ARRÊT RENDU PAR LA
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
Le 30 Novembre 2011
CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS
N° de rôle 11/01795
Monsieur Ben Richard ...
Madame Ruth ...
Monsieur Yohan ...
Madame Nancy ...
c/
COMMUNAUTÉ URBAINE DE BORDEAUX
LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
Nature de la décision AU FOND
Grosse délivrée le
à
Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Le 30 Novembre 2011
Par Monsieur Jean-François ..., Président de la Chambre des expropriations désigné par ordonnance du 1ER septembre 2011,
en présence de Madame Geneviève ..., Greffier en chef,
La COUR d'APPEL de BORDEAUX, CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS, a, dans l'affaire opposant
Monsieur Ben Richard ...
né le ..... à VAUX SUR MER (17640)
Artisan, demeurant EYSINES
Madame Ruth ...
née le ..... à BORDEAUX (33000)
Sans profession, demeurant EYSINES
Monsieur Yohan ...
né le ..... à BORDEAUX (33000)
Sans profession, demeurant EYSINES
Madame Nancy ...
née le ..... à BORDEAUX (33000),
demeurant EYSINES
assistés de Maître Sylvain GALINAT, avocat au barreau de BORDEAUX et assistés de Maître Gwénola BRAND, avocat au barreau de LYON
Appelants d'un jugement au fond rendu le 24 février 2011 par le Juge de l'expropriation de la Gironde suivant déclaration d'appel en date du 22 mars 2011,
à
COMMUNAUTÉ URBAINE DE BORDEAUX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, BORDEAUX CEDEX
assistée de Maître ACHOU - LEPAGE dela SCP COULOMBIE-GRAS-CRETIN-BECQUEVORT-ROSIER-SOLAND, avocats au barreau de BORDEAUX
LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT, demeurant BORDEAUX
Non comparant, qui a adressé ses conclusions par écrit Intimés,
Rendu l'arrêt réputé contradictoire suivant après que la cause ait été débattue le 26 octobre 2011 devant
M. Jean François ..., Président de la Chambre des expropriations,
Monsieur Michel ..., Juge de l'expropriation du département de la Dordogne,
Madame Catherine ..., Juge de l'expropriation du département de la Charente, Madame Geneviève ..., Greffier en chef,
En l'absence de Monsieur ... ... du gouvernement qui a adressé par écrit ses conclusions,
et qu'il en ait été délibéré par les Magistrats du Siège ci-dessus désignés.
* * *
Les consorts ... ..., ..., ... & Nancy Bauer relèvent appel de l'ordonnance rendue par le juge de l'expropriation de la Gironde le 24 février 2011 qui prononce comme suit
- rejetons la demande d'irrecevabilité du mémoire des consorts ... pris la veille de l'audience,
- constatons que le délai d'un mois prévu à l'article L 15-1 du code de l'expropriation à compter de la consignation des indemnités devant revenir aux consorts ... était écoulé et que de ce fait il peut être procédé à l'expulsion des consorts ... de la parcelle cadastrée BA 820 à Eysines, en l'absence d'obstacle à la prise de possession des lieux par la Communauté urbaine de Bordeaux,
- ordonnons l'expulsion des consorts ... de tout occupant de leur chef qui pourra intervenir dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance,
- condamnons les consorts ... aux dépens de l'instance et aux frais de l'expulsion et autorisons l'expropriant à prélever ses frais sur l'indemnité d'expropriation allouée,
- autorisons la Communauté urbaine de Bordeaux à solliciter le concours de la force publique en vue de procéder à l'expulsion des consorts ... et de toute personne de leur chef,
- déboutons les consorts ... de leur demande d'indemnité fondée sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de leur recours, ils entendent faire valoir que la procédure d'expropriation ne s'est pas déroulée régulièrement puisqu'aucune proposition de relogement ne leur a été faite en dépit de leur demande et qu'ils n'ont jamais renoncé au relogement.
Ils précisent qu'il n'existe pas de renonciation implicite au droit au relogement et qu'il appartenait à l'expropriant de leur faire deux propositions de relogement.
Ils demandent à la chambre des expropriations de constater que la consignation est abusive en raison de la violation des obligations relatives au relogement des expropriés, de rejeter la demande d'expulsion, d'annuler l'ordonnance déférée et de condamner l'expropriant à leur verser une somme de 3.000 euros pour frais irrépétibles.
La Communauté urbaine de Bordeaux demande à la chambre des expropriations de
- constater que le délai d'un mois prévu à l'article L 15-1 du code de l'expropriation à compter de la consignation des indemnités devant revenir aux consorts ... est écoulée et que de ce fait il peut être procédé à l'expulsion des consorts ... de la parcelle cadastrée BA 820 à Eysines,
- ordonner l'expulsion des consorts ... et de tout occupant de leur chef qui pourra intervenir dans le délai d'un mois compter de la signification de l'ordonnance intervenir et ce sous astreinte de 75 euros par jour à compter de l'expiration du dit délai,
- condamner les consorts ... aux dépens de l'instance et à verser la somme de 1000 euros à la Communauté urbaine de Bordeaux pour frais irrépétibles, aux frais de l'expulsion et d'autoriser l'expropriant à prélever frais et dépens sur l'indemnité d'expropriation allouée,
- autoriser la Communauté urbaine de Bordeaux à solliciter le concours de la force publique en vue de procéder à l'expulsion des consorts ... et de toute personne de leur chef.
La Communauté urbaine de Bordeaux explique
- que par ordonnance du 2 avril 2009, devenue définitive, les consorts ... ent été immédiatement expropriés pour cause d'utilité publique au profit de la communauté urbaine de Bordeaux de l'immeuble dont s'agit,
- que par un jugement du 2 juin 2009, le montant des indemnités devant revenir aux consorts ... a été fixée à la somme de 130.000 euros,
- qu'en dépit de l'appel de cette décision interjetée par les consorts ..., ... ... urbaine de Bordeaux a souhaité procéder au règlement de l'indemnité fixée par le juge de l'expropriation, que faute de relevé d'identité bancaire, la somme correspondante a été consignée à la Caisse des dépôts et consignations suivant récépissé du 22 mars 2010, que l'arrêté de consignation ainsi que le récépissé correspondant ont été signifiés par voie d' huissier aux consorts ... le 2 avril 2010,
- que le 24 avril 2010, il a été constaté par huissier que la parcelle litigieuse était toujours occupée,
- que par arrêt du 24 novembre 2010 la chambre des expropriations de la cour d'appel de Bordeaux constatait la déchéance de l'appel des consorts ...,
- que par ordonnance du 24 février 2011, aujourd'hui déférée, le juge de l'expropriation a ordonné l'expulsion des consorts ....
Au vu de ce qui précède, la Communauté urbaine de Bordeaux conclut à la confirmation de la décision déférée car le délai d'un mois, prévu à l'article L 15-1 du code de l'expropriation, à compter de la consignation de l'indemnité, était écoulé et que de ce fait il peut être procédé à l'expulsion des consorts ... et de tout occupant de leur chef. La Communauté urbaine de Bordeaux sollicite également le prononcé d'une astreinte comminatoire et demande à être autorisée par la cour à prélever sur l'indemnité d'expropriation les frais d'expulsion.
Elle explique que les consorts ..., qui par l'intermédiaire de leurs représentants ont refusé le principe même d'une proposition de relogement répondant aux normes H LM, ont nécessairement renoncé à tout droit à cet égard. En tout état de cause, elle fait valoir que les appelants ne sont pas fondés à se prévaloir du non-respect d'une obligation de relogement alors qu'ils y ont expressément renoncé et qu'ils n'ont jamais fait part de leur intention à cet égard lors de l'évaluation de leurs biens, y compris lors de l'instance devant la cour d'appel de Bordeaux.
Elle souligne que la liste précisant la composition des familles, versées aux débats par les expropriés le 16 mars 2010, ne peut être qualifiée de précise qui ne permet pas d'identifier le nombre de personnes qui vivent et travaillent sur les terrains expropriés.
Le commissaire du gouvernement s'en rapporte qui rappelle qu'il a pour fonction d'éclairer le juge de l'expropriation, ou la cour d'appel, sur la valeur des biens expropriés mais qu'il n'a pas de compétence particulière pour se prononcer sur une ordonnance du juge de l'expropriation statuant, comme en matière de référé, sur la régularité de la procédure suivie.
SUR CE
Pour les motifs complets développés par le premier juge dont les débats devant la cour n'affectent pas la pertinence et qui sont ici adoptés, la décision déférée sera confirmée.
En effet, en application des dispositions de l'article R 14-10 du code de l'expropriation, il ne peut être offert un local de relogement à un propriétaire exproprié qui occupe tout ou partie de son immeuble, que si cette offre a été acceptée par le dit propriétaire avant la fixation des indemnités d'expropriation, afin de permettre au juge de l'expropriation, et, le cas échéant, à la chambre de l'expropriation statuant en appel, de tenir compte de ce relogement lors de la fixation de l'indemnité d'expropriation. Or, au cas d'espèce, le débat sur l'indemnité d'expropriation est clos sans que nul n'ait évoqué le problème du relogement si bien que l'indemnité a été calculée sur la valeur d'un immeuble libre d'occupation.
Par voie de conséquence, les appelants ne peuvent prétendre à un droit au relogement.
Par ailleurs comme l'a expliqué le premier juge, l'expropriant ne justifie pas de sa demande d'astreinte.
Il n'y a pas lieu à frais irrépétibles.
Les dépens seront mis à la charge des premiers appelants.
PAR CES MOTIFS
Déclare l'appel principal et l'appel incident recevables en la forme,
Les dit non fondés,
Confirme la décision déférée,
Laisse aux consorts ... ..., ..., ... & Nancy Bauer la charge des dépens de l'instance,
Le présent arrêt a été signé par Jean-François ... et par Geneviève ..., greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.