Jurisprudence : CA Agen, 1ère, 31-10-2011, n° 10/02164

CA Agen, 1ère, 31-10-2011, n° 10/02164

A0805HZT

Référence

CA Agen, 1ère, 31-10-2011, n° 10/02164. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5619912-ca-agen-1ere-31102011-n-1002164
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Abstract

Par un arrêt rendu le 31 octobre 2011, la cour d'appel d'Agen refuse l'inscription au barreau d'une avocate régulièrement sanctionnée pour manquement au principe de probité (CA Agen, 1ère ch., 31 octobre 2011, n° 10/02164).



ARRÊT DU
31 Octobre 2011 L.F/S.B
RG N° 10/02164
Carole Z
C/
L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DU LOT
Y Y Y Y
ARRÊT n°
COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Civile

Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le trente et un Octobre deux mille onze, par L. ..., Premier Président, assistée de Nathalie CAILHETON, Greffier
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE
Madame Carole Z
Demeurant
PUY L'EVEQUE
représentée par la SELARL DUMAINE LACOMBE RODRIGUEZ, avocats
APPELANTE d'une décision rendue par le Conseil de l'Ordre des Avocats du Barreau du LOT en date du 08 Décembre 2010
D'une part,
ET
L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DU LOT, représentée par son Bâtonnier en exercice,
Palais de Justice

CAHORS
représenté par Me Jacques FAGGIANELLI, avocat
Y Y Y Y
Palais de Justice
Place Armand
AGEN CÉDEX 9
représenté par M. J. ..., Avocat Général
INTIMÉS
D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en chambre du conseil, le 19 Septembre 2011, devant L. ..., Premier Président, (laquelle a fait un rapport oral préalable), R. ..., Président de Chambre, D. ..., Conseiller, C. ..., Conseiller, et A. ..., Conseiller, assistés de N. ..., Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Premier Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.
* *

Madame Carole Z exerçait à PARIS la profession d'avocat.
En 2007 elle a été autorisée à ouvrir un cabinet secondaire à PUY L'EVEQUE.
Elle a depuis lors fait l'objet des sanctions suivantes prononcées par le conseil de discipline de l'Ordre des Avocats du Barreau de PARIS
-12 octobre 2007 interdiction d'exercice pendant deux mois (assortie du sursis) et privation du droit de faire partie du Conseil de l'Ordre, du CNB et des autres organismes professionnels pendant trois ans pour manquements aux principes essentiels de prudence, de confraternité et de diligence,
- 26 février 2008 interdiction d'exercice pendant un an (assortie du sursis) sans révocation du sursis antérieur et privation du droit de faire partie du Conseil de l'Ordre, du CNB et des autres organismes professionnels pendant dix ans pour manquements aux principes essentiels d'honneur et de probité,
- 31 mars 2009 interdiction d'exercice pendant six mois avec révocation des sursis antérieurs pour manquements graves aux principes essentiels régissant la profession d'avocat.
Une décision d'omission du tableau a par ailleurs été rendue le 18 novembre 2008 par le Conseil de l'Ordre des Avocats de PARIS à la suite de l'absence de paiement des cotisations obligatoires.
A la suite de cette dernière décision le Conseil de l'Ordre du Barreau du LOT a décidé le 22 avril 2009 la fermeture du cabinet secondaire de PUY L'EVEQUE.
Madame Carole Z s'étant vu reprocher d'avoir poursuivi son activité professionnelle, une information pénale a été ouverte du chef d'exercice illégal de la profession d'avocat et se trouve actuellement toujours en cours au cabinet du Juge d'Instruction du Tribunal de Grande Instance de CAHORS.
Madame Carole Z a déposé une demande d'inscription au Barreau du LOT qui a été rejetée le 8 décembre 2010 par le Conseil de l'Ordre du Barreau du LOT. Le motif de ce rejet était que Madame Carole Z ne réunissait pas les garanties d'honorabilité et de probité nécessaires.
Par courrier recommandé envoyé le 21 décembre 2010 et reçu au greffe de la Cour d'Appel le 24 décembre 2010, Madame Carole Z a exercé un recours contre cette décision.
Aux termes de ses dernières écritures, Madame Carole Z conclut à l'annulation de la décision entreprise pour violation du principe du contradictoire.
Elle demande à la Cour de prononcer son inscription au Barreau du LOT en invoquant les dispositions de l'article 107 du décret du 27 novembre 1991 et de l'article 11 (alinéas 4 et 5) de la loi du 31 décembre 1971. Elle fait observer qu'elle n'a pas fait l'objet des sanctions pénale ou disciplinaire prévues par ces textes et s'oppose à tout sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'information ouverte du chef d'exercice illégal de la profession d'avocat.
Elle estime qu'un refus d'inscription au Barreau du LOT, alors même qu'elle aurait pu poursuivre à PARIS son activité professionnelle, serait inéquitable et reviendrait à infliger une nouvelle peine à raison des comportements déjà sanctionnés par le conseil de discipline de l'ordre des avocats du Barreau de PARIS.
L'ordre des avocats du Barreau du LOT conclut à la confirmation de la décision entreprise et demande subsidiairement qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'information ouverte du chef d'exercice illégal de la profession d'avocat.
Faisant valoir que le refus d'inscription a été précédé d'une audition de Madame Carole Z, il estime que doit être écarté le moyen tiré d'une prétendue irrégularité de la procédure.
Invoquant les dispositions de l'article 17-3e de la loi du 31 décembre 1971, il rappelle, sur le fond, que Madame Carole Z a fait l'objet de plusieurs sanctions disciplinaires et stigmatise le comportement général de cet avocat auquel il reproche en outre son absence de réponse à plusieurs convocations de bâtonniers ainsi que son absence de respect des sanctions des décisions d'interdiction et d'omission.
Le Ministère Public conclut également à la confirmation de la décision entreprise. Selon lui, Madame Carole Z n'établit pas qu'elle remplit les garanties d'honorabilité et de probité de nature à justifier son inscription au tableau.

SUR CE
Attendu que Madame Carole Z été régulièrement convoquée devant le Conseil de l'Ordre comme le prescrit l'article 103 du décret du 27 novembre 1991 qui n'exige pas la notification préalable des griefs ;
Attendu cependant que parmi les documents versés aux débats ne figure pas le procès-verbal relatant l'audition de Madame Carole Z par le Conseil de l'Ordre du Barreau du LOT ;
Que la Cour ne se trouve pas, par conséquent, en mesure de vérifier que les droits de la défense ont été respectés et que Madame Carole Z a été invitée à s'expliquer sur les motifs pouvant faire obstacle à son inscription ;
Attendu que la décision entreprise doit, dès lors, être annulée ;
Attendu que, par l'effet dévolutif de l'appel, la Cour se trouve saisie de l'entière connaissance du litige ;
Attendu, sur le fond, que les décisions du conseil de discipline de l'Ordre des Avocats du Barreau de PARIS ci-dessus rappelées ont sanctionné des comportements contraires à l'honneur et à la probité ;
Que des motifs des deux premières de ces décisions, il ressort que Madame Carole Z a, dans un premier temps, rédigé un acte de cession de fonds de commerce en qualité d'avocat du cédant en y mentionnant l'accord des bailleresses sans que cet accord ait été confirmé par la bailleresse puis, dans un second temps, pour dissimuler sa faute professionnelle initiale, falsifié les six originaux de l'acte en insérant un paragraphe supplémentaire, en imitant les paraphes de deux personnes et en modifiant la date effective de signature de l'acte ;
Que des motifs de la troisième décision il ressort que Madame Carole Z, à laquelle une cliente reprochait de l'avoir laissée sans nouvelles alors qu'elle lui avait remis des pièces originales, n'a pas répondu à plusieurs convocations adressées par les instances ordinales et n'a restitué ses documents à la plaignante qu'au bout de quatre années ;
Attendu que les faits ainsi relatés révèlent l'inaptitude persistante de Madame Carole Z à respecter les principes essentiels régissant la profession d'avocat et notamment le principe de probité dont le maintien est confié au conseil de l'ordre par l'article 17-3e de la loi du 31 décembre 1971 ;
Qu'ils suffisent, par conséquent, à justifier le rejet de la demande d'inscription au Barreau du LOT, rejet qui n'intervient pas dans le cadre d'une procédure disciplinaire et qui ne peut, par conséquent, être analysé comme une nouvelle peine infligée à raison de comportements déjà sanctionnés ;

PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Reçoit Madame Carole Z en son recours ;
Annule la décision entreprise ;
Rejette la demande d'inscription au Barreau du LOT présentée par Madame Carole Z ;
Condamne Madame Carole Z aux dépens ;
Le présent arrêt a été signé par L. ..., Premier Président, et par N. ..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Premier Président,
N. ... L. ...

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