Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2011
(n°, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 10/16175
Décision déférée à la Cour Jugement du 22 Juin 2010 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006042661
APPELANT
Monsieur Michel Z
né le ..... à SOUSSE (TUNISIE)
de nationalité française
demeurant
NEUILLY SUR SEINE
pris en sa qualité d'actionnaire et d'administrateur des SA CERVIN et ORPHEE SAINT W et d'associé des SARL JIGGER, MWM et CIBI
représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour
assisté de Me Chantal ASTRUC, Avocat au barreau de PARIS, A235
INTIMÉS
Monsieur William Z
demeurant
PARIS
pris en sa qualité d'actionnaire et d'administrateur des SA CERVIN et ORPHEE SAINT W et d'associé des SARL JIGGER, MWM et CIBI
représenté par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour assisté de Me Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, B096 Madame Alexandra SZ SZ SZ
demeurant 34, rue Laugier
75017 PARIS
prise en sa qualité d'actionnaire et d'administrateur des SA CERVIN et ORPHEE SAINT W et d'associé des SARL JIGGER, MWM et CIBI
représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, B096
S.A. CERVIN
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège
PARIS
non assignée
SARL CIBI
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège
PARIS
représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, B096
SARL JIGGER
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège Michel
PARIS
représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, B096
SARL MWM
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège
PARIS
représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, B096
S.A. ORPHEE SAINT W
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège Michel
PARIS
représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre-Bruno GENON CATALOT, avocat au barreau de PARIS, B096
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 septembre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame DELBES, Conseillère, faisant fonction de Présidente, et Monsieur BOYER, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire,
Un rapport a été présenté à l'audience conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Madame Evelyne DELBES, Conseillère faisant fonction de Présidente
Monsieur Joël BOYER, Conseiller
Monsieur Édouard LOOS, Conseiller désigné en application de l'article R 312-3 du Code de l'Organisation judiciaire pour compléter la Chambre
Greffier, lors des débats Madame Marie-Claude HOUDIN
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBES, Conseillère, faisant fonction de Présidente, et par Madame HOUDIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Michel et William Z sont associés dans cinq sociétés exerçant leur activité dans le domaine du prêt à porter, les sociétés CIBI, Jigger, MWM, Cervin et Orphée ....
La Sarl CIBI, détenue par moitié par chacun des frères, gère la marque 'Cote-côte' à elle confiée par Michel et William Z qui en sont propriétaires indivis.
La Sarl Jigger, qui exploite des boutiques bd Saint-Michel à Paris, est locataire-gérante du fonds de commerce de la société Orphée Saint-Michel. Son capital social est détenu aux deux tiers par William Z, le dernier tiers l'étant par Michel WZ.
La Sarl MWM, dont Michel WZ détient, comme son frère William, 33% du capital, le reste étant détenu par des sociétés contrôlées par William Z, était titulaire d'un droit au bail portant sur des locaux rue de Rivoli à Paris, qui a été racheté par la Ville de Paris moyennant le versement d'une indemnité conventionnelle de 1 077 202 euros.
La société Cervin est une société anonyme, détenue par la société Jigger à hauteur de 2491 parts sur les 2500 qui constituent son capital social, Michel WZ et son frère William détenant 2 parts chacun. Elle a cédé, par acte sous seing privé du 5 octobre 2005, le droit au bail dont elle était propriétaire boulevard Saint-Michel moyennant le prix principal de 750 000 euros, et a été dissoute par décision de ses associés le 29 octobre 2008, les opérations de liquidation ayant été clôturées le 26 décembre 2008.
La société anonyme Orphée Saint-Michel est propriétaire d'un fond de commerce de vente de prêt'porter sous l'enseigne 'Côte-à-côte', boulevard Saint-Michel, qu'elle a confié en location-gérance à la société Jigger. Son capital social est constitué de 6 450 actions, la société Jigger en détient 6 127, William Z, 179, Michel Abbou 79, le reliquat étant ventilé entre d'autres membres de la famille.
William Z est le dirigeant de chacune de ses sociétés.
De nombreux litiges ont opposé les deux frères à partir de l'année 2005, qui seront ainsi résumés pour une meilleure compréhension des termes du litige
- le 10 septembre 2004, M. Roland Z, fils de Michel, alors responsable du magasin géré par la société MWM de la rue de Rivoli, sera licencié avec mise à pied à titre conservatoire,
- l'assemblée générale extraordinaire de la société MWM en date du 7 octobre 2004, décidera la révocation de Mme Bianca Z, fille de Michel, et jusqu'alors co-gérante de la société, pour confier la gérance à Mme Alexandra SZ, seule
- par acte en date du 20 décembre 2005, Michel WZ a fait assigner la société Cervin devant le tribunal de commerce aux fins de voir, notamment, prononcer la nullité de l'assemblée générale du 21 septembre 2005 qui avait approuvé la cession du droit au bail dont cette société était titulaire au 13, boulevard Saint-Michel et a, parallèlement, sollicité la mise sous séquestre de la somme correspondant au prix de cession, actions dont il sera débouté par arrêts de la cour d'appel de Paris,
- sur assignation de Michel WZ, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris désignera, par ordonnance en date du 22 décembre 2005, Maître ... en qualité de mandataire ad hoc avec mission de faire rapport sur l'opportunité de la mise sous mandat de justice des cinq sociétés,
- par acte en date du 13 novembre 2006, Michel WZ a fait assigner en référé les deux sociétés Jigger et MWM devant le tribunal de commerce aux fins de voir désigner un expert de gestion au visa de l'article L 223-37 du code de commerce, demande à laquelle il sera partiellement fait droit, par ordonnance en date du 16 février 2007, la mission confiée à M. Maurice ... ayant été circonscrite aux deux points suivants la mise à disposition du personnel de la société Jigger au profit des sociétés MWM et Griffes Modes, cette dernière entièrement détenue par William Z, et le paiement par les sociétés Jigger et MWM d'une indemnité transactionnelle due par la société Griffes Mode à la société Dior, résultant d'un protocole régularisé entre ces deux dernières.
C'est dans ce contexte que, par actes en date des 8 et 13 juin 2006, M. Michel WZ a fait assigner devant le tribunal de commerce de Paris M. William Z, Mme Alexandra Abbou Cohen SZ ainsi que les sociétés Jigger, MWM, Cervin, Orphée ... et CIBI aux fins de voir, à titre principal, prononcer la dissolution judiciaire, sur le fondement de l'article 1844-7-5° du code civil, des sociétés Orphée Saint-Michel, Jigger, U et CIBI et nommer tel liquidateur qu'il plairait au tribunal, et condamner M. William Z à lui payer la somme de 100 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 22 juin 2010, le tribunal a prononcé la dissolution de la Sarl CIBI et désigné M. William Z en qualité de liquidateur, débouté M. Michel WZ de toutes ses demandes et l'a condamné à payer à chacun des défendeurs une somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration en date du 2 août 2010, M. Michel WZ a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 19 septembre 2011, il demande la cour d'infirmer le jugement entrepris et de dire et juger qu'il existe une mésentente irréversible entre les associés des sociétés Jigger, MWM, Orphée ... et CIBI, conduisant à une disparition de l' affectio societatis, de prononcer en conséquence la dissolution judiciaire desdites sociétés sur le fondement de l'article 1844-7-5 du code civil, de nommer tel liquidateur qu'il plaira à la cour, à l'exclusion des parties, aux fins de poursuivre les opérations de liquidation judiciaire, de condamner M. William Z à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil, et, en tout état de cause, de procéder à la révocation judiciaire de M. William Z de ses fonctions de gérant de la société Jigger, de désigner tel administrateur, de condamner M. William Z à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des fautes de gestion commises, ainsi que la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières écritures signifiées le 8 septembre 2011, les intimés demandent à la cour de débouter M. Michel WZ de toutes ses demandes, de constater que la société Cervin a été dissoute et radiée du registre du commerce et des sociétés, ses opérations de liquidation ayant été clôturées, de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, y ajoutant, de condamner M. Michel WZ à payer à chacun d'eux la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
M. Michel WZ fait valoir, au soutien de son appel, que l'affectio societatis a disparu sans que la dégradation des relations entre les deux frères ne puisse laisser espérer une réconciliation et invoque plusieurs griefs tenant notamment à un abus de majorité et à diverses fautes de gestion, lesquels seront examinés société par société.
William Z et les autres intimés soulignent, quant à eux, pour solliciter la confirmation du jugement déféré, que le fonctionnement d'aucune des sociétés dont la dissolution judiciaire est demandée n'est paralysé, et que l'action de l'appelant, qui a vu toutes les sociétés qu'il dirigeait placées en liquidation judiciaire, est exclusivement dictée par le ressentiment.
Il sera rappelé, au préalable, que la mésentente entre associés, et par suite la disparition de l'affectio societatis, ne peuvent constituer un juste motif de dissolution, au sens de l'article 1844-7, 5° du code civil, qu'à la condition de se traduire par une paralysie du fonctionnement de la société.
Sur la société Jigger
C'est vainement que M. Michel WZ invoque un abus de majorité tiré de la fixation de la rémunération du gérant à hauteur d'une somme de 30 000 euros pour l'exercice 2008 et 2010, outre la prise en charge par la société des cotisations obligatoires et facultatives, dès lors qu'il ne justifie par aucun élément ni du caractère exagéré d'un telle rémunération ni d'avoir poursuivi en justice l'annulation des assemblées générales en ayant décidé.
M. Michel WZ invoque aussi une pratique contestable de mise à disposition du personnel de la société Jigger au profit de la société MWM et d'une Sarl Griffes Modes, détenue par son frère William, en 2004 et 2005. Il sera au préalable relevé qu'il résulte d'un courrier qu'il a adressé à son frère le 28 juin 2005 que M. Michel WZ était parfaitement informé de l'ancienneté d'un tel usage puisqu'il ne s'interrogeait alors, à propos du 'personnel de la société Jigger que vous utilisez pour les sociétés qui vous appartiennent ', que sur des 'refacturations supérieures en 2004 par rapport aux années précédentes'.
Il doit être relevé, en outre, que M. Maurice ..., désigné par ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce en date du 16 février 2007, pour donner son avis, notamment, sur ce point, a relevé que si de telles mises à dispositions ne pouvaient être regardées comme des opérations courantes et auraient dû par conséquent faire l'objet de conventions soumises à l'approbation de l'assemblée générale, 'la facturation des mises à disposition de personnel a été faite au prix de revient' et qu'aucun élément n'avait 'révélé une utilisation à des fins personnelles de la part de M. William Z du personnel détaché par la Sarl Jigger'.
M. Michel WZ fait également grief à son frère d'avoir facturé en 2000 une indemnité transactionnelle fixée en vertu d'un protocole d'accord intervenu entre la société Griffes Mode et la société Dior à la somme de 60 976,61 euros, aux sociétés Jigger, à hauteur d'une somme de 42 415,74 euros et MWM pour un montant de 10 227,65 euros. S'il est vrai qu'aucune de ces dernières sociétés n'était partie audit protocole et qu'aucune convention n'a été passée entre elles et la société Griffes Mode, il reste que ces sommes apparaissaient, au titre des charges exceptionnelles, dans les rapports de gestion de l'exercice clos au 31 décembre 2000 de chacune des ces sociétés, que la résolution de l'assemblée générale ordinaire que la société Jigger a tenue le 29 juin 2001 approuvant les comptes a été approuvée à l'unanimité, y compris donc par Michel WZ et que celle-ci n'a fait l'objet d'aucune contestation judiciaire, ce dernier ne soutenant pas même avoir été privé d'accès au compte de résultat, au bilan, et aux documents annexés mis à la disposition de l'assemblée. S'agissant de la société MWM, M. Michel WZ en était le co-gérant du 10 juillet 2000 au 16 juin 2004, soit à la date d'approbation des comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2000, lesquels mentionnaient un montant de charges exceptionnelles de 67 089 francs, soit 10 227, 65 euros, dont il ne pouvait ignorer ni la nature ni le montant ayant été le signataire du rapport de gestion sur les opérations de l'exercice concerné.
M. Michel WZ n'allègue au soutien du grief général fait à son frère d'opposition au contrôle des comptes sociaux aucun fait précis et circonstancié qui permettrait d'en débattre utilement, à l'exception du refus de M. William Z de coopérer à la mission confiée à Maître ... pour faire rapport sur l'opportunité de la mise sous mandat de justice des cinq sociétés, laquelle mission s'est en effet soldée par un constat d'échec qui n'avait cependant d'autre cause que l'état très altéré des relations personnelles entre les deux frères. Il sera relevé en outre qu'elle a été suivie par la mission d'expertise de M. ..., ci-dessus évoquée, d'où il résultait que, contrairement à ses dires, M. Michel WZ ne pouvait raisonnablement prétendre ni qu'il ignorait la pratique de mise à disposition du personnel de la société Jigger au profit d'autres sociétés, ni que les facturations intervenues à ce titre en 2004 et 2005 auraient revêtu un caractère abusif ou préjudiciable à la société Jigger, ni que l'imputation sur les comptes des sociétés Jigger et MWM des sommes dues par la société Griffes Mode à la société Dior lui avait été dissimulée.
Enfin, M. Michel WZ fait grief à la société Jigger d'avoir provisionné une somme de 113 597 euros correspondant à une dépréciation des titres de la société MWM. Mais il résulte des pièces versées aux débats que cette provision pour perte correspond à un redressement fiscal à hauteur d'une somme de 759 987 euros, résultant d'une vérification de comptabilité de cette dernière au titre des années 2004 et 2005 de sorte que le grief articulé n'est pas fondé.
En définitive, sur cette société, si les éléments de la cause révèlent une incontestable mésentente entre les deux frères qui y sont associés, M. Michel WZ n'établit nullement que ses organes sociaux auraient été empêchés de prendre une décision relevant de leur fonctionnement ou de leur compétence ni que son activité économique s'en trouverait entravée ou paralysée, de sorte que les conditions de la dissolution judiciaire ne sont pas réunies.
Sur la société MWM
M. Michel WZ ne saurait pas plus que précédemment invoquer sa démission de la gérance de la société en juin 2004, le licenciement de son fils en septembre de la même année, ou la révocation de la co-gérance de sa fille au mois d'octobre suivant, pour étayer un abus de majorité, alors qu'il n'a contesté judiciairement aucune des assemblées générales en ayant pris acte ou décidé.
Il sera relevé en outre que M. William Z fait, quant à lui, reproche à son frère de n'avoir pas sollicité d'un de ses amis, précédemment gérant de la Sarl, le remboursement d'un compte courant débiteur à hauteur d'une somme de 13 563,39 euros, ce qui a conduit la société MWM à devoir entreprendre, en 2007, une action judiciaire à cette fin, de s'être trouvé, par ailleurs, à l'origine d'un redressement de la part de l'Ursaff à hauteur d'une somme de 37 639 euros correspondant à trois exercices (2002, 2003, 2004) durant lesquels il assurait la gérance de la société, somme qui a été finalement remboursée en novembre 2005, et évoque diverses négligences de sa fille lorsque, succédant à son père, elle a assuré la co-gérance de la société MWM, qui ne sont pas réellement contestés par l'appelant, de sorte que divers griefs paraissent établis de nature à éclairer les circonstances de la démission de M. Michel WZ de ses fonctions de gérant, ainsi que les décisions prises ensuite par l'assemblée générale de la société MWM, dont aucune n'a été à l'époque contestée.
Le grief tiré du favoritisme à l'égard de la société Griffes Mode a été ci-dessus examiné et sera rejeté pour de même motifs.
Enfin, c'est vainement que M. Michel WZ excipe, au soutien de sa demande de dissolution judiciaire, de l'absence d'activité de la société MWM, qui perçoit les produits financiers des placements de l'indemnité d'éviction à elle versée par la Ville de Paris au titre du bail de la rue de Rivoli, et reconnaît y préférer une dissolution qui permettrait de répartir entre associés le boni de liquidation, alors que les intimés font justement valoir qu'un redressement fiscal est en cours, à hauteur d'une somme de 759 987 euros portant sur les exercices 2004 et 2005, de sorte que M. Michel WZ et sa fille, successivement cogérants jusqu'au mois d'octobre 2004 pourraient ne pas y être aussi étrangers qu'ils le soutiennent, la poursuite d'activité de la société apparaissant dès lors à la fois prudente et exclusive de tout dessin destiné à favoriser la majorité.
Pour ces motifs, les conditions du prononcé d'une dissolution judiciaire ne seront pas regardées comme réunies.
Sur la société Orphée Saint-Michel
M. Michel WZ invoque, à ce titre, une violation des dispositions de l'article L 225-38 du code du commerce sur les conventions réglementées, en stigmatisant l'absence d'approbation en 2008 de la convention liant cette société à la société Jigger, laquelle fixe, en particulier, le montant de la redevance de location-gérance.
Il résulte cependant du procès-verbal de l'assemblée générale de la société Orphée Saint-Michel du 30 juin 2009 que cette dernière a pris acte, après avoir pris connaissance du rapport aux commissaires aux comptes sur les conventions réglementées, que 'les conventions conclues et autorisées antérieurement se sont poursuivies et qu'aucune n'a été conclue au cours de l'exercice', la cour constatant, par ailleurs, que l'appelant s'est abstenu de toute action judiciaire tant à l'égard de cette résolution que de la convention litigieuse, dont il n'est pas même soutenu que son économie générale, et en particulier le montant de la redevance de location-gérance, aurait préjudicié à l'une ou l'autre des sociétés.
Aussi, la demande de dissolution de la société Orphée saint-Michel sera-t-elle également rejetée.
Sur la demande, subsidiaire, de révocation de M. William Z de ses fonctions de gérant de la société Jigger
M. Michel WZ invoque, à ce titre, la conclusion par le gérant de la société Jigger de conventions qui auraient nécessité l'approbation de l'assemblée générale des associés, soit la mise à disposition de personnel de la société Jigger au profit des sociétés MWM et Griffes Mode et la convention de location- gérance du fonds de commerce de la société Orphée Saint-Michel.
Mais il a été précédemment relevé, sur le premier point, que les mises à disposition du personnel ont été refacturées au prix de revient, et, sur le second, que l'appelant ne conteste en aucune façon le montant de la redevance de location-gérance, de sorte que la situation de la société Jigger n'ayant été affectée à aucun titre par les actes litigieux, ces derniers ne sauraient constituer une cause de révocation légitime.
Sur la société CIBI
Le jugement déféré a prononcé la dissolution de la société CIBI après avoir constaté que les capitaux propres étaient devenus inférieurs à la moitié du capital social, que M. William Z avait convoqué une assemblée générale extraordinaire en date du 31 octobre 2006 afin de voir prononcer, par application des dispositions de l'article L 223-42, alinéa 2, du code du commerce, la dissolution anticipée de la société, ce à quoi M. Michel WZ s'était opposé, aucune régularisation n'étant intervenue dans le délai prévu par ce texte. Aucune des parties ne sollicite l'infirmation du jugement sur ce point, M. Michel WZ faisant cependant valoir que le tribunal de commerce aurait dû s'abstenir de désigner en qualité de liquidateur l'un des deux associés en conflit.
Le seul souci d'éviter toute vaine contestation relativement aux opérations de liquidation, alors même qu'il résulte du rapport de M. Denis ... que la société CIBI qui avait pour seule activité de gérer la marque 'Côte-à-côte' utilisée par les différentes sociétés des deux frères n'avait pas formalisé de contrat de licence avec elles, conduira à désigner un liquidateur extérieur aux querelles familiales.
Le jugement entrepris sera dès lors infirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
C'est à juste titre que les premiers juges ont fait droit à la demande d'indemnité présentée par les défendeurs au titre de la procédure abusive en la cantonnant à une somme de 1 000 euros chacun, l'action engagée par M. Michel WZ revêtant tous les caractères de l'action téméraire inspirée par l'intention de nuire, les demandes de dissolution judiciaire à l'égard de sociétés dont le fonctionnement n'était nullement paralysé ne reposant sur aucun fait étayé dont ce dernier soit fondé à se plaindre. Il sera en particulier relevé qu'il a assuré, puis sa fille après lui, la gérance ou la co-gérance de la société MWM jusqu'au mois d'octobre 2004, qu'il n'a jamais contesté en justice aucune résolution des assemblées générales des sociétés concernées- la société Cervin étant étrangère à la présente instance-, et que si le tribunal de commerce a prononcé, sur l'assignation par lui délivrée, la dissolution de la société CIBI, celle-ci avait été proposée plus de quatre ans auparavant à l'initiative de son frère, et n'avait été alors rejetée que de son propre fait.
En cet état, il y aura lieu de confirmer le jugement déféré tant en ce qui concerne les indemnités allouées à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive que les indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
S'agissant des demandes formées en cause d'appel à ces deux titres par les intimés, la cour ayant désigné pour la société CIBI un liquidateur autre que M. William Z, l'appel interjeté par M.
Michel WZ, à ce seul motif, ne sera pas regardé comme abusif et les intimés seront déboutés de leurs demandes à ce titre. L'équité conduira à n'allouer, en cause d'appel, d'indemnité sur le fondement de l'article 700 à quiconque. Enfin, les circonstances propres à l'espèce conduiront à faire supporter par chaque partie la charge de ses dépens d'appel
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à désigner en qualité de liquidateur de la société CIBI, aux lieu et place de M. Michel WZ
Maître Michèle ..., demeurant Paris- Tél 01 44 18 00 13-Fax 01 44 18 00 14- administrateur judiciaire, avec mission de procéder aux opérations de liquidation de la société CIBI, jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci,
Fixe le montant de la consignation sur les honoraires de Maître ... à 2 000 euros que M. Michel WZ devra consigner directement entre ses mains, ce dès sa saisine,
Dit que Maître ... rendra compte de sa mission au TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS au plus tard pour le 2 avril 2011,
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs autres demandes en cause d'appel, en ce compris les demandes d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
M.C HOUDIN E. ...