ARRÊT N°704
R.G 11/00841
NP/PB
Z
C/
CRÉDIT INDUSTRIEL DE L'OUEST
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2011
Numéro d'inscription au répertoire général 11/00841
Décision déférée à la Cour Jugement au fond du 21 juin 2010 rendu par le Tribunal de Commerce de POITIERS.
APPELANT
Monsieur Dominique Z
né le ..... à ST BENOIT (86)
NOUAILLE MAUPERTUIS
représenté par la SCP GALLET - ALLERIT, avoués à la Cour
assisté de Me Jacques KEYMEULEN, avocat au barreau de POITIERS
INTIMÉE
CRÉDIT INDUSTRIEL DE L'OUEST
NANTES
représentée par la SCP PAILLE THIBAULT CLERC, avoués à la Cour
assisté par la SCP BILLY FROIDEFOND, avocats au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de
Monsieur Jean CHAPRON, Président
Madame Nathalie PIGNON, Conseiller
Monsieur Thierry RALINCOURT, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Jean CHAPRON, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement du tribunal de commerce de POITIERS du 21 juin 2010, qui a
- condamné Monsieur Z à payer à la banque CIO la somme de 80.000 euros avec intérêt de droit à compter du 18 février 2009 ;
- condamné Monsieur Z à une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et aux dépens ;
Vu la déclaration d'appel de Monsieur Z du 30 juillet 2010 ;
Vu la radiation de l'affaire prononcée le 28 décembre 2010 (n° 10-03209) et sa réinscription au rôle à la demande du CIO le 14 mars 2011 ( n° 11-00841) ;
Vu les conclusions de Monsieur Z du 7 juin 2011 aux termes desquelles il demande à la cour de
- Réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau ;
- Au principal, débouter le CIO de ses demandes, au motif que, contrairement aux exigences légales, sa signature en sa qualité de caution précède son engagement écrit alors que la signature doit être portée à la fin dudit engagement, et que le cautionnement est en conséquence nul et de nul effet ;
- En tout état de cause, condamner le CIO à lui verser la somme de 90.000 euros à titre de dommages et intérêts, en raison tant des manquements de la banque à ses obligations de renseignement et d'information, que de la violation des dispositions de l'article L.313 - 22 du Code Monétaire et Financier, le CIO ayant commis une faute en s'abstenant de l'aviser des difficultés rencontrées par l'emprunteur principal, et lui ayant fait perdre une chance de ne pas se porter caution dans de telles conditions ;
- condamner le CIO à lui verser 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions du CIO du 29 juin 2011 sollicitant, au visa des articles 2288 et suivants du Code civil, et L. 341-1 et suivants du Code de la consommation, la confirmation du jugement entrepris, que Monsieur Z soit déclaré 'irrecevable et non fondé' en son appel interjeté à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de POITIERS du 21 juin 2010, et soit condamné à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, en faisant valoir d'une part, que la signature de Monsieur Z ainsi que l'apposition d'une mention manuscrite conforme à l'article L. 342-2 du Code de la consommation démontrent que la caution a souscrit l'acte en connaissance de cause, l'apposition de la signature au dessus ou au dessous de la mention manuscrite n'ayant aucune incidence sur le fait que Monsieur Z a eu parfaitement de conscience du contenu et de la portée de son engagement, et, d'autre part, que Monsieur Z ne rapporte la preuve, ni que le créancier avait connaissance de ce que la situation du débiteur était irrémédiablement compromise ou que le projet financé n'était pas viable, ni que l'entreprise n'était plus viable au moment où les crédits ont été accordés ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 20 septembre 2011 ;
MOTIFS
Attendu que, par acte authentique du 3 mai 2004, le CIO a consenti à la SARL de L'ABBAYE une ouverture de crédit d'un montant de 750.000 euros à compter du 3 mai 2004, et jusqu'au 31 mars 2006 ; que, par acte sous seing privé du 19 avril 2006, Monsieur Z s'est porté caution solidaire des engagements de la société de L'ABBAYE à hauteur de la somme de 80.000 euros ; que, par jugement du 4 juillet 2008, le tribunal de commerce de POITIERS a prononcé le redressement judiciaire de la société de l'ABBAYE ; que, par courrier du 23 juillet 2008, le CIO a rappelé à Monsieur Z que la société de l'ABBAYE avait été mise en redressement judiciaire et qu'il restait tenu au titre de son engagement envers la banque ; que, le 7 août 2008, le CIO a déclaré sa créance ; que, par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 octobre 2008, le CIO a mis en demeure Monsieur Z de lui régler la somme de 80.000 euros, puis l'a assigné devant le tribunal de commerce de POITIERS, qui a rendu la décision contestée ;
Attendu qu'à l'appui de son recours, Monsieur Z fait valoir à titre principal que son engagement de caution est nul, sa signature précédant la mention manuscrite, en violation des prescriptions de l'article L. 341-2 du Code de la consommation ;
Attendu que l"article L.341-2 du Code de la Consommation dispose toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement celle "(...)" ; qu'il résulte de ce texte que sont prescrits, cumulativement à peine de nullité, d'une part, l'apposition, par la caution, de la mention manuscrite légalement requise, et d'autre part la position de cette mention manuscrite, précédant la signature de la caution ; qu'au demeurant, cette dernière exigence est conforme au principe de droit commun selon lequel la signature, qui est la marque de l'approbation personnelle et définitive par le rédacteur du contenu de l'acte et de la volonté de s'en approprier les termes, ne peut être antérieure au texte lui-même de l'acte ; qu'en l'occurrence, il n'est pas contesté par le CIO qu'en page 2 de l'acte de cautionnement, Monsieur Z a apposé sa signature immédiatement sous les clauses pré-imprimées de l'acte ; qu'il a inscrit la mention manuscrite légalement requise, sous sa signature, et n'a pas réitéré l'apposition de sa signature sous ladite mention manuscrite ; que ledit acte contrevient donc aux exigences légales précitées, prescrites à peine de nullité, laquelle entache dès lors la validité de l'acte de cautionnement du 19 avril 2006 ; que le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné Monsieur Z au paiement de sommes dues en vertu du cautionnement litigieux ;
Attendu enfin qu'il convient, en équité, de condamner le CIO à payer à Monsieur Z la somme de 1.200 euros en application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, le jugement entrepris étant infirmé de ce chef ; que la demande présentée sur le même fondement par le CIO, qui succombe, sera en revanche rejetée, et il supportera seul les dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Annule le cautionnement souscrit le 19 avril 2006 par M. Z au profit du CIO ;
Déboute le CIO de toutes ses demandes ;
Condamne le CIO à payer à Monsieur Z la somme de 1.200 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne le CIO aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,