CIV. 2 SÉCURITÉ SOCIALE CH.B
COUR DE CASSATION
Audience publique du 13 octobre 2011
Rejet
M. LORIFERNE, président
Arrêt no 1677 FS-P+B
Pourvoi no F 10-25.483
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par l'association OGEC - Centre scolaire privé Jeanne d'Arc, dont le siège est Champagnole,
contre l'arrêt rendu le 29 juin 2010 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Jura, dont le siège est Lons-le-Saunier cedex,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 14 septembre 2011, où étaient présents M. Loriferne, président, M. Feydeau, conseiller rapporteur, M. Mazars, conseiller doyen, MM. Laurans, Barthélemy, Héderer, Prétot, Cadiot, Buisson, conseillers, Mmes Coutou, Fouchard-Tessier, M. Salomon, Mme Chauchis, conseillers référendaires, Mme de Beaupuis, avocat général, Mme Genevey, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Feydeau, conseiller, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat de l'association OGEC - Centre scolaire privé Jeanne d'Arc, de la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat de l'URSSAF du Jura, l'avis de Mme de Beaupuis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 29 juin 2010), qu'à la suite d'un contrôle opéré en juin 2008, l'URSSAF du Jura a notifié à l'association Organisme de gestion de l'enseignement catholique (OGEC)-Centre scolaire privé Jeanne d'Arc (l'association), qui gère un établissement d'enseignement privé sous contrat avec l'Etat, un redressement résultant de la réintégration dans l'assiette de la contribution sociale généralisée (CSG), de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et de la taxe de prévoyance mentionnée à l'article L. 137-1 du code de la sécurité sociale des cotisations destinées au financement des prestations de prévoyance complémentaire dont bénéficient les personnels
enseignants et de documentation travaillant dans l'établissement en
application d'un accord du 16 septembre 2005 ; que l'association a saisi une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de rejeter son recours et de la condamner au paiement des contributions et de la taxe litigieuses, alors, selon le moyen
1o/ que seules les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance sont incluses dans l'assiette de la contribution pour la CSG et la CRDS et soumises à la taxe sur les contributions ; que les bénéficiaires du régime de prévoyance, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'État, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel ils exercent leurs fonctions, si bien qu'en assimilant la somme versée par l'association au titre de sa contribution au régime de prévoyance, pour les agents bénéficiaires, à des cotisations patronales, entrant dans l'assiette de la CSG et de la CRDS et soumise à la taxe sur les contributions la cour d'appel a violé les articles L. 136-2, L. 137-1 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale, l'article 14 de l'ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996, les articles L. 442-5 et L. 914-1 du code de l'éducation, l'article L. 813-8 du Code rural, l'accord du 16 septembre 2005, l'article 6 du décret no 60-745 du 28 juillet 1960, ensemble l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 ;
2o/ qu'en déboutant l'association de sa demande en retenant que les cotisations versées au titre de l'accord du 16 septembre 2005 entraient dans le champ d'application de l'article 32 de la loi du 5 janvier 2006 et qu'étant assimilées à des cotisations patronales, elles étaient soumises à la CSG et à la CRDS et à la taxe sur les contributions qui doivent être réglées par l'établissement scolaire quand l'article 32 de la loi d'orientation agricole ne dispose aucunement que la CSG, la CRDS et la taxe sur les contributions doivent être acquittées par les établissements scolaires, les juges du fond ont ajouté à la loi et partant violé les articles L. 136-2, L. 137-1 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale, l'article 14 de l'ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996, les articles L. 442-5 et L. 914-1 du code de l'éducation, l'article L. 813-8 du Code rural, l'accord du 16 septembre 2005, l'article 6 du décret no 60-745 du 28 juillet 1960, ensemble l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 ;
3o/ que les bénéficiaires du régime de prévoyance, en leur qualité d'agent public, ont pour seul employeur l'État qui doit dès lors supporter les charges sociales et fiscales lui incombant en cette qualité et afférentes à la contribution litigieuse assimilée à des cotisations patronales, si bien que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et partant a violé les articles L. 136-2, L. 137-1 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale, l'article 14 de l'ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996, les articles L. 442-5 et L. 914-1 du code de l'éducation, l'article L. 813-8 du code rural, l'accord du 16 septembre 2005, l'article 6 du décret no 60-745 du 28 juillet 1960,ensemble l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 ;
Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des dispositions de l'article 1er de la loi no 2005-5 du 5 janvier 2005 et de l'article 32 de la loi no 2006-11 du 5 janvier 2006, que les établissements d'enseignement privé sous contrat qui doivent, en application de l'accord collectif étendu du 16 septembre 2005, contribuer au financement du régime dérogatoire de prévoyance complémentaire qu'il institue au profit des personnels enseignants et de documentation, sont, en raison de leur qualité de contributeur, tenus au paiement de la CSG, de la CRDS et de la taxe de prévoyance mentionnée à l'article L. 137-1 du code de la sécurité sociale, nonobstant l'absence l'absence de contrat de travail entre les bénéficiaires de ces garanties et ces établissements ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association OGEC - Centre scolaire privé Jeanne d'Arc aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association OGEC - Centre scolaire privé Jeanne d'Arc, la condamne à payer à l'URSSAF du Jura la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour l'association OGEC - Centre scolaire privé Jeanne d'Arc.
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté l'OGEC Centre scolaire privé Jeanne d'Arc de sa demande d'annulation du redressement de cotisations opéré par l'URSSAF du Jura concernant la réintégration dans l'assiette de la CSG-CRDS et la taxe prévoyance de 8 % des contributions au financement du régime complémentaire de prévoyance institué au profit de son personnel enseignant et de l'avoir en conséquence condamné au paiement de la somme de 8.771 euros, sous réserve des majorations de retard complémentaires qui seraient calculées qu'à complet paiement des cotisations,
AUX MOTIFS QUE "En vertu des dispositions de l'article 1er de la loi no 2005-5 du 5 janvier 2005, les personnels enseignants et de documentation rémunérés par l'Etat exerçant dans les établissements d'enseignement privé sous contrat ont le statut d'agents publics et ne sont pas liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel ils exercent.
Il en résulte que l'Etat a seul la qualité d'employeur et qu'il est donc seul débiteur en principe des cotisations afférentes à la rémunération versée par lui à ses agents.
Pour autant, cet argument ne peut être valablement opposé à l'Urssaf du Jura, s'agissant des contributions versées par lesdits établissements au régime complémentaire de prévoyance résultant de l'accord collectif conclu le 16 septembre 2005 par les organisations syndicales représentatives de ceux-ci et de leurs personnels, tant au profit des enseignants relevant du régime spécial des fonctionnaires (agents publics) qu'au profit des enseignants relevant du régime général de la sécurité sociale.
La loi d'orientation agricole no 2006-11 du 5 janvier 2006 énonce en effet clairement
- la possibilité pour les personnels susvisés de bénéficier, à titre dérogatoire, nonobstant l'absence de contrat de travail avec l'établissement au sein duquel ils exercent les fonctions qui leur ont été confiées par l'Etat, d'un régime de prévoyance complémentaire, selon des modalités déterminées par voie de conventions étendues par arrêté conjoint des ministres concernés
- la soumission des cotisations acquittées à ce régime de prévoyance complémentaire aux régimes fiscal et social prévus par l'article 83 du code général des impôts et par l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale.
Il résulte sans équivoque de ces dispositions que le législateur a entendu soumettre au régime de droit commun des contributions patronales aux régimes complémentaires de prévoyance prévu par les dispositions susvisées, nonobstant l'absence de contrat de travail liant les personnels concernés et les établissements signataires de la convention, les cotisations versées pour le financement du régime concerné.
Le moyen tiré de l'absence de qualité d'employeur de l'appelante ne peut donc être retenu, qu'il s'agisse de l'assujettissement à la CSG et à la CRDS, découlant des articles L 136-2-4o et 14 de l'ordonnance du 24 janvier 2006 ou à la taxe spécifique de 8 % prévue par l'article L 137-1 du même code.
L'existence d'un texte légal dérogatoire aux dispositions de l'article L 911-1 du code de la sécurité sociale concernant les modalités de mise en oeuvre d'un régime complémentaire de prévoyance au profit des enseignants ayant le statut d'agents publics rend tout aussi inopérant le moyen tiré de la non-conformité de l'accord du 16 septembre 2005 aux exigences des articles L 911-1 et suivants du code de la sécurité sociale.
Dès lors qu'il est établi et non sérieusement contestable que ledit accord a institué au profit des personnels en cause des garanties de prévoyance complémentaires à celles versées par l'Etat, en matière de décès, d'incapacité temporaire et/ou permanente, d'invalidité, et qu'il a fait l'objet d'un arrêté d'extension, les cotisations versées par l'appelante au titre dudit accord entrent dans le champ d'application de l'article 32 de la loi du 5 janvier 2006 évoquée plus haut. ",
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
"l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 05 janvier 2005 dispose que les maîtres ou documentalistes habilités par agrément ou par contrat à exercer leurs fonctions dans les établissements privés d'enseignement général ou agricole "bénéficient à titre dérogatoire, nonobstant l'absence de contrat de travail avec l'établissement au sein duquel ils exercent les fonctions qui leur ont été confiées par l'Etat, d'un régime de prévoyance complémentaire, sont déterminées par voie de convention, les cotisations acquittées au régime de prévoyance complémentaire mentionné au présent article sont soumis aux régimes fiscal et social prévus par l'article 83 du code général des impôts et par l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale" ;
ce texte est explicite et a entendu entériner le principe selon lequel les personnels en cause par l'accord conclu le 16 septembre 2005 pouvaient bénéficier d'un régime de prévoyance complémentaire nonobstant le défaut de contrat de travail les liant à l'établissement où ils exercent ;
en conséquence les contributions versées par les établissements privés au titre de prévoyance complémentaire instituée par la convention du 16 septembre 2005, étant assimilées aux contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance, il en résulte qu'elles sont soumises à la CSG et à la CRDS en application de l'article L 136-2 II-4o du code de la sécurité sociale ainsi qu'à la taxe de 8 % et ce, en vertu de l'article L 137-1 du même code ;
Il y a lieu de confirmer la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF du Jura et de débouter le centre scolaire privé Jeanne d'Arc de ses demandes",
ALORS D'UNE PART QUE seules les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance sont incluses dans l'assiette de la contribution pour la CSG et la CRDS et soumises à la taxe sur les contributions ; que les bénéficiaires du régime de prévoyance, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'État, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel ils exercent leurs fonctions, si bien qu'en assimilant la somme versée par l'OGEC Centre scolaire Jeanne d'Arc au titre de sa contribution au régime de prévoyance, pour les agents bénéficiaires, à des cotisations patronales, entrant dans l'assiette de la CSG et de la CRDS et soumise à la taxe sur les contributions la Cour d'appel a violé les articles L 136-2, L 137-1 et L 242-1 du Code de la sécurité sociale, l'article 14 de l'ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996, les articles L 442-5 et L 914-1 du Code de l'éducation, l'article L 813-8 du Code rural, l'accord du 16 septembre 2005, l'article 6 du décret no 60-745 du 28 juillet 1960, ensemble l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006,
ALORS D'AUTRE PART QU'en déboutant l'OGEC ... ... Jeanne d'Arc de sa demande en retenant que les cotisations versées au titre de l'accord du 16 septembre 2005 entraient dans le champ d'application de l'article 32 de la loi du 5 janvier 2006 et qu'étant assimilées à des cotisations patronales, elles étaient soumises à la CSG et à la CRDS et à la taxe sur les contributions qui doivent être réglées par l'Établissement scolaire quand l'article 32 de la loi d'orientation agricole ne dispose aucunement que la CSG, la CRDS et la taxe sur les contributions doivent être acquittées par les Établissements scolaires, les juges du fond ont ajouté à la loi et partant violé les articles L 136-2, L 137-1 et L 242-1 du Code de la sécurité sociale, l'article 14 de l'ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996, les articles L 442-5 et L 914-1 du Code de l'éducation, l'article L 813-8 du Code rural, l'accord du 16 septembre 2005, l'article 6 du décret no 60-745 du 28 juillet 1960, ensemble l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006,
ET ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE les bénéficiaires du régime de prévoyance, en leur qualité d'agent public, ont pour seul employeur l'État qui doit dès lors supporter les charges sociales et fiscales lui incombant en cette qualité et afférentes à la contribution litigieuse assimilée à des cotisations patronales, si bien que la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et partant a violé les articles L 136-2, L 137-1 et L 242-1 du Code de la sécurité sociale, l'article 14 de l'ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996, les articles L 442-5 et L 914-1 du Code de l'éducation, l'article L 813-8 du Code rural, l'accord du 16 septembre 2005, l'article 6 du décret no 60-745 du 28 juillet 1960, ensemble l'article 32 de la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006.