2007, elle a fait l'objet, pour la première fois depuis son embauche, d'un arrêt de travail.
Le 27 mars 2007, lors de la visite annuelle, le médecin du travail l'a déclarée apte à son poste de travail en mentionnant toutefois ' à revoir en juin 2007".
Du 24 au 30 avril 2007, elle a fait l'objet d'un arrêt de travail pour ' état dépressif réactionnel'.
Le 11 juin 2007, le médecin du travail l'a déclarée apte précisant cependant ' toutefois, il faut veiller à diminuer le stress pendant le travail. A revoir dans un mois.'
Au cours du mois de juin, Madame Z a fait l'objet de trois arrêts de travail successifs pour des périodes de un à deux jours.
Du 2 au 6 juillet 2 007, elle a été placée en situation d'arrêt de travail pour état dépressif réactionnel.
Le 20 juillet 2007, le médecin du travail a rencontré le chef d'établissement, Madame ... en présence de Madame Z.
Le même jour, il a déclaré Madame Z ' apte sous réserve d'un examen complémentaire. À suivre.'
A compter du 2 octobre 2007, cette dernière a fait l'objet d'un nouvel arrêt de travail pour le même motif ; à partir de cette dernière date, elle n'a plus repris son poste de travail.
A l'issue des deux visites de reprises en date du 19 novembre et du 5 décembre 2007, le médecin du travail a déclaré Madame Z ' inapte à tous les postes de l'entreprise dans cet environnement professionnel'.
Estimant que son employeur avait manqué à ses obligations, contractuelles et en particulier que ses conditions de travail n'avaient cessé de se dégrader depuis l'arrivée, le 1° septembre 2006, de Madame
ROUFFIAC, en qualité de chef d'établissement, elle a saisi, le 7 février
2008, le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE aux fins, notamment, d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'AEP SAINTE MARIE.
Suivant courrier recommandé en date du 18 mars 2008, l'employeur l'a convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 1° avril 2008.
Le 7 avril 2008, l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN a notifié à la salariée son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Suivant jugement en date du 15 février 2010, le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE a dit que Madame Z n'a pas été victime d'un harcèlement moral, a dit que le licenciement de Madame Z repose sur une cause réelle et sérieuse, a débouté en conséquence Madame Z de l'ensemble de ses demandes et enfin, a débouté l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame Christine Z a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui n'apparaissent pas critiquables.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Reprenant oralement ses conclusions déposées au greffe le 24 mai 2011 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens, Madame Christine Z demande à la Cour, à titre principal, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, cette rupture produisant les effets d'un licenciement entaché de nullité.
A titre subsidiaire, elle demande à la Cour de dire que le licenciement dont elle a fait l'objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse pour violation de recherche loyale et de bonne foi de reclassement.
En tout état de cause, elle sollicite la condamnation de l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN à lui payer les sommes de 50.000 euros à titre de dommages intérêts et de 12.500 euros à titre de dommages intérêts réparant le préjudice tiré du harcèlement moral.
Elle sollicite, également, la condamnation de l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN au paiement, avec intérêts de droit à compter du jour de la demande, des sommes de 6.271,23 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis et de 627,12 euros bruts au titre d'indemnité de congés payés sur préavis.
Elle sollicite, enfin, l'exécution provisoire de la décision à intervenir ainsi que la condamnation de l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient, pour l'essentiel, que depuis son entrée en fonction en septembre 2006, Madame ... n'a eu de cesse de restreindre ses responsabilités et de modifier ses tâches, de critiquer son travail et de remettre en cause ses compétences, de la surcharger de travail, de la dénigrer devant les stagiaires, de la surveiller constamment notamment par la rédaction d'un cahier horaire des tâches effectuées et de la mettre à l'écart, un tel harcèlement moral ayant eu pour effet d'altérer son état de santé et d'aboutir au constat d'inaptitude ci dessus rappelé.
Elle ajoute que les graves manquements de l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN à ses obligations tant légales que contractuelles justifient qu'il soit fait droit à sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, la rupture devant dès lors produire les effets d'un licenciement nul.
Au titre des manquements de l'employeur, elle souligne que celui ci n'a pas repris à compter du 5 janvier 2008 le versement de son salaire en violation de l'article L 1226-4 du code du travail, la reprise du paiement du salaire n'ayant eu lieu que le 26 février 2008 soit postérieurement à la saisine de la juridiction prud'homale, étant relevé que jusqu'au 27 février 2008, l'employeur ne lui a fait aucune proposition de reclassement alors qu'il était tenu de rechercher et de proposer un poste de reclassement, dès le constat d'inaptitude définitive du 5 décembre 2008.
Subsidiairement, elle considère que le licenciement dont elle a fait l'objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'employeur n'ayant, en réalité, à aucun moment effectué de recherche sérieuse et loyale de reclassement, les deux postes proposés le 27 février 2008 étant tous deux constitutifs d'une rétrogradation aussi bien en termes de responsabilité que de rémunération.
Par conclusions du 16 juin 2011, réitérées oralement à l'audience, l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN demande, au contraire, à la Cour de débouter Madame Z de sa demande tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail, de dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence de confirmer la décision déférée et enfin, de lui allouer la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle considère que la demande de Madame Z de résiliation judiciaire du contrat de travail est irrecevable dans la mesure où l'intéressé n'a saisi la juridiction prud'homale que postérieurement à la déclaration d'inaptitude du médecin du travail, à une époque, par conséquent, où le principe de la rupture était acquis.
Elle ajoute que le reclassement de Madame Z déclarée inapte à tous les postes de l'entreprise était compliqué et qu'en réalité, elle a engagé la procédure de reclassement dès le 17 décembre 2007 de sorte qu'il ne saurait lui être reproché un quelconque manquement à son obligation de reclassement.
Elle soutient, par ailleurs, que Madame Z a perçu son salaire de janvier 2008 et ce, avec peut être seulement quelques jours de retard.
Elle estime, en outre, que Madame Z est totalement indigente dans sa démonstration d'un prétendu harcèlement moral, l'intéressée apparaissant, au contraire, rétive à l'autorité et ayant déjà rencontré des difficultés avec la précédente directrice.
Enfin, elle fait valoir que le licenciement de l'appelante est parfaitement causé et justifié.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Lorsqu'un salarié introduit une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, la relation contractuelle subsiste et les droits et obligations de chacune des parties au contrat également.
Il s'ensuit que lorsqu'un salarié demande, comme en l'espèce, la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en demeurant à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, il appartient au juge d'abord de rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; que c'est seulement dans le cas contraire qu'il convient de se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.
En l'espèce, Madame Z a saisi la juridiction prud'homale le 7 février 2008 et le licenciement pour inaptitude lui a été notifié par lettre recommandée en date du 7 avril 2008.
Or aux termes de l'article L 1226-2 du code du travail, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie non professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Selon l'article L 1226-4 de ce code, lorsqu'à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui ci occupait avant la suspension de son contrat de travail, ces dispositions légales s'appliquant également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail et le point de départ de ce délai courant à compter du second examen médical de reprise, soit au cas présent à compter du 5 décembre 2007.
Il est constant qu'à la date du 5 janvier 2008, Madame Z n'était ni reclassée dans l'entreprise ni licenciée.
L'employeur devait, donc, reprendre le paiement des salaires à cette date.
Cependant, l'examen des relevés de compte de Madame Z fait apparaître qu'elle n'a perçu aucun salaire en janvier 2008, qu'au 31 janvier 2008 son solde bancaire était déficitaire et que le paiement par l'employeur de sa rémunération n'a été repris qu'à la date du 26 février 2008 avec la mention 'salaire février'.
L'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN prétend que le salaire de janvier 2008 a été réglé à Madame Z à la date du 31 janvier 2008 ainsi qu'il est mentionné sur le bulletin de paie de janvier 2 008 qu'elle a délivré à la salariée.
Toutefois, c'est à l'employeur débiteur de l'obligation de paiement des salaires, de rapporter la preuve du paiement de ceux ci, la délivrance, par ce dernier, du bulletin de paie n'emportant pas présomption de paiement pour les sommes qui y sont mentionnées, l'employeur étant tenu en cas de contestation de prouver le paiement des salaires, notamment par la production des pièces comptables ou par la justification des virements effectués ou des chèques débités.
Force est de constater que l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN ne rapporte nullement cette preuve nonobstant la contestation de Madame Z du paiement du salaire litigieux.
Dès lors, il ne peut être que retenu que lorsque le Conseil de Prud'hommes a été saisi par Madame Z de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, l'AEP SAINTE MARIE DE SAINT SERNIN n'avait pas repris le paiement des salaires de l'appelante alors que celle ci n'était ni reclassée dans l'entreprise ni licenciée, ce qui constitue de la part de l'employeur un grave manquement à ses obligations contractuelles de sorte que l'action de Madame Z en résiliation judiciaire dont il s'agit est parfaitement recevable.
A l'appui de cette action, Madame Z vise non seulement ce manquement de l'employeur mais aussi le harcèlement moral dont elle soutient avoir été la victime à partir de septembre 2006, date de l'arrivée de la nouvelle directrice, Madame ....
Selon les dispositions de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En cas de litige, il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral ; au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que les agissements reprochés sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Au cas présent, plusieurs témoins s'accordent à souligner le comportement déstabilisant de Madame
ROUFFIAC à l'égard de Madame Z à l'origine d'une indéniable dégradation de ses conditions de travail.
Ainsi, M. Olivier ... ..., formateur consultant, après avoir loué les qualités professionnelles de sa collègue, explique qu'à la suite d'un changement de direction, l'état moral et physique de Madame Z a été affecté la plongeant dans une situation où tout a été fait pour stopper tout développement, limiter son autonomie au travail et étouffer son activité.
Madame Roza ..., employée de collectivité en poste dans l'établissement depuis 28 ans, atteste, pour sa part, avoir vu à plusieurs reprises madame Z sortir en larmes totalement démoralisée du bureau de Madame ..., la directrice.
M. Jacques ..., APS pendant 10 ans au lycée professionnel Sainte ... ... Sernin témoigne, quant à lui, de ce que Madame Z a été ' harcelée, mise au placard, poussée à la démission', le chef d'établissement lui disant ' si vous ne démissionnez pas, je vous trouverez une faute'.
Madame Monique ..., secrétaire du centre de formation du 4 septembre 2006 au 31 juillet 2007, fait état, en ce qui la concerne, de ce que lorsque Madame ... entrait dans le bureau et s'adressait à Madame Z, c'était très souvent de façon déstabilisante et de ce que Madame ... changeait souvent d'avis sur le travail à effectuer ce qui perturbait Madame Z.
Il est constant, également, que le jour même de son retour de congé maladie, le 3 mai 2007, Madame ... a remis en main propre à Madame Z un courrier de sa part lui intimant l'ordre de suivre un cycle de validation des acquis de l'expérience et lui faisant savoir que l'avenir du centre de formation était très incertain.
Il convient, aussi, de noter qu'alors que le 11 juin 2007, le médecin du travail avait conclu son avis par la nécessité de ' veiller à diminuer le stress pendant le travail', il ressort du courrier en date du 12 juillet 2007 adressé par Madame Z à Madame ..., que celle ci bien que consciente de sa charge de travail ainsi qu'il est mentionné dans le compte rendu de l'entretien du 22 juin 2007, lui a demandé au cours de ce même entretien de lui préciser par écrit son emploi du temps hebdomadaire heure par heure, la salariée ajoutant ' je travaille à la rédaction de ce document que je vous transmettrai très prochainement'.
Aucun démenti n'a été apporté à cette exigence particulière de la directrice.
Il n'est pas contesté par ailleurs, que Madame Z salariée de l'AEP SAINTE MARIE SAINT SERNIN, depuis le 1° septembre 1992, n'a commencé à faire l'objet d'arrêts de travail pour maladie qu'à compter de mars 2007.
La relation contractuelle a été, ensuite, émaillée d'arrêts de travail pour état dépressif réactionnel jusqu'à l'arrêt du 2 octobre 2007 pour le même motif et qui a été renouvelé sans interruption jusqu'à la déclaration, le 5 décembre 2007, d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise 'dans cet environnement professionnel'.
Il convient, en outre, de relever qu'à la date du 27 mars 2007 et alors que jusqu'alors le dossier médical de Madame Z ne fait aucune allusion à ses conditions de travail, le médecin du travail a noté ' problème en lien avec le relationnel avec le nouveau chef d'établissement.'
A l'issue de la visite du 10 juillet 2007, le médecin du travail a inscrit ' a toujours des difficultés relationnelles avec le chef d'établissement. Décision de prendre RDV avec le chef d'établissement pour essayer de mettre à plat la communication et les tâches à effectuer'
Le 6 novembre 2007, le médecin du travail a, encore, mentionné ' il semble que malgré l'entretien que nous avons eu en juillet avant les congés avec Madame ... et Madame Z pour poser les problèmes conflictuels et essayer de mettre en place des processus concernant son travail, lors de la reprise de septembre le problème n'a pas avancé. Aux dires de Madame Z aucun des engagements pris n'a été respecté.... devant le constat d'échec et l'état dépressif récidivant, une exclusion de cette entreprise apparaît nécessaire'.
L'ensemble des éléments ci dessus rappelés permettent de retenir suffisamment que le comportement adopté habituellement par Madame ..., chef d'établissement, à l'égard de sa subordonnée, Madame Z a indéniablement eu pour effet non seulement de dégrader les conditions de travail de la salariée mais aussi d'altérer la santé physique ou mentale de l'intéressée.
De tels éléments ne sont en rien remis en cause par les pièces produites aux débats par l'AEP SAINTE MARIE SAINT SERNIN constituées d'attestations de salariés ( M. Jean Luc ..., Madame Valérie ..., Madame Catherine ..., Madame Marie Pierre ..., Madame Joëlle ... ) déclarant qu'ils n'ont jamais vu ou entendu Madame ... faire preuve d'une quelconque forme de harcèlement moral, indiquant pour certains ne pas s'être entendus avec Madame Z ou ne pas avoir apprécié sa façon de travailler et faisant état, pour l'une des attestantes, de ce qu'elle a vu sortir Madame Z en pleurant du bureau de la précédente directrice, Madame ... étant précisé que de son côté, Madame Z verse à la procédure d'une part plusieurs attestations de collègues ( Christine Z, Geneviève ..., Carmen ..., Francisco OLIVERA JIMENEZ ) vantant ses qualités professionnelles et personnelles et d'autre part des témoignages de gratitude de plusieurs promotions d'élèves.
Il convient, donc, de retenir que Madame Z a été effectivement victime de harcèlement moral au travail ce qui doit lui ouvrir droit, à titre de réparation et compte tenu des circonstances, à l'allocation d'une somme de 5.000 euros.
Il s'ensuit que compte tenu des graves manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles, Madame Z est bien fondée à solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, cette rupture produisant les effets d'un licenciement nul conformément aux dispositions de l'article L 1152-3 du code du travail.
Dès lors que la rupture produit les effets d'un licenciement nul, Madame Z a droit aux indemnités de rupture et à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement.
Au regard des éléments du litige, de l'âge de la salariée, de son temps de présence dans l'entreprise et des conditions dans lesquelles la rupture est survenue, le licenciement pour inaptitude physique ayant été la conséquence d'un harcèlement moral, le préjudice subi par Madame Z doit être réparé par l'allocation d'une somme de 50.000 euros à titre de dommages intérêts.
Madame Z a, également, droit à une indemnité compensatrice de préavis pour un montant de 6 271,23 euros bruts ainsi qu'à une indemnité de congés payés sur préavis à hauteur de la somme de 627,12 euros bruts.
* *
*
Il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision d'appel.
Les dépens de première instance et de l'appel seront mis à la charge de l'AEP SAINTE MARIE SAINT SERNIN qui succombe, pour l'essentiel, laquelle devra également verser à Madame Z la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles que cette dernière a pu être amenée à exposer pour assurer la défense de ses intérêts.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme la décision déférée,
Et statuant à nouveau
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame Brigitte Z aux torts de l'employeur, cette rupture produisant les effets d'un licenciement nul,
Condamne l'AEP SAINTE MARIE SAINT SERNIN à payer à Madame Brigitte Z les sommes de
- 5.000 euros à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral,
- 50.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement illicite,
- 6.271,23 euros bruts à titre d'indemnité de préavis,
- 627,12 euros bruts à titre de congés payés sur préavis,
- 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne l'AEP SAINTE MARIE SAINT SERNIN aux dépens de première instance et de l'appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme C. ..., président et par Mme D. ..., greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Dominique FOLTYN-NIDECKER Catherine ....