SOC. PRUD'HOMMES CH.B
COUR DE CASSATION
Audience publique du 28 septembre 2011
Cassation partielle
M. BÉRAUD, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président
Arrêt no 1941 F-D
Pourvoi no K 10-10.445
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Bernard Z, domicilié Arles-sur-Rhône, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Transco et Cie,
contre l'arrêt rendu le 29 octobre 2009 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e chambre C), dans le litige l'opposant
1o/ à M. Moshen X, domicilié Marseille,
2o/ à l'AGS-CGEA de Marseille UNEDIC-AGS délégation régionale Sud-Est, dont le siège est Marseille cedex 02,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 juillet 2011, où étaient présents M. Béraud, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Lambremon, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Lambremon, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat de M. Z, ès qualités, de la SCP Didier et Pinet, avocat de M. X, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen soulevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile
Vu la loi des 16-24 août 1790 ensemble le principe de la séparation des pouvoirs et les articles L. 2421-1 et L. 2421-3 du code du travail ;
Attendu que M. X engagé le 1er juin 1973 en qualité de manutentionnaire par la société Fosséenne Transco et Cie et qui occupait en dernier lieu le poste de chauffeur routier, a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail le 7 août 2007 à la suite d'un accident du travail ; qu'il a saisi le 4 octobre 2007 la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 18 mars 2008, après autorisation de l'inspecteur du travail s'agissant d'un salarié protégé ; que par jugement du 4 juillet 2008, le conseil de prud'hommes a prononcé la résiliation de son contrat de travail, motifs pris de manquements de l'employeur relativement à ses obligations à l'égard de salariés victimes d'accident du travail, et lui a alloué diverses sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour prononcer la résiliation du contrat de travail et fixer les créances indemnitaires du salarié au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la violation du statut protecteur, la cour d'appel retient que la demande de résiliation doit être examinée avant le licenciement postérieur et qu'elle produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur dont bénéficiait le salarié ;
Mais attendu que lorsqu'un licenciement a été notifié à la suite d'une autorisation administrative de licenciement accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire formée par le salarié même si sa saisine était antérieure à la rupture ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'elle avait constaté que le licenciement du salarié protégé, autorisé par l'inspecteur du travail, avait été notifié avant que la juridiction prud'homale statue sur la demande de résiliation, fondée sur des manquements nécessairement pris en compte par l'inspecteur du travail, la cour d'appel a violé les textes et principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de travail de M. X et a fixé les créances du salarié au passif de la liquidation judiciaire de la société Transco et Cie au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la violation du statut protecteur, l'arrêt rendu le 29 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. X aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. Z, ès qualités.
Il est reproché à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir constaté la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, d'avoir dit que cette rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur et d'avoir fixé les créances d'un salarié au passif de la liquidation judiciaire, spécialement en ce qui concerne les dommages et intérêts pour licenciement illicite et des dommages et intérêts pour violation du statut protecteur ;
AUX MOTIFS QUE les premiers juges ont retenu à juste titre que la demande relative à la rupture du contrat de travail du salarié, laquelle doit être examinée avant le licenciement postérieur, était justifiée, aucun reclassement ni licenciement n'étant intervenu dans le mois ayant suivi le deuxième avis médical du 9 août 2007 non plus que le paiement des salaires " dès l'expiration de ce délai " suivant le texte même de l'article L 122-24-4 alinéa 3 du Code du travail devenu L 1226-4 ; que cette résiliation produit les effets non d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur compte tenu de la qualité de salarié protégé de Monsieur X ;
ALORS QUE le salarié ayant pris l'initiative de voir prononcer la résiliation de son contrat de travail pour non-respect par l'employeur des obligations qui découlent pour lui des dispositions de l'article L 1226-4 du Code du travail, le juge du contrat de travail qui devait d'abord se prononcer sur la demande de résiliation et qui y faisait droit sur le fondement du texte précité, ne pouvait que déclarer que cette résiliation aux torts de l'employeur s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse comme en avait jugé à bon droit le Conseil de prud'hommes, et non comme un licenciement nul pour violation du statut protecteur compte tenu de la qualité de salarié protégé de Monsieur X ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour viole le texte précité, ensemble l'article 12 du Code de procédure civile.