No N 11-81.314 F P+B No 5192
GT 20 SEPTEMBRE 2011
CASSATION
M. LOUVEL président,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt septembre deux mille onze, a rendu l'arrêt suivant
Sur le rapport de Mme le conseiller ..., les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, CORLAY et MARLANGE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général ... ;
Statuant sur le pourvoi formé par
- M. Lazare Z,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 21e chambre, en date du 8 février 2011, qui, pour violences aggravées, l'a condamné à cent jours-amende de 10 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;
Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 460, 513 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur la demande de renvoi présentée par le conseil de M. Z sans joindre l'incident au fond, a rejeté cette demande après avoir entendu en dernier les observations du ministère public ;
"alors que le prévenu ou son conseil doit avoir la parole en dernier ; que cette règle ne se limite pas aux débats au fond mais s'applique également à tout incident, dès lors qu'il n'est pas joint au fond, et notamment aux demandes de renvoi ; que la cour d'appel, qui n'a pas joint l'incident au fond et qui a rejeté la demande de renvoi immédiatement après avoir entendu le ministère public, sans donner sur ce point la parole en dernier au prévenu ou à son conseil, a violé les textes susvisés";
Attendu que le ministère public s'étant borné à s'en rapporter à justice sur la demande de renvoi formée pour M. Z, celui-ci ne saurait se faire un grief de ce que le président n'a pas donné la parole à la défense pour qu'elle réplique ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation du mémoire personnel, pris de la violation des articles329, 330, 513, 591, 593 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Et sur le deuxième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 6 § 3 d) de la Convention européenne des droits de l'homme, 591 et 593 du code de procédure pénale
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de M. Z tendant à obtenir un renvoi pour lui permettre de faire citer à nouveau et interroger un témoin dont une première citation avait donné lieu à difficultés ;
"alors que tout accusé a le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; qu'en rejetant, sans la moindre justification, la demande de M. Z tendant à obtenir un renvoi en raison de difficultés rencontrées pour faire citer et interroger un témoin, et en privant ainsi le prévenu du droit de faire interroger ce témoin, la cour d'appel a violé les textes susvisés";
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 § 3, d, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué qu'à l'ouverture des débats, l'avocat de M. Z a demandé le renvoi de l'affaire en exposant qu'il avait rencontré des difficultés pour faire citer un témoin ; que l'avocat de la partie civile s'est associé à sa demande ;
Attendu que, passant outre, les juges ont retenu l'affaire ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans s'en expliquer, alors que, selon le second des textes susvisés, tout "accusé" a le droit d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la cassation aura effet à l'égard de M. Kamal ... qui ne s'est pas pourvu ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 8 février 2011, en toutes ses dispositions, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ETEND la cassation à l'égard de M. Kamal ... ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale M. Louvel président, Mme Radenne conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;