SOC. CB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 26 novembre 2015
Cassation partielle sans
renvoi
M. LACABARATS, conseiller le plus ancien faisant fonction
de président
Arrêt n 1989 F D Pourvoi n C 14-19.263 Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. Z Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 23 juillet 2014.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par
1 / l'AGS de Paris, dont le siège est Paris,
2 / l'Unedic, dont le siège est Paris, agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile au Centre de gestion et d'études AGS (CGEA), dont le siège est Toulouse cedex 6,
contre l'arrêt rendu le 10 avril 2014 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1, chambre sociale), dans le litige les opposant
1 / à M. Z Z, domicilié Paris,
2 / à Mme X X, domiciliée Toulouse, prise en qualité de mandataire-liquidateur de la société à responsabilité limitée Yosaka conseil,
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée selon l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 27 octobre 2015, où étaient présents M. Lacabarats, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Geerssen, conseiller rapporteur, Mme Corbel, conseiller référendaire, M. Petitprez, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Geerssen, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS et de l'Unedic, de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. Z, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique en sa partie recevable non contestée par la défense
Vu les articles 1184 du code civil et L. 3253-8 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat n'a pas été rompu avant cette date ;
Attendu selon l'arrêt attaqué, que M. Z, engagé le 27 octobre 2008 par l'EURL Yosaka conseil en qualité de téléprospecteur, n'a pas été réglé de son salaire à compter de septembre 2009 et par avenant du 30 octobre suivant, a convenu d'exercer ses fonctions à domicile ; que le 19 janvier 2010, la société a été mise en redressement judiciaire, redressement converti en liquidation judiciaire le 23 mars 2010, Mme X étant désignée liquidateur judiciaire ;
Attendu que pour prononcer la résiliation du contrat de travail à compter de la date du prononcé de la liquidation judiciaire de l'employeur et fixer la créance salariale de préavis, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de licenciement, indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et déclarer le CGEA tenu à garantie, l'arrêt retient que le contrat a été rompu de fait par l'employeur, ce qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que le prononcé de la liquidation judiciaire ayant pour conséquence de faire cesser définitivement l'activité de la société, la rupture du contrat de travail sera fixée au 23 mars 2010, que le jugement ayant retenu la date de la résiliation judiciaire soit à son prononcé le 4 juillet 2012 sera réformé sur ce point ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la liquidation judiciaire n'a pas en elle-même pour effet de mettre fin au contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile et après avis donné aux parties par le rapport ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe la date de la résiliation judiciaire au 23 mars 2010 et retient la garantie de l'AGS au titre des conséquences de la résiliation du contrat de travail, l'arrêt rendu le 10 avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi de ces chefs ;
Fixe la résiliation du contrat de travail au 4 juillet 2012 ;
Dit n'y avoir lieu à garantie de l'AGS au titre des indemnités de rupture, pour travail dissimulé et pour les congés payés afférents aux rappels de salaire ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'AGS et l'Unedic
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Z, fixé au 23 mars 2010 la date des effets de la résiliation judiciaire, dit que cette résiliation s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixé la créance de M. Z à l'égard de Maître X, es qualités, aux sommes de 1.527,62 euros au titre du préavis, de 152,76 au titre des congés payés correspondants, de 240,63 au titre des congés payés, de 394,12 au titre de l'indemnité de licenciement, de 4.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'avoir retenu que l'infraction de travail dissimulé était caractérisée, d'avoir fixé la créance de M. Z à l'égard de Maître X, es qualités, à la somme de 4.582,86 au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé et d'avoir déclaré le Cgea de Toulouse tenu à garantie pour les sommes se rattachant au contrat de travail, dans les termes des articles L.3263-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles ;
AUX MOTIFS QUE sur la date de la rupture, aucune des parties n'a relevé appel de la décision prononçant la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. Z ; que celui-ci conteste seulement la date d'effet de cette résiliation, que les premiers juges ont fixé les effets de la résiliation judiciaire à la date du prononcé de leur jugement, soit le 4 juillet 2012, après avoir indiqué dans les motifs que la relation de travail avait été rompue, de facto, le 23 mars 2010 par l'effet du prononcé de la liquidation judiciaire, que lorsque le salarié n'est plus au service de son employeur au jour où il est statué sur la demande de résiliation judiciaire, cette dernière prend effet, si le juge la prononce, au jour du licenciement ; qu'il est établi par l'attestation d'un collègue de travail de M. Z que la société Yosaka Conseil n'avait plus d'activité avant le prononcé de la liquidation judiciaire, l'agence de la société étant définitivement fermée dès le mois de novembre 2009 ; qu'à compter de cette date, M. Z n'a plus reçu aucune instruction de son employeur et n'a pu avoir aucun contact avec lui ; que si l'employeur lui a versé des salaires, certes incomplets, jusqu'au mois d'août 2009, il a cessé tout paiement à compter du mois de septembre ; qu'il résulte de ces éléments que le contrat de travail liant la société Yosaka Conseil et M. Z a été rompu de fait par son employeur, cette rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le prononcé de la liquidation judiciaire de la société ayant pour conséquence de faire cesser définitivement son activité, la rupture du contrat de travail sera fixée au 23 mars 2010 ; qu'en conséquence, la résiliation judiciaire doit produire ses effets à la date du 23 mars 2010, le jugement sera réformé sur ce point ; [...] ; que sur la garantie du CGEA, la garantie de paiement des créances dues en exécution du contrat de travail s'applique à toutes les sommes dues aux salariés à la date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, dès lors qu'elles se rattachent à un contrat de travail ; que toutes les sommes déterminées par les premiers juges et dont les montants ne sont pas contestés par les parties, découlant de contrat du travail ayant existé entre M. Z et la société Yosaka Conseil, doivent bénéficier de la garantie du CGEA de Toulouse dans les termes des articles L 3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles ;
AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QU' en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 du code du travail a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ;
1/ ALORS QU' en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d'effet de la résiliation ne peut être fixée qu'au jour de la décision qui la prononce dès lors que le contrat de travail n'a pas été rompu avant ; que ni la cessation d'activité du salarié, serait-elle due à la cessation de celle de son employeur, ni le prononcé d'une liquidation judiciaire, n'emportent de plano la rupture du contrat de travail ; que la garantie de l'Ags couvre " [...] 1 Les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi que les contributions dues par l'employeur dans le cadre de la convention de reclassement personnalisé ; 2 Les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant [...] c) Dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation ; [...] " ; qu'en retenant que le prononcé de la liquidation judiciaire de la société ayant pour conséquence de faire cesser définitivement son activité, la rupture du contrat de travail devait être fixée au 23 mars 2010 et que la résiliation judiciaire devait produire ses effets à cette même date, pour déclarer le Cgea de Toulouse tenu à garantie pour les sommes se rattachant au contrat de travail, après avoir relevé que la garantie de paiement des créances dues en exécution du contrat de travail s'applique à toutes les sommes dues aux salariés à la date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, dès lors qu'elles se rattachent à un contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil, ensemble l'article L.3253-8 du code du travail ;
2/ ALORS QUE subsidiairement, la garantie de l'Ags couvre " [...] 1 Les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi que les contributions dues par l'employeur dans le cadre de la convention de reclassement personnalisé ; 2 Les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant [...] c) Dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation ; [...] " ; que les indemnités résultant de la rupture du contrat de travail sont celles qui en sont la conséquence directe, telle l'indemnité de congés payés ou l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, dont le fait générateur est la seule rupture du contrat de travail ; qu'en déclarant le Cgea de Toulouse tenu à garantie pour les sommes se rattachant au contrat de travail, après avoir relevé que la garantie de paiement des créances dues en exécution du contrat de travail s'applique à toutes les sommes dues aux salariés à la date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, dès lors qu'elles se rattachent à un contrat de travail, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article 1184 du code civil, ensemble l'article L.3253-8 du code du travail.