CIV. 1 CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 25 novembre 2015
Cassation
Mme BATUT, président
Arrêt n 1334 F D Pourvoi n G 15-10.601 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par le Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, dont le siège est Paris,
contre le jugement rendu le 22 mai 2014 par la juridiction de proximité de Mâcon, dans le litige l'opposant à M. Y Y, domicilié Paray-le-Monial,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 octobre 2015, où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Duval-Arnould, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Laumône, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Duval-Arnould, conseiller, les observations de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat du Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, l'avis de M. Sudre, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu les articles L. 4321-18 du code de la santé publique et 1134 du code civil ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. Y a fait opposition à une ordonnance portant injonction de payer des cotisations ordinales au Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, représenté par son président, en contestant notamment la recevabilité de cette action ;
Attendu que, pour accueillir la fin de non-recevoir, le jugement retient que l'article L. 4321-18 du code de la santé publique, qui n'est pas incompatible avec le règlement intérieur prévoyant l'exercice des actions en justice par le président du Conseil national de l'ordre, subordonne l'action du Conseil national de l'ordre à une autorisation du conseil départemental de l'ordre, donnée au président de l'ordre et dont le Conseil national de l'ordre ne justifie pas, en l'absence de délibération en ce sens du conseil départemental de l'ordre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 4321-18 du code de la santé publique, régissant l'action en justice du président du conseil départemental de l'ordre, n'est pas applicable à celle diligentée par le président du Conseil national de l'ordre et que, pour permettre l'accomplissement des missions confiées au Conseil national de l'ordre en vertu des articles L. 4321-14 et suivants du code de la santé publique, les articles 12.3 et 15.3 du règlement intérieur de l'ordre habilitent le président du Conseil national de l'ordre à ester en justice au nom de ce Conseil et ce dernier à recouvrer les cotisations dues, la juridiction de proximité a dénaturé ce règlement intérieur et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement n 59 rendu le 22 mai 2014, entre les parties, par la juridiction de proximité de Mâcon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Chalon-sur-Saône ;
Condamne M. Y aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer au Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes la somme de 1 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour le Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes.
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR déclaré le Conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes irrecevable et de l'AVOIR débouté en conséquence de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE " l'action a été introduite par le président du C.N.O.M.K. ; que le C.N.O.M.K. produit à l'appui de sa demande le règlement intérieur de l'Ordre des masseurs Kinésithérapeutes dont l'article 12.3 prévoit que "le Président est le représentant légal du conseil, et, en cette qualité, il l'engage dans les actes de la vie civile, il introduit d'éventuelles actions en justice..." ; que l'article L 4321-18 du CSP prévoit spécialement l'organisation de l'Ordre des Masseurs Kinésithérapeutes "dans chaque département, le conseil départemental de l'ordre... autorise le président de l'ordre à ester en justice..." ; que les dispositions légales précitées subordonnent l'action en justice du Conseil National à une autorisation du Conseil Départemental donnée au président de l'ordre ; que ces dispositions ne sont pas incompatibles avec celles du règlement intérieur prévoyant l'exercice des actions en justice par le président du conseil national ; que le C.N.O.M.K. ne justifie cependant pas d'une autorisation spéciale du Conseil départemental de Saône et Loire autorisant son président à agir à l'encontre de Monsieur Y Y ; que, sans qu'il lui soit besoin d'apprécier la légalité du règlement précité, la Juridiction en peut que constater l'absence de délibération du Conseil départemental de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes autorisant le président du Conseil National du même Ordre à agir à l'encontre de Monsieur Y Y ; que la demande du C.N.O.M.K. sera par conséquent déclarée irrecevable " (cf. jugement p.2, § 1-8) ;
ALORS QUE, l'article 12.3 du règlement intérieur de l'Ordre des masseurs kinésithérapeutes prévoit que son Président est le représentant légal de l'Ordre et qu'il peut, en cette qualité, introduire d'éventuelles actions en justice ; qu'en déclarant le conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes irrecevable en son action faute d'une autorisation spéciale du conseil départemental de Saône et Loire l'autorisant à agir à l'encontre de Monsieur Y Y quand l'article L. 4321-18 du code de la santé publique subordonne l'action du président du conseil départemental et non du conseil national à une telle autorisation, la Juridiction de proximité a violé les articles L. 4321-16 et L.4321- 18 du code de la santé publique ;
ALORS QUE, d'autre part, le Conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes avait versé le règlement de trésorerie de l'Ordre aux termes duquel, selon les dispositions 15.3, le Conseil national est autorisé à procéder au recouvrement extra judiciaire voire judiciaire des cotisations dues (cf. conclusions p.5-6 et pièce produite n 6) ; qu'aussi, en déclarant le Conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes irrecevable en son action faute d'une autorisation spéciale du conseil départemental de Saône et Loire l'autorisant à agir à l'encontre de Monsieur Y Y quand le conseil national avait versé son règlement de trésorerie qui autorisait expressément le Conseil national à agir, la juridiction de proximité, qui n'a pas pris en compte ce document, fut-ce pour l'écarter, l'a dénaturé par omission, en violation de l'article 1134 du code civil.