Jurisprudence : Cass. civ. 3, 09-11-2011, n° 10-22.844, FS-P+B, Rejet

Cass. civ. 3, 09-11-2011, n° 10-22.844, FS-P+B, Rejet

A8913HZ7

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Cass. civ. 3, 09-11-2011, n° 10-22.844, FS-P+B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5630112-cass-civ-3-09112011-n-1022844-fsp-b-rejet
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Abstract

Le cessionnaire irrégulier d'un droit au bail peut néanmoins prétendre à la titularité de ce droit du fait de la transmission légale de ce droit.



CIV.3 FB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 9 novembre 2011
Rejet
M. TERRIER, président
Arrêt no 1314 FS-P+B
Pourvoi no N 10-22.844
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par
1o/ M. Pierre Z, domicilié Jean Saint-Nicolas-de-Redon,
2o/ M. Bruno Y, domicilié Onnaing,
3o/ M. Jean Z, domicilié Ormes,
4o/ Mme Marie-Chantal Z, épouse Z, domiciliée Mouthier-Haute-Pierre,
5o/ M. Francis Y, domicilié Marly,
6o/ M. Rémy Y, domicilié Famars,
7o/ l'association Ariane, dont le siège est Anzin, agissant en sa qualité de curatrice de M. Bruno Y
contre l'arrêt rendu le 17 mai 2010 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 1), dans le litige les opposant à M. Gaston W, domicilié Arles,
défendeur à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 octobre 2011, où étaient présents M. Terrier, président, M. Crevel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Bellamy, conseiller doyen, Mmes Fossaert, Feydeau, MM. Fournier, Echappé, Parneix, Mme Andrich, conseillers, Mmes Manes-Roussel, Monge, Proust, Pic, conseillers référendaires, M. Gariazzo, premier avocat général, Mme Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Crevel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat des consorts ... et de l'association Ariane, ès qualités, de Me Ricard, avocat de M. W, l'avis de M. Gariazzo, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 17 mai 2010), que M. Gaston W avait pris en location une parcelle de terre appartenant, en indivision, aux consorts ... ; qu'antérieurement à son décès survenu le 28 décembre 1997, il avait cédé son bail à son fils Gaston W ; qu'en 2001, un notaire a notifié notamment à M. W fils un projet de vente de la parcelle louée, lequel a fait connaître son intention d'exercer un droit de préemption ; que confronté à un refus de régularisation de la vente, M. Gaston W fils a agi contre les propriétaires aux fins d'être déclaré acquéreur de la parcelle litigieuse ; que ces derniers ont sollicité, outre le rejet de cette demande, le départ de M. W fils comme occupant sans droit ni titre ;

Attendu que les consorts ... font grief à l'arrêt attaqué de rejeter leur demande tendant à l'expulsion de M. W, alors, selon le moyen
1o/ que nonobstant les dispositions de l'article 1717 du code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie avec l'agrément du bailleur au profit d'un descendant du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ; que les dispositions prohibant la cession de bail en-dehors des conditions ci-dessus, sont d'ordre public ; qu'en cas de contravention à ces dispositions le propriétaire a le droit de rentrer en jouissance et le preneur est condamné aux dommages-intérêts résultant de l'inexécution du bail ; que la violation de ces dispositions emporte nécessairement, indépendamment de la nullité de l'acte, la résiliation du bail ; que dès lors, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que M. W était titulaire d'un droit au bail afférent à la parcelle litigieuse, en sa qualité de descendant du preneur, de sorte qu'il ne pouvait être considéré comme occupant sans droit ni titre de la parcelle, cependant qu'elle avait constaté le caractère irrégulier de la cession du bail, ce qui autorisait les bailleurs à entrer en jouissance, la résiliation du bail étant nécessairement acquise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 411-34 et
L. 411-35 du code rural ;
2o/ que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ; que dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait tout en constatant que M. Gaston W père avait cédé irrégulièrement le bail à son fils, de sorte que ce dernier qui ne pouvait ignorer cette irrégularité, ne pouvait davantage prétendre poursuivre régulièrement un bail cédé irrégulièrement, à la suite du décès de son père, la cour d'appel a procédé d'une violation des articles L. 411-34 et L. 411-35 du code rural ;
3o/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux écritures d'appel des consorts Z qui avaient soutenu la cession irrégulière du bail, autorisant la résiliation, ce qui justifiait l'expulsion de
M. Gaston W devenu occupant sans droit ni titre, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu, par une interprétation que l'ambiguïté des conclusions des consorts ... rendait nécessaire, que ceux-ci n'avaient demandé que la constatation de la nullité de la cession du bail, la cour d'appel, qui a retenu qu'il s'inférait de cette nullité que Gaston W, père, avait conservé sa qualité de preneur à l'égard des co-indivisaires et relevé que M. W, fils, qui avait participé à l'exploitation des terres louées au cours des cinq années ayant précédé le décès de son père, était devenu titulaire du droit au bail au décès de celui-ci, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts ... et l'association Ariane, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts ... et l'association Ariane, ès qualités, à payer à M. W la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts ... et de l'association Ariane, ès qualités ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour les consorts ... et l'association Ariane, ès qualités.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait ordonné à M. Gaston W de quitter et libérer la parcelle AN 299, et statuant à nouveau, d'avoir débouté les consorts ... de leur demande d'expulsion de M. Gaston W, de ladite parcelle ;
AUX MOTIFS QUE si le principe de l'existence d'une cession du bail de M. Gaston W père à son fils est acquis aux débats, cette cession est bien irrégulière, faute pour ce dernier de justifier de l'agrément des bailleurs ; que cependant, il s'infère du constat de la nullité de la cession que M. Gaston W a conservé à l'égard des coindivisaires la qualité de preneur ; que conformément aux dispositions de l'article L. 411-34 du Code rural, au décès de ce dernier, survenu le 28 décembre 1997, le bail a continué indivisément au profit de son conjoint et de ses descendants, sous réserve que ceux-ci participent à l'exploitation ou y aient effectivement participé effectivement au cours des cinq années antérieures au décès ; que les intimés ne contestent nullement que M. Gaston W fils ait participé de façon effective à ladite exploitation au cours des cinq années précédant le décès du preneur ; qu'il ressort au demeurant que l'attestation en date du 23 octobre 2001 de la Mutualité Sociale Agricole des BOUCHES DU RHÔNE, versée aux débats par les consorts Z que l'appelant a exploité la parcelle litigieuse depuis le 1er janvier 1997 au moins ; qu'il est donc établi que M. Gaston W est titulaire du bail ; que cependant l'envoi au notaire d'une lettre recommandée pour l'informer de l'intention de M. Gaston W de faire valoir son droit de préemption ne peut pallier l'absence de notification aux coindivisaires propriétaires de la parcelle ; que le silence observé par le preneur équivaut à une renonciation au droit de préemption ; que M. W doit être débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître la qualité de propriétaire de ladite parcelle ;
ET ENCORE AUX MOTIFS, ainsi qu'il l'a été précédemment exposé, M. Gaston W fils est titulaire d'un droit au bail afférant à la parcelle litigieuse en sa qualité de descendant du preneur, de sorte qu'il ne peut être considéré comme occupant sans droit ni titre de ladite parcelle ;
ALORS QUE nonobstant les dispositions de l'article 1717 du Code civil, toute cession de bail est interdite, sauf si la cession est consentie avec l'agrément du bailleur au profit d'un descendant du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ; que les dispositions prohibant la cession de bail en-dehors des conditions ci-dessus, sont d'ordre public ; qu'en cas de contravention à ces dispositions le propriétaire a le droit de rentrer en jouissance et le preneur est condamné aux dommages-intérêts résultant de l'inexécution du bail ; que la violation de ces dispositions emporte nécessairement, indépendamment de la nullité de l'acte, la résiliation du bail ; que dès lors, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que M. W était titulaire d'un droit au bail afférent à la parcelle litigieuse, en sa qualité de descendant du preneur, de sorte qu'il ne pouvait être considéré comme occupant sans droit ni titre de la parcelle, cependant qu'elle avait constaté le caractère irrégulier de la cession du bail, ce qui autorisait les bailleurs à entrer en jouissance, la résiliation du bail étant nécessairement acquise, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 411-34 et L. 411-35 du Code rural ;
ALORS, EN OUTRE, QUE nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ; que dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait tout en constatant que M. Gaston W père avait cédé irrégulièrement le bail à son fils, de sorte que ce dernier qui ne pouvait ignorer cette irrégularité, ne pouvait davantage prétendre poursuivre régulièrement un bail cédé irrégulièrement, à la suite du décès de son père, la Cour a procédé d'une violation des articles L. 411-34 et L. 411-35 du Code rural ;
ALORS, ENFIN, QU'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux écritures d'appel des consorts Z qui avaient soutenu la cession irrégulière du bail, autorisant la résiliation, ce qui justifiait l'expulsion de M. Gaston W devenu occupant sans droit ni titre, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.

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