Jurisprudence : CA Douai, 9e, 29-10-2008, n° 08/02725

CA Douai, 9e, 29-10-2008, n° 08/02725

A6878ND4

Référence

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DOSSIER N° 08/02725

ARRÊT DU 29 OCTOBRE 2008

9e CHAMBRE

COUR D'APPEL DE DOUAI

9e Chambre - N° 606 / 2008

Prononcé publiquement le MERCREDI 29 OCTOBRE 2008, par la 9e Chambre des
Appels Correctionnels,

Sur appel d'un jugement du TGI DE DOUAI du 06 MAI 2008


PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

X... A Aa Ab,

né le … … … à … (…)

Fils de YB Ac et de Y... Sergine

De nationalité française, marié

Cariste

Détenu à la maison d'arrêt de Douai,

demeurant Chez Mme Ad AeB, ...

Prévenu, appelant, détenu, comparant

Assisté de Maître DABLEMONT Marc, avocat au barreau de DOUAI

LE MINISTÈRE PUBLIC : Le Procureur de la République près le Tribunal de Grande
Instance de DOUAI

appelant,

A... Corinne épouse AfB,

demeurant …

Non comparante, partie civile, intimée, représentée par Maître EXPOSTA
Nathalie, avocat au barreau de DOUAI


COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats, du délibéré et du prononcé de
l'arrêt

Président : Ag C DE FAUDOAS,

Conseillers : Anne COCHAUD-DOUTREUWE, Ali HAROUNE.

GREFFIER : Ah X aux débats et au prononcé de l'arrêt.

MINISTÈRE PUBLIC : Jean-Michel DESSET, Avocat Général, aux débats et au
prononcé de l'arrêt.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 29 Octobre 2008, le Conseiller Rapporteur a constaté
l'identité du prévenu.

Ont été entendus :

Madame Y en son rapport ;

X... A en ses interrogatoires et moyens de défense ;

Le Ministère Public, en ses réquisitions ;

Les parties en cause ont eu la parole dans l'ordre prévu par les dispositions
des articles 513 et 460 du code de procédure pénale.

Le prévenu et son conseil ont eu la parole en dernier ;

Le président a alors déclaré que l'arrêt serait rendu à l'audience de ce jour.
La Cour a ensuite délibéré conformément à la loi. A la reprise de l'audience
en audience publique, en présence du ministère public et du greffier, le
président a prononcé l'arrêt dont la teneur suit.

DÉCISION :


VU TOUTES LES PIÈCES DU DOSSIER,


LA COUR, APRES EN AVOIR DÉLIBÉRÉ CONFORMÉMENT A LA LOI, A RENDU L'ARRÊT
SUIVANT :

LE JUGEMENT :

Devant le Tribunal Correctionnel de DOUAI, X... A était prévenu
d'avoir :

- à ORCHIES, entre le 1er janvier 2004 et le 10 septembre 2006, en tout cas
sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription de
l'action publique, commis ou tenté de commettre des atteintes sexuelles avec
violence, contrainte, menace ou surprise, sur la personne de Corinne A...
épouse AfB, en l'espèce en procédant sur elle à des attouchements à caractère
sexuel, avec cette circonstance que les faits ont été commis par le conjoint
de la victime,

infraction prévue par les articles 222-28 7° ; 222-27, 132-80 du Code Pénal et
réprimée par les articles 222-28 al. 1, 222-44, 222-45, 222-47 al. 1, 222-48-1
du Code Pénal.

- à ORCHIES, entre le 1er janvier 2004 et le 10 septembre 2006, en tout cas
sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription de
l'action publique, commis volontairement des violences n'ayant pas entraîné
d'incapacité totale de travail sur la personne de Corinne A..., avec cette
circonstance que les faits ont été commis par le conjoint de la victime,

infraction prévue par les articles 222-13 al. 1 6°, 132-80 du Code pénal et
réprimée par les articles 222-13 al. 1, 222-44, 222-45, 222-47 al. 1 du Code
Pénal.

- à ORCHIES, entre le 1er janvier 2006 et le 10 septembre 2006, en tout cas
sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription de
l'action publique, commis volontairement des violences n'ayant pas entraîné
d'incapacité totale de travail sur la personne d'Amandine AfB, avec ces
circonstances que les faits ont été commis sur une mineure de 15 ans pour être
née le … … …, par l'ascendant légitime, naturel ou adoptif de la
victime,

infraction prévue par l'article 222-13 al. 1, al. 2 du Code pénal et réprimée
par les articles 222-13 al. 2, 222-44, 222-45, 222-47 al. 1 du Code Pénal,
l'article 378 du Code Civil.

- à ORCHIES, entre le 1er janvier 2006 et le 10 septembre 2006, en tout cas
sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription de
l'action publique, commis volontairement des violences n'ayant pas entraîné
d'incapacité totale de travail sur la personne d'Angélique AfB,

infraction prévue par l'article R. 624-1 al. 1 du Code pénal et réprimée par
l'article R. 624-1 al. 1, al. 2 du Code Pénal.

Ledit tribunal correctionnel de DOUAI, par jugement contradictoire en date du
06 Mai 2008, a :

Sur l'action publique :

- relaxé X... A du chef de violences sans incapacité par conjoint,
de violences sans incapacité sur mineur de 15 ans par ascendant, de violences
n'ayant entraîné aucune incapacité de travail,

- déclaré X... A coupable d'agressions sexuelles sur conjointe.

Le tribunal a :

- condamné Jean-Louis AfB à la peine de 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans
avec sursis et mise à l'épreuve pendant 2 ans, avec obligations de soins
psychiatriques et psychologiques,

- décerné contre lui mandat de dépôt,

- constaté l'inscription au FIJAIS,

- prononcé la confiscation des scellés.

Sur l'action civile :

Le tribunal a reçu Madame AiB épouse AfB Aj en sa constitution de
partie civile.

Le tribunal a déclaré Monsieur AfB A responsable du préjudice par
Madame AiB épouse AfB Aj et l'a condamné à lui payer la somme 10 000
euros à titre de dommages-intérêts.

LES APPELS :

Les déclarations d'appel ont été reçues régulièrement ainsi :

- Le Conseil de X... A, par déclaration au greffe du tribunal le 14
mai 2008, son appel visant les dispositions pénales et civiles du jugement,

- Monsieur le Procureur de la République, le 14 mai 2008, son appel incident
visant les dispositions pénales.

LES CITATIONS :

Les parties ont régulièrement été citées pour l'audience du 29 octobre 2008 :

- Monsieur AfB A, à personne, le 25 août 2008.

- Madame AiB Aj épouse AfB, à personne, le 15 septembre 2008.

Monsieur A AfB comparaît à l'audience assisté de son conseil. MAie
AB Aj y est représentée par son conseil. L'arrêt sera rendu
contradictoirement à leur égard.

LE JUGEMENT :

Corinne A... et A AfB se sont mariés en 1998.

De leur union sont issus trois enfants :

Angélique, née le … … …, Ak, née le … … … et Al née
en 1999.

Le 11 septembre 2006, Aj AiB se présentait à la gendarmerie d'Orchies
pour dénoncer des faits de viols et de violences commis par son mari sur elle-
même et des faits de violences commis par son mari sur leurs deux filles
aînées.

Corinne A... indiquait qu'en janvier 2006, A AfB s'était retrouvé au
chômage et qu'à compter de cette date la situation conjugale et familiale
s'était fortement dégradée, Jean-Louis AfB se mettant à faire preuve d'un
comportement violent ;

Qu'il lui avait à plusieurs reprises imposé des rapports sexuels alors qu'elle
lui avait clairement exprimé son refus ;

Que le dernier rapport imposé datait du 27 août 2006 ;

Qu'à chaque fois, il la prenait de force, la déshabillait et la pénétrait.

Elle indiquait par ailleurs qu'Amandine et Angélique recevaient des claques
injustifiées.

Entendue, Angélique (D 6) dénonçait la violence de son père.

Elle expliquait que depuis un an et demi, elle entendait ses parents dans leur
chambre et, notamment, sa mère demander à son père de la laisser tranquille.

Elle précisait avoir, à plusieurs reprises, crié pour que son père attende au
moins que ses filles dorment.

Elle relatait qu'une fois, sa mère avait bloqué la porte de la cuisine pour
l'empêcher d'entrer ;

Qu'elle avait supposé que sa mère remettait son pantalon ;

Que sa mère lui avait alors dit que son père avait voulu la prendre de force.

Enfin, elle indiquait que son père s'était montré violent à son encontre à
trois reprises et qu'il lui avait donné à chaque fois une forte gifle, ces
épisodes s'étant déroulés, selon elle, en avril, août et septembre 2006.

Egalement entendue, (D 7) Ak indiquait que son père était violent ;

Qu'il voulait " prendre " sa mère de force ;

Qu'elle entendait sa mère crier " lâche-moi " et que son père s'énervait.

Elle précisait qu'une fois son père avait poussé sa mère contre un mur ;

Qu'une autre fois, alors qu'elle avait claqué une porte sans faire exprès, son
père lui avait donné une gifle puis un coup de pied aux fesses et un coup dans
le dos.

Jean-Marie D..., le petit ami d'Angélique, attestait, pour sa part, d'un
comportement violent de Jean-Louis AfB et relatait notamment une scène
s'étant déroulée le 10 septembre 2006 au cours de laquelle Angélique avait
reçu une gifle.

Entendu par les services de gendarmerie, Jean-Louis AfB (D 9) reconnaissait
avoir donné des fessées et des gifles à ses filles mais précisait qu'il
s'agissait de simples corrections méritées en raison de leur comportement.

Il contestait avoir porté les coups dénoncés par Ak.

Il reconnaissait " avoir pété les plombs " quand sa femme l'avait poussé à
bout et précisait à cet égard qu'il " était un homme, avait des besoins et
qu'il était très difficile de pouvoir satisfaire ces besoins ".

Il reconnaissait également avoir eu des rapports sexuels avec son épouse alors
que celle-ci lui avait fait part de son refus mais précisait qu'à la fin, elle
finissait toujours par consentir mais qu'elle ne manifestait aucun plaisir.

Devant le juge d'instruction, il revenait sur ces déclarations indiquant que
si, au début, sa femme disait qu'elle n'était pas consentante, elle finissait
toujours par accepter et que pour lui c'était un jeu.

Corinne A... maintenait, pour sa part, ses déclarations (D17), elle relatait
la scène de violence décrite par Am D... et précisait que les viols se
produisaient une fois par semaine environ depuis 2006 mais que cela avait
commencé en 2004.

L'expertise psychologique de Corinne A... établissait que les déclarations de
cette dernières étaient crédibles bien que confuses.

L'expert notait un passé douloureux et le climat insécuritaire dans lequel
vivait Corinne A... .

L'expert psychiatre ayant examiné A AfB ne relevait aucune anomalie
au sens psychiatrique du terme ;

Il relevait cependant que Jean-Louis AfB était égocentrique et qu'il ne se
remettait pas en cause.

A l'audience, A AfB a contesté l'intégralité des faits qui lui sont
reprochés.

Corinne A..., par l'intermédiaire de son conseil, a maintenu ses déclarations
et sollicité la confirmation du jugement entrepris.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'action publique

Sur les violences sur Corinne A...

C'est à juste titre et par des motifs que la présente juridiction adopte que
les premiers juges ont relevé que les violences dénoncées n'étaient pas
suffisamment distinctes des faits d'agressions sexuelles avec violences qui
sont reprochés à Jean-Louis AfB pour la même période et constituaient, en
réalité, une circonstance aggravante de ce dernier délit et qu'en raison d'un
concours idéal de ces deux types d'infractions A AfB devait être
relaxé.

Sur les violences sur Ak AfB et sur Angelique AfB

C'est également à juste titre et par des motifs que la présente juridiction
adopte que les premiers juges ont relaxé Jean-Louis AfB des faits de
violences sur ses filles Angélique et Ak.

En effet, les violences reconnues par le prévenu et reprochées à ce dernier
sont légères, rares et n'ont pas dépassé l'exercice du simple droit de
correction explicité par Jean-Louis AfB .

Sur les agressions sexuelles sur Corinne A...

Il résulte des débats et des éléments qui y sont versés que les délits
d'agressions sexuelles reprochés à Jean-Louis AfB sont parfaitement établis.

Si Jean-Louis AfB nie les agressions sexuelles qui lui sont reprochées, il a
dans un premier temps reconnu avoir imposé à sa femme deux rapports forcés.

Lors de sa garde à vue il a en effet décrit le refus verbalisé par Corinne
A... à l'occasion d'une sollicitation de sa part puis la contrainte qu'il lui
a imposée en la conduisant dans la chambre pour avoir une relation sexuelle
avec elle.

Il a également reconnu lui avoir imposé un rapport sexuel en 2004, après
l'avoir attrapée à la suite d'une course autour d'une table.

S'il est revenu par la suite sur ses déclarations, et a indiqué que son épouse
était consentante, ses dénégations ne sont pas crédibles compte tenu des
éléments ci-dessus rappelés.

En effet, les déclarations de Corinne A..., laquelle ne semble animée par
aucun désir de vengeance, sont précises, circonstanciées et constantes.

Elles sont corroborées par les déclarations d'Angélique et d'Amandine AfB qui
ont été, à plusieurs reprises, témoins du refus de leur mère et des violences
de leur père à son égard, pour selon leurs dires " prendre leur mère ".

Elles sont également corroborées par le témoignage de Jean-Marie D... .

Par ailleurs, Jean-Louis AfB n'a cessé au fil de la procédure de minimiser
les faits, indiquant que son épouse finissait toujours par être consentante
tout en reconnaissant qu'elle ne manifestait aucun plaisir, et de varier dans
ses déclarations pour finir par nier en totalité les faits qui lui sont
reprochés.

Il apparaît de ce fait comme n'étant aucunement crédible.

Il convient donc de confirmer la décision dont appel en ce qui concerne la
culpabilité de Jean-Louis AfB .

Cette décision doit cependant être réformée en ce qui concerne la peine
appliquée au prévenu.

En effet, les infractions commises de manière répétée et pendant plusieurs
années sont particulièrement graves.

Elles ont engendré un préjudice important pour Corinne A... .

Jean-Louis AfB n'a pas pris conscience des faits commis et semble ne pas
vouloir se remettre en question.

Il convient, dans ces conditions, compte tenu tant de la gravité des faits
commis que de la personnalité du prévenu, de prononcer à son encontre une
peine de cinq années d'emprisonnement, d'ordonner son maintien en détention et
de prononcer à son encontre un suivi socio-judiciaire pendant trois ans et de
fixer à un an la peine d'emprisonnement en cas d'inobservation de ce suivi.


L'inscription au FIJAIS sera confirmée ainsi que le mandat de dépôt.

Sur l'action civile

Il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ses dispositions civiles.

En effet, Corinne A... justifie avoir personnellement subi un préjudice en
relation directe de cause à effet avec les infractions commises parAAA
XB .

Par ailleurs, ce préjudice a été très exactement apprécié par les premiers
juges.


PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire.

Confirme la décision entreprise, sauf en ce qui concerne la peine prononcée à
l'encontre de Jean-Louis AfB .

Statuant à nouveau sur ce point,

Condamne Jean-Louis AfB à la peine de 5 ans d'emprisonnement.

Prononce à l'encontre de Jean-Louis AfB, un suivi socio-judiciaire pour une
durée de trois ans.

Fixe à un an la durée de la peine encourue en cas de non-respect de ce suivi.

Ordonne le maintien en détention de Jean-Louis AfB .

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant
de 120 euros dont est redevable le condamné.


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