CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
N°
340847
MINISTRE DE LA DEFENSE
c/ Mme Zaremba
M. Terry Olson, Rapporteur
M. Bertrand Dacosta, Rapporteur public
Séance du 21 septembre 2011
Lecture du
26 octobre 2011
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 7ème et 2ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux
Vu le pourvoi, enregistré le 23 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement nos 0720672, 0720673, 0821206 du 22 avril 2010 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé sa décision du 30 août 2007 par laquelle il a été mis à la charge de Mme Zaremba le remboursement d'un trop-perçu de 1 873 euros, ainsi que le titre de perception du 11 décembre 2007 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de Mme Zaremba ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le décret n° 97-901 du 1er octobre 1997 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Terry Olson, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le 4 juillet 2007, Mme Zaremba, ex-compagne de M. Hascour, sous-officier de gendarmerie, a perçu la somme de 1 873 euros, correspondant au versement de l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger, tenant compte d'un enfant à charge, au titre des services accomplis en opération extérieure par M. Hascour du 1er janvier 2002 au 23 juin 2003 ; que par décision du 30 août 2007, le MINISTRE DE LA DEFENSE a mis cette somme à la charge de Mme Zaremba, au motif qu'elle lui avait été versée à tort ; qu'un titre de perception a été émis le 11 décembre 2007 à l'encontre de Mme Zaremba ; que, par un jugement du 22 avril 2010 contre lequel le MINISTRE DE LA DEFENSE se pourvoit dans cette mesure, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 30 août 2007 ainsi que le titre de perception du 11 décembre 2007 ;
Considérant que la décision du MINISTRE DE LA DEFENSE en date du 30 août 2007 a retiré, non pas une mesure propre à liquider une créance née d'une décision prise antérieurement, mais une décision accordant un avantage financier constatant l'ouverture de droits dont le bénéfice avait été sollicité ; que par suite le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'une erreur de droit en regardant la décision du MINISTRE DE LA DEFENSE du 30 août 2007 comme étant constitutive du retrait d'un acte créateur de droits ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, les décisions individuelles devant être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, ne peuvent être prises par l'administration qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant et sur sa demande, des observations orales ; que le retrait d'une décision administrative créatrice de droits figure au nombre de ces décisions ; que, si l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger prévue à l'article 2 du décret du 1er octobre 1997 relatif à la rémunération des militaires à solde mensuelle envoyés en opération extérieure ou en renfort temporaire à l'étranger constitue un droit à complément de rémunération ouvert au militaire destiné à compenser les charges spécifiques découlant de cette affectation, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à la demande de M. Hascour cette prestation a été versée par l'administration entre les mains de Mme Zaremba, assumant la charge effective de leur enfant Adrien ; que tant la décision retirant cet avantage que le titre de perception ont été pris à l'encontre de celle-ci ; que dès lors Mme Zaremba devait être regardée comme étant la personne intéressée au sens des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que Mme Zaremba n'étant pas agent du ministère de la défense, ses relations avec ce ministère n'entraient pas dans le champ de l'exception prévue à l'article 18 de la loi du 12 avril 2000 en vertu duquel les prescriptions imposées notamment par l'article 24 de cette même loi ne sont pas applicables aux relations entre les administrations et leurs agents ; qu'il suit de là qu'en jugeant illégale la décision du 30 août 2007 au motif que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'avait pas invité Mme Zaremba à présenter au préalable ses observations en application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à Mme Françoise Zaremba.
Délibéré dans la séance du 21 septembre 2011 où siégeaient : M. Philippe Martin, Président adjoint de la Section du Contentieux, Président ; M. Edmond Honorat, M. Rémy Schwartz, Présidents de sous-section ; Mme Dominique Laurent, M. Olivier Rousselle, M. Denis Prieur, M. Gilles Bardou, M. Jacques-Henri Stahl, Conseillers d'Etat et M. Terry Olson, Conseiller d'Etat-rapporteur.