CIV.3 SM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 24 juin 2015
Cassation
M. TERRIER, président
Arrêt no 743 FS-P+B
Pourvoi no S 14-15.205
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis Paris, représenté par son syndic la société Hellier du Verneuil, dont le siège est Paris,
contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2014 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant
1o/ à la société Paris Villiers, société en nom collectif, dont le siège est Issy-les-Moulineaux,
2o/ à la société Socotec France, société anonyme, dont le siège est Guyancourt, anciennement dénommée société Socotec,
3o/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est Nanterre, prise en qualité d'assureur responsabilité civile de la SNC Paris Villiers,
défenderesses à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 mai 2015, où étaient présents M. Terrier, président, Mme Masson-Daum, conseiller rapporteur, Mme Fossaert, MM. Echappé, Parneix, Mmes Andrich, Salvat, Dagneaux, M. Barbieri, conseillers, Mmes Proust, Meano, Collomp, conseillers référendaires, M. Dupont, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Masson-Daum, conseiller, les observations de la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à Paris, de la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat de la société Paris Villiers, de Me Bouthors, avocat de la société Socotec France, de la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat de la société Axa France IARD, l'avis de M. Kapella, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen
Vu les articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble les articles 1641 et 1645 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 janvier 2014) que la société Paris Villiers (la société) a acquis en 2003 un immeuble qu'elle a rénové puis divisé et vendu par lots de copropriété, les actes de vente comportant en annexe un rapport de la société Socotec relatif à l'état de la couverture ; que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers (le syndicat) a, après une expertise judiciaire, assigné la société, la société Axa France IARD son assureur et la société Socotec, afin qu'ils soient déclarés solidairement responsables des désordres survenus en toiture ; que les défendeurs ont soulevé l'irrecevabilité des demandes ;
Attendu que, pour dire le syndicat des copropriétaires irrecevable en ses demandes à l'encontre de la société Paris Villiers et de la société Axa, l'arrêt retient que si le syndicat a l'obligation d'assurer la sauvegarde et la conservation des parties communes de l'immeuble dont fait partie la toiture, il n'est pas titulaire des actions rédhibitoire et estimatoire réservées aux acquéreurs, que l'action en garantie des vices cachés est une action qui trouve son origine dans les contrats de vente auxquels il n'est pas partie et qu'elle vise à protéger les acquéreurs qui en sont les seuls titulaires ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action en réparation du préjudice subi du fait d'un vice caché n'est pas subordonnée à l'exercice d'une action rédhibitoire ou estimatoire et peut, par suite, être engagée de manière autonome et que le syndicat des copropriétaires ayant qualité pour agir en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble a qualité pour exercer, contre le vendeur des lots, l'action en réparation des désordres affectant les parties communes de l'immeuble vendu ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens
CASSE et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne les sociétés Paris ... et Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ; condamne la société Paris Villiers et la société Axa France IARD, in solidum, à payer la somme de 3 000 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à Paris ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à Paris
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du tribunal de grande instance de PARIS du 3 avril 2012 ayant dit le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble à Paris XVIIème irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SNC PRIS VILLIERS et de son assureur la société AXA FRANCE IARD ;
AUX MOTIFS QUE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers, au visa de l'article 1641 et suivants du code civil, forme une action en garantie des vices cachés à l'encontre de la SNC Paris Villiers, excipant de désordres affectant la toiture de l'immeuble du à Paris ; que si le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers a l'obligation d'assurer la sauvegarde et la conservation des parties communes de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers, dont fait partie la toiture affectée des désordres litigieux, il n'est pas titulaire des actions rédhibitoire et estimatoire réservées aux acquéreurs de cet immeuble, étant relevé que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers n'est pas partie aux contrats de ventes conclus entre la SNC Paris Villiers et les copropriétaires de l'immeuble litigieux ; qu'en effet l'action en garantie des vices cachés est une action trouvant son origine dans le contrat de vente visant à protéger les acquéreurs qui en sont par conséquent les seuls titulaires ; qu'au regard de ces éléments et des moyens pertinents des premiers juges que la cour adopte, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers en son action en garantie des vices cachés ;
ET AUX MOTIFS DU TRIBUNAL QUE, sur la recevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la SNC PARIS VILLIERS et son assureur la société AXA FRANCE IARD, le syndicat des copropriétaires fonde ses demandes, originelle et additionnelle, à l'encontre de ces parties sur la garantie des vices cachés et sur l'obligation d'information du vendeur ; que ces deux actions sont ouvertes aux contractantes ; que c'est à juste titre que les parties défenderesses soulèvent que l'action fondée sur la garantie des vices cachés est une action qui tend à la restitution du prix de vente ou à une indemnisation au titre d'un moindre prix, de sorte que le syndicat des copropriétaires qui n'a pas versé le prix d'acquisition ne peut être admis à exercer cette action ;
ALORS QUE le syndicat des copropriétaires tient des articles 14 et 15 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965 qualité à agir en garantie des vices cachés relativement aux parties communes de l'immeuble contre l'auteur des copropriétaires lorsque celui-ci, propriétaire de l'immeuble en son entier, l'avait placé sous le régime de la copropriété puis vendu par lots ; qu'en décidant le contraire pour les raisons inopérantes, ou erronées en droit, que le syndicat n'était pas partie aux contrats de vente conclus entre la SNC Paris Villiers et les copropriétaires, que l'action a son origine dans le vente et tend à protéger les acquéreurs qui en sont les seuls titulaires, quand elle constatait que la SNC Paris Villiers avait acquis l'immeuble du à Paris, puis l'avait revendu par lots après y avoir fait réaliser des travaux de modification ou de rénovation, la Cour d'appel a violé lesdits textes, ensemble l'article 1641 du Code civil ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du tribunal de grande instance de PARIS du 3 avril 2012 ayant dit le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble à Paris (XVIIème) irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SNC PRIS VILLIERS et de son assureur la société AXA FRANCE IARD ;
AUX MOTIFS QUE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers forme également une demande en dommages et intérêts à l'encontre de la SNC Paris Villiers, au visa de l'article 1602 du code civil, au titre des désordres litigieux, soutenant que la SNC Paris Villiers aurait notamment manqué à son obligation d'information de vendeur en fournissant " un document obscur ou ambigu " ; mais que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers n'étant pas partie aux contrats de vente portant sur l'immeuble litigieux, il est irrecevable à former une action en dommages et intérêts formée à l'encontre de la SNC Paris Villiers pour violation par cette dernière de son obligation d'information ou de renseignement lors de la conclusion des ventes litigieuses ; que le jugement entrepris sera également confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS DU TRIBUNAL QU'il en est de même de l'action fondée sur l'obligation d'information du vendeur puisque cette obligation est destinée à protéger l'acquéreur, alors que le Syndicat des copropriétaires est un tiers par rapport aux contrats d vente et ne peut réclamer l'exécution d'une obligation contractuelle à son profit ;
ALORS QUE le syndicat des copropriétaires tient des articles 14 et 15 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965 qualité à agir en responsabilité sur le fondement de l'article 1602 du Code civil relativement aux parties communes de l'immeuble contre l'auteur des copropriétaires lorsque celui-ci, propriétaire de l'immeuble en son entier, l'avait placé sous le régime de la copropriété puis vendu par lots ; qu'en décidant le contraire pour les raisons inopérantes, ou erronées en droit, que le syndicat n'était pas partie aux contrats de vente conclus entre la SNC Paris Villiers et les copropriétaires, que l'action a son origine dans le vente et tend à protéger les acquéreurs qui en sont les seuls titulaires, quand elle constatait que la SNC Paris Villiers avait acquis l'immeuble du à Paris (XVIIème), puis l'avait revendu par lots après y avoir fait réaliser des travaux de modification ou de rénovation, la Cour d'appel a violé lesdits textes ;
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du tribunal de grande instance de PARIS du 3 avril 2012 ayant débouté le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble à Paris (XVIIème) de ses demandes à l'encontre de la société SOCOTEC FRANCE.
AUX MOTIFS QUE par ailleurs le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers forme une action en dommages et intérêts au titre des désordres litigieux à l'encontre de la société SOCOTEC soutenant que celle-ci n'a pas respecté son obligation d'information à l'égard des acquéreurs notamment en établissant un document informatif tronqué et en légitimant des informations incomplètes ; mais que, en toute hypothèse, cette prétendue erreur de diagnostic ne saurait rendre responsable la société SOCOTEC des désordres affectant la toiture et que cette dernière ne saurait par conséquent être condamnée à réparer ces désordres ou à réparer le préjudice qui consisterait dans la dépréciation de l'immeuble en raison se l'existence de ces désordres ; qu'au regard de ces éléments et des moyens pertinents des premiers juges que la cour adopte, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 26 avenue de Villiers de ses demandes formées à l'encontre de la société SOCOTEC ;
ET AUX MOTIFS DU TRIBUNAL qu'il n'en reste pas moins que la demande du Syndicat est fondée sur le fait que le diagnostic technique qu'il critique aurait été annexé à chacun des contrats de vente des appartements et aurait eu pour effet de fausser l'information due aux acquéreurs, la fausseté prétendue du rapport, qui constituerait la faute de la société SOCOTEC, ayant ainsi entraîné un préjudice ; or, outre qu'il ne verse aux débats qu'un seul des actes de vente, ainsi que le souligne la société SOCOTEC, le Syndicat des copropriétaires était tiers par rapport à ces contrats et n'a pas qualité pour exercer une action fondée sur les conditions dans lesquelles ils ont été conclus - ni pour faire valoir un défaut d'information qui ne saurait de toute façon préjudicier qu'aux intérêts des acquéreurs et ne concerne pas le Syndicat ; qu'en effet, l'éventuelle erreur de la société SOCOTEC n'a pas, par elle-même, causé d'altération à la toiture et la charpente de l'immeuble - ce qui aurait pu ouvrir des droits au Syndicat des copropriétaires qui en est gardien, mais aurait seulement faussé l'idée qu'avaient les acquéreurs de leur état, qui est une des données de la conclusion de chacun des contrats ; que le syndicat des copropriétaires doit en conséquence être débouté de sa demande également à l'encontre de la société SOCOTEC ;
ALORS QUE cause un préjudice au syndicat des copropriétaires l'erreur commise par la société SOCOTEC FRANCE dans l'exécution de son obligation d'information quant à l'état exact de la toiture de l'immeuble examiné ne mettant ainsi pas en mesure les copropriétaires et, partant, ledit syndicat d'agir au plus tôt pour remédier au vice et empêcher ainsi la
réalisation et l'aggravation de dommages ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.