SOC. PRUD'HOMMES LG
COUR DE CASSATION
Audience publique du 7 décembre 2011
Rejet
Mme MAZARS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt no 2580 FS-P+B sur la première branche du
premier moyen
Pourvoi no M 09-67.367
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par la société Gefco, société anonyme, dont le siège est Courbevoie cedex,
contre l'arrêt rendu le 28 avril 2009 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l'opposant à M. Didier Y, domicilié Marseille,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 novembre 2011, où étaient présents Mme Mazars, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Becuwe, conseiller référendaire rapporteur, MM. Bailly, Trédez, Blatman, Chollet, Gosselin, Linden, Ballouhey, Mmes Goasguen, Vallée, conseillers, Mmes Mariette, Sommé, M. Flores, Mmes Wurtz, Ducloz, M. Hénon, Mme Brinet, conseillers référendaires, M. Legoux, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Becuwe, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Gefco, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Y, l'avis de M. Legoux, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 avril 2009), que M. Y a été engagé par la société Gefco le 2 août 2004 en vue d'une affectation prochaine en qualité de chef de centre au sein de sa filiale tchèque à Kolin ; que le salarié a signé un contrat de travail le 1er septembre 2004 en qualité de responsable du centre automobile de Kolin avec la société Gefco Ceska Républika ; que celle-ci a "résilié à effet immédiat" ce contrat de travail par lettre du 3 mai 2006 pour un "motif de violation particulièrement grave de la discipline du travail" tiré de faits de harcèlement sexuel ; que, par lettre du même jour, la société Gefco l'a mis à pied à titre conservatoire ; qu'elle l'a, par lettre du 23 mai 2006, licencié pour faute grave en lui reprochant les mêmes faits, en invoquant leur nature et "leur résonnance quel que soit le lieu d'affectation" ; que ce dernier a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes contre la société mère ;
Sur le premier moyen
Attendu que la société Gefco fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié diverses sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen
1o/ qu'aux termes de l'article L. 1231-5 du code du travail, "lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale étrangère et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein" ; qu'il en résulte que ce texte n'est pas applicable lorsque le salarié n'a jamais exercé de fonctions au sein de la société mère ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2o/ qu'en tout état de cause, qu'à supposer l'article L. 1231-5 du code du travail applicable, la société mère est en droit, après le licenciement prononcé par la filiale étrangère à la disposition de laquelle le salarié avait été mis, de licencier ce dernier en invoquant les mêmes faits dès lors qu'ils justifient également la rupture du contrat de travail liant la société mère au salarié ; qu'en particulier, le harcèlement commis par un salarié à l'égard d'employés de la filiale justifie également le licenciement prononcé par la société mère ; qu'en affirmant que si la société mère décide de licencier le salarié mis à disposition après son licenciement par la filiale, elle doit le faire pour des motifs propres et ne peut justifier le licenciement qu'elle prononce par des motifs qui ont servi de cause à celui décidé par la filiale, et en lui refusant en conséquence le droit d'invoquer pour justifier le licenciement du salarié l'envoi par ce dernier à certaines collaboratrices de la filiale tchèque de messages (SMS) tout à fait déplacés, dont certains à connotation sexuelle, et le harcèlement moral de l'une d'elle, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble les articles L. 1152-1, L. 1153-1, L. 1153-2,
L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
3o/ que, selon l'article 1351 du code civil, il n'y a d'autorité de la chose jugée qu'entre les mêmes parties, si la demande et sa cause sont les mêmes ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le licenciement de
M. Y par elle-même reposait sur son licenciement par la société Gefco République tchèque qui a été annulé par le tribunal d'arrondissement de Prague selon jugement en date du 20 juin 2007 retenant que "le tribunal ne trouve pas qu'une telle conduite éventuelle du demandeur présenterait le harcèlement sexuel au sens de la disposition du § 1 alinéa 9 du code du travail", quand cette décision, rendue entre des parties différentes et dans un litige dont l'objet et la cause étaient différentes, n'avait pas autorité de chose jugée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
4o/ qu'en statuant de la sorte, quand elle rappelait que le jugement du 20 septembre 2007 avait été annulé en appel le 29 avril 2008, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
5o/ qu'en matière prud'homale, la preuve est libre ; qu'en affirmant que "dans l'examen des preuves il convient de rappeler que le témoignage des victimes supposées du harcèlement doit être corroboré par d'autres éléments", et en refusant ainsi par principe aux témoignages des victimes une valeur probante autonome, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail et les articles 199 et 202 du code de procédure civile ;
6o/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, elle produisait et invoquait, outre les témoignages des deux victimes du harcèlement, les attestations de deux de leurs collègues (Mmes ... et ...) ; qu'en s'abstenant de les examiner, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que le seul fait que le salarié n'ait pas, avant son détachement, exercé des fonctions effectives au service de l'employeur qui l'a détaché ne dispense pas celui-ci de son obligation d'assurer son rapatriement à la fin du détachement et de le reclasser dans un autre emploi en rapport avec ses compétences ;
Attendu, ensuite, qu'ayant, par motifs adoptés, retenu par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que les faits fautifs reprochés au salarié dans la lettre de licenciement n'étaient pas établis, l'arrêt, qui décide que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, n'encourt aucun des cinq derniers griefs du moyen ;
Sur le second moyen
Attendu que la société Gefco fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié une somme de 8 000 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied, alors, selon le moyen, qu'elle soulignait que M. Y ne pouvait réclamer cette somme au titre de la mise à pied conservatoire dès lors que le salaire qui lui avait été retenu pour les jours de mise à pied s'élevait à 5.454,54 euros comme en attestait le bulletin de paie du mois de mai 2006 ; qu'en se bornant, pour faire intégralement droit à la demande du salarié, à affirmer de façon inopérante que la mise à pied conservatoire avait bien duré jusqu'au 30 mai 2006, quand il lui appartenait de vérifier quelle somme avait effectivement été retenue au titre de cette période, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le salarié, à la suite de sa mise à pied conservatoire, n'avait pas perçu son salaire brut mensuel d'un montant de 8 000 euros, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gefco aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Gefco à payer à M. Y la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Gefco
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société GEFCO à payer à Monsieur Y une indemnité de préavis et les congés payés afférents, un rappel de salaire au titre de la mise à pied, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS PROPRES QUE le licenciement prononcé par la société GEFCO le 23 mai 2006, mais entrepris par voie de convocation à entretien préalable datée du 28 avril 2006, soit quelques jours avant celui de la "résiliation" décidée par sa filiale tchèque, n'a pas de cause distincte de celle invoquée à l'appui de la résiliation, dont la filiale tchèque a déclaré avoir eu connaissance les 18 et 19 avril 2006, soit peu avant la convocation, manifestement provoquée par cette prétendue révélation ; que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est dépourvue d'ambiguïté, visant clairement le harcèlement de salariées de la filiale, présenté au titre de "la nature même des faits en cause" et de "leur résonance quel que soit votre lieu d'affectation" ; que les preuves invoquées concernent ce harcèlement prétendu ; que par des motifs dont les débats devant la cour n'ont pas altéré la pertinence, les premiers juges ont fait une juste application de la règle de droit et une exacte appréciation des faits et documents de la cause, en retenant que les deux licenciements ont le même fondement, ce qui est prohibé ; que les dispositions de l'article L.1231-5 nouveau du code du travail sont en tous points applicables, n'exigeant en rien que le salarié ait exercé une activité effective au sein de la société mère préalablement au détachement, et elles ont d'ailleurs été appliquées partiellement par la société GEFCO, qui, informée de l'intention de sa filiale tchèque de résilier le contrat de travail spécifique la liant à Monsieur Y, a d'abord mis fin au détachement ; qu'en violation de ces dispositions, elle n'a proposé aucune nouvelle fonction en son sein, et a au contraire, le jour même de la cessation du détachement, entrepris la procédure de licenciement, poursuivie et fondée définitivement sur les motifs mêmes de la résiliation ; que compte tenu de la fin du détachement, elle ne peut sérieusement soutenir avoir la qualité de co-employeur au jour du licenciement, étant encore relevé, avec les premiers juges, que la clause de non-suspension du contrat de travail pendant le détachement ne peut en aucun cas l'emporter sur les dispositions impératives du texte précité ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement qui a retenu l'absence de cause réelle et sérieuse de ce licenciement ;
ET AUX MOTIFS expressément ADOPTES QUE vu l'article L 122-14-8 du code du travail qui dispose que lorsqu'un salarié, mis par la société au service de laquelle il était engagé, à la disposition d'une filiale étrangère, à laquelle il est lié par un contrat de travail, est licencié par cette filiale, la société mère doit assurer son rapatriement et lui procurer un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère ; que si la société mère décide de licencier son salarié elle doit le faire pour des motifs propres et ne peut justifier le licenciement qu'elle prononce par des motifs qui ont servi de cause au licenciement décidé par la filiale ; qu'en effet, des comportements inacceptables dans certains pays (conduire une voiture pour une femme, boire de l'alcool, détenir un drapeau tibétain....) peuvent éventuellement justifier un licenciement dans ces pays mais en aucun cas justifier un licenciement par une société française ; qu'en l'espèce la société GEFCO (France) a licencié Monsieur Y pour les mêmes motifs que la société GEFCO République tchèque ; que la société GEFCO affirme en outre "compte tenu de la nature même des faits en cause, et de leur résonance, quel que soit votre lieu d'affectation, nous ne serions dorénavant vous accorder la confiance nécessaire à l'accomplissement des tâches qui vous sont confiées" ; que la perte de confiance de l'employeur ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement ; qu'il n'est pas nécessaire que le salarié embauché par une société mère dans un groupe ait travaillé pour elle avant d'être envoyé dans une de ses filiales à l'étranger ; que l'affirmation, figurant dans le contrat de travail de Monsieur Y selon laquelle son contrat de travail avec GEFCO France n'est pas suspendu, n'est pas de nature à exclure l'article L 122-14-8 du code du travail ; que si l'objet de cette clause est d'empêcher la mise en oeuvre de la garantie apportée par le code du travail elle est inopérante ; que le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse ;
1. ALORS QU'aux termes de l'article L. 1231-5 du Code du travail, "lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale étrangère et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein " ; qu'il en résulte que ce texte n'est pas applicable lorsque le salarié n'a jamais exercé de fonctions au sein de la société mère ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2. ALORS en tout état de cause QU'à supposer l'article L. 1231-5 du Code du travail applicable, la société mère est en droit, après le licenciement prononcé par la filiale étrangère à la disposition de laquelle le salarié avait été mis, de licencier ce dernier en invoquant les mêmes faits dès lors qu'ils justifient également la rupture du contrat de travail liant la société mère au salarié ; qu'en particulier, le harcèlement commis par un salarié à l'égard d'employés de la filiale justifie également le licenciement prononcé par la société mère ; qu'en affirmant que si la société mère décide de licencier le salarié mis à disposition après son licenciement par la filiale, elle doit le faire pour des motifs propres et ne peut justifier le licenciement qu'elle prononce par des motifs qui ont servi de cause à celui décidé par la filiale, et en refusant en conséquence à la société GEFCO le droit d'invoquer pour justifier le licenciement du salarié l'envoi par ce dernier à certaines collaboratrices de la filiale tchèque de messages (SMS) tout à fait déplacés, dont certains à connotation sexuelle, et le harcèlement moral de l'une d'elle, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble les articles L. 1152-1, L. 1153-1, L. 1153-2, L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
ET AUX MOTIFS à les supposer ADOPTES QUE par un motif surabondant, le licenciement de Monsieur Y par la société GEFCO (France) repose sur son licenciement par la société GEFCO République tchèque qui a été annulé par le juge local ; que le tribunal d'arrondissement de Prague a prononcé la nullité de l'annulation immédiate du contrat de travail de Monsieur Y, selon jugement en date du 20 juin 2007 ; qu'il a motivé sa décision en écrivant " le tribunal ne trouve pas qu'une telle conduite éventuelle du demandeur présenterait le harcèlement sexuel au sens de la disposition du § 1 al 9 du code du travail" ; que dans l'examen des preuves il convient de rappeler que le témoignage des victimes supposées doit être corroboré par d'autres éléments ; qu'en l'espèce les seuls éléments produits par la société sont deux SMS envoyés par Monsieur Y à Mademoiselle ... en date du 23 décembre 2005, respectivement à 16 h 03 et 18 h 07, selon les termes suivants pour le premier "Dear Jitka, I hope you are feeling better and I wish you merry Christmas, Vesele Vanoce. Didier" ce qui est traduit par le demandeur "Chère Jitka J'espère que vous vous sentez mieux, et je vous souhaite un joyeux Noël. Didier" et pour le second "OK Dear Jitka, Happy to read good news. Take care. We miss you et I miss you to -)" traduit ainsi "OK chère Jitka, content de lire de bonnes nouvelles. Prenez soin de vous. Vous nous manquez aussi et vous me manquerez aussi -)" ; que les termes utilisés sont anodins ; que Monsieur Y présente plusieurs attestations de personnes ayant travaillé à la société GEFCO République Tchèque ; que la familiarité même déplacée ne doit pas être confondue avec le harcèlement sexuel dont le but est d'obtenir des faveurs de nature sexuelle ; que les faits évoqués ne justifient pas les accusations de harcèlement sexuel portées à l'encontre de Monsieur Y ; que le licenciement de Monsieur Y est sans cause réelle et sérieuse ;
3. ALORS QUE selon l'article 1351 du Code civil, il n'y a d'autorité de la chose jugée qu'entre les mêmes parties, si la demande et sa cause sont les mêmes ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le licenciement de Monsieur Y par la société GEFCO reposait sur son licenciement par la société GEFCO République tchèque qui a été annulé par le tribunal d'arrondissement de Prague selon jugement en date du 20 juin 2007 retenant que "le tribunal ne trouve pas qu'une telle conduite éventuelle du demandeur présenterait le harcèlement sexuel au sens de la disposition du § 1 al 9 du code du travail", quand cette décision, rendue entre des parties différentes et dans un litige dont l'objet et la cause étaient différentes, n'avait pas autorité de chose jugée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
4. ALORS en outre QU'en statuant de la sorte, quand l'exposante rappelait que le jugement du 20 septembre 2007 avait été annulé en appel le 29 avril 2008 (conclusions d'appel, p. 35), la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil ;
5. ALORS QU'en matière prud'homale, la preuve est libre ; qu'en affirmant que "dans l'examen des preuves il convient de rappeler que le témoignage des victimes supposées [du harcèlement] doit être corroboré par d'autres éléments", et en refusant ainsi par principe aux témoignages des victimes une valeur probante autonome, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail et les articles 199 et 202 du Code de procédure civile ;
6. ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, l'exposante produisait et invoquait, outre les témoignages des deux victimes du harcèlement, les attestations de deux de leurs collègues (Mesdames ... et ...) ; qu'en s'abstenant de les examiner, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société GEFCO à payer à Monsieur Y 8.000 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied,
AUX MOTIFS QU'en l'absence de faute grave, aucune mise à pied conservatoire ne pouvait être prononcée ; que Monsieur Y a droit au paiement de la rémunération de la période de mise à pied ; qu'il doit en outre percevoir l'indemnité compensatrice de préavis et celle de congés payés y afférents ; que les sommes allouées de ces chefs correspondent à ses droits et les critiques formulées par l'appelante sont sans objet, dès lors que le contrat de travail fait ressortir un salaire mensuel net de 6.000 euros en principal, ce qui représente, comme le soutient l'intéressé, un montant brut de 8.000 euros ; que d'autre part la mise à pied conservatoire a bien duré jusqu'au 30 mai 2006 selon le bulletin de salaire pour la période produit ; que le jugement sera de même confirmé ;
ALORS QUE l'exposante soulignait que Monsieur Y ne pouvait réclamer 8.000 euros au titre de la mise à pied conservatoire dès lors que le salaire qui lui avait été retenu pour les jours de mise à pied s'élevait à 5.454,54 euros comme en attestait le bulletin de paie du mois de mai 2006 (conclusions d'appel, p. 38) ; qu'en se bornant, pour faire intégralement droit à la demande du salarié, à affirmer de façon inopérante que la mise à pied conservatoire avait bien duré jusqu'au 30 mai 2006, quand il lui appartenait de vérifier quelle somme avait effectivement été retenue au titre de cette période, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.