Ordonnance n° 59-244
du 4 février 1959
relative au statut général des fonctionnaires
Le Président de la République,
Vu la Constitution, et notamment ses articles 13, 34 et 92;
Le conseil d'Etat entendu;
Le conseil des ministres entendu,
Ordonne:
TITRE Ier : DISPOSITIONS GENERALES
Article 1er
Le présent statut s'applique aux personnes qui, nommées dans un emploi permanent ont été titularisées dans un grade de la hiérarchie des administrations centrales de l'Etat, des services extérieurs en dépendant ou des établissements publics de l'Etat.
Il ne s'applique ni aux magistrats de l'ordre judiciaire, ni aux personnels militaires, ni aux personnels des administrations, services et établissements publics de l'Etat qui présentent un caractère industriel ou commercial.
Article 2
Des décrets en conseil d'Etat portant statuts particuliers précisent pour le personnel de chaque administration ou service, ainsi que, le cas échéant, pour le personnel appelé à être affecté dans plusieurs administrations ou services, les modalités d'application des dispositions de la présente ordonnance.
Ces décrets sont délibérés en conseil des ministres lorsqu'ils concernent les corps comportant des emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres ainsi que les corps mentionnés à l'alinéa 1er de l'article 2 de l'ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 relative aux nominations aux emplois civils et militaires de l'Etat.
En ce qui concerne les membres du conseil d'Etat, de la cour des comptes, du corps diplomatique et consulaire, de l'administration préfectorale, du corps enseignant et des corps reconnus comme ayant un caractère technique, les statuts particuliers pris en la forme indiquée ci-dessus, peuvent déroger, après avis du conseil supérieur de la fonction publique prévu à l'article 15 ci-après, à certaines dispositions de la présente ordonnance incompatibles avec les nécessités propres à ces corps ou services.
Article 3
L'accession aux différents emplois permanents mentionnés à l'article 1er ne peut avoir lieu que dans les conditions prévues au présent statut.
Toutefois, un règlement d'administration publique détermine pour chaque administration et service, les emplois supérieurs pour lesquels les nominations sont laissées à la décision du Gouvernement.
L'accession de non-fonctionnaires à ces emplois n'entraîne pas leur titularisation dans un corps de l'administration ou du service.
Les nominations aux emplois visés à l'alinéa 2 du présent article sont essentiellement révocables, qu'elles concernent des fonctionnaires ou des non-fonctionnaires.
Article 4
Toute nomination ou toute promotion de grade n'ayant pas pour objet exclusif de pourvoir régulièrement à une vacance est interdite.
Article 5
Le fonctionnaire est vis-à-vis de l'administration dans une situation statutaire et réglementaire.
Les magistrats de la cour des comptes sont et demeurent inamovibles.
Article 6
Le fonctionnaire peut être appelé à servir hors du territoire européen de la France, notamment dans un service français ou pour l'accomplissement d'une tâche de coopération technique.
Article 7
Pour l'application de la présente ordonnance, aucune distinction n'est faite entre les deux sexes, sous réserve des mesures exceptionnelles prévues dans les statuts particuliers et commandées par la nature des fonctions.
Article 8
Il est interdit à tout fonctionnaire d'exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Les conditions dans lesquelles il peut être exceptionnellement dérogé à cette interdiction sont fixées par règlement d'administration publique.
Il est interdit à tout fonctionnaire quelle que soit sa position d'avoir, par lui-même ou par personne interposée, sous quelque dénomination que ce soit, dans une entreprise soumise au contrôle de son administration ou service, ou en relation avec son administration ou service, des intérêts de nature à compromettre son indépendance.
Lorsque le conjoint d'un fonctionnaire exerce à titre professionnel une activité privée lucrative, déclaration doit être faite à l'administration ou service dont relève le fonctionnaire.
L'autorité compétente prend, s'il y a lieu, les mesures propres à sauvegarder les intérêts du service, après avis de la commission administrative paritaire prévue à l'article 15 ci-dessous.
Article 9
Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées.
Le fonctionnaire chargé d'assurer la marche d'un service est responsable à l'égard de ses chefs de l'autorité qui lui a été conférée pour cet objet et de l'exécution des ordres qu'il a donnés.
Il n'est dégagé d'aucune des responsabilités qui lui incombent par la responsabilité propre de ses subordonnés.
Article 10
Indépendamment des règles instituées dans le code pénal en matière de secret professionnel, tout fonctionnaire est lié par l'obligation de discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les faits et informations dont il a connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions.
Tout détournement, toute communication contraire aux règlements de pièces ou documents de service à des tiers sont formellement interdits.
En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, le fonctionnaire ne peut être délié de cette obligation de discrétion ou relevé de l'interdiction édictée par l'alinéa précédent qu'avec l'autorisation du ministre dont il relève.
Article 11
Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale.
Lorsqu'un fonctionnaire a été poursuivi par un tiers pour faute de service et que le conflit d'attribution n'a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions n'est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui.
Article 12
Les fonctionnaires ont droit, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, à une protection contre les menaces, outrages, injures ou diffamations dont ils peuvent être l'objet.
L'Etat ou la collectivité publique intéressé est tenu de protéger les fonctionnaires contre les menaces, attaques, de quelque nature que ce soit, dont ils peuvent être l'objet à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté.
L'Etat ou la collectivité publique, tenu dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, est subrogé aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées à son agent.
Il dispose, en outre aux mêmes fins, d'une action directe qu'il peut exercer au besoin par voie de constitution civile devant la juridiction pénale.
Article 13
Le dossier individuel du fonctionnaire doit contenir toutes les pièces intéressant sa situation administrative. Celles-ci doivent être enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité. Ne pourra figurer au dossier aucune mention faisant état des opinions politiques, philosophiques ou religieuses de l'intéressé.
Les décisions de sanctions disciplinaires sont versées au dossier individuel du fonctionnaire. Il en est de même des avis ou recommandations émis par les conseils de discipline ou le Conseil supérieur de la fonction publique et de toutes pièces et documents annexes.
Article 14
Le droit syndical est reconnu aux fonctionnaires. Leurs syndicats professionnels, régis par le livre III du code du travail, peuvent ester en justice devant toute juridiction. Ils peuvent notamment, devant les juridictions de l'ordre administratif, se pourvoir contre les actes réglementaires concernant le statut du personnel et contre les décisions individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires.
Toute organisation syndicale de fonctionnaires est tenue d'effectuer, dans les deux mois de sa création, le dépôt de ses statuts et de la liste de ses administrateurs auprès de l'autorité hiérarchique dont dépendent les fonctionnaires appelés à en faire partie.
Article 15
Le Premier ministre veille à l'application du présent statut.
Il préside le Conseil supérieur de la fonction publique qui comprend en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires.
Il existe dans chaque administration ou service:
Une ou plusieurs commissions administratives paritaires dont les membres représentant le personnel sont élus.
Un ou plusieurs comités techniques paritaires.
Des règlements d'administration publique fixent la compétence, la composition, les modalités de désignation des membres, l'organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la fonction publique et des commissions et comités visés à l'alinéa précédent.
TITRE II : RECRUTEMENT
Article 16
Nul ne peut être nommé à un emploi public:
1° S'il ne possède la nationalité française, sous réserve des incapacités prévues par le code de la nationalité française;
2° S'il ne jouit de ses droits civiques et s'il n'est de bonne moralité;
3° S'il ne se trouve en position régulière au regard des lois sur le recrutement de l'armée;
4° S'il ne remplit les conditions d'aptitude physique exigées pour l'exercice de la fonction et s'il n'est reconnu, soit indemne de toute affection tuberculeuse, cancéreuse ou nerveuse, soit définitivement guéri. Les conditions d'application de cette disposition sont fixées par règlement d'administration publique.
Article 17
Les fonctionnaires appartiennent à des corps qui comprennent un ou plusieurs grades et sont classés, selon leur niveau de recrutement, en catégories.
Les corps groupent les fonctionnaires soumis au même statut particulier et ayant vocation aux mêmes grades. Ils sont répartis entre quatre catégories désignées dans l'ordre hiérarchique décroissant par les lettres A, B, C, D et définies par règlement d'administration publique. Les statuts particuliers fixent le classement de chaque corps dans l'une ou l'autre de ces catégories.
Article 18
Sous réserve des mesures prévues par la législation sur les emplois réservés en ce qui concerne les catégories B, C et D, les fonctionnaires sont recrutés par voie de concours.
Les concours donnent lieu à l'établissement de listes classant par ordre de mérite les candidats déclarés aptes par un jury. Les nominations sont faites selon cet ordre.
Article 19
Les concours pour le recrutement des fonctionnaires des catégories A, B et C sont organisés suivant l'une des modalités ci-après ou suivant l'une et l'autre de ces modalités:
1° Des concours distincts sont ouverts, d'une part aux candidats justifiant de certains diplômes ou de l'accomplissement de certaines études, d'autre part, aux candidats fonctionnaires ou aux agents en fonctions ayant accompli une certaine durée de services publics;
2° Des concours sont réservés aux fonctionnaires ayant accompli un temps de service déterminé et, le cas échéant, reçu une certaine formation.
Les règlements propres à chaque administration ou service doivent assurer, en tout cas, à tous les fonctionnaires ayant les aptitudes nécessaires, des facilités de formation et d'accès aux catégories hiérarchiquement supérieures.
Lesdits règlements peuvent, à titre exceptionnel et en vue d'assurer aux fonctionnaires de certains corps le développement normal de leur carrière, autoriser cet accès soit par voie d'examen professionnel, soit par voie d'inscription à un tableau d'avancement.
Article 20
Les statuts particuliers peuvent déroger aux conditions normales de recrutement prévues au présent titre soit pour la constitution initiale d'un nouveau corps soit pour le recrutement des fonctionnaires des catégories C et D.
Article 21
Les décisions portant nominations, promotions de grade et mises à la retraite doivent faire l'objet d'une publication suivant des modalités fixées par règlement d'administration publique.
TITRE III : REMUNERATION ET AVANTAGES SOCIAUX
Article 22
Tout fonctionnaire a droit, après service fait, à une rémunération comportant le traitement, les suppléments pour charges de famille et l'indemnité de résidence. Le montant du traitement est fixé en fonction soit du grade de l'agent et de l'échelon auquel il est parvenu, soit de l'emploi auquel il a été nommé.
Peuvent s'ajouter au traitement des indemnités représentatives de frais, des indemnités rétribuant les travaux supplémentaires effectifs, des indemnités justifiées par des sujétions ou des risques inhérents à l'emploi ou présentant le caractère de primes d'expatriation, des indemnités tenant compte de la manière de servir et éventuellement des indemnités différentielles.
Article 23
Les fonctionnaires sont affiliés à un régime spécial de retraites et bénéficient d'un régime spécial de sécurité sociale.
TITRE IV : NOTATION ET AVANCEMENT
Chapitre Ier : Notation
Article 24
Il est attribué, chaque année, à tout fonctionnaire en activité ou en service détaché, une note chiffrée, suivie d'une appréciation générale, exprimant sa valeur professionnelle.
Le pouvoir de notation appartient au chef de service.
Article 25
Un règlement d'administration publique détermine:
- les divers éléments à prendre en considération pour l'appréciation générale;
- les modalités de communication de la note chiffrée et éventuellement de l'appréciation générale;
- la procédure de révision de la notation et éventuellement de sa péréquation générale, sur le plan national, dans chaque administration ou service.
Chapitre II : Avancement
Article 26
L'avancement des fonctionnaires comprend l'avancement d'échelon et l'avancement de grade, qui ont lieu de façon continue d'échelon en échelon et de grade à grade.
Article 27
L'avancement d'échelon se traduit par une augmentation de traitement. Il est fonction à la fois de l'ancienneté et de la notation du fonctionnaire.
Article 28
Le grade est le titre qui confère à ses bénéficiaires vocation à occuper l'un des emplois qui leur sont réservés.
L'avancement de grade a lieu exclusivement au choix.
Sauf pour les postes visés à l'alinéa 2 de l'article 3, l'avancement de grade ne peut avoir lieu qu'au profit de fonctionnaires inscrits, à raison de leur mérite, à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire.
Sous réserve des nécessités du service, les promotions doivent avoir lieu dans l'ordre du tableau.
Tout fonctionnaire qui bénéficie d'un avancement de grade est tenu d'accepter l'emploi qui lui est assigné dans son nouveau grade. Sous réserve des dispositions de l'article 48, son refus peut entraîner la radiation du tableau d'avancement.
Article 29
Un règlement d'administration publique fixe les modalités d'établissement, de validité et de publicité du tableau d'avancement.
La hiérarchie des grades dans chaque corps, le nombre d'échelons dans chaque grade, les règles d'avancement d'échelon et de promotion au grade, les règles d'avancement d'échelon et de promotion au grade supérieur sont fixés par les statuts particuliers.
TITRE V : DISCIPLINE
Article 30
Les sanctions disciplinaires sont:
a) L'avertissement;
b) Le blâme;
c) La radiation du tableau d'avancement;
d) La réduction d'ancienneté d'échelon;
e) L'abaissement d'échelon;
f) Le déplacement d'office;
g) La rétrogradation;
h) La mise à la retraite d'office;
i) La révocation sans suspension des droits à pension;
j) La révocation avec suspension des droits à pension.
L'exclusion temporaire de fonctions peut être prononcée comme sanction principale ou complémentaire pour une durée qui ne peut excéder six mois. Elle est privative de toute rémunération.
Article 31
Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination qui l'exerce après accomplissement des formalités prescrites par l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et consultation de la commission administrative paritaire siégeant en formation disciplinaire.
Toutefois, l'avertissement et le blâme sont prononcés, sans consultation de la commission administrative paritaire, par l'autorité compétente, qui peut déléguer son pouvoir disciplinaire.
La décision, qui doit être motivée, peut prescrire que la sanction et ses motifs seront rendus publics.
Article 32
En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'un infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être immédiatement suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire.
La décision prononçant la suspension d'un fonctionnaire doit préciser si l'intéressé conserve, pendant le temps où il est suspendu, le bénéfice de son traitement ou déterminer la quotité de la retenue qu'il subit, que ne peut être supérieure à la moitié du traitement. En tout état de cause, il continue à percevoir la totalité des suppléments pour charges de famille.
Il doit être aussitôt rendu compte de cette décision essentiellement provisoire au ministre intéressé qui saisit, sans délai, de l'affaire le conseil de discipline. Celui-ci émet un avis motivé sur la sanction applicable et le transmet à l'autorité compétente.
La situation du fonctionnaire suspendu en application de l'alinéa 1er du présent article doit être définitivement réglée par le ministre intéressé dans un délai de quatre mois à compter du jour où la décision de suspension a pris effet. Lorsque aucune décision n'est intervenue ou bout de quatre mois l'intéressé reçoit à nouveau l'intégralité de son traitement, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales.
Lorsque l'intéressé n'a subi aucune sanction ou n'a été l'objet que d'un avertissement, d'un blâme ou d'une radiation du tableau d'avancement ou si, à l'expiration du délai prévu à l'alinéa précédent, il n'a pu être statué sur son cas, il a droit au remboursement des retenues opérées sur son traitement.
Toutefois, lorsque le fonctionnaire est l'objet de poursuites pénales, sa situation n'est définitivement réglée qu'après que la décision rendue par la juridiction saisie est devenue définitive.
Article 33
La procédure devant les conseils de discipline et le conseil supérieur de la fonction publique est contradictoire. Un règlement d'administration publique organise les modalités de cette procédure.
TITRE VI : POSITIONS
Article 34
Tout fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes:
1° En activité;
2° En service détaché;
3° Hors cadres;
4° En disponibilité;
5° Sous les drapeaux.
Chapitre Ier : Activité. - Congés
Article 35
L'activité est la position du fonctionnaire qui régulièrement titulaire d'un grade, exerce effectivement les fonctions de l'un des emplois correspondants.
Article 36
Le fonctionnaire en activité a droit:
1° A un congé annuel avec traitement d'une durée de trente jours consécutifs pour une année de service accompli;
2° A des congés de maladie d'une durée maximum de six mois pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions; le fonctionnaire en congé de maladie conserve l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois; ce traitement est réduit de moitié pendant les trois mois suivants; le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité des suppléments pour charges de famille.
Toutefois si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L 39 du code des pensions civiles et militaires de retraites ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident;
3° A des congés de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affectation cancéreuse ou poliomyélite; le fonctionnaire mis en congé de longue durée conserve, pendant les trois premières années, années, l'intégralité de son traitement; pendant les deux années qui suivent, il subit une retenue de moitié; toutefois si la maladie donnant droit à un congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions les délais fixés ci-dessus sont respectivement portés à cinq et trois années;
4° Au congé pour couches et allaitement, avec traitement d'une durée égale à celle prévue par la législation sur la sécurité sociale;
5° Au congé destiné à favoriser l'éducation ouvrière, d'une durée maximum de douze jours ouvrables; pendant la durée de ce congé qui est accordé sur demande les émoluments du fonctionnaire sont réduits au montant des retenues légales pour retraite et sécurité sociale afférentes à son grade, l'intéressé conservant, en outre, ses droits à la totalité des suppléments pour charges de famille.
Article 37
Un règlement d'administration publique fixe les modalités des différents régimes de congé et détermine leurs effets sur la situation administrative des fonctionnaires. Il fixe également les modalités d'organisation et de fonctionnement des comités médicaux compétents en matière de congés de maladie et de longue durée.
Chapitre II : Détachement
Article 38
Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine, mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite.
Il est prononcé, sur la demande du fonctionnaire ou d'office; dans ce dernier cas, la commission administrative paritaire est consultée.
Le détachement est essentiellement révocable.
Le fonctionnaire détaché est soumis à l'ensemble des règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement.
A l'expiration de son détachement, le fonctionnaire est obligatoirement réintégré dans son corps d'origine, dans les conditions fixées par règlement d'administration publique.
Article 39
Sous réserve des dérogations fixées par un règlement d'administration publique, la collectivité ou l'organisme auprès desquels un fonctionnaire est détaché est redevable, envers le Trésor, d'une contribution pour la constitution des droits à pension de l'intéressé, égale à 12 p. 100 du traitement de l'agent dans son corps d'origine.
Article 40
Le fonctionnaire détaché ne peut, sauf dans le cas où le détachement a été prononcé auprès d'organismes internationaux ou pour exercer une fonction publique élective, être affilié au régime de retraite dont relève la fonction de détachement, ni acquérir à ce titre des droits quelconques à pensions ou à allocations sous peine de la suspension de la pension de l'Etat.
Article 41
Un règlement d'administration publique détermine les cas, les conditions, la durée du détachement, les modalités d'intégration dans le corps de détachement et de réintégration dans le corps d'origine. Il fixe les cas où la réintégration peut être prononcée en surnombre.
Chapitre III : Position hors cadres
Article 42
La position hors cadres est la position dans laquelle un fonctionnaire détaché, soit auprès d'une administration ou d'une entreprise publique dans un emploi ne conduisant pas à pension du régime général des retraites, soit auprès d'organismes internationaux, peut être placé sur sa demande, pour continuer à servir dans la même administration, entreprise ou organisme.
Dans cette position, le fonctionnaire cesse de bénéficier de ses droits à l'avancement et à la retraite.
Le fonctionnaire en position hors cadres est soumis aux régimes statutaires et de retraites régissant la fonction qu'il exerce dans cette position.
Un règlement d'administration publique détermine les conditions de la mise hors cadres, sa durée ainsi que les modalités de réintégration dans le corps d'origine.
Article 43
Lorsque le fonctionnaire en position hors cadres est réintégré dans son corps d'origine, l'organisme dans lequel il a été employé doit, s'il y a lieu, verser la contribution de 12 p. 100 exigible en cas de détachement.
Chapitre IV : Disponibilité
Article 44
La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier dans cette position de ses droits à l'avancement et à la retraite.
La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus à l'article 36 (2° et 3°) ci-dessus.
Le personnel féminin bénéficie, en outre, d'une disponibilité spéciale.
Article 45
Un règlement d'administration publique détermine les cas et conditions de la mise en disponibilité, sa durée ainsi que les modalités de réintégration des fonctionnaires intéressés à l'expiration de la période de disponibilité.
Le fonctionnaire mis en disponibilité qui, lors de sa réintégration, refuse le poste qui lui est assigné, peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire.
Chapitre V : Position sous les drapeaux
Article 46
Le fonctionnaire incorporé dans une formation militaire pour son temps de service légal est placé dans une position spéciale dite «sous les drapeaux».
Il perd alors son traitement d'activité et ne perçoit que sa solde militaire.
Article 47
Le fonctionnaire qui accomplit une période d'instruction est mis en congé avec traitement pour la durée de cette période.
La situation des fonctionnaires rappelés ou maintenus sous les drapeaux est fixée par des lois spéciales.
Chapitre VI : Mutations
Article 48
L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires.
Dans les administrations ou services où sont dressés des tableaux périodiques de mutations, l'avis de la commission est donné au moment de l'établissement de ces tableaux.
Toutefois, seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation de l'intéressé sont soumises à l'avis de la commission.
Les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille dans la mesure compatible avec l'intérêt du service. Dans le cas où il s'agit de remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service et à laquelle il n'est pas possible de pourvoir par un autre moyen même provisoirement, la mutation peut être prononcée sous réserve d'examen ultérieur par la commission.
Article 49
En l'absence de tableaux périodiques de mutations, les ministres sont tenus de faire connaître au personnel, dès qu'elles ont lieu, les vacances de tous emplois, sans préjudice des obligations spéciales imposées en matière de publicité par la législation sur les emplois réservés.
TITRE VII : CESSATION DEFINITIVE DE FONCTIONS
Article 50
Sans préjudice des dispositions de l'article 53 ci-dessous, la cessation définitive des fonctions entraînant perte de la qualité de fonctionnaire résulte:
1° De la démission régulièrement acceptée et, de ce fait, irrévocable;
2° Du licenciement;
3° de la révocation;
4° De l'admission à la retraite.
La perte de la nationalité française ou des droits civiques, la non-réintégration à l'expiration de la période de disponibilité produisent les mêmes effets.
Article 51
Dans les cas prévus à l'article 45, alinéa 2, ci-dessus et à l'article 52 ci-dessous, le fonctionnaire est licencié par décision du ministre intéressé.
En dehors de ces cas, les fonctionnaires ne peuvent être licenciés qu'en vertu de dispositions législatives de dégagement des cadres prévoyant notamment les conditions de préavis et d'indemnisation des intéressés.
Article 52
Le fonctionnaire qui fait preuve d'insuffisance professionnelle est, s'il ne peut être reclassé dans un autre emploi, soit admis à faire valoir ses droits à la retraite, soit licencié.
La décision est prise après observation des formalités prescrites en matière disciplinaire.
Le fonctionnaire licencié pour insuffisance professionnelle peut recevoir une indemnité dans des conditions qui sont fixées par règlement d'administration publique.
Article 53
Sous réserve des exceptions prévues par les textes en vigueur, les fonctionnaires ne peuvent être maintenus en fonctions au-delà de la limite d'âge de leur emploi. Le régime des limites d'âge est fixé par décret en conseil d'Etat.
Article 54
Un règlement d'administration publique définit les activités privées qu'en raison de leur nature un fonctionnaire qui a cessé définitivement ses fonctions ou qui a été mis en disponibilité ne peut exercer. Il fixe la durée de cette interdiction, les conditions dans lesquelles il peut être dérogé, ainsi que les modalités d'application de l'article 8 ci-dessus au fonctionnaire ayant cessé définitivement ses fonctions.
En cas de violation de l'interdiction édictée par le présent article, le fonctionnaire retraité peut faire l'objet de retenues sur pension, et éventuellement, être déchu de ses droits à pension, après avis de la commission administrative paritaire, siégeant en formation disciplinaire, du corps auquel appartenait l'intéressé.
TITRE VIII : DISPOSITIONS DIVERSES
Article 55
La loi n° 48-1504 du 28 septembre 1948 relative au statut spécial des personnels de police et l'ordonnance n° 58-696 du 6 août 1958 relative au statut spécial des personnels des services extérieurs de l'administration pénitentiaire sont maintenues en vigueur.
Article 56
La loi n° 46-2294 du 19 octobre 1946 modifiée relative au statut général des fonctionnaires est abrogée.
Demeurent en vigueur les statuts particuliers applicables à la date de publication de la présente ordonnance ainsi que les dispositions du décret n° 47-1457 du 4 août 1947 et du décret n° 48-1108 du 10 juillet 1948 modifié et complété par les décrets n° 49-508 du 14 avril 1949 et n° 53-1218 du 9 décembre 1953.
Restent provisoirement applicables les dispositions du décret n° 50-1348 du 27 octobre 1950 modifié pris pour l'application de la loi du 19 octobre 1946 aux fonctionnaires de certains cadres exerçant normalement leur activité dans les territoires d'outre-mer.
Article 57
La présente ordonnance sera publiée au Journal officiel de la République française et exécutée comme loi.
Fait à Paris, le 4 février 1959.
CHARLES DE GAULLE
Par le Président de la République :
Le Premier ministre, MICHEL DEBRÉ
Le ministre des finances et des affaires économiques, ANTOINE PINAY