Jurisprudence : Cass. civ. 1, 09-11-2011, n° 10-21.710, FS-P+B+I, Rejet

Cass. civ. 1, 09-11-2011, n° 10-21.710, FS-P+B+I, Rejet

A8906HZU

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Cass. civ. 1, 09-11-2011, n° 10-21.710, FS-P+B+I, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5630105-cass-civ-1-09112011-n-1021710-fsp-b-i-rejet
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Abstract

Dans un arrêt rendu le 9 novembre 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation déclare que la clause d'accroissement est exclusive de l'indivision dès lors qu'il n'y aura jamais eu qu'un seul titulaire du droit de propriété et que, tant que la condition du prédécès de l'une des parties n'est pas réalisée, celles-ci n'ont que des droits concurrents, tel le droit de jouir indivisément du bien.



CIV. 1 CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 9 novembre 2011
Rejet
M. CHARRUAULT, président
Arrêt no 1092 FS-P+B+I
Pourvoi no E 10-21.710
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par M. Lucien Z, domicilié Battigny,
contre l'arrêt rendu le 29 avril 2010 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme Lidia Fernandes ZY épouse ZY, domiciliée Cagnes-sur-Mer,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 octobre 2011,
où étaient présents M. Charruault, président, M. Savatier, conseiller rapporteur, M. Pluyette, conseiller doyen, M. Rivière, Mmes Monéger, Bignon, MM. Chaillou, Suquet, Matet, conseillers, Mmes Degorce, Capitaine, Bodard-Hermant, Maitrepierre, conseillers référendaires, M. Domingo, avocat général, Mme Nguyen, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Savatier, conseiller, les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. Z, de la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat de Mme Fernandes Y, l'avis de M. Domingo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur la quatrième branche du moyen unique, ci-après annexé

Attendu que ce grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur les première, deuxième, troisième et cinquième branches du moyen
Attendu que M. Lucien Z fait grief à l'arrêt attaqué (Nancy, 29 avril 2010) de l'avoir condamné à payer à Mme Lidia Fernandes Y, son épouse, une indemnité d'occupation égale à la moitié de la valeur locative de l'immeuble qu'ils ont acquis avant leur mariage et pour lequel ils sont convenus d'une clause d'accroissement, dite de tontine, prévoyant notamment une jouissance commune pendant leur vie ;
Attendu qu'en relevant qu'il résulte de l'économie de la convention que jusqu'au décès de l'une d'elles, les parties ont des droits concurrents qui emportent le droit de jouir indivisément du bien, pour retenir exactement que l'exercice de ce droit peut être organisé par le juge et, par suite, statuer comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas ajouté au contrat et n'encourt pas la critique de la première branche ;

Et attendu que dans ses deuxième, troisième et cinquième branches, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par la cour d'appel de la situation de fait qui lui était soumise et par laquelle elle a estimé que M. Z a la jouissance exclusive de l'immeuble tandis que Mme Fernandes Y est mise dans l'impossibilité d'exercer son droit de jouissance ;

Enfin, sur la sixième branche du moyen
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le moyen, qu'en toute hypothèse l'indemnité d'occupation, qui a pour objet de réparer le préjudice causé à l'indivision par la jouissance privative d'un co-indivisaire, est due à l'indivision ; qu'en condamnant M. Z à payer une indemnité pour l'occupation de l'immeuble litigieux à son épouse, égale à la moitié de la valeur locative du fonds bâti, quand une telle indemnité ne pouvait être due qu'à l'indivision, la cour d'appel a violé les articles 815-9 et 815-10 du code civil ;

Mais attendu que la clause d'accroissement est exclusive de l'indivision dès lors qu'il n'y aura jamais eu qu'un seul titulaire du droit de propriété et que, tant que la condition du prédécès de l'une des parties n'est pas réalisée, celles-ci n'ont que des droits concurrents, tel le droit de jouir indivisément du bien ; qu'en décidant que M. Z, qui a la jouissance exclusive de l'immeuble, doit une indemnité pour son occupation à Mme Fernandes Y, co-titulaire du droit de jouissance, la cour d'appel n'encourt donc pas la critique du moyen ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z et le condamne à payer à Mme Fernades Y la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. Z.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que M. Lucien Z était redevable à l'égard de Mme Lidia ZY d'une indemnité d'occupation égale à la moitié de la valeur locative du fonds bâti situé rue du professeur ... à Battigny ;
AUX MOTIFS QUE le premier juge a exactement rappelé qu'il résulte de l'économie de la convention conclue entre les parties que jusqu'au décès de l'une d'elles, elles ont des droits concurrents qui emportent le droit de jouir indivisément du bien, ce droit pouvant être organisé par le juge lorsqu'est établie avec certitude et constance une impossibilité de jouissance commune ; que si cette condition est remplie, la partie qui jouit privativement du bien est redevable d'une indemnité d'occupation due au co-acquéreur, égale à la moitié de la valeur locative ; que la lecture des attestations produites de part et d'autre révèle un manque d'objectivité et d'impartialité de tous les témoins, si bien qu'il ne leur sera accordé aucune valeur probante ; qu'il n'en reste pas moins qu'il est avéré que les époux Z sont séparés de fait depuis le mois de juillet 1999, époque à laquelle M. Z s'est installé à Nancy ; que Mme Z a quant à elle quitté l'ancienne résidence de la famille pour s'installer dans le Sud de la France au courant du mois de juillet 2000 ; qu'il n'est effectivement pas prouvé par la demanderesse qu'elle aurait été mise dans l'impossibilité de jouir du bien à compter de cette époque ; que par contre, M. Z qui n'a jamais revendiqué la reprise de la vie commune admet avoir refait de l'immeuble de BATTIGNY sa résidence principale au mois d'août 2005, ce dont il résulte que depuis lors, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, M. Z en a la jouissance exclusive, tandis que Mme Z est mise dans l'impossibilité d'exercer son droit de jouissance ; que le jugement sera donc réformé pour dire que depuis le mois d'août 2005 M. Z est redevable, à l'égard de Mme Z, d'une indemnité d'occupation égale à la moitié de la valeur locative ; qu'avant-dire droit sur la fixation de son montant, il y a lieu d'ordonner une expertise ;
1) ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en jugeant que M. Z, qui avait acquis un immeuble avant le mariage avec sa future épouse et était lié à elle par un pacte tontinier prévoyant une jouissance commune du bien, sans stipuler le versement d'une indemnité de jouissance en cas de jouissance individuelle, serait néanmoins redevable d'une telle indemnité, la Cour d'appel a ajouté aux stipulations contractuelles et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse seul celui qui use ou jouit privativement de l'immeuble et empêche les autres indivisaires d'en jouir en commun est redevable d'une indemnité d'occupation privative ; que les époux s'obligeant mutuellement à une communauté de vie, aucun d'eux ne saurait jouir privativement de l'immeuble et empêcher son conjoint d'en jouir également tant que le juge ne les a pas autorisés à vivre séparément ; qu'en condamnant M. Z à payer une indemnité pour l'occupation de l'immeuble acquis avec son épouse, sans rechercher si les époux avaient été autorisés à vivre séparément par le juge ou en instance de divorce, de sorte que M. Z aurait eu le droit de jouir privativement de l'immeuble et d'empêcher son épouse de le rejoindre, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 815-9 et 215 du Code civil ;
3) ALORS QU'en toute hypothèse seul celui qui use ou jouit privativement de l'immeuble et empêche les autres indivisaires d'en jouir en commun est redevable d'une indemnité d'occupation privative ; qu'en condamnant M. Z à payer une indemnité pour l'occupation de l'immeuble acquis avec son épouse, quand elle relevait elle-même que Mme Z ne prouvait pas que, depuis qu'elle avait quitté l'ancienne résidence la famille pour s'installer dans le Sud de la France, elle aurait été mise dans l'impossibilité de jouir du bien, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 815-9 du Code civil ;
4) ALORS QU'en toute hypothèse seul celui qui use ou jouit privativement de l'immeuble et empêche les autres indivisaires d'en jouir en commun est redevable d'une indemnité d'occupation privative ; qu'en condamnant M. Z à payer une indemnité pour l'occupation de l'immeuble acquis avec son épouse, qui avait quitté la résidence de la famille au mois de juillet 2000, quand elle avait elle-même relevé que M. Z avait luimême quitté cette résidence au mois de juillet 1999 et n'y était retourné qu'à compter du mois d'août 2005, ce qui excluait qu'il puisse être redevable d'une indemnité avant cette dernière date, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 815-9 du Code civil ;
5) ALORS QU'en toute hypothèse seul celui qui use ou jouit privativement de l'immeuble et empêche les autres indivisaires d'en jouir en commun est redevable d'une indemnité d'occupation privative ; qu'en condamnant M. Z à payer une indemnité pour l'occupation de l'immeuble acquis avec son épouse, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si depuis qu'il occupait l'immeuble M. Z avait empêché son épouse d'en jouir également, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article du Code civil ;
6) ALORS QU'en toute hypothèse l'indemnité d'occupation, qui a pour objet de réparer le préjudice causé à l'indivision par la jouissance privative d'un coïndivisaire, est due à l'indivision ; qu'en condamnant M. Z à payer une indemnité pour l'occupation de l'immeuble litigieux à son épouse, égale à la moitié de la valeur locative du fonds bâti, quand une telle indemnité ne pouvait être due qu'à l'indivision, la Cour d'appel a violé les articles 815-9 et 815-10 du Code civil.

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